TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référé
N° RG 24/01056 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YNAS
SL/SH
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 06 AOUT 2024
DEMANDERESSE :
S.C.I. 2ACG
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par Me Emmanuel LACHENY, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDEURS :
S.A.S. PIZZA PASTA & CO
[Adresse 3]
[Localité 4]
défaillante
M. [F] [O]
[Adresse 2]
[Localité 4]
défaillant
JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire
GREFFIER : Sébastien LESAGE
DÉBATS à l’audience publique du 02 Juillet 2024
ORDONNANCE du 06 Août 2024
LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte notarié reçu le 13 juin 2018, par Me [I] [D], Notaire à [Localité 6] (Nord), la SCI 2ACG a consenti à la SASU PIZZA PASTA & CO un bail commercial, portant sur des locaux situés [Adresse 3] à [Localité 4], pour une durée de neuf années à compter du 15 mai 2018, moyennant le paiement d’un loyer annuel de 7.800 euros HT, que le preneur s’oblige à payer en douze termes égaux de 650 euros HT, outre versement d’un dépôt de garantie de 1.300 euros.
Aux termes de l’acte authentique, Monsieur [F] [O] s’est porté caution solidaire des engagements de la SASU PIZZA PASTA & CO.
Les loyers étant impayés, la SCI 2ACG a fait délivrer, par acte de commissaire de justice en date du 29 janvier 2024 à la SASU PIZZA PASTA, un commandement de payer les loyers pour un montant de 15.303,40 euros en principal, et visant la clause résolutoire insérée au bail.
Suivant acte extrajudiciaire en date du 29 janvier 2024, ce commandement de payer a été dénoncé à Monsieur [F] [O], en sa qualité de caution solidaire.
La SCI 2ACG a, par actes séparés des 05 et 20 juin 2024, fait assigner la SASU PIZZA PASTA & CO, ainsi que Monsieur [F] [O], devant le président du tribunal judiciaire de LILLE, statuant en référés, aux fins de :
Vu les articles L. 145-41 du code de commerce,
Vu l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
- Constater que la société PIZZA PASTA & CO n'a pas régularisé les causes du commandement de payer signifié le 29 janvier 2024 dans le délai du mois qui lui était imparti ;
- Constater que la clause résolutoire insérée au bail conclu entre la société PIZZA PASTA & CO et la SCI 2ACG en date du 13 juin 2018 est donc acquise ;
- Constater la résiliation du bail commercial à la date du 29 février 2024 ;
- Constater que la société PIZZA PASTA & CO, qui n'a pas libéré les lieux, est devenue occupante sans droit ni titre des locaux ;
- Ordonner en conséquence l'expulsion de la société PIZZA PASTA & CO et de tous occupants de son chef des lieux loués, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin, le tout sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 1er mars 2024 conformément au libellé du bail ;
- Ordonner la séquestration des meubles et objets garnissant les lieux loués tant tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur, aux frais, risques et périls de la société PIZZA PASTA & CO ;
- Condamner solidairement la société PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O], pris en sa qualité de caution personnelle, au paiement à titre provisionnel dela somme principale de 17 338,09 € assortie des intérêts de retard au taux de la Banque centrale européenne majoré de 10 points, à compter de la date d’échéance de chacune des factures en cause en vertu de l’article L 441-10-II du Code de commerce ;
- Fixer l'indemnité d'occupation due à compter du 1er mars 2024 à une somme égale à 150% du loyer global de la dernière année de location en vertu des clauses du bail, en principal, charges et taxes et CONDAMNER solidairement la société PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O], pris en sa qualité de caution personnelle, à verser cette indemnité d’occupation provisionnelle jusqu'à la date effective de sa libération des lieux ;
- Condamner solidairement la société PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O], pris en sa qualité de caution personnelle, au paiement de la somme de 2.000,00 euros à titre d’indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 29 janvier 2024 et de la dénonciation du 12 février 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience du 02 juillet 2024 pour y être plaidée.
