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17/06/2024 | FRANCE | N°24/03397

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jcp, 17 juin 2024, 24/03397


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 5]


☎ :[XXXXXXXX01]




N° RG 24/03397
N° Portalis DBZS-W-B7I-YF3Q

N° de Minute : 24/00360

JUGEMENT

DU : 17 Juin 2024





S.C.I. SETA EN ABREGE SCI SETA


C/

[E] [G]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 17 Juin 2024






DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)


S.C.I. SETA EN ABREGE SCI SETA, dont le siège social est sis [Adresse 3]


représenté par Me Sly CROQUELOIS-

AMRI, avocat au barreau de LILLE

ET :


DÉFENDEUR(S)

Mme [E] [G], demeurant [Adresse 2]


non comparante




COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 12 Avril 2024

Noémie LOMBAR...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 5]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 24/03397
N° Portalis DBZS-W-B7I-YF3Q

N° de Minute : 24/00360

JUGEMENT

DU : 17 Juin 2024

S.C.I. SETA EN ABREGE SCI SETA

C/

[E] [G]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 17 Juin 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

S.C.I. SETA EN ABREGE SCI SETA, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représenté par Me Sly CROQUELOIS-AMRI, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

Mme [E] [G], demeurant [Adresse 2]

non comparante

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 12 Avril 2024

Noémie LOMBARD, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 17 Juin 2024, date indiquée à l'issue des débats par Noémie LOMBARD, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

RG 3397/2024 – Page - MA

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous-seing privé du 20 juin 2006, [J] [U] et [C] [R] ont donné à bail à [E] [G] un immeuble à usage d'habitation sis [Adresse 2] à [Localité 7], moyennant un loyer mensuel initial de 675 euros, charges en sus.

Par acte authentique reçu le 28 octobre 2008 entre les mains de Maître [N], notaire à [Localité 7], [J] [U] et [C] [R] ont vendu cet immeuble à la SCI SETA.

Par acte d'huissier du 3 juillet 2023, la SCI SETA a fait délivrer à [E] [G] un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrait de bail pour un montant principal de 3.380 euros au titre des loyers et charges impayés.

Par acte d'huissier du 28 février 2024, la SCI SETA a fait citer [E] [G] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Lille à l'audience du 12 avril 2024 aux fins d'obtenir :

à titre principal, le constat de la résiliation de plein droit du bail en application de la clause résolutoire et à titre subsidiaire, le prononcé de la résiliation du bail aux torts de [E] [G] ;l'expulsion de [E] [G] ;la condamnation de [E] [G] à lui payer la somme de 11.041 euros au titre des loyers impayés à parfaire au jour du jugement ;la condamnation de la locataire à lui payer la somme de 1.104,10 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat de bail ;la condamnation de [E] [G] à lui payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant actuel du loyer et des charges à compter de la résiliation et jusqu'à la libération effective des lieux ;la condamnation de [E] [G] à lui payer la somme de 1.200 euros au titre des frais irrépétibles, outre l'ensemble des dépens.
A l'audience du 12 avril 2024, la SCI SETA, représentée par son conseil, a maintenu l'ensemble des demandes contenues dans son acte introductif d'instance, sauf à actualiser le montant de la dette locative à la somme de 11.416 euros. Elle a indiqué ne pas avoir d'observations à formuler sur la demande de délais pour quitter les lieux formée par sa locataire, précisant que cette dernière n'avait pas repris le paiement de ses loyers au jour de l'audience.

Dispensée de comparaître à l'audience en raison de problèmes de santé dont elle a justifié, [E] [G] a demandé au juge des contentieux de la protection de lui accorder des délais pour quitter les lieux.

Elle a indiqué ne pas contester le montant des sommes réclamées, expliquant ne toucher que l'allocation spécifique de solidarité à hauteur de 565 euros par mois depuis la crise sanitaire. Elle a précisé être suivie par une assistante sociale depuis le mois de mai 2023 et avoir déposé une demande de logement social en avril 2023.

