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19/03/2024 | FRANCE | N°19/04313

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 19 mars 2024, 19/04313


REPUBLIQUE FRANCAISE TRIBUNAL JUDICIAIREDE [Localité 8]
POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/01133 du 19 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 19/04313 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WPSC

AFFAIRE :
DEMANDEURS
Madame [S] [U] VEUVE [E]
née le 11 Août 1961 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
représentée par Me Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

Madame [G] [E] EPOUSE [D]
née le 03 Mars 1984 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 5]
représentée par M

e Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

Monsieur [F] [E]
né le 08 Décembre 1986 à [Localité 7] (BO...

REPUBLIQUE FRANCAISE TRIBUNAL JUDICIAIREDE [Localité 8]
POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/01133 du 19 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 19/04313 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WPSC

AFFAIRE :
DEMANDEURS
Madame [S] [U] VEUVE [E]
née le 11 Août 1961 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
représentée par Me Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

Madame [G] [E] EPOUSE [D]
née le 03 Mars 1984 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 5]
représentée par Me Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

Monsieur [F] [E]
né le 08 Décembre 1986 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 3]
représenté par Me Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

Madame [C] [E]
née le 14 Mai 1988 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
représentée par Me Marie-julie CONCIATORI-BOUCHARD, avocat au barreau de [Localité 8]

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
[Localité 2]
représentée par Mme [R] (Inspecteur)

DÉBATS : À l'audience publique du 16 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Président

Assesseurs : CHARBONNIER Antoine
DUMAS Carole

L’agent du greffe lors des débats : AROUS Léa,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 19 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE :

Selon déclarations du 19 avril 2018 et du 20 mai 2018, transmises à la caisse primaire d’assurance maladie (ci-après CPAM) des Bouches-du-Rhône, Madame [U] [S], veuve de Monsieur [E] [B] décédé le 20 septembre 2017, a sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie constatée par certificat médical initial du 19 avril 2018 mentionnant une « leucémie aiguë myeloïde ».

Après avoir sollicité l’avis du médecin conseil, la CPAM des Bouches-du-Rhône a instruit cette demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre d’une maladie non mentionnée dans un tableau de maladie professionnelle, et a saisi le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (ci-après CRRMP) de la région de [Localité 8] PACA-Corse.

Par courrier du 14 janvier 2019, la CPAM des Bouches-du-Rhône a notifié à la veuve de l’assuré sa décision de refus de prise en charge de la maladie déclarée, en l’absence d’avis favorable du CRRMP de la région de [Localité 8] PACA-Corse.

Les ayants droit de [E] [B] ont contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches du Rhône, puis ont saisi le pôle social du tribunal judiciaire de [Localité 8] le 14 juin 2019 d’un recours contre la décision implicite de rejet de la caisse (recours n° 19/04313).

Le 19 mars 2019, le CRRMP de [Localité 8] PACA-Corse a rendu un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de l'affection déclarée en considérant que : « La profession exercée n’est pas connue pour être associée à un risque augmenté de survenue d’une leucémie aiguë. L’origine professionnelle de la pathologie ne peut être retenue. En conséquence, le comité ne retient pas un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et la profession exercée. »

Par courrier du 26 mars 2019, la CPAM des Bouches-du-Rhône a notifié à la veuve de l’assuré sa décision de refus de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, suite à l’avis défavorable du CRRMP de [Localité 8] PACA-Corse.

Les consorts [E] ont contesté cette décision du 26 mars 2019 devant la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône, puis ont saisi le pôle social du tribunal judiciaire de [Localité 8] le 23 septembre 2019 d’un recours contre la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône du 23 juillet 2019 (recours n° 19/05765).

Par ordonnance présidentielle du 9 août 2019, rectifiée par ordonnance du 21 octobre 2019, la présidente de la présente juridiction a désigné le CRRMP de Bretagne, afin qu’il rende un avis sur la prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels.

Dans le cadre d’une demande en rectification d’erreur matérielle de l’ordonnance du 9 août 2019 par la CPAM des Bouches-du-Rhône, le tribunal a enregistré un nouveau recours sous le numéro RG 19/05527.

Le CRRMP de Bretagne a rendu un avis défavorable le 14 février 2020 en considérant que :
« Compte tenu :
- De la pathologie présentée : leucémie myéloïde aiguë
- De la profession : Chaudronnier tuyauteur, mécanicien, soudeur entre 1978 et 2011 et charpentier couvreur
- De l’étude attentive du dossier, notamment de l’enquête administrative du 05.12.2018, de l’avis du médecin du travail du 20.12.2018, du rapport du médecin conseil du 19.12.2018
- De l’avis de l’Ingénieur Conseil
- De l’analyse des éléments apportés par le conseil de l’assuré, en support de sa contestation à la date du 14.06.2019 ne permettant pas d’infirmer l’avis du précédent CRRMP de [Localité 8] en date du 19.03.2019
- De l’impossibilité de mettre en évidence des facteurs professionnels connus pour être des facteurs étiologiques avérés de la pathologie déclarée
Le Comité ne peut établir une relation directe et essentielle entre la pathologie présentée par l’intéressé et son activité professionnelle. »

L’affaire a été appelée à l’audience de fond du 16 janvier 2024.

