La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°20/04665

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Chambre 10 cab 10 j, 14 mars 2024, 20/04665


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 J

N° RG 20/04665 - N° Portalis DB2H-W-B7E-VBYD

Jugement du 14 Mars 2024
























Notifié le :




Grosse et copie à :
Me Aurélie GRAIL - 1595
la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS - 716






REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 14 Mars 2024, délibéré prorogé du 07 Mars 2024,

devant la Chambre 10 cab 10 J le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 20 Mars 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 16 Novembre 2023 devant :
...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 J

N° RG 20/04665 - N° Portalis DB2H-W-B7E-VBYD

Jugement du 14 Mars 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :
Me Aurélie GRAIL - 1595
la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS - 716

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 14 Mars 2024, délibéré prorogé du 07 Mars 2024, devant la Chambre 10 cab 10 J le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 20 Mars 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 16 Novembre 2023 devant :

François LE CLEC’H, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assisté de Patricia BRUNON, Greffier,

En présence de Perrine PEREZ, Juriste assistante du magistrat,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

S.A.S. SOLYPER,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Laurent LELIEVRE de la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS, avocats au barreau de LYON

DEFENDEUR

Monsieur [F] [R]
né le 24 Décembre 1971 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Aurélie GRAIL, avocat au barreau de LYON

EXPOSE DU LITIGE
 
Suivant un devis établi le 23 mai 2019, modifié par un devis du 5 septembre 2019 puis par un autre du 4 novembre 2019, la société SOLYPER est intervenu chez Monsieur [F] [R] afin de réaliser des travaux de rénovation de son appartement.
 
Plusieurs factures d’un montant total de 27 306,69 euros TTC ont été émises par la société SOLYPER mais n’ont pas été réglées par Monsieur [R].
 
Par acte d’huissier de justice du 20 juillet 2020, la société SOLYPER a assigné Monsieur [R] afin, pour l’essentiel, d’obtenir le règlement desdites factures impayées.
 
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 janvier 2022, la SAS SOLYPER demande au tribunal de :
-          Condamner Monsieur [R] à payer à la société SOLYPER, à parfaire au jour du délibéré, la somme de 27 306,69 euros à titre principal, avec intérêts égaux à trois fois le taux d’intérêt légal et 80 euros au titre de l’indemnité forfaitaire légale pour les deux factures ;
-          Condamner Monsieur [R] à payer à la société SOLYPER la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
-          Condamner Monsieur [R] à payer à la société SOLYPER la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens ;
-          Débouter Monsieur [R] de l’ensemble de ses demandes et prétentions.
 
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 06 avril 2022, Monsieur [R] demande au tribunal de :
-         Débouter la société SOLYPER de toutes ses demandes infondées et injustifiées ;
-          Condamner la société SOLYPER à payer à Monsieur [R] la somme de 21 298,79 € au titre du coût des travaux de reprises ;
-          Condamner la société SOLYPER à payer à Monsieur [R] la somme de 6500 € en réparation du préjudice de jouissance subi ;
A titre subsidiaire ;  
-          Ordonner la compensation entre la somme réclamée par la société SOLYPER, le coût des travaux de reprise que Monsieur [R] devra supporter et le préjudice de jouissance subi ;
En tout état de cause ;  
-          Condamner la société SOLYPER à payer à Monsieur [R] la somme de 1500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-          Condamner la société SOLYPER aux entiers dépens de l'instance et de ses suites.
 
Par ordonnance du 20 mars 2023, le juge de la mise en état a clôturé la procédure à cette date et fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 16 novembre 2023. L'affaire a été mise en délibéré au 7 mars 2024. Le délibéré a été prorogé au 14 mars 2024.
 
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties visées ci-dessus pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
 

 
            MOTIFS DE LA DECISION
 
Sur la demande en paiement des travaux
 
Selon l’article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
 
L’article 1217 du même code énonce :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
-
refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
 
Aux termes de l’article 1219, une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
 
L’article 1231-1 prévoit que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
 
L’article 1231-5 énonce que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus ni forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
 
En l’espèce, la SAS SOLYPER sollicite le paiement par Monsieur [R] de deux factures pour un montant total de 27 306,69 euros TTC. Elle se prévaut d’une inexécution contractuelle de Monsieur [R] qui n’aurait pas réglé lesdites sommes alors même que les travaux ont été réalisés.
Elle rappelle que les deux factures précisaient les modalités de règlement, dont le fait que des sommes dues étaient exigibles dès la réception des factures. Elle précise aussi que l’échéance prévue pour la première facture de 13 001,12 euros TTC émise le 28 novembre 2019 était le 28 décembre 2019 et celle de la seconde de 14 305,57 euros TTC le 31 décembre 2020. La SAS SOLYPER s’appuie également sur des échanges téléphoniques pour mettre en lumière qu’elle a initié plusieurs tentatives de rencontre avec Monsieur [R] mais qu’elles sont restées vaines.
 
