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11/03/2024 | FRANCE | N°18/05482

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 2ème chambre cab2, 11 mars 2024, 18/05482


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°


Enrôlement : N° RG 18/05482 - N° Portalis DBW3-W-B7C-UVHB

AFFAIRE : S.C. SCCV VILLA ROLLAND (Me Grégoire ROSENFELD)
C/ M. [R] [U] (Me Yann PREVOST )
- M. [D] [G] (Me Yann PREVOST )
- Mme [X] [T] (Me Yann PREVOST )
- Mme [A] [J] (Me Yann PREVOST )
- M. [F] [M] (Me Yann PREVOST )
- Mme [C] [M] (Me Yann PREVOST )



DÉBATS : A l'audience Publique du 22 Janvier 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président

: Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 18/05482 - N° Portalis DBW3-W-B7C-UVHB

AFFAIRE : S.C. SCCV VILLA ROLLAND (Me Grégoire ROSENFELD)
C/ M. [R] [U] (Me Yann PREVOST )
- M. [D] [G] (Me Yann PREVOST )
- Mme [X] [T] (Me Yann PREVOST )
- Mme [A] [J] (Me Yann PREVOST )
- M. [F] [M] (Me Yann PREVOST )
- Mme [C] [M] (Me Yann PREVOST )

DÉBATS : A l'audience Publique du 22 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 11 Mars 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mars 2024

PRONONCE par mise à disposition le 11 Mars 2024

Par Madame Elsa VALENTINI, Juge

Assistée de Madame Célia SANDJIVY, Greffier

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

S.C. SCCV VILLA ROLLAND, domiciliée : chez PRIMOSUD, dont le siège social est sis [Adresse 9]

représentée par Maître Grégoire ROSENFELD de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEURS

Monsieur [R] [U], demeurant [Adresse 2] / FRANCE

représenté par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

Monsieur [D] [G], demeurant [Adresse 7] / FRANCE

représenté par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

Madame [X] [T], demeurant [Adresse 7] / FRANCE

représentée par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

Madame [A] [J], demeurant [Adresse 1] / FRANCE

représentée par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

Monsieur [F] [M], demeurant [Adresse 10] / FRANCE

représenté par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

Madame [C] [M], demeurant [Adresse 10] / FRANCE

représentée par Maître Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

***************

Suivant permis de construire délivré le 08 juillet 2016, la Mairie de [Localité 11] a autorisé la SCCV VILLA ROLLAND à réaliser la construction d’un ensemble immobilier représentant une surface de plancher de 2.709 m² de logements et 460m² de bureaux sur un terrain situé [Adresse 8], sur les parcelles [Cadastre 12], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6].

Par requête devant le tribunal administratif de Marseille, Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] ont sollicité l'annulation de l'arrêté de permis de construire. Parallèlement, les mêmes personnes ont saisi la juridiction des référés par requête en date du 2 octobre 2017. Monsieur le Président du tribunal administratif de Marseille a, par ordonnance du 25 octobre 2017, rejeté le recours en référé suspension. Par jugement en date du 31 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le recours des voisins et ces derniers se sont pourvus devant le Conseil d'Etat qui a rendu un arrêt du 31 décembre 2018 déclarant non admis le pourvoi aux motifs que les moyens n'étaient pas fondés.

Par acte d'huissier en date du 27 avril 2018, la société SCCV VILLA ROLLAND a fait assigner devant le tribunal de céans Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] pour qu'ils soient condamnés in solidum à réparer, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, le préjudice subi à la suite de ces procédures que la SCCV VILLA ROLLAND qualifie d'abusives.

Saisi par Madame [P] et Monsieur [U], le juge de la mise en état, par ordonnance en date du 14 juin 2021, a déclaré irrecevable la première, celle-ci n’étant pas partie à la présente procédure, et a rejeté les demandes du second de provision et de cessation du passage de la grue au dessus de la propriété des consorts [U].

En parallèle, par exploit du 9 novembre 2021, Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [N] [P], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] ont assigné la SCCV VILLA ROLLAND aux fins d’indemnisation de leurs préjudices sur le fondement du trouble anormal de voisinage. Cette affaire a été enrôlée sous le numéro RG 21/10006 devant la 3ème chambre civile du tribunal judiciaire de MARSEILLE.

A l’audience de mise en état du 20 juin 2022, la demande de jonction des deux procédures a été refusée.

Dans ses conclusions récapitulatives notifiées le 7 septembre 2022, la SCCV VILLA ROLLAND demande au tribunal de :
- DIRE ET JUGER que les demandes reconventionnelles des défenderesses au titre des troubles anormaux de voisinage et désordres allégués sont irrecevables à défaut de lien suffisant avec les prétentions originelles
- DÉBOUTER les défenderesses de toutes leurs demandes
- CONDAMNER in solidum Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] à lui verser la somme de 572.435, 08 €
- CONDAMNER in solidum Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir
- CONDAMNER les défenderesses aux entiers dépens.

