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27/06/2024 | FRANCE | N°22/04359

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Chambre 10 cab 10 h, 27 juin 2024, 22/04359


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 22/04359 - N° Portalis DB2H-W-B7G-WZO5

Jugement du 27 juin 2024
























Notifié le :




Grosse et copie à :

Me Philippe BUSSILLET de la SELARL BUSSILLET POYARD - 1776
Me Laure MATRAY - 1239





REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 27 juin 2024 devant la Chambre 10

cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 24 avril 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 04 avril 2024 devant :

Julien CASTELBOU...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 22/04359 - N° Portalis DB2H-W-B7G-WZO5

Jugement du 27 juin 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :

Me Philippe BUSSILLET de la SELARL BUSSILLET POYARD - 1776
Me Laure MATRAY - 1239

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 27 juin 2024 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 24 avril 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 04 avril 2024 devant :

Julien CASTELBOU, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assisté de Jessica BOSCO BUFFART, Greffier,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

Madame [J] [R] [B]
née le 29 avril 1967 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 2]

représentée par Maître Philippe BUSSILLET de la SELARL BUSSILLET POYARD, avocats au barreau de LYON, et Maître Matthieu ROBARDEY, avocat au barreau de VIENNE

DEFENDEUR

Monsieur [N] [U]
demeurant [Adresse 1]

représenté par Maître Laure MATRAY, avocat au barreau de LYON

Par acte authentique du 17 mai 2016, Monsieur [N] [U] a acquis, de la SCI DOLI, un local commercial situé [Adresse 2] cadastré AB [Cadastre 3] et AB [Cadastre 4].

Selon permis de construire, déposé auprès de la mairie de [Localité 6] le 12 janvier 2016, Monsieur [N] [U] a réalisé des travaux de réaménagement dudit local afin d’en changer la destination commerciale en habitation.

Par acte authentique du 27 août 2018, Madame [J] [B] a acquis l’immeuble de Monsieur [N] [U].

Des désordres sont apparus en fin d’année 2018.

Madame [J] [B] a sollicité de Monsieur [U] la prise en charge du coût des travaux nécessaires à la reprise des désordres, outre la transmission de divers documents relatifs aux installations et travaux réalisés.

Aucune réponse satisfactoire n’a été apportée à ses demandes.

Par exploit du 12 août 2020, Madame [J] [B] a assigné Monsieur [U] devant le juge des référés de la présente juridiction.

Par ordonnance du 21 décembre 2020, le Juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et nommé Monsieur [Y] en qualité d’expert.

Monsieur [Y] a déposé son rapport le 21 février 2022.

Par exploit d’huissier du 04 mai 2022, Madame [J] [B] a assigné Monsieur [U] devant la présente juridiction.

*

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 novembre 2022, Madame [J] [B] sollicite d’entendre le Tribunal, au visa des articles 1792 et suivants ; 1231-1 ; 1137 ; 1604 et 1611 et 1641 et suivants du Code civil :

A titre principal sur le fondement des vices cachés, de l’absence de délivrance conforme et du dol, à titre subsidiaire sur le fondement de la responsabilité décennale et à titre infiniment subsidiaire sur le fondement de la responsabilité pour faute :
Condamner Monsieur [U] à lui payer la somme de 18.017 € en réparation des désordres se décomposant comme suit :10.528 € en réparation des désordres et puits de lumière,6.011 € en réparation de la non-conformité à la norme RT 2012,1.178 € en réparation de la fuite en toiture et ses conséquences sur le plafond du séjour,300 € en réparation des désordres sur le parquet,Condamner Monsieur [U] à lui payer la somme de 10.000 € à titre de préjudice moral et de jouissance,Condamner Monsieur [U] à lui payer la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,Condamner Monsieur [U] aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire soit 10.872,56 € TTC, distraits au profit de Maître [D] [X],Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
*

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 avril 2023, Monsieur [N] [U] sollicite d’entendre le Tribunal, au visa des articles 1137-1, 1231-1, 1604, 1641 et 1792 du Code civil :

A titre principal,
Rejeter l’intégralité des demandes de Madame [B],Condamner Madame [B] à lui verser la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.A titre subsidiaire,
Fixer les préjudices de Madame [B] de la façon suivante :10.528 € en réparation des désordres sur les puits de lumière,6.011 € en réparation de la non-conformité de la norme RT 2012,1.178 € en réparation de la fuite de toiture et ses conséquences sur le plafond du séjour,300 € en réparation des désordres sur le parquet,Rejeter toutes les autres demandes formées par Madame [B],Ramener la demande formée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à de plus justes proportions,Dire qu’il y a lieu d’écarter l’exécution provisoire.*
En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
*
La clôture de la procédure a été prononcée au 24 avril 2023.
*