Sur les désordres invoqués par Monsieur [R], la SAS SOLYPER fait valoir qu’outre le fait que la pose de l’isolant sous le carrelage n’était pas prévue par le devis, le défendeur, exerçant par ailleurs une activité de plomberie à titre professionnel, s’est chargé de la fourniture du carrelage et qu’il avait donc connaissance de l’absence de dispositif phonique. La SAS SOLYPER précise que ce procédé est généralement utilisé dans les parties communes des immeubles et rarement chez les particuliers.
En outre, la SAS SOLYPER soutient que les défauts de finition ne justifient pas le refus de paiement de Monsieur [R] et que certains d’entre eux sont en outre hors marché, de sorte qu’il ne peut lui être fait aucun reproche à ce sujet.
La SAS SOLYPER souligne également les conditions dans lesquelles elle a dû exécuter son contrat, et particulièrement les délais courts qui lui ont été imposés et la présence de nombreux ouvriers sur le chantier rendant difficile sa réalisation.
La SAS SOLYPER souligne également une erreur de commande de carrelage par Monsieur [R] qui l’aurait obligé à revenir sur le chantier pour pouvoir procéder aux travaux.  
Sur la ventilation, La SAS SOLYPER rappelle que le devis accepté par Monsieur [R] ne prévoyait pas la réalisation de ce dispositif.
 
De son côté, Monsieur [R] excipe d’une exception d’inexécution. Il justifie son absence de paiement par des malfaçons, objet du constat d’huissier diligenté par lui et réalisé le 28 septembre 2020. Il précise que la SAS SOLYPER a reconnue l’existence de tels désordres dans des échanges de SMS qui sont versés aux débats.
Monsieur [R] souligne, entre autres, l’absence suspectée d’isolation phonique sous le carrelage, ou encore, des défauts de finition de peinture dans le salon. Et il se prévaut de normes applicables en vertu desquelles, même en l’absence de précision sur le devis, il incombe au professionnel de poser un tel isolant. Il considère que la SAS SOLYPER aurait dû, de ce fait et au titre de son devoir de conseil et de son obligation d’information, le prévoir ou, a minima, l’en informer.
Sur les délais d’exécution des travaux, Monsieur [R] indique qu’il appartenait à la SAS SOLYPER de refuser le chantier.
Sur la présence d’ouvriers sur le chantier, le défendeur expose qu’il incombait à la demanderesse d’organiser correctement la bonne tenue du chantier.
Sur la commande du carrelage, Monsieur [R] estime qu’il n’y a pas eu d’erreur et de retard.
Sur la ventilation, Monsieur [R] reproche à la SAS SOLYPER d’avoir bouché la ventilation au cours de la réalisation des travaux de carrelage dans la salle de bain. Il considère qu’en tant que professionnelle, la SAS SOLYPER aurait dû connaître les modalités de réalisation de ces travaux dans la salle de bain, ce qui impliquait de ne pas boucher toutes les ventilations.
 
Enfin, les parties s’opposent sur la qualification des désordres, la SAS SOLYPER considérant qu’il est question de finitions et Monsieur [R] soutenant qu’il s’agit de malfaçons.
 
Il est ici établi par la reconnaissance des parties et par les pièces produites aux débats que les travaux dont la SAS POLYPER demande le paiement ont été réalisés, justifiant la demande en paiement des travaux.
 
Toutefois, comme il vient d’être dit, le défendeur allègue d’une exception d’inexécution qui justifierait qu’il n’aurait à en s’en acquitter. Tel est à cet égard le cas si et seulement si l’inexécution est suffisamment grave pour le justifier.
 