Dans leurs dernières écritures notifiées le 17 juin 2022, Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] demandent au tribunal de :
A titre liminaire
- ORDONNER la jonction des procédures enrôles sous les numéros RG 18/05482 et RG 21/100006
Sur le fond
- DÉBOUTER la SCCV VILLA ROLLAND de l’ensemble de ses demandes
- DÉCLARER les défendeurs recevables et bien fondés, en leur demande reconventionnelle
- DÉCLARER abusif le recours en réparation initié par la SCCV VILLA ROLLAND
- CONDAMNER la SCCV VILLA ROLLAND à payer la somme de 10.000,00 euros à chacun des défendeurs à titre de réparation de leur préjudice moral causé par l’engagement de la présente procédure abusive
- CONDAMNER la SCCV VILLA ROLLAND à régler la somme de 5 000,00 euros à chacun des défendeurs au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions quant à l’exposé détaillé des prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 24 octobre 2022.

L’affaire a été appelée à l’audience du 4 décembre 2023 et renvoyée, le délibéré de l’instance pendante devant la 3ème chambre étant fixé au 16 janvier 2024.

Ledit jugement a été communiqué.

L’affaire a été retenue à l’audience du 22 janvier 2024 et mise en délibéré au 11 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de jonction

La demande de jonction de la présente procédure avec celle enregistrée sous le numéro
RG 21/10006 est désormais sans objet.

Sur la demande de la SCCV VILLA ROLLAND

La SCCV VILLA ROLLAND expose que, suite à la requête des défendeurs du 8 septembre 2016 devant le tribunal administratif, elle a produit un mémoire justifiant que celle-ci était irrecevable et que les moyens soulevés étaient manifestement infondés de sorte que le recours était abusif ; qu’elle a fait délivrer le 31 mars 2017 une sommation interpellative et acte protestatif dans lesquels elle les a informés qu’ils n’avaient ni intérêt, ni qualité à agir, que leur procédure était injustifiée et abusive, que leur recours ne lui permettait pas de commencer les travaux ce qui causait un préjudice mensuel de 43.000 € et qu’elle se réservait la possibilité d’engager toute procédure en réparation dudit préjudice ; que les défendeurs ont également initié un référé suspension sur le fondement de l’article L521-1 du code de justice administrative ; que par ordonnance du 25 octobre 2017, le président du Tribunal Administratif a rejeté ce recours considérant que les moyens développés à l’encontre du permis de construire n’étaient pas fondés ; qu’elle a fait délivrer une seconde sommation interpellative le 8 novembre 2017 indiquant notamment que depuis cette ordonnance elle était en droit de considérer que le maintien du recours contentieux constituait un abus de droit.
La SCCV VILLA ROLLAND soutient que le maintien, après le 25 octobre 2017, de la procédure devant le Tribunal Administratif constitue un abus de droit réalisé dans une intention manifeste de nuire, caractérisé par la poursuite d’une procédure que les voisins savaient infondée.
Elle fait valoir qu’elle a été contrainte d’attendre le jugement au fond du Tribunal Administratif en date du 31 mai 2018 qui a rejeté le recours des voisins, puis l’arrêt du Conseil d’Etat en date du 31 décembre 2018.

La SCCV VILLA ROLLAND indique que le maintien du recours ne lui a pas permis de mettre en oeuvre le permis de construire et de réaliser le programme immobilier. Elle précise que, tant que le recours est pendant, les logements ne peuvent pas être vendus et les banquiers n’accordent pas les concours bancaires.
Elle soutient que le maintien de la procédure devant la juridiction administrative après le 25 octobre 2017 a entraîné un retard de 14 mois dans la réalisation du programme immobilier, à savoir jusqu’à l’arrêt du Conseil d’Etat du 31 décembre 2018.
Sur la base d’un chiffre d’affaire de 11.977.000 euros, elle évalue le préjudice découlant du retard à la somme mensuelle de 39.923, 33 € (11.977.000 x 4 % = 479.080€/an soit
39.923, 33€/mois). Elle sollicite à ce titre la somme de 558.926, 62 euros. Elle estime que cette somme doit être majorée de frais financiers mensuels de 962, 34 euros. Au total, elle demande la condamnation in solidum des défendeurs à lui payer la somme de 572.435, 08 €.

