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26/03/2024 | FRANCE | N°19/00950

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc : urssaf, 26 mars 2024, 19/00950


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]


JUGEMENT N°24/01159 du 26 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 19/00950 - N° Portalis DBW3-W-B7D-V56G

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A.R.L. [5]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Sandrine DELOGU-BONAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE


c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par Me Jenna BROWN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituÃ

© par Me GUILLEMIN, avocat au barreau de LYON




DÉBATS : À l'audience publique du 24 Janvier 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats e...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/01159 du 26 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 19/00950 - N° Portalis DBW3-W-B7D-V56G

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A.R.L. [5]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Sandrine DELOGU-BONAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par Me Jenna BROWN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me GUILLEMIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS : À l'audience publique du 24 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Président

Assesseurs : JAUBERT Caroline
DURAND Patrick

L’agent du greffe lors des débats : AROUS Léa,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 26 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE :

A l’issue d’un contrôle sur l’application des législations de sécurité sociale, de l’assurance chômage et de la garantie des salaires, l’inspecteur du recouvrement de l’Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales de Provence-Alpes-Côte d’Azur (ci-après URSSAF PACA) a adressé à la SARL [5] une lettre d’observations du 14 février 2018 faisant état d’un constat d’infraction aux interdictions de travail dissimulé avec verbalisation pour les années 2014 et 2015, et à un redressement subséquent d’un montant total de 40.473 €.

Par requête expédiée le 27 décembre 2018, la société [5], représentée par son conseil, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d’un recours contentieux à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA saisie de sa contestation de la mise en demeure n°64204154 du 25 octobre 2018 délivrée pour la mise en recouvrement des sommes régularisées au titre du redressement.

L’affaire a fait l’objet, par voie de mention au dossier, d’un dessaisissement au profit du pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, en vertu de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.

Par décision du 26 février 2019, la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA a rejeté la contestation de la société et maintenu le chef de redressement.

Par jugement définitif du tribunal correctionnel de Marseille du 25 janvier 2023, la SARL [5] a été déclarée coupable du délit d’exécution d’un travail dissimulé par personne morale commis du 1er janvier 2014 au 31 août 2015, en étant employeur de M. [B] [K].

Pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale, l’affaire a été retenue à l’audience de fond du pôle social du 24 janvier 2024.

La SARL [5], représentée par son conseil soutenant oralement ses conclusions, se prévaut de sa bonne foi et de l’absence d’élément intentionnel en ayant employé M. [B] [K] en qualité d’auto-entrepreneur comme celui-ci l’avait réclamé.
Elle reconnaît toutefois qu’elle ne disposait pas d’attestation de vigilance afin d’établir la régularité des déclarations et de la situation sociale de ce dernier.
A titre subsidiaire, elle indique que l’intégralité des sommes réclamées ont été réglées dans le cadre d’un échéancier mis en place avec l’URSSAF PACA, de sorte que les causes du litige sont soldées.

L’URSSAF PACA, représentée par son conseil soutenant oralement ses conclusions, soutient pour sa part l’autorité de la chose jugée au pénal sur le plan civil, et demande au tribunal de débouter la société cotisante de l’intégralité de ses demandes, ainsi que sa condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la régularité de la procédure de contrôle

La société requérante soutient, dans ses écritures, que les opérations de contrôle seraient nulles en l’absence de mention d’accès à la charte du cotisant contrôlé, ainsi que du droit de se faire assister du conseil de son choix, dans l’avis de contrôle à l’origine du présent redressement.

Il résulte toutefois de l’examen de l’avis de contrôle produit par l’URSSAF, et que l’inspecteur du recouvrement a adressé à l’employeur en date du 3 octobre 2016, que l’ensemble des mentions en cause sont bien présentes et spécifiées en page 2 du document.

De même, le document d’information, en date du 8 février 2018, établi en application des articles L.133-1 et R.133-1 du Code de la sécurité sociale suite au constat de travail dissimulé mentionne exactement, en page 8, les voies et délais de recours.

Les motifs invoqués par la requérante à ce titre ne sont manifestement pas fondés.

Sur l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil

En vertu de l'article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet d’un jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

L’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s’attache à ce qui a été définitivement, nécessairement et certainement décidé par le juge pénal sur l’existence du fait qui forme la base commune de l’action civile et pénale, sur sa qualification ainsi que sur la culpabilité de celui à qui le fait est imputé.

Il s’ensuit que seules les décisions définitives des juridictions pénales statuant au fond sur l'action publique ont au civil autorité de la chose jugée à l'égard de tous ; lorsqu’elles statuent accessoirement sur l’action civile, elles sont soumises à la règle de la relativité de la chose jugée, dans les conditions prévues par l'article précité et qu’ainsi doit être démontrée, une identité des parties, de la cause et de l’objet des instances en cause.

