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07/03/2024 | FRANCE | N°21/02637

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Chambre 10 cab 10 h, 07 mars 2024, 21/02637


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 21/02637 - N° Portalis DB2H-W-B7F-VZO4

Jugement du 07 mars 2024
























Notifié le :




Grosse et copie à :

Me Thierry DUMOULIN - 261
Me Emeline THOMAS - 1275






REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 07 mars 2024 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contr

adictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 06 mars 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 07 décembre 2023 devant :

Marlène DOUIBI, Président,
siégeant en forma...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 21/02637 - N° Portalis DB2H-W-B7F-VZO4

Jugement du 07 mars 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :

Me Thierry DUMOULIN - 261
Me Emeline THOMAS - 1275

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 07 mars 2024 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 06 mars 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 07 décembre 2023 devant :

Marlène DOUIBI, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assistée de Jessica BOSCO BUFFART, Greffier,

En présence de Perrine PEREZ, Juriste assistante du magistrat,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

S.C.I. AB
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON

DEFENDERESSE

S.A.S. AIR SYSTEME CONTROLE
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Emeline THOMAS, avocat au barreau de LYON

EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé signé le 1er avril 2017, la société civile immobilière AB (ci-après “SCI AB”) a consenti un bail commercial à la société par actions simplifiée AIR SYSTEME CONTROLE (ci-après “SAS AIR SYSTEME CONTROLE”) pour une durée de neuf années à compter du 1er avril 2017 au 31 mars 2026 sur un local à usage commercial de 160 m² situé au [Adresse 1] (69) moyennant un loyer annuel de 3.672,00 euros.
Le 3 juillet 2020, la SCI AB a fait réaliser un procès-verbal d’huissier de justice aux fins de constater divers manquements de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE à ses obligations contractuelles.
Par acte extrajudiciaire en date du 22 septembre 2020 , la SCI AB a fait délivrer à la SAS AIR SYSTEME CONTROLE un commandement de payer visant la clause résolutoire.
Par ordonnance du 22 octobre 2020, le Président du tribunal judiciaire Lyon a autorisé la SCI à faire procéder à un constat d’huissier afin de constater les manquements allégués du preneur, lequel a finalement été exécuté le 3 décembre 2020.
Par acte extrajudiciaire du 9 avril 2021, la SCI AB a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Lyon la SAS AIR SYSTEME CONTROLE aux fins de voir :
juger acquise la clause résolutoire insérée dans le bail pour prendre effet au 22 octobre 2020,juger résilier le contrat de bail du 1er novembre 2017 aux torts exclusifs de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE,juger que le dépôt de garantie restera acquis à la SCI AB,prononcer la résiliation du contrat de bail du 1er avril 2017 aux torts exclusifs de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE,ordonner l’expulsion, condamner la défenderesse à payer la somme de 700,00 euros au titre de l’indemnité de résiliation,condamner la SAS AIR SYSTEME CONTROLE à la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,condamner la SAS AIR SYSTEME CONTROLE aux entiers dépens.
Par acte notarié du 30 avril 2021, la SCI AB a vendu le local commercial à la SCI FLASH. Consécutivement, elle a souhaité se désister de l’instance, ce qui a été refusé par la SAS AIR SYSTEME CONTROLE. Elle a alors formé une demande additionnelle. Pour l’essentiel, elle demande le paiement de dommages et intérêts au titre des manquements de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE intervenus en cours de bail.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées le 27 février 2023, auxquelles il sera expressément renvoyé pour un plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises, la SCI AB demande au tribunal de :
débouter la SAS AIR SYSTEME CONTROLE de l’ensemble de ses prétentions et demandes,condamner la SAS AIR SYSTEME CONTROLE à lui payer : 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ; 3.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner la SAS AIR SYSTEME CONTROLE aux entiers dépens, dont les frais du commandement de payer et des deux constats d’huissier de justice du 3 juillet 2020 et du 3 décembre 2020.
* * *

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées le 22 décembre 2022, auxquelles il sera expressément renvoyé pour un plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises, la SAS AIR SYSTEME CONTROLE demande au tribunal de :
débouter la SCI AB de l’ensemble de ses demandes fins et prétentions ; condamner la SCI AB à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts ; condamner la SCI AB à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile ; condamner la SCI AB aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 06 mars 2023. L’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie en formation à juge unique du 07 décembre 2023, à l’issue de laquelle la décision a été mise en délibéré au 7 mars 2024.