A cette audience, la SCI 2ACG, représentée par son avocat, sollicite le bénéfice de son exploit introductif d’instance.
La SASU PIZZA PASTA & CO, bien que régulièrement assignée par remise de l’acte en l’étude de commissaire de justice, n’a pas constitué avocat.
Bien que régulièrement assignée (par procès-verbal de recherches infructueuses établi le 20 juin 2024 conformèment aux dispositions de l’article 659 du Code de procédure civile), Monsieur [F] [O] n’a pas constitué avocat.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.
La présente décision, susceptible d’appel, est réputée contradictoire.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En l’absence du défendeur qui n’a pas constitué avocat, il sera fait application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile selon lesquelles il appartient au juge de ne faire droit à la demande que dans la mesure où celle-ci apparaît recevable, régulière et bien fondée.
Sur la dénonciation de la procédure aux créanciers inscrits :
Le bailleur qui entend se prévaloir du bénéfice de la clause résolutoire doit informer les créanciers inscrits à la date où la clause résolutoire est présumée acquise, soit à l'expiration du délai d'un mois imparti par l'article L. 145-41 du code de commerce, en dénonçant aux créanciers inscrits, la copie de l'assignation tendant à l'acquisition de la clause résolutoire, selon la procédure fixée par les articles L. 143-2 et suivants du code de commerce. La résiliation ne devient définitive à l'égard des créanciers inscrits qu'un mois après la notification qui leur en a été faite.
En l’occurrence, la SCI 2ACG ne justifie pas avoir exécuté cette formalité. La procédure ne sera donc pas opposable aux éventuels créanciers inscrits sur le fonds de commerce.
Sur l’acquisition de la clause résolutoire et l’expulsion :
Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, "le président du tribunal judiciaire (…) [peut] toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite”.
En application de l’article L145-41 du code de commerce, “Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité, mentionner ce délai”.
Le juge des référés dispose des pouvoirs de constater l’acquisition de la clause résolutoire.
Il appartient au juge, statuant en référé, saisi aux fins de suspension des effets de la clause résolutoire d'un bail de locaux à usage commercial, d'examiner la demande au seul regard des dispositions de l'article 25 du décret n°53-960 du 30 septembre 1953 (devenu article L145-41 du code de commerce) et non dans les limites posées par les articles 834 et 835 du code de procédure civile.
En l’espèce, le bail liant les parties contient une clause résolutoire (page 12 du contrat).
Le commandement de payer la somme en principal de 15.303,40 euros, délivré le 29 janvier 2024 dans les formes prévues à l’article L.145-41 du code du commerce, étant demeuré infructueux, le bail s’est trouvé résilié de plein droit à l’expiration du délai d’un mois, soit le 29 février 2024, ce qu’il convient de constater.
Le preneur se trouvant sans droit ni titre à compter de cette date et son obligation de quitter les lieux n’étant dès lors pas contestable, il convient d’accueillir la demande d’expulsion, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision,sans qu’il soit besoin d’ordonner une astreinte.
Sur le sort des meubles :
Le sort des biens meubles garnissant les lieux loués sera réglé conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et suivants ainsi que R. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution.
Sur la demande de condamnation provisionnelle au paiement de l’indemnité d’occupation :
Le maintien dans les lieux de la SASU PIZZA PASTA & CO, après acquisition de la clause résolutoire est fautif et cause un préjudice à la SCI 2ACG, celle-ci ne pouvant librement disposer de son bien dont le bail a pris fin. Le bailleur est fondé à obtenir à titre provisionnel la fixation et la condamnation de la SASU PIZZA PASTA & CO au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi, à compter du 1er mars 2024 et jusqu’à complète libération des lieux, en réparation du préjudice résultant de l’occupation des lieux.
Sur la demande de condamnation provisionnelle au paiement de l’arriéré :
En application de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile “Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, [il peut] accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire”.
La SCI 2ACG justifie par la production du bail, du commandement de payer et du décompte que la SASU PIZZA PASTA & CO a cessé de payer ses loyers, charges, taxes et indemnités d’occupation, et reste lui devoir une somme de 17.338,09 euros, selon décompte arrêté au 29 février 2024.
