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12/03/2024 | FRANCE | N°21/03815

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Chambre 10 cab 10 h, 12 mars 2024, 21/03815


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 21/03815 - N° Portalis DB2H-W-B7F-V5RX

Jugement du 12 mars 2024
























Notifié le :




Grosse et copie à :

Maître Cédric DROUIN - 1436
Maître Hervé BARTHELEMY de la SELARL PBO AVOCATS ASSOCIES - 44
Maître Sébastien BOURILLON de la SELARL URBAN CONSEIL - 2419





REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant pu

bliquement et en premier ressort, a rendu, le 12 mars 2024 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 05 juin 2023, et que la cause eut été débat...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 21/03815 - N° Portalis DB2H-W-B7F-V5RX

Jugement du 12 mars 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :

Maître Cédric DROUIN - 1436
Maître Hervé BARTHELEMY de la SELARL PBO AVOCATS ASSOCIES - 44
Maître Sébastien BOURILLON de la SELARL URBAN CONSEIL - 2419

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 12 mars 2024 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 05 juin 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 01 février 2024 devant :

Marlène DOUIBI, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assistée de Jessica BOSCO BUFFART, Greffier,

En présence de Perrine PEREZ, Juriste assistante du magistrat,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDEUR

Monsieur [C] [W] [X], exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION
demeurant [Adresse 4]

représenté par Maître Hervé BARTHELEMY de la SELARL PBO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

DEFENDERESSES

S.A.S. BMC DEVELOPPEMENT
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Cédric DROUIN, avocat au barreau de LYON

S.C.I. MC8588
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Sébastien BOURILLON de la SELARL URBAN CONSEIL, avocats au barreau de LYON, et Maître Florence DAVID de la SELARL URBAN CONSEIL, avocats au barreau de VIENNE

EXPOSE DU LITIGE

La société civile immobilière MC8588 (ci-après “SCI MC8588") a entrepris un projet de réhabilitation d’un tènement immobilier sur les parcelles cadastrées sections [Cadastre 5], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] sur la commune de [Localité 7]. A l’appui dudit projet, elle a obtenu un permis de construire numéroté PC 069 249 19 00007 délivré le 16 mai 2019 par la mairie de [Localité 6] et modifié par arrêté municipal daté du 30 avril 2020.

Selon devis établi le 15 mai 2020, l’exécution des travaux de maçonnerie a été confiée à Monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel.

Courant février 2021, la SCIMC8588 a été alertée par un membre du voisinage de la hauteur problématique du bâtiment nouvellement édifié.

A défaut de résolution du litige subséquent et en considération de la lettre d’observation adressée le 21 avril 2021 par la commune de THURINS, la SCI MC8588 a mis en demeure monsieur [W] [X] de reprendre l’exécution du marché par courrier émis le 10 mai 2021. Aucune réponse satisfaisante n’y étant apportée dans les délais impartis, la SCI MC8588 a finalement notifié à monsieur [W] [X] la résiliation dudit marché par écrit adressé le 25 mai 2021 et l’a convoqué le 1er juin 2021 sur les lieux de l’opération, aux fins de procéder aux constations relatives aux ouvrages exécutés, outre à l’inventaire descriptif du matériel et des installations présentes. Un procès-verbal de constat d’huissier de justice a été établi à cette fin par Maître [H] [P].