A l'issue de l'audience, la décision a été mise en délibéré au 17 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA RECEVABILITE DE L'ACTION

Aux termes de l'article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, à peine d'irrecevabilité de la demande, l'assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence de le commissaire de justice au représentant de l'Etat dans le département au moins six semaines avant l'audience, afin qu'il saisisse l'organisme compétent désigné par le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l'offre globale de services d'accompagnement vers et dans le logement prévue à l'article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s'effectue par voie électronique par l'intermédiaire du système d'information prévu au dernier alinéa de l'article 7-2 de la même loi. La saisine de l'organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s'effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L'organisme saisi réalise un diagnostic social et financier, selon des modalités et avec un contenu précisés par décret, au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l'audience, ainsi qu'à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic. Le locataire est informé par le représentant de l'Etat dans le département de son droit de demander au juge de lui accorder des délais de paiement, prévu au V du présent article.

En l'espèce, le commandement de payer du 3 juillet 2023 a été notifié à la CCAPEX le 5 juillet 2023.

L'assignation du 28 février 2024 a été notifiée par voie électronique au Préfet du Nord le 29 février 2024, soit plus de six semaines avant l'audience.

L'action est donc recevable.

SUR LE CONSTAT DE L'ACQUISITION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE

Aux termes de l'article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; le paiement mensuel est de droit lorsque le locataire en fait la demande.

L’article 24 de cette même loi, dans sa version applicable à l'espèce, dispose notamment que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, le contrat de bail signé entre les parties contient une telle clause en son article 2.10.1.2.

La dette de loyer s'élevait, au 3 juillet 2023, date à laquelle le commandement de payer visant la clause résolutoire a été signifié à [E] [G], à la somme en principal de 3.380 euros.

Il ressort du décompte produit par la bailleresse que [E] [G] ne s'est acquittée d'aucune somme d'argent depuis le 10 mai 2023.

Il convient donc de constater l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail au 4 septembre 2023.

Il y a lieu par conséquent d'ordonner l'expulsion de [E] [G] et de tous occupants de son chef à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la délivrance d'un commandement de quitter les lieux.

SUR LES DEMANDES EN PAIEMENT

L'article 7-a) de la loi du 6 juillet 1989 précitée, ainsi que le contrat de bail conclu entre les parties, énoncent que le locataire doit payer les loyers et charges récupérables aux termes convenus.

En vertu de l'article 1240 du code civil, le préjudice du bailleur résultant de l'occupation du logement postérieurement à la résiliation du bail sera réparé par l'allocation d'une indemnité mensuelle d'occupation due de la résiliation à la libération des lieux.

En l'espèce, il ressort du dernier décompte produit par la requérante, actualisé au 12 avril 2024, que [E] [G] était redevable de la somme de 11.416 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation, échéance du mois d'avril 2024 incluse.

[E] [G] sera par conséquent condamnée à payer à la SCI SETA la somme de 11.416 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés au 12 avril 2024, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement.

[E] [G] sera également condamnée à payer à la SCI SETA une indemnité d’occupation jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux. Cette indemnité mensuelle d'occupation sera fixée au montant du loyer majoré de la provision sur charges, soit la somme de 753 euros, afin de réparer le préjudice découlant pour la SCI SETA de l'occupation indue de son bien et de son impossibilité de le relouer.

SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT FONDEE SUR LA CLAUSE PENALE

La clause pénale insérée au contrat de bail doit être réputée non écrite en application des dispositions d’ordre public de l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989, de sorte que la demande de condamnation y afférente sera rejetée.

SUR LA DEMANDE DE DELAI POUR QUITTER LES LIEUX

Aux termes des articles L. 412-3 et L. 412-4 du code des procédures civiles d’exécution le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales ; ces délais ne peuvent être inférieurs à trois mois ni supérieurs à trois ans.

Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés, selon les modalités prévues au code de la construction et de l'habitation, en cas de défaut d'attribution d’un logement locatif social et, plus généralement, du délai prévisible de relogement des intéressés.

En l'espèce, [E] [G] justifie avoir été dans l'impossibilité de se présenter à l'audience en raison d'invalidants problèmes de santé, également responsables de difficultés particulières pour gérer sa situation administrative et financière. Les services sociaux évoquent l'existence d'antécédents personnels l'ayant fragilisée, la perte de son emploi, l'abandon pendant un temps de son suivi médical.