MOTIVATION

Sur la demande en réparation présentée par la SCI AB
Aux termes de l’article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou l’a été imparfaitement peut demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Selon l’article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

Si l’inexécution contractuelle ouvre droit à réparation au débiteur, l’inexécution n’entraîne pas de plein droit une obligation à réparation, de sorte que le créancier doit également démontrer la nature et l’étendue du préjudice subi afin d’obtenir l’octroi de dommages et intérêts.

La SCI AB requiert la condamnation de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE au paiement de 5.000,00 euros à titre de réparation du préjudice subi, lequel s’inférerait des manquements contractuels du preneur qui l’aurait contrainte à mobiliser son temps pour en obtenir le respect, l’emanant, in fine, à vendre son bien.

Néanmoins, la SCI AB ne rapporte la preuve ni de l’existence de son préjudice ni de son étendue.
En effet, les démarches entreprises par la SCI AB contre la SAS AIR SYSTEME CONTROLE n’apparaissent pas justifiées par un quelconque manquement. Le projet de résolution amiable du bail commercial du 29 juin 2019 (pièce n°3 défendeur) énonce seulement que la résiliation interviendra à compter du 25 décembre 2019, sans qu’une quelconque indemnité ne soit exigible de part et d’autre. Ce n’est que dans un second temps, après que la SAS AIR SYSTEME CONTROLE a manifesté son intention de réclamer une indemnité d’éviction (pièce n°4 défendeur), que la SCI AB a mandaté un huissier de justice le 3 juillet 2020 aux fins de faire constater les manquements allégués, puis a fait délivrer le 22 septembre 2020 un commandement visant la clause résolutoire à l’encontre de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE.

En outre, il s’avère que la seconde mesure de constat d’huissier de justice du 3 décembre 2020, autorisée par ordonnance du juge des référés près le tribunal judiciaire de LYON du 22 octobre 2020, avait pour finalité de mettre un terme au bail commercial et non de mettre fin aux manquements allégués du preneur. En effet, la SCI AB se prévalait alors de l’acquisition de la clause résolutoire au 22 octobre 2020 et précisait conséquemment qu’elle se trouvait en droit de poursuivre la résiliation judiciaire du bail litigieux aux torts de son preneur.

Il s’infère des éléments exposés que la SCI AB requiert l’indemnisation d’un investissement personnel qui ne saurait constituer un préjudice réparable et dont l’étendue n’est, au surplus, pas démontrée.

En conséquence, et sans qu’il ne soit nécessaire de statuer sur la réalité des manquements allégués, la SCI AB sera déboutée de sa demande de réparation formée contre la SAS AIR SYSTEME CONTROLE.

Sur la demande reconventionnelle en réparation formée par la SAS AIR SYSTEME CONTROLE
Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il appartient au demandeur d’établir à l’égard de celui qu’il entend obliger à réparer l’existence d’une faute, d’un préjudice réel et certain et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage.

