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21/03/2024 | FRANCE | N°20/00287

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 21 mars 2024, 20/00287


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/01343 du 21 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 20/00287 - N° Portalis DBW3-W-B7E-XGJG

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [C] [F]
né le 01 Juillet 1960 à [Localité 6] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Nicole GASIOR, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sabrina REBOUL, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
[Localité 2]
rep

résentée par Mme [V]




DÉBATS : À l'audience publique du 18 Décembre 2023


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

P...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/01343 du 21 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 20/00287 - N° Portalis DBW3-W-B7E-XGJG

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [C] [F]
né le 01 Juillet 1960 à [Localité 6] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Nicole GASIOR, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sabrina REBOUL, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
[Localité 2]
représentée par Mme [V]

DÉBATS : À l'audience publique du 18 Décembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : KASBARIAN Nicolas
DUMAS Carole

L’agent du greffe lors des débats : AROUS Léa,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 21 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [F], exerçant la profession de vernisseur, a adressé à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône une demande d’indemnité temporaire d’inaptitude à compter du 26 juin 2019.

Cette demande a été rejetée par la CPAM des Bouches-du-Rhône le 5 août 2019, au motif qu'il n'existait pas de relation entre l'inaptitude prononcée par le médecin du travail et le sinistre.

Par requête reçue le 22 janvier 2020, Monsieur [C] [F] a saisi, par l’intermédiaire de son conseil, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours à l’encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône en date du 3 décembre 2019, ayant considéré que les conditions règlementaires d’attribution de l’indemnité temporaire d’inaptitude n’étaient pas remplies.

Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience de plaidoirie du 18 décembre 2023.

Monsieur [C] [F], représenté par son conseil, sollicite oralement le bénéfice de sa requête et demande au tribunal de :
- Avant dire-droit, ordonner la mise en œuvre par la CPAM des Bouches-du-Rhône d’une expertise médicale prévue par l’article L141-1 du code de la sécurité sociale,
- Sur le fond, annuler la décision du 3 décembre 2019 de la commission de recours amiable,
- Dire et juger qu’il remplit toutes les conditions pour se voir attribuer l’indemnité temporaire d’inaptitude,
- Condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône à lui verser l’indemnité temporaire d’inaptitude du 26 juin 2019 au 26 juillet 2019,
- Ordonner l’exécution provisoire du présent jugement,
- Condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure.

Monsieur [C] [F] indique qu’il est atteint de cinq pathologies dont le caractère professionnel a été reconnu par la caisse : ténosynovite du 4è doigt, épicondylite du coude droit, canal carpien gauche, canal carpien droit, et épicondylite du coude gauche. Il précise que les maladies « ténosynovite du 4è doigt », « épicondylite du coude droit » et « épicondylite du coude gauche » ont été déclarées consolidées le 30 novembre 2019 sans séquelle indemnisable, que la maladie « canal carpien droit » a été déclarée guérie le 24 juin 2019, et qu’il est toujours en arrêt de travail au titre de la maladie « canal carpien gauche ».
Il reproche à la CPAM des Bouches-du-Rhône d’avoir attribué d’office sa demande d’indemnité temporaire d’inaptitude à sa maladie du canal carpien droit, alors même que le formulaire qu’il a rempli ne désigne pas expressément cette pathologie, et que l’avis d’inaptitude du médecin du travail est fondé sur ses cinq maladies professionnelles.

La CPAM des Bouches du Rhône, représentée par un inspecteur juridique, sollicite le débouté des prétentions adverses.

Se référant à la décision de la commission de recours amiable du 3 décembre 2019, elle soutient qu’il n’existe pas de lien entre la décision d’inaptitude du médecin du travail et la pathologie du canal carpien droit, de sorte que les conditions réglementaires d’attribution de l’indemnité temporaire d’inaptitude ne sont pas remplies.

L'affaire est mise en délibéré au 21 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la qualification de la décision

En l’espèce, toutes les parties ont comparu. Conformément aux dispositions de l’article 467 du code de procédure civile, la présente décision sera donc contradictoire.

Par ailleurs, par application de l’article 40 du code de procédure civile, la présente décision est rendue en premier ressort.
Sur la demande d'attribution de l'indemnité temporaire d'inaptitude

Aux termes de l'article D433-2 du code de la sécurité sociale, la victime dont l'accident du travail ou la maladie professionnelle a été reconnu et qui a été déclarée inapte conformément auxdispositions de l'article R.4624-31 du code du travail a droit à l'indemnité mentionnée au cinquième alinéa de l'article L433-1 dénommée "indemnité temporaire d'inaptitude" dans les conditions prévues aux articles L442-5 et D433-3 et suivants.

Selon l'article D433-3 du code de la sécurité sociale, pour bénéficier de l'indemnité temporaire d'inaptitude, la victime adresse sans délai à la caisse primaire d'assurance maladie dont elle relève un formulaire de demande portant notamment mention, portée par le médecin du travail, d'un lien susceptible d'être établi entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle, dans les conditions prévues à l'article D4624-47 du code du travail et comportant un cadre dans lequel elle atteste sur l'honneur de l'impossibilité de percevoir, pendant la période mentionnée à l'article D433-5, une quelconque rémunération liée au poste de travail pour lequel elle a été déclarée inapte.