Il est néanmoins établi qu'elle a fait appel à l'association ALEFPA aux fins de trouver un logement social et apparaît s'être mobilisée à cette fin avant même la délivrance du commandement de payer, ce qui témoigne de sa bonne volonté en dépit des difficultés rencontrée.

Son état de santé et ses faibles ressources laissent craindre de réelles difficultés pour trouver un nouveau logement, tandis que la SCI SETA ne justifie pas de besoins tels qu'ils feraient obstacle à la demande présentée par sa locataire.

Enfin, [E] [G] occupe le logement depuis près de 20 ans ; la bailleresse n'a fait part d'aucun incident antérieur à la présente procédure.

Il apparaîtrait par conséquent inéquitable d'ordonner son expulsion sans lui accorder les délais nécessaires à son relogement.

Par conséquent, il sera fait droit à sa demande de délais pour quitter les lieux, selon les modalités prévues au dispositif du présent jugement.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens.

En l'espèce, [E] [G] , qui succombe principalement, seront condamnée aux dépens de l'instance en ce compris le coût du commandement de payer du 3 juillet 2023.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

La situation économique de la partie condamnée justifie de rejeter la demande présentée par la SCI SETA au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, en application de l'article 514 du code de procédure civile, le présent jugement sera assorti de l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection de Lille, statuant après débats publics, par décision contradictoire, rendue en premier ressort, et mise à disposition au greffe,

DECLARE la SCI SETA recevable en son action ;

CONSTATE l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat aux termes duquel [J] [U] et [C] [R] ont donné à bail à [E] [G] un appartement meublé [Adresse 2] à [Localité 7], à la date du 4 septembre 2023 ;

CONDAMNE [E] [G] à payer à la SCI SETA la somme de 753 euros par mois à compter du 4 septembre 2023 au titre de l'indemnité d'occupation et jusqu'à libération effective des lieux ;

CONDAMNE [E] [G] à payer à la SCI SETA la somme de 11.416 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés au 12 avril 2024, échéance du mois d'avril incluse, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

DEBOUTE la SCI SETA de sa demande fondée sur la clause pénale insérée au contrat de bail ;

ACCORDE à [E] [G] un délai de quatre mois, à compter du présent jugement, pour quitter les lieux ;

A l'expiration de ce délai :

ORDONNE l'expulsion de [E] [G] des lieux loués dans le respect du délai prévu à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution (à l'expiration du délai de deux mois du commandement d'avoir à quitter les lieux) et sans préjudice des articles L.412-2 et suivants du même code ;

DIT qu'à défaut de départ volontaire dans ce délai, la SCI SETA pourra faire procéder à l'expulsion de [E] [G] et à celle de tous occupants de son chef avec, au besoin, l'assistance de la force publique et d'un serrurier ;

AUTORISE, le cas échéant, la SCI SETA à faire transporter et séquestrer les biens abandonnés dans les lieux aux frais, risques et périls de [E] [G] dans le délai de deux mois de la libération des lieux ;

RAPPELLE à [E] [G] qu'elle peut  saisir la commission de médiation, à condition de justifier du dépôt préalable et de l'enregistrement d'une demande de logement social pourvue d'un numéro unique et, le cas échéant, renouvelée ou, à défaut, d'apporter la justification de l'absence de demande. Pour saisir la commission de médiation, il convient d’utiliser le formulaire Cerfa n°15036*01,  téléchargeable  sur le site internet des services de l'Etat dans le Nord "nord.gouv.fr", à retourner complété et accompagné de toutes les pièces justificatives requises, à l'adresse suivante :

Direction départementale de la cohésion sociale
Mission accès au logement
Secrétariat de la commission de médiation - DALO175, [Adresse 8]
[Adresse 6]
[Localité 4] 

REJETTE le surplus des demandes présentées et non satisfaites ;

CONDAMNE [E] [G] aux entiers dépens de l'instance ;

REJETTE la demande présentée par la SCI SETA au titre de l'article 700 du code de procédure civile

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire ;

Ainsi jugé et prononcé à Lille, le 17 juin 2024

LE GREFFIER LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jcp
Numéro d'arrêt : 24/03397
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.03397 ?
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