MOTIFS

I. Sur les préjudices matériels

Au soutien de ses demandes, Madame [B] fait valoir que la responsabilité de Monsieur [U] est engagée au titre des vices-cachés, sans pouvoir se prévaloir de la clause d’exclusion de garantie, en ce qu’il doit être considéré comme vendeur constructeur puisqu’il a réalisé une partie des ouvrages et s’est placé en qualité de maître d’œuvre gérant l’intervention des entreprises pour la transformation du local. S’agissant spécifiquement du non-respect de la norme RT 2012, Madame [B] soutient qu’outre la caractérisation d’un vice caché, celle du défaut de délivrance conforme ou du dol est permise. Subsidiairement, elle soutient la responsabilité décennale de Monsieur [U] ou plus encore subsidiairement sa responsabilité pour faute au titre des désordres intermédiaires.

En réponse, Monsieur [U] soutient, qu’outre l’absence de démonstration de manœuvres frauduleuses constitutives du dol, la clause d’exclusion de garantie des vices cachés à vocation à s’appliquer. Il soutient également que le caractère décennal des désordres ne ressort nullement de l’expertise, pas plus d’ailleurs que l’existence d’une faute de sa part.

Réponse du Tribunal,

A titre liminaire, il convient de rappeler que la non-conformité de la chose aux spécifications convenues par les parties est une inexécution de l’obligation de délivrance et ne relève donc pas de la garantie des vices cachés.

Ainsi, la non-conformité à la norme RT 2012 alléguée par Madame [B] doit être distinguée des autres désordres dont elle sollicite l’indemnisation.

En outre, l’existence de manœuvres frauduleuses ou de mensonges ayant vicié le consentement de Madame [B] n’étant aucunement démontrée aux termes de conclusions ne faisant pas état de ces éléments explicitement prévus à l’article 1137 du Code civil, ce fondement sera écarté.

A. Sur les vices cachés

Aux termes de l’article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

En application de l’article 1645 du Code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

En l’espèce, il ne ressort pas des conclusions de Madame [B] que les défauts dont elle se prévaut rendent, ou ont rendu, l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné, en ce qu’elle y habite effectivement sans que l’occupation de certaines pièces ne lui soit interdite.

Pour autant, il n’est pas contestable que les fuites au niveau des puits de lumière ou encore de celles présentes en toiture, causant notamment la dégradation des plafonds et diverses infiltrations constatées par l’expert, diminuent l’usage et la jouissance que Madame [B] a pu ou pourrait avoir de son habitation et l’auraient dissuadé d’en faire l’acquisition ou, à tout le moins, motivé à en offrir un moindre prix.

A ce titre, il ressort de l’acte authentique du 17 mai 2016 que si les parties se sont accordées sur l’exonération de garantie du vendeur s’agissant des vices cachés, c’est à l’exception de la situation ou le vendeur serait réputé ou se serait comporté comme un professionnel de l’immobilier ou de la construction.

Or, il apparait aux termes du rapport d’expertise que, s’agissant de l’installation des puits de lumières et de la pose du parquet, Monsieur [U] a lui-même choisi les matériaux et réalisé les travaux, devant dès lors être réputé comme un professionnel de la construction.

De même, s’agissant des travaux en toiture que Monsieur [U] a fait réaliser par une entreprise dont il n’a pas surveillé ni vérifier le travail, il doit être considéré comme ayant eu un rôle de maître d’œuvre dès lors que ces travaux, d’une importance particulière en ce qu’il touche à l’isolation d’une habitation, s’insèrent dans la réalisation d’un projet immobilier visant à changer l’affection d’un local professionnel en lieu d’habitation qu’il a porté dès son origine aux fins de vendre ledit bien.

Ainsi, Monsieur [U] doit ici être considéré comme un professionnel de l’immobilier, en ce que vendeur occasionnel il s’est comporté comme le maître d’œuvre d’un projet qu’il a pensé et à la réalisation duquel il s’est lui-même impliqué en y réalisant divers travaux.

Il en résulte que Monsieur [U] ne peut se prévaloir de la clause d’exclusion de garantie des vices cachés et que sa responsabilité est engagée pour les désordres relatifs aux puits de lumière, à la fuite en toiture et à ses conséquences sur le plafond du séjour ainsi que ceux relatifs au parquet qui n’étaient pas connus au moment de la vente.

A ce titre, le Tribunal constate que les parties s’accordent sur le montant des réparations tel que retenu par l’expert judiciaire au terme de son rapport.

En conséquence, Monsieur [U] sera condamné à payer à Madame [B] les sommes de :

10.528 € en réparation des désordres des puits de lumière,1.178 € en réparation de la fuite en toiture et ses conséquences sur le plafond du séjour,300 € en réparation des désordres sur le parquet.
B. Sur le défaut de conformité

Vu les articles 1604 et suivants du Code civil ;

En l’espèce, il apparait que le bien vendu par Monsieur [U] l’a été comme respectant la réglementation RT 2012 ainsi que cela résulte du formulaire d’attestation de la prise en compte de la réglementation thermique au dépôt de la demande du permis de construire signée de la main de Monsieur [U].

Or, si l’expert relève en suite des conclusions de son sapiteur Madame [G], comme le souligne Monsieur [U], que « les gardes fous de la réglementation thermique RT 2012 sont respectés », il n’en demeure pas moins que de nombreux travaux doivent être réalisés pour que l’habitation respecte effectivement la réglementation RT 2012, ce dont il résulte que Monsieur [U] a manqué à son obligation de délivrance conforme.

En conséquence, Monsieur [U] sera condamné au paiement des travaux nécessaires à la mise en conformité de l’habitation à la réglementation RT 2012, soit la somme de 6.011 € retenue par l’expert et non contestée par les parties.

II. Sur le préjudice moral

Au soutien de sa demande de dommages et intérêts, Madame [B] fait valoir l’attitude dilatoire de Monsieur [U] tout au long de la procédure, outre les suites des infiltrations et de l’humidité excessive au sein de son logement.

En réponse, Monsieur [U] soutient que les demandes de Madame [B] ne sont pas fondées.

Réponse du Tribunal,

Vu l’article 1231-1 du Code civil ;

En l’espèce, s’il n’est pas démontrée que l’attitude de Monsieur [U] a été purement dilatoire ou qu’il ait fait preuve d’une particulière mauvaise foi à l’origine du préjudice moral dont il est sollicité réparation et relevant par ailleurs que certains éléments relèvent des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, il n’est pas contestable que l’apparition de nombreux désordres du fait des insuffisance de Monsieur [U] dans la réalisation des travaux pour lesquels sa responsabilité a été retenue, et de la nécessité de mettre en œuvre de multiples procédures auprès d’assureur, d’entreprises ou de la Justice, alors même que Madame [B] a acquis un bien venant d’être totalement rénové, est de nature à lui avoir causer un préjudice moral qu’il est équitable d’évaluer à la somme de 5.000 €, somme au paiement de laquelle sera condamné Monsieur [U].

III. Sur les demandes de fin de jugement

Aux termes de l’article 696 du Code de procédure civile, les parties perdantes sont condamnées aux dépens, à moins que le Juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, Monsieur [N] [U], supportera les entiers dépens de l’instance en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile est accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, le Juge condamne les parties tenues aux dépens ou qui perdent leur procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le Juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à ces condamnations.

En l’espèce, Monsieur [N] [U] sera condamné à payer à Madame [J] [B] la somme qu’il est équitable de fixer à 3.000 euros, à défaut de production de justificatifs, au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

En l’espèce, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision, aucun élément justificatif n’étant produit par Monsieur [U] au soutien de sa demande d’exclusion de l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort ;

CONDAMNE Monsieur [N] [U] à payer à Madame [J] [B] les sommes de :

10.528 € en réparation des désordres des puits de lumière,1.178 € en réparation de la fuite en toiture et ses conséquences sur le plafond du séjour,300 € en réparation des désordres sur le parquet,6.011 € pour les travaux nécessaires à la mise en conformité de l’habitation à la réglementation RT 2012,en réparation du préjudice moral ;
CONDAMNE Monsieur [N] [U] à payer à Madame [J] [B] la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [N] [U] aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;

AUTORISE les avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre à faire application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Président, Julien CASTELBOU, et le Greffier, Jessica BOSCO BUFFART.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Chambre 10 cab 10 h
Numéro d'arrêt : 22/04359
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-27;22.04359 ?
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