S’agissant en premier lieu des désordres invoqués par Monsieur [R], la preuve de leur existence est rapportée par le constat d’huissier réalisé le 28 septembre 2020 (pièce 1 défendeur) et par les échanges intervenus entre les parties (pièce 9 demanderesse).
 
Néanmoins, et sans qu’il ne soit nécessaire de rentrer dans le débat de qualification soulevé par les parties entre malfaçons et finitions, il n’est pas démontré, au vu des pièces du dossier, qu’ils revêtent une gravité suffisante pouvant justifier le refus de payer de Monsieur [R]. En effet, le constat d’huissier se borne à énoncer la présence de désordres qui ne saurait caractériser une atteinte suffisamment grave pour justifier un défaut de paiement de l’ensemble des travaux par Monsieur [R]. Les désordres relevés par l’huissier (peinture mal réalisée à de nombreux endroits de l’appartement notamment par manque de ratissage, pas de finitions sur les plinthes, des parties de certains murs non peintes notamment dans la cuisine, plusieurs encadrements de porte non repris, grille d’aération tordue dans la chambre de Monsieur [R], des joints du carrelage du hall d’entrée craquelés, ou encore un jour au niveau de la baguette de finition entre la séparation du hall d’entrée et du séjour) sont effectivement d’ordre esthétique, de sorte que leur existence est insuffisante à caractériser la gravité attendue justifiant une exception d’inexécution.
Sur le cas particulier du désordre relatif à la sortie de ventilation de la salle de bain bouchée par la faïence, qui, lui, ne peut être qualifié d’esthétique étant donné qu’il est question d’une ventilation bouchée dans une salle d’eau sans autre ventilation créée, le débat sur le point de savoir si ce désordre se trouve ou non hors du marché constitué par les trois devis de la société SOLYPER importe peu, ce dès lors que, dans l’hypothèse où il ne serait pas hors marché, il serait de toute façon d’une gravité insuffisante pour justifier que Monsieur [R] n’exécute pas son obligation principale, à savoir le paiement du prix des travaux.  
 

S’agissant en second lieu du manquement de la SAS SOLYPER à son obligation d’information et à son devoir de conseil, d’une part, la pièce produite par Monsieur [R] ne démontre pas suffisamment qu’il y a une obligation, en cas de pose d’un carrelage dans l’appartement d’un particulier, de mise en place d’un isolant phonique sous ledit carrelage (pièce 8 défendeur : page internet d’un site dont le nom n’est pas mentionné et intitulée « NRA 2000 : Nouvelle Réglementation Acoustique »).
D’autre part, aucune isolation phonique n’est prévue dans les devis de la SAS SOLYPER. Enfin, c’est Monsieur [R] qui, de son propre chef, a passé la commande relative à la fourniture du carrelage et qui n’a donc pu que constater l’absence de dispositif isolant, absence qu’il a partant eu l’occasion de questionner, ce qu’il n’a pas fait.
Ce moyen tiré du manquement à l’obligation d’information et au devoir du conseil doit donc être écarté
 
Ainsi, les travaux ayant été effectués et aucun manquement n’étant de nature à empêcher Monsieur [R] de payer le prix, la demande de paiement de travaux apparaît justifiée en son principe.
 
Par ailleurs, la SAS SOLYPER requiert du tribunal qu’il condamne Monsieur [R] au paiement d’intérêts de retard et d’une indemnité forfaitaire.
 
Il se prévaut à cet égard de ce qui est stipulé sur les deux factures litigieuses, lesquelles prévoient un intérêt de retard de trois fois le taux légal à compter de l’exigibilité des factures et une indemnité forfaitaire de 40 euros par facture au titre des frais de recouvrement (pièces 6 demandeur).
 
Tout d’abord, il est constant que les stipulations relatives à la fixation de pénalités de retard constituent une clause pénale. En pareille circonstance, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
 
En l’occurrence, tel est le cas dans la mesure où il est prévu qu’en cas de retard de paiement, des intérêts de retard égal à trois fois le taux légal sont exigibles jusqu’au paiement intégral de la facture, ces pénalités étant dues à compter du 1er jour suivant l’échéance des factures.
 
Cette majoration de trois points du taux d’intérêt légal apparaît disproportionnée au regard du préjudice résultant pour la société SOLYPER du non paiement du coût des travaux. En effet, le taux de l’intérêt légal au premier semestre 2024 pour les sommes d’argent dues par un débiteur particulier à un créancier professionnel est de 5,07%. Il sera donc porté à 15,21% s’il est multiplié par 3, ce qui est excessif.
 