Après déduction de la somme de 1.391,20 euros, au titre des pénalités de retard prévue par la clause pénale (10%), l’arriéré locatif s’élève à la somme de 15.946,89 euros, qui constitue une créance non sérieusement contestable.
La SASU PIZZA PASTA & CO sera en conséquence condamnée à payer à la SCI 2ACG la somme provisionnelle de 15.946,89 euros, correspondant aux loyers, charges et indemnités d’occupation, selon décompte arrêté au 29 février 2024.
Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision.
Sur la condamnation de la caution solidaire
Le commandement ayant été délivré le 29 janvier 2024 à la SASU PIZZA PASTA & CO a été dénoncé le 12 février 2021 à Monsieur [F] [O] (pièce demanderesse n°3) qui s’est porté caution solidaire de la SASU PIZZA PASTA & CO le 13 juin 2018 (pièce demanderesse n°7).
L’assignation a été délivrée à Monsieur [F] [O].
Il sera donc condamné in solidum à payer à la SCI 2ACG la somme provisionnelle de 15.946,89 euros.
Monsieur [F] [O] sera aussi condamné in solidum à titre provisionnel, au paiement de l’indemnité d’occupation mensuelle jusqu’à parfait délaissement des lieux loués, en sa qualité de caution solidaire de la SASU PIZZA PASTA & CO.
Sur la clause pénale et la conservation du dépôt de garantie :
Les demandes relatives à des pénalités pouvant prendre la forme de la conservation du dépôt de garantie, de sommes forfaitaires à payer au bailleur, d'intérêts de retard ou de majoration de l'indemnité d'occupation par rapport au loyer sont des clauses pénales dont l'interprétation comme l'éventuel caractère manifestement excessif ou dérisoire préjudicient au fond.
En conséquence ces prétentions excèdent les pouvoirs du juge des référés.
Sur les demandes accessoires :
La SASU PIZZA PASTA & CO qui succombe, sera condamnée aux dépens, y incluant le coût du commandement de payer et de la dénonciation.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI 2ACG, les sommes exposées par elle dans la présente instance et non comprises dans les dépens.
La SASU PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O] seront condamnés in solidum à lui verser la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
En vertu des dispositions des articles 484, 514 et 514-1 du Code de procédure civile, l’exécution provisoire sera de droit.
PAR CES MOTIFS
Statuant en référés, par décision réputée contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au greffe,
Déclarons inopposable aux créanciers inscrits, la demande de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ;
Constatons l’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail du 13 juin 2018, portant sur les locaux situés [Adresse 3] à [Localité 4], depuis le 29 février 2024 ;
Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la SASU PIZZA PASTA & CO et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 3] à [Localité 4], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;
Disons, en cas de besoin, que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;
Disons n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte ;
Fixons à titre provisionnel, l’indemnité mensuelle d’occupation au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi, à compter du 1er mars 2024 ;
Condamnons in solidum à titre provisionnel la SASU PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O] en qualité de caution solidaire au paiement de cette indemnité et ce, jusqu’à libération effective des lieux ;
Condamnons in solidum la SASU PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O] en qualité de caution solidaire à payer à la SCI 2ACG la somme provisionnelle de 15.946,89 euros (quinze mille neuf cent quarante-six euros et quatre-vingt-neuf centimes) au titre de l’arriéré de loyers, charges et taxes, et indemnités d’occupation, selon décompte arrêté au 29 février 2024 ;
Disons que les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur les prétentions au titre de clause pénale ;
Condamnons in solidum la SASU PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O] en qualité de caution solidaire à payer à la SCI 2ACG la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamnons in solidum la SASU PIZZA PASTA & CO et Monsieur [F] [O] en qualité de caution solidaire aux dépens, y incluant les frais de commandement de payer du 29 janvier 2024 et de la dénonciation du 12 février 2024 ;
Rappelons que l’exécution provisoire est de droit.
La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.
LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE