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25/03/2024 | FRANCE | N°22/01303

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc : urssaf, 25 mars 2024, 22/01303


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]


JUGEMENT N°24/00869 du 25 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 22/01303 - N° Portalis DBW3-W-B7G-Z77V

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [H] [Y]
né le 30 Juillet 1947 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Renaud THOMAS, avocat au barreau de PARIS


c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF [Localité 4]
*
[Adresse 2]
représentée par Mme [V] [K] (Autre) muni d’un pouvoir spécial


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COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : BOUAFFASSA Myriam, Juge

Asse...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

JUGEMENT N°24/00869 du 25 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 22/01303 - N° Portalis DBW3-W-B7G-Z77V

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [H] [Y]
né le 30 Juillet 1947 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Renaud THOMAS, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF [Localité 4]
*
[Adresse 2]
représentée par Mme [V] [K] (Autre) muni d’un pouvoir spécial

DÉBATS : À l'audience publique du 15 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : BOUAFFASSA Myriam, Juge

Assesseurs : NAL Marianne
DICHRI Rendi

L’agent du greffe lors des débats : RAKOTONIRINA Léonce,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 25 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

Contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [O] [Y], ancien salarié de la société [7], bénéficie depuis le 1er janvier 2010 du régime de retraite supplémentaire à prestations définies mis en place par cette entreprise, et confié à l'[5] ([5]).

À compter du 1er janvier 2011, le précompte de la contribution prévue à l'article L137-11-1 du code de la sécurité sociale a été effectué sur le montant de la rente servie à Monsieur [O] [Y].

Contestant son obligation au paiement de cette contribution, Monsieur [O] [Y] a demandé au directeur de l'URSSAF [Localité 4], par lettre adressée le 28 septembre 2022 reçue le 29 septembre 2022, le remboursement de la somme de 23.123,60 euros précomptée entre les mois de juillet 2018 et décembre 2020.

En l'absence de réponse de ce dernier, Monsieur [O] [Y] a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF [Localité 4] le 6 janvier 2022.

Par requête reçue le 7 avril 2022, Monsieur [O] [Y] a, par l'intermédiaire de son conseil, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l'URSSAF [Localité 4].

La commission de recours amiable de l'URSSAF [Localité 4] a rendu une décision explicite de rejet en sa séance du 11 avril 2022.

L'affaire a été retenue à l'audience utile du 15 janvier 2024.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement par son Conseil, Monsieur [O] [Y], représenté, demande au tribunal de :
- Dire recevables et bien-fondés tous ses chefs de demande,
- En conséquence, dire et juger que la retraite supplémentaire dont il bénéficie n'entre pas dans le champ d'application de l'article L137-11 du code de la sécurité sociale et doit être exemptée de la taxe prévue et fixée par l'article L137-11-1 du même code,
- Ordonner cessation de tous prélèvements,
- Donner acte de ce qu'il a tenu compte de la prescription triennale,
- Ordonner à l'URSSAF [Localité 4] de lui rembourser la somme de 23.123,60 euros arrêtée au 31 décembre 2020, outre les sommes prélevées à compter de cette date et les sommes à intervenir jusqu'à la fin des prélèvements, sauf à parfaire,
- Dire que ces sommes seront assorties des intérêts de droits avec capitalisation par année entière à compter de la première demande de remboursement, soit le 6 septembre 2021,
- Condamner l'URSSAF [Localité 4] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, il fait essentiellement valoir qu'il résulte de l'examen du règlement IRUS, tel que modifié par l'accord du 22 décembre 2005, que le régime de retraite supplémentaire dont il bénéficie n'est pas conditionné à l'achèvement de la carrière du salarié au sein de l'entreprise et que si l'accord du 22 décembre 2005 a modifié l'article 4 du régime de retraite en y insérant une condition de présence dans l'entreprise au moment de la retraite, d'autres dispositions démontrent que le régime est resté un régime de retraite à prestations définies à droits certains, qui n'entre pas dans les dispositions de l'article L137-11 du code de la sécurité sociale et doit donc être exempté de la taxe fixée et prévue par l'article L137-11-1 du même code. Il ajoute que la condition d'absence d'individualisation du financement est une autre condition posée par l'article L137-11 du Code de la société sociale qui n'est pas remplie puisque le régime [5] a été fermé à compter du 31 décembre 1989 et remplacé par un système d'adhésion auprès d'une compagnie d'assurance mis en pace par un financement individualisable.