C’est dans ce contexte que par actes d’huissier de justice signifiés le 9 juin 2021, monsieur [W] [X] a fait assigner les sociétés BMC DÉVELOPPEMENT et MC8588 devant le tribunal judiciaire de LYON aux fins, pour l’essentiel, d’obtenir le règlement des factures impayées et l’indemnisation des préjudices allégués.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 août 2022, auxquelles il sera expressément renvoyé pour un plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises, monsieur [W] [X] demande au tribunal de :
dire et juger que la SCI MC 8588 est seule responsable de la non-conformité des travaux réalisés au permis de construire,dire et juger que rien ne s’oppose au paiement de ses factures impayées à celui-ci pour un montant de 34.102,62 euros,condamner la SCI MC 8588 à lui payer la somme de 34.102,62 €, outre intérêts depuis le 5 mars 2021, débouter les sociétés JFT DÉVELOPPEMENT et SCI MC 8588 de toutes prétentions,condamner la SCI MC 8588 à lui payer, à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues, la somme de 3.000,00 euros,condamner la SCI MC 8588 à lui payer, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 4.000,00 euros,condamner la SCI MC 8588 aux entiers dépens distraits au profit de Me Hervé BARTHELEMY, avocat, sur son affirmation de droit.
Reprenant les dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil, monsieur [W] [X] affirme qu’il a exécuté les travaux de maçonnerie en toute bonne foi et conformément à la commande passée par les sociétés BMC DÉVELOPPEMENT et MC8588, auxquelles il reproche d’avoir refusé toute communication des plans côtés en hauteur. Il estime, en ce sens, que les sociétés précitées ne peuvent se prévaloir d’une non-conformité des travaux au permis de construire pour échapper au paiement des factures des prestations, d’un montant total de 34.102,62 euros. Il souligne, par ailleurs, qu’il a gracieusement proposer d’araser les murs de l’étage, afin de mettre en conformité le bâtiment, mais qu’il s’est heurté au refus des parties défenderesses. Il relève qu’il ne peut lui être opposé l’exception d’inexécution, dès lors qu’aucun manquement ne peut lui être imputé. Estimant que les sociétés BMC DÉVELOPPEMENT et MC8588 sont seules responsables de la situation litigieuse, il en déduit qu’elles ne peuvent faire valoir de préjudice.
A l’inverse, il expose que la particulière mauvaise foi de la SCI MC8588 a généré un important préjudice financier, le non-paiement des factures ayant obéré la trésorerie de l’entreprise JFT CONSTRUCTION dont il assure la gestion.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 décembre 2022, auxquelles il sera expressément renvoyé pour un plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises, la société civile immobilière MC8588 demande au tribunal de :
rejeter la demande de paiement des factures présentées par monsieur [W] [X] pour un montant de 34.102, 62 euros,rejeter la demande de paiement de dommages et intérêts présentées par monsieur [W] [X] pour un montant de 3.000, 00 euros,rejeter la demande de paiement de la somme de 4.000,00 euros présentées par monsieur [W] [X] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,condamner monsieur [W] [X] à lui payer la somme de 21.700,00 euros au titre de la différence demeurant à sa charge,condamner monsieur [W] [X] à lui payer la somme de 13.200,00 euros au titre du préjudice commercial,rejeter monsieur [W] [X] à lui payer la somme de 15.000,00 euros au titre du préjudice moral,condamner monsieur [W] [X] aux entiers dépens et à lui verser la somme de 2.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Se fondant sur les dispositions des articles 1224 et 1227 code civil, la SCI MC8588 soutient que monsieur [W] [X] a commis une faute d’une extrême gravité en édifiant un bâtiment non conforme au permis de construire modificatif délivré par la mairie de [Localité 6]. Signalant que les prestations exécutées par la société JFT CONSTRUCTIONS ont d’ores et déjà été anéanties par la démolition de l’édifice litigieux, elle estime, au visa de l’article 1229 du code civil, qu’il ne peut lui être demandé le règlement des factures impayées.
Subsidiairement, elle soutient, à l’appui des dispositions de l’article 1219 du code civil, qu’elle peut légitimement refuser de payer le solde des travaux dans la mesure où la gravité des défaillances imputables à monsieur [W] [X] l’a contraint à missionner un second entrepreneur pour démolir et reconstruire l’ouvrage.
Ecartant toute faute personnelle, elle reporte la responsabilité sur monsieur [W] [X] pour ne pas l’avoir alertée de la nécessité d’obtenir une autorisation d’urbanisme et pour ne pas avoir sollicité, en amont de l’ouverture du chantier, les documents nécessaires à son exécution.
Elle sollicite, à titre reconventionnel et au visa de l’article 1231-1 du code civil, l’indemnisation des frais supplémentaires induits par la démolition-reconstruction de l’ouvrage, de la perte locative sur une durée de douze mois correspondant à la réception retardée du chantier et d’un préjudice moral caractérisé par l’atteinte portée à sa réputation auprès du voisinage et de la mairie de [Localité 6].

