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18/03/2024 | FRANCE | N°21/05944

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 2ème chambre cab2, 18 mars 2024, 21/05944


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°


Enrôlement : N° RG 21/05944 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y5NA

AFFAIRE : Mme [U] [N] (Me Anne-laure ROUSSET )
C/ E.P.I.C. REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS (RTM) (Me Charlotte SIGNOURET)
- CPAM DES BOUCHES DU RHONE ( )



DÉBATS : A l'audience Publique du 05 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laq

uelle, la date du délibéré a été fixée au : 18 Mars 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 21/05944 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y5NA

AFFAIRE : Mme [U] [N] (Me Anne-laure ROUSSET )
C/ E.P.I.C. REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS (RTM) (Me Charlotte SIGNOURET)
- CPAM DES BOUCHES DU RHONE ( )

DÉBATS : A l'audience Publique du 05 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 18 Mars 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 18 Mars 2024

PRONONCE par mise à disposition le 18 Mars 2024

Par Madame Elsa VALENTINI, Juge

Assistée de Madame Célia SANDJIVY, Greffier

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [U] [N]
née le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]

Immatriculée à la sécurité sociale sous le n° [Numéro identifiant 3]

représentée par Maître Anne-laure ROUSSET de l’AARPI CABINET BRINGUIER-RICHELME-ROUSSET, avocats au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSES

E.P.I.C. REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS (RTM), dont le siège social est sis [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Charlotte SIGNOURET de la SELARL ENSEN AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, dont le siège social est sis [Localité 1] prise en la personne de son représentant légal en exercice

défaillant

**********

Par acte du 21 juin 2021, Madame [U] [N], née le [Date naissance 4] 1964, a assigné devant le tribunal de céans la Régie des Transports Métropolitains (RTM) et la CPAM des Bouches du Rhône, sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil.

Madame [N] expose que, le 15 mai 2019, alors qu’elle se rendait à l’opéra pour une sortie scolaire, dans le cadre de son activité d’enseignante, elle a été victime d’une chute dans la voiture du métro suite à une freinage brusque.

La MAIF, assureur de Madame [N], a mandaté le docteur [M] afin de l’examiner.
Celui-ci a déposé son rapport le 22 juin 2020.

Dans ses dernières écritures notifiées le 24 mars 2022, Madame [N] demande au tribunal de :
A titre principal
- DÉCLARER la RTM responsable de l’accident survenu le 15 mai 2019 au préjudice de Madame [N] sur le fondement des dispositions de l’article 1231-1 du Code Civil
A titre subsidiaire
- DÉCLARER la RTM responsable de l’accident survenu le 15 mai 2019 au préjudice de Madame [N] sur le fondement des dispositions des articles 1240 et suivants du Code civil
En tout état ce cause
- CONDAMNER la RTM à indemniser les conséquences dommageables de l’accident survenu le 15 mai 2019 au préjudice de Madame [N]
- CONDAMNER la RTM au paiement de la somme totale de 7.022 € en indemnisation des préjudices subis
A titre infiniment subsidiaire
- DÉSIGNER tel médecin expert qu’il plaira au Tribunal aux fins de l’examiner et de déterminer les séquelles dont elle reste atteinte, de dire quels sont les DFTT, DFTP, DFP, pretium doloris, préjudice esthétique et préjudice d’agrément et de faire toute constatation utile
- CONDAMNER la RTM à verser à Madame [N] une provision de 3.000 € à valoir sur l’indemnisation intégrale de son préjudice
En tout état de cause
- CONDAMNER la RTM au paiement de la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile
- la CONDAMNER aux entiers dépens distraits au profit de Maître Anne-Laure ROUSSET
- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 30 septembre 2022, la RTM demande au tribunal de :
A titre principal
- DIRE ET JUGER que Madame [N] ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité direct et certain entre l’accident allégué et les préjudices dont elle se plaint
- DIRE ET JUGER que les conditions de la responsabilité de la RTM n’est pas démontrée, tant sur le fondement contractuel que délictuel
- DÉBOUTER Madame [N] de l’intégralité de ses demandes telles que formulées à l’encontre de la RTM
A titre subsidiaire
- DÉBOUTER Madame [N] de sa demande de condamnation provisionnelle, ou à titre subsidiaire, la réduire sensiblement
- DONNER ACTE à la RTM de ce qu’elle formule ses plus expresses protestations et réserves tant sur le bien-fondé de sa mise en cause que sur la mesure d’expertise sollicitée à titre subsidiaire par Madame [N]
- RÉDUIRE sensiblement la demande de condamnation provisionnelle formulée à titre subsidiaire par Madame [N]
- DÉSIGNER tel expert qu’il plaira avec la mission détaillée dans le corps des présentes
- DIRE ET JUGER que la mission d’expertise s’effectuera aux frais avancés de la requérante
A très titre subsidiaire
- SURSOIR A STATUER sur les postes de préjudices susceptibles de faire l’objet d’un recours de la part de l’organisme social
- SUBSIDIAIREMENT, déduire la créance de l’organisme social des sommes qui pourraient être allouées à Madame [N]
- RÉDUIRE les demandes d’indemnisation de Madame [N], et la débouter de ses demandes injustifiées
En toute hypothèse
- DÉBOUTER Madame [N] de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens
- DIRE ET JUGER que l’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire et ne pas l’ordonner.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions quant à l’exposé détaillé des prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 16 janvier 2023.

