La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°24/00614

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Référés, 25 juin 2024, 24/00614


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-



Référé
N° RG 24/00614 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YDLI
SL/SH


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 25 JUIN 2024




DEMANDERESSE :

S.C.I. GUREA
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Benjamin VANOVERSCHELDE, avocat au barreau de LILLE




DÉFENDEUR :

M. [C] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Patrick DRANCOURT, avocat au barreau de LILLE







JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, sup

pléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 04 Juin 2024

ORDONNANC...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référé
N° RG 24/00614 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YDLI
SL/SH

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 25 JUIN 2024

DEMANDERESSE :

S.C.I. GUREA
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Benjamin VANOVERSCHELDE, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEUR :

M. [C] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Patrick DRANCOURT, avocat au barreau de LILLE

JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 04 Juin 2024

ORDONNANCE du 25 Juin 2024

LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

Suivant acte sous seing privé du 15 septembre 2022, la SCI GUREA a consenti à Monsieur [C] [Y] (exerçant en tant qu’entrepreneur individuel et immatriculé en son nom personnel auprès du RCS de Lille Métropole), un bail dérogatoire portant sur des locaux situés [Adresse 2] pour une durée de 6 mois et 16 jours, courant à compter du 15 septembre 2022 pour se terminer le 31 mars 2023, moyennant le paiement d’un loyer annuel de 6 600 € euros, payable par mois et d’avance, outre provisions pour charges et versement d’un dépôt de garantie de 550 euros.

La SCI GUREA expose que Monsieur [Y] n’a jamais versé les loyers, avances sur charge et dépôt de garantie prévus au contrat.

La SCI GUREA a fait signifier à Monsieur [C] [Y] le 18 avril 2023 une ordonnance d’injonction de payer rendue par le juge du contentieux de la protection du tribunal de proximité de Roubaix le 10 mars 2023, pour la somme de 4.234,80 € en principal, outre 80 € d’accessoires, 423,48 € de clause pénale et 131,63 € d’intérêts.

Monsieur [C] [Y] a formé opposition à injonction de payer et selon jugement en date du 08 février 2024, le juge des contentieux et de la protection de Roubaix s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal Judiciaire de Lille.

Monsieur [Y] n’ayant pas quitté les locaux loués, la SCI GUREA a fait signifier le 18 avril 2023 à Monsieur [C] [Y] une sommation de quitter les lieux, puis par acte du 3 avril 2024, a fait assigner Monsieur [C] [Y] devant le président du tribunal judiciaire de LILLE, statuant en référés, aux fins de voir notamment ordonner l’expulsion de Monsieur [C] [Y] sous astreinte et le condamner, à titre provisionnel, à verser une somme de 3.666 € au titre des loyers et provisions pour charges impayées, une somme de 366,60 € au titre de la clause pénale, une indemnité d’occupation correspondant au loyer conventionnel, la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers frais et dépens, en ce compris le coût de la sommation de quitter les lieux et celui de l’assignation.

L’affaire appelée à l’audience du 23 avril 2024 a été renvoyée à la demande des parties pour être plaidée le 4 juin 2024.

A cette audience, la SCI GUREA représentée par son avocat reprend oralement ses conclusions déposées et demande de
Vu l’article 835 du Code de procédure civile,
Vu l’article 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu l’article 1103 du Code civil,
Vu les articles 1231-6 et 1343-2 du Code Civil,
Vu les articles 695 et 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces annexées,
- DÉBOUTER Monsieur [C] [Y] de l’ensemble de ses demandes ;
- ORDONNER l’expulsion de Monsieur [C] [Y] ainsi que celle de tout occupant de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, le déplacement et la séquestration à ses frais de tous meubles, effets ou autres et l’assistance d’un serrurier, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du prononcé de l’Ordonnance à intervenir ;
- JUGER que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l’application des dispositions des articles L. 433-1 et R. 433-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution;
- CONDAMNER Monsieur [C] [Y], à titre provisionnel, à verser à la SCI GUREA une somme de 3.666,00 € au titre des loyers et provisions pour charges impayées, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26/10/2022, avec capitalisation des intérêts ;
- CONDAMNER Monsieur [C] [Y], à titre provisionnel, à verser à la SCI GUREA une somme de 366,60 € au titre de la clause pénale ;
- CONDAMNER Monsieur [C] [Y], à titre provisionnel, à payer la SCI GUREA une indemnité d’occupation correspondant au loyer conventionnel (soit 550 € HT HC par mois) outre les charges et taxes prévues par le bail (soit 14 € par mois), soit une indemnité d’occupation de 564€ par mois, à compter du 01/04/2023 et jusqu’à la libération effective des lieux ;
- CONDAMNER Monsieur [C] [Y] à régler à la SCI GUREA la somme de 2.000,00 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER Monsieur [C] [Y] aux entiers frais et dépens, en ce compris le coût de la sommation de quitter les lieux et celui de la présente assignation.