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 janvier 2023, auxquelles il sera expressément renvoyé pour un plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises, la société BMC DÉVELOPPEMENT demande au tribunal de :
débouter monsieur [W] [X] de l’ensemble de ses demandes formées à son encontre,condamner le même aux entiers dépens de l’instance et à lui verser la somme de 2.500,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour exclure toute responsabilité, la société BMC DÉVELOPPEMENT observe que monsieur [W] [X] ne démontre pas l’existence d’un quelconque lien contractuel et ne formule finalement pas demande de condamnation la visant nommément dans le dispositif de ses dernières conclusions. Si elle reconnaît que les plans dessinés par monsieur [D] ont été adressés à monsieur [W] [X] sous sa propre adresse générique, elle précise qu’il ne peut en être déduit une implication personnelle à l’acte de construction, l’expéditeur, soit monsieur [Z] [G], assurant concomitamment les fonctions de dirigeant des sociétés BMC DÉVELOPPEMENT et MC8588. Elle souligne, au surplus, que monsieur [W] [X] a systématiquement transmis les factures de travaux à la SCI MC8588, seul maître de l’ouvrage du chantier de réhabilitation.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 5 juin 2023. L'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoirie en formation à juge unique du 1er février 2024, à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré au 12 mars 2024.

MOTIVATION

A titre liminaire, il est rappelé qu'en application des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. De plus, en vertu de l'article 768 dudit code, le tribunal statue sur les seules prétentions énoncées au dispositif et examine uniquement les moyens invoqués dans la discussion. Les demandes de “déclarer”, “dire et juger”, “constater”, “prendre acte” ou de “préserver des droits” ne constituant pas, sauf exceptions liées à une rédaction erronée de la demande, des revendications au sens du code de procédure civile, le juge ne se trouve pas tenu d'y répondre.

En parallèle, il est observé que monsieur [W] [X] ne formule aucune demande de condamnation à l’encontre de la société BMC DÉVELOPPEMENT, également attraite à la présente cause.

Sur les demandes de paiement formées par monsieur [W] [X]
Sur la demande de paiement du solde des travaux
Afin de préserver la cohérence et l’intelligibilité du raisonnement juridique développé infra, il sera concomitamment apporté une réponse à la demande de paiement présentée par monsieur [W] [X] et aux demandes reconventionnelles opposées par la société MC8588.

Sur la demande reconventionnelle de résolution judiciaire opposée par la société MC8588
Aux termes de l’article 1224 du code civil, “la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.”

Les dispositions de l’article 1227 dudit code permettent par ailleurs de solliciter, en toute hypothèse, la résolution par voie judiciaire, pourvu que l’inexécution contractuelle dénoncée présente un degré de gravité suffisant.

En l’occurrence, il ressort de la pièce n°1 produite par la société MC8588 qu’il lui a initialement été accordé un permis de construire n°PC 069 249 00007 par le Maire de [Localité 6] aux fins de rénover un bâtiment existant sur des parcelles cadastrées section [Cadastre 5] à [Cadastre 3].

Monsieur [W] [X] s’étant inquiété, par courrier électronique adressé par le 3 mars 2020 à monsieur [G], de l’état de vétusté de la maison à réhabiliter (pièce n°3 de la société MC8588), la société BMC DÉVELOPPEMENT a conséquemment déposé un dossier modificatif de permis de construire daté du 9 mars 2020, aux termes duquel elle a indiqué qu’il lui semblait préférable de “démolir [le] bâtiment et de le reconstruire à l’identique (sauf les ouvertures prévues dans le PC de base)” eu égard au “très mauvais état” des murs et de la charpente.

Par suite, monsieur [W] [X] a établi le 15 mai 2020 un devis d’estimation excluant les prestations de démolition et de terrassement, sur la base des plans élaborés par monsieur [O] [D], assistant à maître d’ouvrage (pièces n°1 et n°2 de monsieur [W] [X]).

Or, il n’est pas démontré que monsieur [W] [X] a été informé de la nécessité de reconstruire “à l’identique” le bâtiment, soit selon une hauteur à l’égout de 5,60 mètres, ni le devis ni les plans précités ne mentionnant une telle hauteur. Il n’est pas davantage prouvé par la société MC8588 qu’elle a porté à la connaissance de monsieur [W] [X] le permis de construire modificatif et le détail du projet de rénovation, dont notamment les plans de coupe précisant la hauteur du bâtiment.

En conséquence, la société MC8588 ne peut reprocher à monsieur [W] [X] le non-respect de préconisations qui n’ont pas été définies contractuellement.