Dans leurs dernières conclusions, soutenues oralement par leur conseil lors de l’audience, les consorts [E] demandent au tribunal :
- d’ordonner la jonction des recours numérotés RG 19/04313, n° 19/05765 et 19/05527,
- à titre principal, d’ordonner à la CPAM des Bouches-du-Rhône de reconnaître le caractère professionnel de la maladie déclarée le 20 mai 2018, et l’imputabilité du décès de l’assuré à cette maladie professionnelle,
- à titre subsidiaire, de désigner un nouveau CRRMP autre que celui de [Localité 8] PACA Corse et de celui de Bretagne,
- à titre infiniment subsidiaire, d’ordonner une expertise médicale judiciaire,
- en tout état de cause, de condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône à leur régler la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Ils font valoir que :
- le tribunal n’est pas lié par l’avis des CRRMP,
- la CPAM des Bouches-du-Rhône a commis une erreur d’appréciation en instruisant la demande des consorts de l’assuré comme n’étant pas désignée dans un tableau de maladie professionnelle alors que la maladie est désignée dans le tableau numéro 4 de l’annexe II relative aux tableaux des maladies professionnelles prévus par l’article R. 461-3 du Code de la sécurité sociale, et qu’elle aurait dû faire application de la présomption d’imputabilité d’origine professionnelle de cette maladie,
- l’ensemble des conditions mentionnées au titre du tableau numéro 4 de maladie professionnelle sont satisfaites.

Par voie de conclusions soutenues oralement par une inspectrice juridique, la CPAM des Bouches-du-Rhône demande pour sa part au tribunal de :
- joindre les quatre recours sus-mentionnés,
- entériner l’avis du CRRMP de Bretagne,
- confirmer le refus de prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels ainsi que de rejeter l’ensemble des demandes de la partie requérante.

Elle fait valoir que :
- elle n’a pas commis d’erreur en instruisant la demande des consorts [E] au titre d’une maladie professionnelle sur le fondement de l’alinéa 4 de l’article L.461-1 du Code de la sécurité sociale,
- sa décision de refus de reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie est justifiée,
- les pièces versées aux débats par les ayants droit de l’assuré ne démontrent pas de lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et l’activité professionnelle exercée, et notamment le fait qu’il aurait été exposé à du benzène dans le cadre de son travail.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la jonction d’instance

Les recours n° RG 19/04313, n° 19/05765 et 19/05527 ayant le même objet, il convient d’ordonner la jonction d’instance de ces quatre dossiers sous le numéro RG 19/04313.

Sur l’absence de caractère professionnel de la maladie déclarée par la veuve de l’assuré

En vertu de l’article L.461-1 du Code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci.

Dans ces deux derniers cas, la CPAM reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP).

En l’espèce, il ressort des écritures et des pièces versées aux débats que la maladie dont était atteint l’assuré n’était pas inscrite au tableau numéro 4 des maladies professionnelles de l’annexe II prévus par l’article R. 461-3 du Code de la sécurité sociale. En effet, si ce tableau désigne les « Leucémies aiguës myéloblastique et lymphoblastique », il exclut les « leucémies aiguës avec des antécédents d'hémopathies ».

En outre, les documents versés aux débats par les parties ne permettent pas de rapporter la preuve que Monsieur [B] [E] a été exposé exclusivement à titre professionnel au benzène correspondant à la liste indicative des travaux mentionnées dans le tableau numéro 4, ni pendant la durée d’exposition au risque prévue par ce même tableau.

Enfin, il ressort de l’avis du CRRMP de [Localité 8] PACA-Corse du 19 mars 2019 que « L’enquête administrative n’a pas retrouvé d’exposition au benzène ni à des radiations ionisantes (pas de mention de contrôle de soudure aux rayons X) » et que « La profession exercée n’est pas connue pour être associée à un risque augmenté de survenue d’une leucémie aigüe ».

De même, l’avis du CRRMP de Bretagne du 14 février 2020 relève que « l’analyse des éléments apportés par le conseil de l’assuré, en support de sa contestation à la date du 14 juin 2019 ne permettent pas d’infirmer l’avis du précédent CRRMP de [Localité 8] » et qu’il était dans « l’impossibilité de mettre en évidence des facteurs professionnels connus pour être des facteurs étiologiques avérés de la pathologie déclarée ».

S’il est constant que le juge n’est pas lié par les avis des CRRMP dont il apprécie souverainement la valeur et la portée, il appartient à la partie requérante qui en conteste les conclusions d’établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions.

En l’espèce, la contestation et les pièces produites par les consorts [E] sont insuffisantes pour contredire les avis clairs et motivés rendus par les deux CRRMP.

L’avis de ces deux CRRMP étant clairs, concordants, et sans équivoque, il y a lieu de les entériner et de confirmer la décision de la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches du Rhône du 23 juillet 2019, ayant confirmé la décision de refus de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par la veuve de Monsieur [B] [E].

Les éléments de l’espèce ne justifient pas de saisir un troisième CRRMP, ni de faire droit à la demande d’expertise médicale des consorts [E].

Sur les demandes accessoires

En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, les dépens seront laissés à la charge des consorts [E].

L’issue du litige ne justifie pas de faire droit à la demande présentée par les consorts [E] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

Vu l’avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de [Localité 8] PACA-Corse du 19 mars 2019 ;
Vu l’ordonnance présidentielle du 9 août 2019, rectifiée par l’ordonnance du 21 octobre 2019 ;
Vu l’avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de Bretagne du 14 février 2020 ;

Ordonne la jonction d’instance des recours numéro RG 19/04313, n° 19/05765 et 19/05527 sous le numéro RG 19/04313 ;
Entérine l’avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de [Localité 8] PACA-Corse du 19 mars 2019 et celui du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de Bretagne du 14 février 2020 ;

Confirme la décision de la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône du 23 juillet 2019, ayant refusé la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par la veuve de Monsieur [B] [E] ;

Déboute les consorts [E] de l’ensemble de leurs demandes et prétentions ;

Condamne les consorts [E] aux dépens de l’instance ;

Conformément aux dispositions de l’article 538 du Code de procédure civile, tout appel de la présente décision doit être formé, à peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 19/04313
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;19.04313 ?
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