En l’espèce, la SAS AIR SYSTEME CONTROLE sollicite la condamnation de la SCI AB au paiement de 10.000,00 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive. Elle fait valoir qu’au regard des éléments chronologiques de l’affaire, la SCI AB aurait agi afin de pouvoir rompre le contrat de bail en vue de la vente de son local sans avoir à s’acquitter d’une indemnité d’éviction. Outre la mauvaise foi du bailleur, elle considère également que la procédure est injustifiée et infondée, dès lors que la SCI AB a introduit l’instance au 9 avril 2021 en parfaite connaissance de la cession future de son local, laquelle est finalement intervenue le 30 avril2021. Elle rapporte, en outre, la réalisation de la condition suspensive dès le 4 février 2021. Elle soutient que le maintien des demandes de son bailleur traduit une intention de nuire à son égard, d’autant que le nouveau cessionnaire a demandé à la SCI AB de se désister de ses demandes. Elle souligne enfin le manque de célérité du demandeur dans sa demande de désistement, qui n’est intervenue que six mois après la vente du local. La SAS AIR SYSTEME CONTROLE estime que le bailleur a tenté de nuire à son activité par diverses manœuvres tendant à lui faire quitter son local, notamment en requérant à plusieurs reprises l’intervention d’huissiers de justice et en provoquant l’ouverture d’une procédure judiciaire, avant de se désister dans un délai qu’elle estime particulièrement long. La SAS AIR SYSTEME CONTROLE considère ainsi que le comportement de la SCI AB dénote une intention de nuire et a porté atteinte à la jouissance paisible des locaux. Elle souligne le fait que le temps consacré à sa défense n’a pas pu être consacré au développement de son activité.

Toutefois, il ne saurait être déduit des seuls éléments chronologiques de l’affaire l’intention de nuire de la SCI AB et de se soustraire au paiement de l’indemnité d’éviction dans le cadre de la cession des locaux commerciaux. À cet égard, ce n’est qu’à compter de la vente effective du local le 30 avril 2021 que la SCI AB a été assurée de la réalisation d’une telle opération impliquant la perte corrélative de son intérêt à poursuivre la résolution du contrat de bail.

En outre, si le manque de célérité de la SCI AB dans la procédure de désistement est regrettable, elle ne suffit pas davantage à caractériser une intention de nuire à l’égard de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE ou un quelconque abus.

En conséquence, la demande indemnitaire de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE sera rejetée.

Sur les frais du procès et sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

La SCI AB et la SAS AIR SYSTEME CONTROLE succombant toutes les deux en leurs demandes respectives, les dépens de l’instance seront partagés à hauteur de 50% à la charge de la SCI AB et 50% à la charge de la SAS AIR SYSTEME CONTROLE.

La SCI AB conservera la charge des frais du commandement visant la clause résolutoire délivré le 22 septembre 2020 et des constats d’huissier de justice respectivement datés du 3 juillet 2020 et du 3 décembre 2020.

Selon l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à condamnation.

Au regard de l’équité, les demandes formées par la SCI AB et par la SAS AIR SYSTEME CONTROLE au titre des frais irrépétibles seront rejetées.

Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

Il est rappelé l’exécution provisoire du présent jugement.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant publiquement après débats par jugement contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

REJETTE la demande de la société civile immobilière AB tendant à obtenir la condamnation de la société par actions simplifiées AIR SYSTEME CONTROLE au paiement de la somme de 5.000,00 euros au titre de dommages et intérêts ;

REJETTE la demande de la la société par actions simplifiées AIR SYSTEME CONTROLE tendant à obtenir la condamnation de la société civile immobilière AB au paiement de la somme de 10.000,00 euros de dommages et intérêts ;

PARTAGE les dépens de l’instance à hauteur de 50% à la charge de la société civile immobilière AB et de 50% de la la société par actions simplifiées AIR SYSTEME CONTROLE, hors frais du commandement visant la clause résolutoire délivré le 22 septembre 2020 et des deux constats d’huissier de justice datant respectivement du 3 juillet 2020 et du 3 décembre 2020 ;

REJETTE les demandes de la société civile immobilière AB et de la la société par actions simplifiées AIR SYSTEME CONTROLE formées au titre des frais irrépétibles ;

RAPELLE l’exécution provisoire de la présente décision ;

REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires.

En foi de quoi, le présent jugement a été signé par la Présidente, Marlène DOUIBI, et la Greffière, Jessica BOSCO BUFFART.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Chambre 10 cab 10 h
Numéro d'arrêt : 21/02637
Date de la décision : 07/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-07;21.02637 ?
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