Il ne peut davantage être fait grief à monsieur [W] [X] d’avoir refusé d’entreprendre à ses frais la démolition intégrale et la reconstruction à l’identique de l’édifice, cette prestation n’étant pas prévue dans le contrat initial.

A défaut de manquement avéré, la société MC8588 sera in fine déboutée de sa demande de résolution du marché de travaux.

Sur l’exception d’inexécution
En application de l’article 1219 du code civil, “une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.”

Il a d’ores et déjà été démontré supra que le marché de travaux confié à monsieur [W] [X] ne prévoyait pas expressément la reconstruction à l’identique du bâtiment numéroté un sur une hauteur à l’égout de 5,60 mètres, de sorte qu’il ne peut être retenu à son encontre une inexécution d’une gravité suffisante pour justifier le non-paiement du solde par la société MC8588.

Sur les factures impayées
L’article 1103 du code civil énonce que “les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.”

L’article 1104 du code susdit prévoit par ailleurs que “les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.”

En l’occurrence, il résulte du devis en date du 15 mai 2020 que les parties sont convenus de l’exécution du marché de travaux moyennant un coût total de 125.414,77 euros.

La société MC8588 ne contestant pas le défaut de paiement du solde, elle sera conséquemment condamnée à verser à monsieur [W] [X] les sommes suivantes :
- 3.000,00 euros TTC en règlement de la facture n°FA00452 datée du 3 novembre 2020 ;
- 25.870,98 euros en règlement de la facture n°FA00473 datée du 31 janvier 2021 ;
- 5.231,64 euros en règlement de la facture n°FA00473 datée du 22 février 2021.

Sur la demande de paiement de dommages et intérêts
L’article 1104 du code susdit prévoit que “les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.”

A cet égard, aux termes de l’article 1231-1 dudit code, “le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.”

Monsieur [W] [X] ne démontrant pas la réalité des difficultés de trésorerie, la demande d’indemnisation formée à ce titre sera rejetée.

Sur les demandes reconventionnelles d”indemnisation présentées par la société MC8588
Aux termes de l’article 1231-1 dudit code, “le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.”

Or, quelle que soit la qualification du contrat, tout professionnel de la construction est tenu, avant réception, d'une obligation de conseil et de résultat envers le maître de l'ouvrage.

En l’occurrence, il a été précédemment jugé que monsieur [W] [X] n’a pas contrevenu aux prestations définies contractuellement, à défaut de mention expresse sur les plans communiqués par le maître de l’ouvrage des hauteurs sous plafond et à l’égout attendues. Il a également été observé que la société MC8588 ne rapporte pas la preuve d’une transmission effective du permis de construire et des plans complets annexés à l’entrepreneur.

En revanche, il pouvait légitimement être attendu de monsieur [W] [X] qu’il s’assure personnellement, avant l’ouverture du chantier, des hauteurs sous plafond des différents niveaux et qu’il alerte la société MC8588 d’une éventuelle non-conformité aux dispositions du permis de construire.

A cet égard, si monsieur [W] [X] soutient qu’il a sollicité à plusieurs reprises auprès du maître de l’ouvrage la communication des plans de façade côtés, il n’apporte pas d’élément probant à l’appui de cette assertion.

Il y a donc lieu de retenir un manquement fautif à l’encontre de monsieur [W] [X].

Sur le plan indemnitaire, la SCI MC8588 demande, en premier lieu, l’indemnisation des frais supplémentaires supportés aux fins de mettre en conformité l’ouvrage avec les dispositions du permis de construire modificatif accordé par la mairie de [Localité 6].

Il apparaît effectivement que la solution amiable proposée par monsieur [W] [X], soit l’arasement de la hauteur litigieuse à ses frais, aurait “mis à mal” le projet d’aménagement des combles en trois chambres, une salle de bain et un cabinet de toilettes. Il est rappelé que si l’article 4 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, pris dans la version en vigueur du 31 janvier 2002 au 01 juillet 2021, impose une hauteur sous plafond et une surface habitable minimales à la pièce principale d’un logement, l’aménagement des combles n’est pas soumis au respect d’une hauteur particulière. Pour autant, il est difficilement imaginable de rendre habitable une surface réduite à une hauteur sous faîtage de 1,50 mètres par l’arasement des murs.