Monsieur [C] [Y], représenté par son avocat, reprend oralement ses écritures déposées à l’audience, aux termes desquelles il demande :
Vu l'article 100 du Code de procédure civile.
- DIRE recevable et bien fondée l’exception de litispendance soulevée.
- DÉBOUTER la SCI GUREA de toutes ses demandes, fins et conclusions
- A TITRE SUBSIDIAIRE DÉBOUTER la SCI GUREA de toutes ses demandes
- CONDAMNER la SCI GUREA à payer à Monsieur [Y] la somme de 1000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure civile.
- CONDAMNER la SCI GUREA à tous les frais et dépens

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La présente décision susceptible d’appel est contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exception de litispendance

Monsieur [C] [Y] estime que dans son jugement du 8 février 2024, le juge du contentieux et de la protection s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal judiciaire de Lille et que les parties, l’objet du litige et le fondement sont identiques de sorte qu’il estime bien fondée l’exception de litispendance soulevée.

La SCI GUREA considère qu’il n’existe pas actuellement deux juridictions qui soient saisies du litige, puisque le litige soumis au JCP de Roubaix a pris fin et que la première juridiction qui a été saisie s’est déclarée incompétente.

L’article 100 du code de procédure civile dispose : « Si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une des parties le demande. À défaut, elle peut le faire d'office ».

La litispendance suppose, en application de l’article 100 du code de procédure civile, une identité de parties, une identité d’objet et de fondement du litige.

En l’occurrence, le juge des contentieux de la protection de Roubaix s’est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Lille et la SCI GUREA a assigné Monsieur [Y] devant le président du tribunal judiciaire statuant en référé. Les instances initiées devant chaque juridiction ont des fondement distincts, le juge du fond étant saisi d’une demande de condamnation au paiement de sommes à raison du bail commercial signé entre les parties (dépôt de garantie, provision sur charges, loyers, indemnité d’occupation, clause pénale, intérêts de retard) tandis que le juge des référés est saisi d’une demande d’expulsion sous astreinte au visa de l’artcile 835 du code de procédure civile et de demandes de condamnation à titre provisionnel au paiement de sommes dues au titre des loyers et provisions pour charges impayées, au titre de la clause pénale ou au titre d’une indemnité d’occupation.
Il n’y a pas par ailleurs de situation de litispendance entre une instance au fond et une demande devant le juge des référés, tendant au prononcé de mesures provisoires, tout comme il n’y a pas de risque de contrariété de décision, l’ordonnance de référé étant une décision provisoire n’ayant pas autorité de la chose jugée et qui ne lie pas le juge du fond.

L’exception de litispendance sera écartée.

Sur la demande l’expulsion

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, "le président du tribunal judiciaire (…) [peut] toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite”.

En l’espèce, le bail signé par les parties est arrivé à échéance le 31 mars 2023, et il prévoit que : « La durée du présent bail ne sera susceptible d’aucune reconduction et expirera une fois le contrat arrivé à son terme, même à défaut de dénonciation à cette date […] Le locataire ne pourra se prévaloir d’aucun maintien dans les lieux après l’échéance du bail. En conséquence, à l’expiration du contrat, ou de ses éventuels renouvellements, le locataire s’oblige irrévocablement à libérer les locaux loués. » (contrat de bail page 4/7 pièce demanderesse n°2)

La SCI GUREA indique que Monsieur [Y] ne s’est pas exécuté et n’a pas rendu les clés tandis que ce dernier affirme dans ses écritures avoir restitué les clés le 5 octobre 2022 sans verser de pièce permettant d’en attester.

La SCI GUREA verse aux débats deux attestations, l’une d’un voisin de l’entrepôt qui indique avoir vu Monsieur [Y] utiliser le local loué jusqu’en mars 2023 et la seconde de la part d’un entrepreneur qui est intervenu en toiture et qui explique que Monsieur [Y] occupait les lieux entre le 24 octobre et le 19 décembre 2022.

Ainsi, les pièces versées aux débats permettent d’établir que contrairement aux affirmations de Monsieur [Y], les clés n’ont pas été restituées le 5 octobre 2022.

De plus, La SCI GUREA a été contrainte de faire délivrer une sommation d’avoir à quitter les lieux, le 18 avril 2023.