L'URSSAF [Localité 4], représentée par un inspecteur juridique muni d'un pouvoir régulier, demande au tribunal de :
- Déclarer Monsieur [O] [Y] recevable mais mal fondé en son appel,
- Débouter Monsieur [O] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- En tout état de cause, déclarer prescrites les sommes précomptées sur les rentes versées à l'appelant, antérieurement au 26/01/2019,
- En tout état de cause, condamner Monsieur [O] [Y] à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'organisme objecte que le règlement [5] conditionne bien le bénéfice du régime de retraite supplémentaire à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire au sein de l'entreprise. Il précise que la clause est claire, ce qui exclue qu'il en soit recherché l'esprit. Il développe ensuite un ensemble d'arguments relatif aux rentes liquidées antérieurement au 1er janvier 2004.

L'affaire est mise en délibéré au 25 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la qualification de la décision

Conformément à l'article R142-10-4 du code de la sécurité sociale, le présent jugement sera contradictoire.

Par ailleurs, par application de l'article R211-3-25 du code de l'organisation judiciaire, la présente décision est rendue en premier ressort.

Sur la demande de remboursement

Il résulte des articles L.137-11 et L.137-11-1 du code de la sécurité sociale, qu'est soumise à la contribution qu'ils prévoient, la retraite supplémentaire à prestations définies dont le bénéfice est conditionné à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise.

La condition d'achèvement de la carrière dans l'entreprise mentionnée au premier des textes susvisés ne s'entend pas d'une condition qui implique que le salarié cesse son activité dans l'entreprise, mais qu'il achève dans l'entreprise sa carrière professionnelle, et liquide ses droits à la retraite au moment où il quitte l'entreprise.

Le règlement de l'IRUS a été créé par accord d'entreprise du 20 juillet 1990, et modifié par accord de révision du 22 décembre 2005.

L'article 2 du règlement de l'IRUS portant sur " Les bénéficiaires " dispose, depuis le 22 décembre 2005, que le règlement s'applique en " Groupe fermé " aux ingénieurs - cadres - Etam - Ouvriers désignés à l'annexe n°1 à la date de création de l'IRUS, ainsi qu'à leurs ayants droit.
Pour les bénéficiaires :
- qui font partie du " Groupe fermé " tel que décrit ci-dessus et qui sont nés à partir du 1er janvier 1946
- qui sont salariés d'une société appartenant à la liste figurant en annexe 1 (liste des sociétés adhérentes), dont la liste figure en annexe du présent règlement,
- et qui n'ont pas adhéré à un régime spécifique d'aménagement de fin de carrière (TPFC, PRP, RTA2, TPAC2) au 31 décembre 2005 par le biais d'un avenant à leur contrat de travail,

Ces critères étant cumulatifs, il leur est fait application des seuls articles 1, 2, 3bis, 4, 5bis, 9bis et 14bis du présent règlement étant entendu que les articles 3bis, 5bis, 9bis et 14bis ont vocation à ne s'appliquer qu'à cette catégorie de bénéficiaires.

En l'espèce, Monsieur [O] [Y], qui est né le 30 janvier 1947, entre dans le champ des bénéficiaires du nouveau régime de retraite supplémentaire géré par l'IRUS.

L'article 4 A) du règlement relatif aux " Conditions d'ouverture des droits - durée des services " prévoit depuis le 22 décembre 2005, que l'âge normal de la retraite est fixé à 65 ans sous réserves des dispositions prévues dans le cadre des retraites anticipées, et sous condition de présence dans l'entreprise au moment de la prise de retraite. L'ancienneté minimum des services est de 10 ans.

L'article 5 dudit règlement portant sur les " allocations annuelles de retraite " prévoit que :
" 1. Lorsqu'un membre du personnel remplit, lors de la cessation de ses fonctions, la double condition d'avoir au moins 65 ans d'âge et un minimum de 10 années de services tels qu'ils sont définis à l'article 4, il lui est reconnu qu'une retraite globale " R " constituant la garantie de ses ressources minimum annuelles durant sa retraite au titre de ses services dans les sociéts adhérentes (…) ".

L'article 6 du règlement susvisé portant sur la " cessation anticipée de services " prévoit :
" A - Initiative intéressée
1-En cas de cessation anticipée volontaire de services, pour raison personnelle avant l'âge 65 ans, la retraite globale " R " de l'agent sera calculée d'après le nombre d'annuités acquises au moment du départ, le pourcentage obtenu étend diminué par le jeu de coefficients d'anticipation figurant au tableau " B ci-après, déterminés en fonction d'une part de l'âge d'entrée et d'autre part, de la durée des services tels que définis à l'article 4 du présent règlement (…).
B - Initiative société (..)
En cas de licenciement pour faute grave, les dispositions du présent règlement ne sont pas applicables ".

Si l'accord de révision des statuts et règlement de l'IRUS du 22 décembre 2005 a modifié l'article 4 du règlement de 1990 en insérant au 1er alinéa du A) la " condition de présence dans l'entreprise au moment de la prise de la retraite ", pour autant, il n'est fait aucune mention d'une telle condition dans les autres dispositions du règlement.

Ainsi, l'article 5 fait référence à la qualité de membre du personnel remplissant lors de la cessation de ses fonctions une condition d'âge et d'ancienneté, sans exiger de condition d'achèvement de carrière dans l'entreprise.

L'article 6 prévoit également des modalités de calcul de cette retraite supplémentaire dans l'hypothèse d'une cessation anticipée volontaire de service pour raison personnelle, avant l'âge de 65 ans, ou encore le caractère inapplicable de ces dispositions en cas de licenciement pour faute grave, permettant ainsi, a contrario, son application dans d'autre type de licenciement ou de rupture du contrat de travail.

Dès lors si la condition d'achèvement de carrière professionnelle du bénéficiaire dans l'entreprise est expressément prévue par l'article 4 du règlement tel que modifié par l'annexe 3 de l'accord de révision du 22 décembre 2005, les autres dispositions permettent, dans certaines conditions, de procéder au versement de la retraite supplémentaire sans que le salarié ait achevé sa carrière au sein de la société.

Ces dispositions excluent donc le régime de retraite en cause du champ d'application de l'article L.137-11-1 du Code de la sécurité sociale en ce qu'elles ne conditionnent pas la constitution des droits à prestations à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise.

Il n'est par ailleurs pas contesté par l'URSSAF [Localité 4] que le régime de financement est individualisable, ce qui ne répond à l'exigence posée par l'article L.137-11 du Code de la sécurité sociale.

Il s'en suit que Monsieur [O] [Y], qui a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er janvier 2010 et a bénéficié d'une retraite globale garantie [5] est parfaitement fondé, en application de l'article 1302 du Code civil, à obtenir le remboursement des sommes indûment prélevées sur ses pensions de retraite au titre de la taxe prévues et fixée par l'article L137-11-1 du Code de la sécurité sociale dans la limite de la prescription applicable prévue à l'article L243-6 du Code de la sécurité sociale.

Monsieur [O] [Y] justifie avoir mis en demeure l'URSSAF, par lettre adressée le 28 septembre 2021 reçue le 29 septembre 2021, de lui rembourser la somme de 23.123,60 € correspondant aux sommes versées de juillet 2018 à décembre 2020.

L'URSSAF [Localité 4] sera donc condamnée à lui verser la somme de 23.123,60 € indûment prélevées depuis le mois de juillet 2018 à décembre 2020, majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2021.

Il sera fait application des règles relatives à la capitalisation des intérêts échus pour une année entière.

Il convient par ailleurs d'ordonner la cessation du précompte de la contribution

Sur les demandes accessoires

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, L'URSSAF [Localité 4], qui succombe, sera condamnée aux dépens.

L'URSSAF [Localité 4] sera par ailleurs condamnée à verser à Monsieur [O] [Y] la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE l'URSSAF d'[Localité 4] à verser à Monsieur [O] [Y] la somme de 23.123,60 € au titre des sommes indûment prélevées de juillet 2018 à décembre 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2021, outre les sommes prélevées à compter de cette date et jusqu'à la fin des prélèvements, outre les sommes prélevées à compter de cette date et jusqu'à la fin des prélèvements;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 29 septembre 2021;

ORDONNE la cessation de tous précompte de la contribution;

CONDAMNE l'URSSAF d'[Localité 4] aux dépens de l'instance ;

CONDAMNE l'URSSAF d'[Localité 4] à verser à Monsieur [O] [Y] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ainsi Jugé et prononcé les jour, mois et an susdits, et ont signé après lecture le Président et le Greffier.

L’AGENT DU GREFFELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc : urssaf
Numéro d'arrêt : 22/01303
Date de la décision : 25/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-25;22.01303 ?
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