En ce sens, la société MC8588 est bien fondée à solliciter l’indemnisation des frais de démolition-reconstruction directement imputables au défaut de vérification par monsieur [W] [X] des hauteurs de plafond applicables.

Monsieur [W] [X] sera conséquemment condamné à payer la somme de 21.288,73 euros à la société MC8588, ce conformément à la facture n° FAC2021146 éditée le 29 novembre 2021 par la société VIEIRA (les deux autres factures produites ayant trait à des prestations distinctes - pièce n°18 de la société MC8588).

La société MC8588 requiert également l’indemnisation d’un préjudice commercial tenant à une perte locative sur une durée de douze mois.

Si elle évalue la valeur locative de l’appartement à une somme mensuelle de 1.100,00 euros, elle ne produit pas d’estimations immobilières à l’appui. En outre, elle ne démontre pas qu’il était initialement prévu une finalisation des travaux au mois de février 2021.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande d’indemnisation d’un préjudice commercial.

De même, la société MC8588 ne prouve pas d’une part qu’il a été porté atteinte à sa réputation, d’autre part que cela a généré un préjudice particulier.

De ce fait, la demande d’indemnisation afférente sera rejetée.

Sur les frais du procès et sur l’exécution provisoire
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, “la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie."

En outre, l'article 699 dudit code dispose que les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision. La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens.

La société MC8588 et monsieur [W] [X] succombant toutes deux partiellement en leurs demandes respectives, les dépens de l’instance seront partagés à hauteur de 50% à la charge de la société MC8588 et 50% à la charge de monsieur [W] [X].

De plus, il sera accordé à Maître Hervé BARTHELEMY le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Au regard de l’équité, les demandes formées par la société MC8588, la société BMC DÉVELOPPEMENT et monsieur [W] [X] au titre des frais irrépétibles seront rejetées.

Plus précisément, s’il apparaît que monsieur [W] [X] n’a finalement formulé aucune demande de condamnation à l’encontre de la société BMC DÉVELOPPEMENT, il a pu légitimement être induit en erreur par le flou entretenu sur les missions respectives des deux sociétés dirigées par monsieur [G] et monsieur [K], les permis de construire et le dossier modificatif étant au nom de la société BMC DÉVELOPPEMENT, ce de même que certains courriers électroniques adressés à monsieur [W] [X].

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il est rappelé l’exécution provisoire du présent jugement.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant publiquement après débats publics par jugement contradictoire rendu en premier par mise à disposition au greffe,

REJETTE la demande de la société civile immobilière MC8588 tendant à obtenir la résolution judiciaire du marché de travaux conclu avec monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION ;

CONDAMNE la société civile immobilière MC8588 à payer à monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, la somme totale de 34.102,62 euros toutes taxes comprises en règlement du solde de marché de travaux ;

DÉBOUTE monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société civile immobilière MC8588 à lui payer la somme de 3.000,00 euros à titre de dommages-intérêts ;

CONDAMNE monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, à payer à la société civile immobilière MC8588 la somme de 21.288,73 euros toutes taxes comprises au titre des frais de reprise de la maison édifiée ;

REJETTE la demande de la société civile immobilière MC8588 tendant à obtenir la condamnation de monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, à l’indemniser d’un préjudice commercial de 13.200,00 euros ;

REJETTE la demande de la société civile immobilière MC8588 tendant à obtenir la condamnation de monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, à l’indemniser d’un préjudice moral de 15.000,00 euros ;

PARTAGE les dépens de l’instance à hauteur de 50% à la charge de la société civile immobilière MC8588 et de 50% à la charge de monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION ;

ACCORDE à Maître Hervé BARTHELEMY le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure ;

REJETTE les demandes formées par la société par actions simplifiée BMC DÉVELOPPEMENT, société civile immobilière MC8588 et monsieur [C] [W] [X], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne JFT CONSTRUCTION, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE l’exécution provisoire du présent jugement ;

REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires ;

En foi de quoi la Présidente et la Greffière ont signé la présente décision.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE
Jessica BOSCO BUFFARTMarlène DOUIBI


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Chambre 10 cab 10 h
Numéro d'arrêt : 21/03815
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;21.03815 ?
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