Il convient dès lors de réduire la pénalité et de retenir l’intérêt au taux légal, non majoré, et ce à compter de la mise en demeure du 17 mars 2020 (pièce 8 demandeur), étant rappelé qu’il est constant que le juge peut, lorsque la clause pénale porte sur des intérêts moratoires, modifier tant le taux que le point de départ de ces intérêts.  
 
Ensuite, l’indemnité légale forfaitaire de 40 euros due au titre des frais de recouvrement prévue par l’article L. 441-10 du Code de commerce est inapplicable. En effet, un tel dispositif ne concerne que les rapports entre professionnels, ce qui n’est pas le cas ici puisqu’en l’occurrence Monsieur [R] n’intervient pas en qualité de professionnel. Il est, dans ses rapports contractuels à l’égard de la SAS SOLYPER, un particulier, les travaux objet du contrat concernant son domicile personnel. De ce fait, la demande relative à l’allocation de la somme forfaitaire de 40 euros par facture doit être rejetée.
 
En conclusion, Monsieur [R] sera condamné au paiement de 27 306,69 euros à la SAS SOLYPER, assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mars 2020.
 
Sur la demande en paiement des travaux de reprise
 
Aux termes de l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
 

L’article 1217 du même code énonce :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
 
L’article 1231-1 du même code prévoit que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
 
En l’espèce, Monsieur [R] sollicite la condamnation de la SAS SOLYPER au paiement de la somme de 21 298,79 euros. Il fonde l’existence de son préjudice sur la preuve des manquements de la SAS SOLYPER dans la réalisation de sa mission constatée par constat d’huissier du 28 septembre 2020 et son quantum sur la production d’un devis de la société LAPIERRE de 21 298,79 euros.
 
La SAS SOLYPER estime cette somme trop élevée, soulignant que le devis correspond à celui qui a été établi par elle alors même qu’à cette période, l’appartement se trouvait dans un état délabré. Monsieur [R] explique quant à lui que le montant du devis se justifie par le fait que la demanderesse n’a pas ratissé les murs, et qu’il faut donc reprendre l’ensemble des travaux.
 
En défense, la SAS SOLYPER soutient que le ratissage des murs du séjour, du hall, de la cuisine, des couloirs, des trois chambres et des WC sont des postes hors marché puisqu’elle était seulement en charge du ratissage des plafonds.
 
Le constat d’huissier du 28 septembre 2020 produit par Monsieur [R] (pièce 1 défendeur) souligne de nombreux défauts quant aux peintures :
-          dans le hall d’entrée, il est noté par l’huissier que « des reprises de ratissage et de peinture sont à réaliser puisque les murs ne sont ni droits ni lisses » (p.3) ;
-          sur les piliers du salon, le pilier côté cuisine, les murs de renfoncement où se trouve le tableau électrique, le pan de mur frontal délimitant le dressing de la chambre, un même défaut de ratissage est noté (p.5) ;
-          dans la cuisine, il est mentionné que « le mur droit où se trouve l’évier n’a pas été ratissé puisque des défauts d’aspects et des manques de peinture sont visibles », et que « seule la partie haute du mur a été peinte » (p.10) ;
-          dans le salon : des défauts de finition de peinture au niveau des plinthes sont également relevés (p.14) ;
-          dans la chambre de la fille de Monsieur [R] : il est noté des défauts liés aux travaux de peinture (p.15 -16) ;
-          dans la chambre d’amis : « des manques de peinture ou des travaux, voir des accrocs à l’emplacement d’anciens scotchs » sont visibles et côté balcon un « défaut de ratissage des murs » est souligné (p.17) ;
-          dans les WC, un défaut de ratissage est aussi noté ainsi que des gondolements à partir d’1,70 m et jusqu’en partie haute où d’importantes cloques sont en cours de formation (p.18 – 19) ;
-          dans le couloir, il est précisé que « les encadrements ne sont ni traités ni repris », les murs « laissent apparaître des griffures » avec un « défaut de ratissage global » qui est visible (p.21) ;
-          dans la chambre de Monsieur [R], un défaut de ratissage global est constaté et l’huissier note que « les plinthes ont été repeintes sans ponçage ou ont été légèrement poncées mais présentent des défauts ».
 