En l’espèce, la matérialité et la réalité du travail dissimulé reproché à la SARL [5] est définitivement acquise compte tenu de sa condamnation pénale le 25 janvier 2023 par le tribunal correctionnel de Marseille.

Il résulte de la prévention du jugement correctionnel que la société a été déclaré coupable « d’avoir à Marseille, du 1er janvier 2014 au 31 août 2015, étant employeur de M. [B] [K], omis intentionnellement de procéder à la déclaration nominative préalable à l’embauche, en excipant que M. [K] intervenait en qualité d’auto-entrepreneur alors qu’étaient réunis tous les critères de subordination propres à la qualité de salarié, pour un montant de préjudice de 36.533 euros. »

La décision pénale devenue irrévocable a au civil l’autorité de la chose jugée en ce qui concerne la qualité du fait incriminé.

S’agissant de l’absence d’élément intentionnel invoquée à l’audience par le conseil de la société cotisante, le tribunal relève d’abord que ce point a été tranché par le tribunal correctionnel et se trouve couvert par l’autorité de la chose jugée.

D’autre part et surtout, il convient de rappeler et de souligner que si le redressement opéré par l’URSSAF procède du constat d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, celui-ci a pour objectif exclusif le recouvrement des cotisations sociales et contributions afférentes à cet emploi, sans qu’il soit nécessaire d’établir l'intention frauduleuse de l’employeur, et ce en vertu de l’autonomie du droit de la sécurité sociale par rapport au droit pénal, consacrée ultimement par les dispositions de l’article L.243-7-5.

Il en résulte que la contestation de la société [5] n’est pas fondée.

Sur la confirmation du redressement

* sur la dissimulation d'emploi salarié

Le Code de la sécurité sociale dispose à l'article L.311-2, que sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.

Et l’article L.242-1-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, de préciser :
« Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail ».

En l’espèce, l’inspecteur du recouvrement a procédé à la reconstitution en montants bruts du montant total des prestations facturées par M. [K] à la société [5], soit des bases de régularisation de 24.359 € pour l’année 2014, et 17.588 € pour l’année 2018.

La société requérante ne produit aucun élément de nature à contester le montant du redressement fondé sur les sommes réelles versées au travailleur en contrepartie ou à l’occasion de son travail.

* sur l'annulation des réductions Fillon

En application de l'article L.133-4-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige :
« Le bénéfice de toute mesure de réduction et d'exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale ou de contributions dues aux organismes de sécurité sociale, appliquée par un employeur ou un travailleur indépendant sans qu'il soit tenu d'en faire une demande préalable, est subordonné au respect par l'employeur ou le travailleur indépendant des dispositions des articles L.8221-1 et L.8221-2 du code du travail.
Lorsque l'infraction définie aux articles L.8221-3 et L.8221-5 du même code est constatée par procès-verbal dans les conditions déterminées aux articles L.8271-7 à L.8271-13 du même code, l'organisme de recouvrement procède, dans la limite de la prescription applicable en matière de travail dissimulé, à l'annulation des réductions ou exonérations des cotisations ou contributions mentionnées au premier alinéa du présent article et pratiquées au cours d'un mois civil, lorsque les rémunérations versées ou dues à un ou des salariés dissimulés au cours de ce mois sont au moins égales à la rémunération mensuelle minimale définie à l'article L.3232-3 du même code. »

Conformément à cette disposition, et suite au constat de dissimulation d’emploi salarié à l’encontre de la SARL [5], il a été procédé à l'annulation des réductions générales de cotisations patronales dites « Fillon » accordées pour les périodes en litige et pour un montant total de 5.574 €.

La société cotisante ne développe pas d’argumentation à ce titre. Elle justifie en revanche avoir acquitté l’ensemble des sommes mises en recouvrement au titre du redressement.

En conséquence, et compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le redressement opéré du chef de dissimulation d'emploi salarié est pleinement justifié dans son principe comme son montant.

Il convient dès lors de rejeter le recours de la cotisante et de confirmer la décision de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA.

Sur les demandes accessoires

En vertu de l'article 696 du Code de procédure civile, la partie qui succombe à l'instance en supporte les dépens.

Il convient également de condamner la SARL [5] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 1.000 € en contribution aux frais non compris dans les dépens que l’organisme de sécurité sociale a dû exposer pour l’application de la loi.

Compte tenu de la nature et de l’ancienneté du litige, il convient d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉCLARE recevable, mais mal fondé, le recours formé par la SARL [5] à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l'URSSAF PACA saisie de sa contestation de la mise en demeure n°64204154 du 25 octobre 2018 ;

DÉBOUTE la SARL [5] de ses demandes et prétentions ;

CONSTATE que les causes du litige ont été réglées par la SARL [5] ;

CONDAMNE la SARL [5] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL [5] aux dépens de l’instance ;

ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement ;

DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.

LE GREFFIERELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc : urssaf
Numéro d'arrêt : 19/00950
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;19.00950 ?
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