Les défendeurs considèrent qu’aucune faute dans l’exercice du droit d’ester en justice n’est démontrée à leur encontre. Ils font valoir qu’ils avaient intérêt à agir en leur qualité de voisins immédiats de la SCCV VILLA ROLLAND, ce que la juridiction administrative a reconnu puisqu’elle a rejeté le moyen d’irrecevabilité soulevé par le promoteur.
Ils estiment que leur recours contre le permis de construire était étayé, fourni et documenté.
Ils précisent avoir soulevé les moyens suivants :
- le signataire de la décision était incompétent
- le dossier ne contenait pas de pièces attestant que le pétitionnaire avait qualité pour demander l’autorisation ;
- le dossier était insuffisant concernant les règles d’accessibilité des personnes souffrant de handicap
- le dossier de demande de permis de construire est incomplet en méconnaissance de l’article R. 431-10 du code de l’urbanisme
- la décision méconnaît le préambule du règlement de la zone UBt du règlement du plan local d’urbanisme ;
- la décision méconnaît l’article UBt 6 du règlement du plan local d’urbanisme
- la décision méconnaît l’article UBt 7 du règlement du plan local d’urbanisme
- la décision méconnaît l’article UBt 10 du règlement du plan local d’urbanisme
- la décision méconnaît l’article UBt 13 du règlement du plan local d’urbanisme
- la décision méconnaît l’article R. 111-27 du plan local d’urbanisme.
Ils soulignent que, dans son mémoire en réponse, la SCCV VILLA ROLLAND avait conclu, à titre subsidiaire, à un sursis à statuer pour lui permettre de régulariser la situation dans le cadre d’un permis modificatif et, à titre infiniment subsidiaire, au prononcé d’une annulation partielle de celui-ci.
Ils notent que dans les suites du recours, la SCCV VILLA ROLLAND a déposé un permis modificatif s’inspirant en tout point de moyens d’illégalités qu’ils avaient soulevés.
Ils relèvent que le Tribunal Administratif n’a prononcé aucune condamnation au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative et considèrent que cela démontre la légitimité de leur action.
Ils estiment qu’il est légitime pour des propriétaires, dont le droit fondamental de propriété est mis à mal par la délivrance d’un permis de construire qu’ils pensaient non conforme, d’utiliser les moyens légaux pour préserver leur droit. Ils font valoir que dans son ordonnance le président du Tribunal Administratif n’a pas considéré que les moyens développés n’étaient pas fondés mais qu’ils n’étaient pas “de nature à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée”. Ils considèrent que le rejet d’une demande de suspension ne préjuge en rien de la décision qui sera rendue sur le fond.
Les défendeurs indiquent que la SCCV VILLA ROLLAND a fait l’objet d’un rappel à la loi par le Procureur de la République de [Localité 11] en date du 4 mai 2022 pour non-respect du permis de construire déposé, celle-ci ayant sciemment agrandi l’ouverture au rez-de-chaussée. Il estiment que si les gents du Service de l’Urbanisme ont constaté des défaillances entre les travaux et le permis de construire déposé, alors eux-mêmes, profanes en la matière, étaient en droit de penser que le permis était irrégulier et de solliciter son annulation.
Par ailleurs, les défendeurs soutiennent avoir démontré devant la juridiction administrative que le permis de construire était de nature à affecter les conditions d’occupation de leurs propriétés notamment en ce que la construction projetée les exposait à une augmentation du vis-à-vis, des nuisances sonores, de la circulation automobile, une perte de luminosité et à une dépréciation générale de leurs biens. Ils concluent que cette construction était de nature à leur causer un trouble anormal de voisinage.

Ensuite, les défendeurs font valoir que le promoteur est un professionnel qui avait nécessairement anticipé le risque d’action en contestation du permis. Ils estiment que les délais de recours sont pris en compte de le calcul de ce type de programme immobilier et que le retard allégué dans l’achèvement des travaux n’est pas imputable à leur recours. Ils indiquent que, consciente des conséquences dramatiques des constructions sur les riverains, la SCCV VILLA ROLLAND a tenté par tout moyen de les indemniser en échange d’un abandon de leurs recours.