L’affaire a été appelée à l’audience du 5 février 2024 et mise en délibéré au 18 mars 2024.

La CPAM des Bouches du Rhône, régulièrement assignée, n’ayant pas constitué avocat ; le présent jugement sera réputé contradictoire à l’égard de l’ensemble des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité contractuelle

En vertu de l'article 1231-1 du code civil, le transporteur ferroviaire est tenu d'une obligation de sécurité de résultat l'obligeant à amener le voyageur sain et sauf à la destination prévue, sans pouvoir s'exonérer partiellement, l'exonération totale restant possible s'il prouve qu'il n'a fait que subir l'action d'une cause étrangère, le fait d'un tiers ou la faute de la victime, présentant les caractères de la force majeure.
L'analyse de l'application de ces dispositions présuppose que la matérialité des faits invoqués soit rapportée, démonstration qui incombe à Madame [N].

Celle-ci soutient avoir été victime d’une chute consécutive à un freinage brutal opéré par le conducteur du métro. Elle considère n’avoir commis aucune faute et précise qu’elle se tenait à la barre au moment du freinage. Elle indique que, participant à l’encadrement d’une sortie scolaire, elle disposait d’un ticket collectif. Elle affirme que le chef de station a rempli un procès-verbal de l’accident le jour-même.
Au soutien de sa demande, Madame [N] verse au débat :
- une attestation de Madame [P] [O] en date du 29/06/2019 mentionnant : “entre les stations Estrangin/Vieux-Port, le métro qui était lancé, a brutalement freiné ce qui a fait lâcher prise à Madame [N] qui se tenait debout dans un des ilôts central. Je l’ai vu partir en arrière de toute sa hauteur entre les sièges, et heurter l’un de ceux-là avant de chuter au sol. La brutalité du freinage n’a permis à personne de la retenir ni d’amortir le choc ...”
- des pièces médicales
- sa déclaration d’accident
-une attestation de Madame [L], principale du collège, indiquant que les tickets pour la sortir scolaire avaient été achetés en avril 2018 + facture RTM du 16/04/2018.

La RTM considère que Madame [N] ne rapporte pas la preuve du lien de causalité direct et certain entre l’accident allégué et les préjudices dont elle se plaint. Elle estime que le rapport du docteur [M], établi non contradictoirement, n’est pas suffisant à ce titre. Elle conclut au débouté.