Il ressort de ces dispositions que l'attribution de l'indemnité temporaire d'inaptitude, d'une durée maximum d'un mois, est soumise à plusieurs conditions cumulatives d'ordre administratif et médical :
- que l'accident du travail ou la maladie professionnelle ait été reconnu au titre de l'assurance du risque professionnel, à titre initial ou de rechute,
- que l'accident du travail ou la maladie professionnelle ait entraîné un arrêt de travail indemnisé ;
- qu'un lien entre l'inaptitude déclarée par le médecin du travail et l'accident ou la maladie professionnelle ait été établi,
- qu'aucune rémunération liée à l'activité salariée de la victime n'ait été versée à compter du premier jour qui suit la date de l'avis d'inaptitude jusqu'au jour de la date de licenciement ou de reclassement.

En l’espèce, Monsieur [C] [F] a présenté une demande d'indemnité temporaire d'inaptitude au titre de la maladie professionnelle déclarée le 1er mars 2019.

Il précise lui-même, aux termes de ses conclusions, que les maladies déclarées le 1er mars 2019 correspondent au syndrome du canal carpien droit et du canal carpien gauche.

Il en résulte que les conditions réglementaires d’attribution de l’indemnité temporaire d’inaptitude doivent être examinées à l’aune de ces deux maladies, à l’exclusion des pathologies « ténosynovite du 4è doigt », « épicondylite du coude droit » et « épicondylite du coude gauche », qui ne sont pas visées par la demande.

Les maladies « syndrome du canal carpien droit » et « syndrome du canal carpien gauche » ont été prises en charge au titre de la législation professionnelle par notifications du 3 juin 2019.

Ces maladies ont par ailleurs entrainé un arrêt de travail au moins jusqu’au 24 juin 2019.

Le 25 juin 2019, Monsieur [C] [F] a fait l’objet d’une visite de reprise devant le médecin du travail, le docteur [O], qui a établi le jour même un avis d’inaptitude.

Cet avis, visé dans la demande d’indemnité temporaire d’inaptitude, indique : « Afin de prévenir une aggravation des pathologies existantes et l’apparition de nouvelles lésions et compte tenu de l’absence d’aménagement de son poste de travail suite à l’intervention du cap emploi maintien en octobre et décembre 2018, M. [F] est inapte à son poste de vernisseur.
Un reclassement professionnel à un autre poste de l’entreprise est sollicité en prenant en compte les incapacités définitives de ce salarié :
- Pas de port de charges
- Pas de travaux comportant habituellement des mouvements répétés de préhension ou d’extension de la main sur l’avant-bras ou des mouvements de prono-supination
- Pas de travaux comportant habituellement des mouvements répétés d’adduction ou de flexion et pronation de la main et du poignet
- Pas de travaux comportant de façon habituelle soit des mouvements répétés ou prolongés d’extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main ».

L’inaptitude déclarée par le médecin du travail vise donc sans équivoque les pathologies du canal carpien droit et du canal carpien gauche de Monsieur [C] [F].

Ce dernier produit en outre une attestation du docteur [O], en date du 13 septembre 2019, certifiant qu’elle a déclarée Monsieur [C] [F] inapte au poste de vernisseur pour l’ensemble de ses pathologies, et notamment en raison de ses syndromes du canal carpien droit et du canal carpien gauche.

Contrairement à ce qu’indique la caisse, qui a suivi l’avis de son médecin conseil, il existe donc un lien patent entre la décision d’inaptitude du médecin du travail et les maladies professionnelles déclarées.

Monsieur [C] [F] a été licencié par lettre du 7 août 2019, faute pour l’employeur d’être parvenu au reclassement de son salarié dans le respect des restrictions formulées par avis médical du 25 juin 2019.

Il en ressort que Monsieur [C] [F] n’a perçu aucune rémunération liée à son activité salariée entre le 26 juin 2019, soit le premier jour qui suit la date de l'avis d'inaptitude, jusqu'au 7 août 2019, soit le jour de son licenciement.

Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il n’y ait lieu de recourir à une expertise médicale, que l’assuré justifie de l'ensemble des conditions réglementaires pour bénéficier de l'indemnité temporaire d’inaptitude sollicitée.

Il conviendra en conséquence de condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône à verser à Monsieur [C] [F] l’indemnité temporaire d’inaptitude à compter du 26 juin 2019.

Il n’y a pas lieu en revanche d’annuler la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône en date du 3 décembre 2019, s’agissant d’une décision administrative à laquelle le présent jugement a vocation à se substituer.

Sur les demandes accessoires

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la CPAM des Bouches-du-Rhône, qui succombe en ses prétentions, sera condamné aux dépens de l'instance.

L’équité commande d’allouer à Monsieur [C] [F] la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et de condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône à lui payer cette somme.

L’ancienneté et la nature du litige commandent d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

DECLARE le recours de Monsieur [C] [F] recevable et bien fondé,

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône à verser à Monsieur [C] [F] l'indemnité temporaire d'inaptitude à compter du 26 juin 2019,

RAPPELLE que le présent jugement se substitue aux décisions prises par l’organisme et la commission de recours amiable,

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône à verser à Monsieur [C] [F] la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône aux dépens de l'instance,

ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

RAPPELLE que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

LA GREFFIÈRELE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 20/00287
Date de la décision : 21/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-21;20.00287 ?
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