Il sera rappelé qu’en application de l’article 1240 du code civil, l’exercice d’une action en justice ne peut constituer un abus que dans des circonstances particulières le rendant fautif.
En l’espèce, contrairement à ce qu’elle soutenait devant la juridiction administrative, la SCCV VILLA ROLLAND ne prétend plus que les voisins du projet immobiliers n’avaient pas intérêt à agir en annulation du permis de construire. Elle estime que l’abus réside dans le maintien de l’action après l’ordonnance de référé du président du tribunal administratif en date du 25 octobre 2017.
Dans cette ordonnance, le juge des référés a rejeté la requête “considérant qu’aucun des moyens soulevés par les requérants n’est de nature à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée” au sens de l’article L521-1 du code de la justice administrative.
Or cette décision a un caractère provisoire et n’a pas autorité de la chose jugée au principal. Dès lors, retenir que le maintien d’un recours en annulation d’un arrêté de permis de construire au fond après le rejet d’un référé suspension serait nécessairement abusif constituerait une atteinte majeure au droit d’accès au juge.
Les requêtes en annulation du permis de construire étaient argumentées et fondées sur des dispositions spécifiques du droit de l’urbanisme. Pour rejeter ces requêtes, le tribunal administratif, dans ses décisions du 31 mai 2018,s’est livré a un examen minutieux des moyens. Il sera observé que sur les 16 moyens soulevés, seul celui tiré de l’absence d’alignement des constructions sur la voie publique et du non-respect d’une marge de recul architectural de 20 à 30 mètres a été considéré comme non n’étant pas sérieux.
Par conséquent, il ne peut être retenu que les requérants ont fait preuve de légèreté dans l’exercice de leur action, ni même qu’il était évident, pour des non-professionnels, que celle-ci était destinée à échouer.
Par ailleurs, il n’est pas démontré, ni même soutenu, que les voisins du projet immobilier étaient mus par une quelconque intention malveillante à l’égard du promoteur, le seul but poursuivi étant la préservation de leurs lieux de vie, indépendamment du caractère effectivement préjudiciable du projet.
Ainsi, le caractère abusif du maintien du recours ne sera pas retenu.
Au surplus, la SCCV VILLA ROLLAND échoue à démontrer la réalité du préjudice dont elle se prévaut. La pièce 7 figurant à son bordereau comme étant des “justificatifs des préjudices(pour mémoire)” n’a pas été communiquée au tribunal. Or les rapports concernant le chiffre d’affaire et les frais engagés produits au débat ne démontrent nullement que le commencement des travaux, la vente des logements ou des opérations bancaires ont été retardés par le maintien de la requête en annulation de l’arrêté du permis de construire alors même que de tels recours étaient parfaitement prévisibles pour un projet immobilier de cette ampleur.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, la demande de la SCCV VILLA ROLLAND sera rejetée.

Sur la demande reconventionnelle

Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] considèrent que la présente instance engagée à leur encontre est abusive en raison notamment de son objectif d’intimidation. Ils soutiennent qu’elle est la suite logique des mesures voulues “dissuasives” par la SCCV VILLA ROLLAND pour les contraindre à abandonner toute défense de leurs droits en faisant peser sur eux un risque financier démesuré. Ils sollicitent la somme de 10.000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral.

La SCCV VILLA ROLLAND fait valoir que ce sont les défendeurs à cette instance qui ont pris l’initiative d’engager différents contentieux notamment une procédure devant le tribunal administratif en contestation d’un permis de construire qu’ils savaient parfaitement légal. Elle indique les avoir informé par mémoires devant la juridiction administrative et par sommations du fait qu’elle estimait leur recours infondé et abusif. Elle note que le tribunal administratif et le Conseil d’Etat lui ont donné raison de sorte qu’on ne peut lui reprocher ces initiatives.
.

Il sera observé que les défendeurs au principal prêtent à la SCCV VILLA ROLLAND des intentions qu’aucun élément objectif versé au dossier ne permet d’établir. Le fait pour un promoteur d’engager une action pour procédure abusive contre les voisins mécontents de son projet immobilier ayant contesté le permis de construire devant les juridictions adminsitratives n’est pas fautif en soi. Au surplus, il s’est avéré que le permis contesté était légal.
Par conséquent, la demande reconventionnelle sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

La société SCCV VILLA ROLLAND, qui succombe en la présente instance, sera condamnée aux dépens.

En outre, elle devra supporter les frais irrépétibles engagés dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à raison de la somme de 1.000 euros pour chacun des défendeurs.

Au regard de l’ancienneté de la procédure, il y a lieu d’ordonner l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DIT sans objet la demande de jonction ;

DÉBOUTE la SCCV VILLA ROLLAND de sa demande au titre du maintien abusif d’une procédure ;

DÉBOUTE Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] de leur demande au titre de la procédure abusive ;

CONDAMNE la SCCV VILLA ROLLAND à payer la somme de 1.000 euros chacun à Madame [A] [J], Monsieur [R] [U], Monsieur [D] [G], Madame [X] [T], Monsieur [F] [M] et Madame [C] [M] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SCCV VILLA ROLLAND de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE l’exécution provisoire ;

CONDAMNE la SCCV VILLA ROLLAND aux dépens ;

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DEUXIEME CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE
11 MARS 2024

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 2ème chambre cab2
Numéro d'arrêt : 18/05482
Date de la décision : 11/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-11;18.05482 ?
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