Il résulte de ces constatations l’existence de manquements de la SAS SOLYPER dans la réalisation des travaux de peinture qui ouvrent droit à réparation à Monsieur [R].
 
A cet égard, l’argument de la SAS SOLYPER qui se prévaut du caractère hors marché du ratissage ailleurs que sur les plafonds doit être écarté. En effet, le devis du 04 novembre 2019 de la SAS SOLYPER (pièce 5 demandeur) détaille le lot peinture, qui concerne l’entrée, la cuisine, le couloir, le séjour, la chambre 1 gauche, la chambre 2 gauche, la salle de bain, les WC, le dressing et la chambre 3. S’il est effectivement fait mention d’une « option : entoilage anciens plafonds : microlith et sous couche/ratissage » pour l’ensemble des plafonds sans que soient visés les murs, il n’en demeure pas moins qu’il est inscrit dans le devis pour la totalité des murs « préparation des supports, masticage, ponçage, lessivage des boiseries ». Ces éléments sont repris dans la facture du 1er décembre 2019 relative au lot peinture (pièce 6 demandeur). En conséquence, la SAS SOLYPER ne peut valablement prétendre que le ratissage des murs étaient hors marché même s’il n’est pas mentionné expressément dans le devis, ce dès lors qu’elle était tenue de la préparation des murs impliquant masticage et ponçage. Le ratissage était donc une étape nécessaire sans laquelle les travaux de peinture ne pouvaient être conformes aux engagements contractuels.
 
Par ailleurs, la SAS SOLYPER ne démontre pas en quoi le devis présenté par le défendeur est excessif (pièce 2 défendeur). En effet, les manquements invoqués par Monsieur [R] sont établis et l’obligent, au vu des désordres, exposés ci-dessus, qu’ils ont entraînés et de leur étendue, à une reprise quasi-totale des travaux de peinture, telle que prévue par le devis présenté par la société LAPIERRE, dont la prétendue connivence soutenue par la SAS SOLYPER avec Monsieur [R] n’est établie par aucun élément.
 
Par conséquent, Monsieur [R] est fondé à obtenir réparation de son préjudice à hauteur de 12 603, 79 euros TTC auprès de la SAS SOLYPER à raison du manquement de cette dernière dans la réalisation des travaux de peinture.
 
En ce qui concerne la demande de réparation au titre du remplacement de la porte d’entrée, Monsieur [R] fonde l’existence de son préjudice sur le constat d’huissier du 28 septembre 2020 venant prouver le manquement de la SAS SOLYPER à ce titre et son quantum sur le devis établi par la société LA CLE LYONNAISE d’un montant de 4100 euros TTC.
 
La SAS SOLYPER fait valoir qu’elle a été contrainte de couper le bas de la porte pour réaliser les travaux au sol, que Monsieur [R] n’a pas fait intervenir de serrurier et que le poste est en tout état de cause hors marché. Elle estime en outre que Monsieur [R] ne démontre pas que le devis fait référence à la porte qui fait l’objet de ses prétentions.
 
En l’occurrence, le constat d’huissier indique que « la porte palière a été recoupée suite à la pose du carrelage » et que « la découpe n’est pas droite » (p.2). Les photos qui accompagnent ce constat témoignent de ce défaut esthétique. Ledit défaut traduit l’existence d’un manquement de la SAS SOLYPER dans sa mission. En effet, si la porte ne fait pas l’objet d’un poste particulier dans les devis établis par elle et les factures produites, il n’en reste pas moins qu’une telle intervention est inhérente aux travaux de sol dont elle était chargée, de sorte que Monsieur [R] est fondé à obtenir la réparation de son préjudice.
 
Le montant de ce dernier peut raisonnablement être estimé à 4100 euros TTC, correspondant à ce qui a été prévu par le devis produit par le défendeur (pièce 3 défendeur), qui mentionne le remplacement d’une porte d’entrée, rendue nécessaire par le manquement constaté de la SAS SOLYPER dans l’exécution de sa mission.
 
S’agissant de la dépose et de la pose de la cuisine, Monsieur [R] se fonde une nouvelle fois sur le constat d’huissier du 28 septembre 2020 pour établir les manquements de la demanderesse sur ce point. Pour le quantum, il communique un devis de 3000 euros TTC de la société DE ARAUJO.
 