Les pièces versées au débat établissent le lien contractuel entre les parties de sorte que la RTM était bien débitrice d’une obligation de sécurité de résultat à l’égard de Madame [N] le jour des faits.
Il ressort des déclarations de cette dernière, de l’attestation de Madame [O] et du certificat médical établi le 15 mai 2019 que ce jour-là Madame [N] a été blessée à la suite d’une chute dans la rame du métro.
Dès lors, la responsabilité de la RTM est engagée sauf à démontrer une faute de la victime présentant les caractères de la force majeure.
La défenderesse ne prouve, ni n’invoque aucune faute de cette nature.
Par conséquent, la RTM sera condamnée à indemniser Madame [N] de l’intégralité de son préjudice.
A cet égard, il ressort du certificat médical initial que Madame [N] a été examinée le jour même aux urgences de la Timone où il a été constaté trois côtes fracturées. Ainsi la RTM est malfondée à contester le lien de causalité entre l’accident et le préjudice de Madame [N].

Sur l’évaluation du préjudice

Aux termes du rapport d’expertise amiable du docteur [M], l’accident a eu pour Madame [N] les conséquences médico-légales suivantes :
- ATAP du 15/05/2019 au28/05/2019
- GTP de classe 2 du 15/05/2019 au 15/06/2019
- GTP de classe 1 du 16/06/2019 jusqu’à consolidation
- Consolidation :03/10/2019
- Souffrances endurées : 2,5/7
- AIPP : 1%.

La société RTM considère que le rapport non contradictoire du docteur [M] n’est pas une preuve suffisante à l’évaluation du préjudice corporel de Madame [N].
Cependant, force est de constater que la société RTM ne sollicite pas qu’une expertise judiciaire soit ordonnée.
Dans la mesure où le rapport d’expertise amiable a été communiquée a minima le 13 juillet 2021 à la RTM dans le cadre de la présente procédure ce qui lui laissait la possibilité de le communiquer à une médecin recours et d’y apporter toute critique, il n’y a pas lieu d’écarter ce rapport.

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Madame [N], âgé de 54 ans lors de l’accident, sera réparé ainsi que suit.

Déficit fonctionnel temporaire
Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

L’expert retient les éléments suivants :
- GTP de classe 2 du 15/05/2019 au 15/06/2019
- GTP de classe 1 du 16/06/2019 au 03/10/2019.

Sur la base d’une indemnisation de 27 € par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par Madame [N] jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi d'une somme de 513 euros, calculée comme suit :
32j x 27 € x 25 % = 216 €
110 j x 27 € x 10 % = 297 €.

Souffrances endurées
Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis. Cotées à 2,5/7 par l’expert, elles seront réparées par l'allocation de la somme de 4.500 euros.

Déficit fonctionnel permanent
Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d'existence.

La victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 1 % par l’expert compte-tenu des séquelles relevées et étant âgée de 55 ans lors de la consolidation de son état, il lui sera alloué la somme de 1.400 euros.

Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la société RTM, succombante sera condamnée aux entiers dépens de la présente procédure, distraits au profit de Maître Anne-Laure ROUSSET.

Madame [N] ayant été contrainte d’exposer des frais pour obtenir la reconnaissance de ses droits, il est équitable de condamner la RTM à lui payer la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la Régie des Transports Métropolitains à payer à Madame [U] [N] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :

- 513 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire
- 4.500 euros au titre des souffrances endurées
- 1.400 euros au titre du déficit fonctionnel permanent

DIT le présent jugement commun à la CPAM des Bouches du Rhône ;

CONDAMNE la Régie des Transports Métropolitains à payer à Madame [U] [N] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire ;

CONDAMNE la Régie des Transports Métropolitains aux dépens, distraits au profit de Maître Anne-Laure ROUSSET;

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DEUXIEME CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE
18 MARS 2024

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 2ème chambre cab2
Numéro d'arrêt : 21/05944
Date de la décision : 18/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-18;21.05944 ?
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