Le preneur se trouvant sans droit ni titre et son obligation de quitter les lieux n’étant pas contestée, il convient d’accueillir la demande d’expulsion, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Il n’y a pas lieu en l’espèce de prononcer cette expulsion sous astreinte, le recours possible à la force publique étant suffisant pour permettre la libération des lieux.

Sur le sort des meubles

Le sort des biens meubles garnissant les lieux loués sera réglé conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et suivants ainsi que R. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution.

Sur la demande de condamnation provisionnelle au paiement de l’indemnité d’occupation

Le maintien dans les lieux de Monsieur [C] [Y] causant un préjudice à la SCI GUREA, le bailleur est fondé à obtenir à titre provisionnel la fixation et la condamnation de Monsieur [C] [Y] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi, à compter du 1er avril 2023 et jusqu’à complète libération des lieux.

Sur la demande de condamnation provisionnelle au paiement de l’arriéré

En application de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile “Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, [il peut] accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire”.

La SCI GUREA a produit le bail dérogatoire signé entre les parties.
Elle a versé une mise en demeure adressée par lettre recommandée du 29 novembre 2022 et reçue selon accusé reception par Monsieur [Y] le 2 novembre 2022. (Pièce demanderesse n°3)
Elle a présenté aussi une mise en demeure adressée le 25 janvier 2023, par recommandé déposé le 25 janvier 2023 mais sans accusé réception. (Pièce demanderesse n°4)
Elle présente le décompte suivant indiquant que Monsieur [Y] n’a réglé aucun loyer du 15 septembre 2022 au 31 mars 2023 : 550 € x 6,5 mois = 3.575 € et y ajoute les provisions sur charges impayées, soit une somme de 14 € x 6,5 mois = 91 €, pour réclamer la somme provisionnelle de 3.666 €.

Monsieur [C] [Y] fait valoir que les clés ont été restituées et que la demanderesse ne justifie pas des charges et estime qu’elle sera déboutée de sa demande.

Monsieur [C] [Y] ne conteste pas n’avoir pas payé les loyers et charges et ne justifie pas d’avoir restitué les clés des locaux loués.

Monsieur [C] [Y] sera en conséquence condamné à payer à la SCI GUREA la somme provisionnelle de 3.666 euros selon décompte arrêté au 31 mars 2023, terme du mois de mars 2023 inclus.

Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente ordonnance.

Sur la clause pénale et la conservation du dépôt de garantie

Les demandes relatives à des pénalités pouvant prendre la forme de la conservation du dépôt de garantie, de sommes forfaitaires à payer au bailleur, d'intérêts de retard ou de majoration de l'indemnité d'occupation par rapport au loyer sont des clauses pénales dont l'interprétation comme l'éventuel caractère manifestement excessif ou dérisoire préjudicient au fond.

En conséquence il n’y aura pas lieu à référé sur les prétentions se fondant sur ces clauses.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [C] [Y], qui succombe, sera condamné aux dépens comprenant le coût de l’assignation et le coût de la sommation de quitter les lieux.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI GUREA les sommes exposées par elle dans la présente instance et non comprises dans les dépens.
Monsieur [C] [Y] sera condamné à lui verser la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En vertu des dispositions des articles 484, 514 et 514-1 du Code de procédure civile, l’exécution provisoire sera de droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référés, par décision mise à la disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort ;

Rejetons l’exception de litispendance ;

Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de Monsieur [C] [Y] et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 2], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

Déboutons la SCI GUREA de sa demande d’assortir l’expulsion de Monsieur [C] [Y] d’une condamantion au paiement d’une astreinte ;

Disons, en cas de besoin, que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

Fixons à titre provisionnel, l’indemnité mensuelle d’occupation au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi, à compter du 1er avril 2023 ;
Condamnons à titre provisionnel Monsieur [C] [Y] au paiement de cette indemnité et ce, jusqu’à libération effective des lieux ;

Condamnons Monsieur [C] [Y] à payer à la SCI GUREA, la somme provisionnelle de 3666 euros (trois mille six cent soixante six euros) au titre de l’arriéré de loyers, charges et taxesselon décompte arrêté au 31 mars 2023 , terme du mois de mars 2023 inclus ;

Disons que les sommes dues porteront intérêts au taux légal, à compter du prononcé de la présente ordonnance ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur les prétentions au titre de clause pénale ;

Condamnons Monsieur [C] [Y] à payer à la SCI GUREA la somme de 1000 euros (mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Monsieur [C] [Y] aux dépens, y incluant les frais de sommation de quitter les lieux et de l’assignation devant le président du tribunal judiciaire statuant en référé ;

Rappelons que l’exécution provisoire est de droit.

La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Référés
Numéro d'arrêt : 24/00614
Date de la décision : 25/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée en référé (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-25;24.00614 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award