La SAS SOLYPER estime ne pas avoir à réparer un tel préjudice, soulignant que le devis présenté par le défendeur ne fait pas état de travaux de reprise mais d’une dépose et d’une pose d’une cuisine, ce qu’elle considère être particulièrement « vaste » et « hors marché ».
 
A cet égard, il a été retenu les manquements de la SAS SOLYPER dans la réalisation des travaux de peinture pour la quasi-totalité des pièces de l’appartement, y compris la cuisine.
 
Or, si, effectivement, il n’appartenait pas à la SAS SOLYPER de poser et déposer la cuisine, ce manquement dans l’exécution des travaux de peinture impose à Monsieur [R] de déposer puis poser à nouveau la cuisine pour une bonne exécution des travaux de réfection de la peinture. 
 
Partant, Monsieur [R] est fondé à demander la réparation de son préjudice.
 
Sur le quantum, le montant de 3000 euros TTC fixé dans le devis de la société DE ARAUJO apparaît raisonnable pour une dépose et une nouvelle pose de la cuisine.
 
A propos de la dépose et de la repose des spots, luminaires et écrans de l’appartement pour reprendre la peinture, Monsieur [R] se fonde toujours sur le constat d’huissier du 28 septembre 2020 pour établir les manquements de la demanderesse sur cet aspect. Pour le quantum, il communique un devis de 1595 euros TTC de la société ESD.
 
La SAS SOLYPER fait valoir le caractère hors marché de ces travaux dont elle ne saurait supporter la charge tandis que Monsieur [R] oppose le fait que de tels travaux sont rendus nécessaires pour la reprise des travaux de peinture.
 
De la même façon que pour la dépose et la repose de la cuisine, une bonne exécution des travaux de réfection de la peinture implique de déposer puis reposer l’ensemble des spots, luminaires et écrans.
 
Ainsi, le coût de cette dépose et de cette repose devra être assumé par la SAS SOLYPER, et il peut être retenu le montant du devis de la société ESD, soit 1595 euros TTC.
 
Par ailleurs, la SAS SOLYPER fait également valoir, pour s’opposer au paiement des travaux de reprise, que Monsieur [R] instrumentalise l’action pour faire réaliser des travaux supplémentaires à ses frais. Elle se prévaut de la date d’émission des devis, lesquels sont postérieurs à l’assignation délivrée à Monsieur [R]. Elle souligne également que six mois après la livraison du chantier, Monsieur [R] a envoyé une proposition de règlement de 4084 euros TTC qu’il n’a jamais honoré et que six mois plus tard il adopte une position contraire en réclamant la somme de 21 298, 79 euros TTC.
Monsieur [R] se défend de toute instrumentalisation de la procédure, expliquant que la SAS SOLYPER n’a pas accepté sa proposition de règlement, qui doit s’analyser comme une proposition transactionnelle avant procédure et qu’ainsi, la SAS SOLYPER l’ayant assigné, il a entendu obtenir l’indemnisation de son entier préjudice.
Le manque de cohérence soulevée par la SAS SOLYPER dans le comportement de Monsieur [R] n’est ni démontré ni de nature à pouvoir le priver de son droit à réparation, lequel est acquis par l’établissement des manquements de cette dernière dans la réalisation des travaux.
 
En conséquence, au regard de l’ensemble de ces développements, la SAS SOLYPER sera condamnée à payer à Monsieur [R] la somme totale de 21 298,79 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise.
 
Sur le préjudice de jouissance
 
Aux termes de l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
 
L’article 1217 du même code énonce :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
-
refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
 
L’article 1231-1 du même code prévoit que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
 
En l’espèce, Monsieur [R] sollicite la condamnation de la SAS SOLYPER à hauteur de 6500 euros au titre d’un préjudice de jouissance résultant des manquements de cette dernière.
 
La SAS SOLYPER souligne à cet égard ce qu’elle estime être un manque de cohérence et d’honnêteté de Monsieur [R] qui n’a pas accusé réception du chantier, ni souhaité que la société SOLYPER effectue des finitions, en dépit de plusieurs sollicitations de rendez-vous initiées par elle. Sur ce point, elle met en exergue que les devis et le constat d’huissier ont été établis près d’un an après l’aménagement de Monsieur [R] et de sa famille.
 
S’il a été établi l’existence de manquements contractuels de la SAS SOLYPER, les défauts relevés ne sont pas de nature à empêcher Monsieur [R] et sa famille de jouir normalement de leur appartement.
 
En conséquence, Monsieur [R] sera débouté de sa demande au titre de la réparation d’un préjudice de jouissance.
 
Sur la compensation
 
Aux termes de l’article 1347 du code civil, la compensation est l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. Elle s’opère, sous réserve d’être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.
 
Selon l’article 1347-1 du même code, la compensation n’a lieu qu’entre obligations fongibles, certaines, liquides et exigibles.
 
L’article 1348 prévoit que la compensation peut être prononcée en justice. A moins qu’il n’en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses effets à la date de la décision.
 
En l’espèce, à titre subsidiaire, Monsieur [R] sollicite la compensation entre la somme réclamée par la société SOLYPER et le coût des travaux de reprise ainsi que le préjudice de jouissance subi par lui.
 
La SAS SOLYPER ne formule aucune observation à cet égard, si ce n’est de constater, en son dispositif, qu’elle dispose d’une créance certaine, liquide et exigible de 27 306,69 euros TTC à l’égard de Monsieur [R].
 
La compensation suppose l’existence de dettes réciproques de débiteurs qui soient fongibles, certaines, liquides et exigibles.
 
En l’occurrence, il a été établi que la SAS SOLYPER détient une créance de 27 306,69 euros TTC à l’égard de Monsieur [R] et que Monsieur [R] détient une créance de 21 298,79 euros TTC à l’égard de la SAS SOLYPER.
 
Les deux créances étant certaines, liquides et exigibles il y a lieu d’ordonner la compensation, à la date de la présente décision, entre ces créances, et de condamner en conséquence Monsieur [R] à verser à la SAS SOLYPER le reliquat demeurant après cette compensation, soit la somme de 6007,86 euros TTC, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mars 2020.
 

Sur la résistance abusive
 
Aux termes de l’article 1240 du Code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
           
En l’espèce, la SAS SOLYPER ayant été condamnée au titre du coût des travaux de reprise, sa demande de condamnation au versement de dommages et intérêts pour résistance abusive ne peut prospérer.
 
En conséquence, cette demande sera rejetée.
 
Sur les demandes accessoires
 
Monsieur [R] sera condamné aux dépens.
 
Tenu des dépens, il sera également condamné à verser à la SAS SOLYPER la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
 
Monsieur [R] sera débouté de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
 
En vertu de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version issue du décret du 11 décembre 2019 et applicable à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
 
 
PAR CES MOTIFS,
 
Le Tribunal, statuant à juge unique, après audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
 
CONDAMNE Monsieur [F] [R] à verser à la SAS SOLYPER la somme de 27 306,69 euros TTC, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mars 2020 ;
 
DEBOUTE la SAS SOLYPER de sa demande de condamnation au titre de l’indemnité forfaitaire légale pour les deux factures ;
 
CONDAMNE la SAS SOLYPER à verser à Monsieur [F] [R] la somme de 21 298,79 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise ;
 
DEBOUTE Monsieur [F] [R] de sa demande au titre de la réparation du préjudice de jouissance ;
 
ORDONNE la compensation, à la date de la présente décision, entre la somme de 27 306,69 euros TTC due par Monsieur [F] [R] à la SAS SOLYPER et celle de 21 298,79 euros TTC due par la SAS SOLYPER à Monsieur [F] [R] ;
 
CONDAMNE en conséquence Monsieur [F] [R] à payer la SAS SOLYPER la somme de 6007,86 euros TTC, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mars 2020 ; 
 
DEBOUTE la SAS SOLYPER de sa demande de réparation au titre d’une résistance abusive ;
 
CONDAMNE Monsieur [F] [R] aux dépens ;
 
CONDAMNE Monsieur [F] [R] à verser à la SAS SOLYPER la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
 
DEBOUTE Monsieur [F] [R] de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
 
RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire.
 
En foi de quoi le Président et le Greffier ont signé la présente décision.
 
LA GREFFIERE                                                                     LE PRESIDENT
Patricia BRUNONFrançois LE CLEC’H


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Chambre 10 cab 10 j
Numéro d'arrêt : 20/04665
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;20.04665 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award