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17/06/2024 | FRANCE | N°24/00475

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Référés jcp, 17 juin 2024, 24/00475


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 4]


☎ :[XXXXXXXX01]




N° RG 24/00475
N° Portalis DBZS-W-B7I-YEP7

N° de Minute : 24/00129

ORDONNANCE DE REFERE

DU : 17 Juin 2024





[X] [E]


C/

[I] [G]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ORDONNANCE DU 17 Juin 2024






DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)


Mme [X] [E], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Bénédicte LAVILLE, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me

Charlotte HERBAUT, avocat au barreau de LILLE


ET :


DÉFENDEUR(S)

M. [I] [G], demeurant [Adresse 3]


comparant en personne





COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 Mai...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 4]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 24/00475
N° Portalis DBZS-W-B7I-YEP7

N° de Minute : 24/00129

ORDONNANCE DE REFERE

DU : 17 Juin 2024

[X] [E]

C/

[I] [G]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ORDONNANCE DU 17 Juin 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

Mme [X] [E], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Bénédicte LAVILLE, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Charlotte HERBAUT, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

M. [I] [G], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 Mai 2024

Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 17 Juin 2024, date indiquée à l'issue des débats par Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

RG 475/24 – Page - MAEXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique dressé par Maître [U] [P], notaire à [Localité 5] le 21 décembre 2016 avec effet au 22 décembre 2016, M. [V] [R] et Mme [X] [R] épouse [E] ont donné en location à M. [I] [G] et Mme [W] [T] une maison d’habitation située [Adresse 3] à [Localité 6], moyennant un loyer mensuel initial de 850 euros, outre une provision sur charges de 13,33 euros.

Suivant attestation notariée du 2 mars 2020, à la suite du décès de [V] [R] le 19 décembre 2019, Mme [E] est devenue seule propriétaire du bien.

Par acte d'huissier du 19 décembre 2023, Mme [E] a fait délivrer à M. [G] un commandement de payer visant la clause résolutoire contenue dans le bail afin d’obtenir le paiement d’une somme de 3 391,91 euros dont 3 241,76 euros au titre des loyers et charges impayés.

Ce commandement de payer visant la clause résolutoire a été notifié par voie électronique à la Commission de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions locatives (CCAPEX) dans le Nord le 20 décembre 2023.

Par acte d’huissier du 23 février 2024, Mme [E] a fait assigner en référé M. [G] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille afin de voir, au visa des articles 7 g et 24 de la loi du 6 juillet 1989, 834 et suivants du code de procédure civile :

constater l’acquisition de la clause résolutoire,ordonner l’expulsion de M. [G] des lieux loués à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ainsi que celle de tous occupants du chef de la partie défenderesse avec assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est,condamner M. [G] à titre provisionnel au paiement de la somme de 3 581,36 euros au titre de la dette locative arrêtée au mois de février 2024 inclus,condamner M. [G] à titre provisionnel au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges à compter de l’acquisition de la clause résolutoire, soit le 31 janvier 2024 jusqu’à la complète libération des lieux,dire qu’il sera procédé au transport des meubles et objets mobiliers dans tel local que l’huissier instrumentaire avisera, à la charge, aux frais et risques de la partie défenderesse,condamner M. [G] à lui régler la somme de 700 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.
Cette assignation a été notifiée par voie électronique au Préfet du Nord le 19 décembre 2023.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 13 mai 2024.

Mme [E], représentée par son conseil, s’en est rapportée aux demandes contenues dans son acte introductif d’instance sauf à actualiser la dette locative à la somme de 4 237,80 euros.

Elle a précisé que le dernier règlement de M. [G] remontait au 8 avril 2024.

M. [G] a comparu et il a sollicité la suspension des effets de la clause résolutoire et des délais de paiement.

Il a précisé qu’il avait réglé la somme de 960 euros au titre du loyer courant et 500 euros au titre de l’arriéré la semaine précédant l’audience.

Il a ajouté qu’il était séparé avec deux enfants à charge ; qu’il n’avait pas perçu de salaire entre mai 2023 et décembre 2023 et qu’il existait un contentieux prud’hommal à cet égard avec son ancien employeur ; qu’il est en contrat à durée indéterminée depuis un mois et perçoit une rémunération mensuelle de 2 400 euros ; qu’il exerce également une activité de livreur sous le statut de micro entrepreneur moyennant une rémunération mensuelle comprise entre 1 000 et 1 500 euros par mois ; qu’il perçoit également 450 euros d’aide personnalisée au logement compte tenu de sa configuration familiale ; qu’il a constitué un dossier FSL et devrait à ce titre bénéficier d’une aide de 2 000 euros ; qu’il est en capacité d’apurer l’arriéré moyennant des échéances mensuelles de 200 euros par mois en sus du loyer courant.

Mme [E] a précisé qu’elle s’opposait à la demande de délais dans la mesure où le solde du compte de M. [G] était débiteur depuis plus de deux ans.

A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 17 juin 2024 et le juge a demandé à M. [G] de lui transmettre le dernier relevé de la caisse d’allocations familiales, son contrat à durée indéterminée, son dernier bulletin de paie, ses derniers revenus de micro-entrepreneur, le jugement du juge aux affaires familiales et la preuve des derniers versements allégués au profit de Mme [E].

Le juge a également sollicité de Mme [E] la transmission d’un décompte actualisé.

Les pièces de M. [G] ont été adressées au greffe de la juridiction par courriel du 30 mai 2024.

Le décompte actualisé a été transmis par le conseil de Mme [E] par courriel du 5 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’existence d’un trouble manifestement illicite

Aux termes de l’article 834 du même code, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Aux termes de l’article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il est constant que l’occupation sans droit ni titre du bien d’autrui constitue un trouble manifestement illicite au sens de ce texte.

En l’espèce, M. [G] n’a manifestement pas réglé son loyer pendant plusieurs mois et ce en méconnaissance des termes du contrat de bail et de la loi du 6 juillet 1989.

L’existence d’un trouble manifestement illicite est donc établie.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire et la demande d’expulsion

Aux termes du paragraphe I de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, Mme [E] produit le contrat de bail conclu entre les parties le 21 décembre 2016 qui contient une clause résolutoire suivant laquelle en cas de non-paiement à son échéance de l’une des sommes dues par le locataire au titre du loyer ou des charges récupérables et deux mois après un commandement de payer resté sans effet, la location sera résiliée de plein droit s’il s’agit du défaut de paiement des loyers et des charges ou du non-versement du dépôt de garantie s’il en est stipulé un.

Cette clause résolutoire est visée et reprise sur le commandement de payer qui a été délivré à M. [G] le 19 décembre 2023.

Suivant le décompte joint au commandement de payer, la somme due en principal par M. [G] s'élevait alors à 3 241,76 euros.

Suivant le décompte actualisé produit à l’audience et daté du 6 mai 2024, l’intégralité des causes du commandement n’a pas été réglée dans le délai de deux mois de sa délivrance.

Il y a donc lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 20 février 2024.

Aux termes de l’article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version en vigueur depuis le 29 juillet 2023, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

En l’espèce, M. [G] a fait valoir qu’il avait réglé la somme de 960 euros au titre du loyer courant et 500 euros au titre de l’arriéré de loyers la semaine précédant l’audience.

Il a joint à son courriel transmis en cours de délibéré des captures écran faisant mention de plusieurs virements effectués au profit de la bailleresse, à savoir 1 200 euros le 7 mars 2024, 500 euros le 8 mai 2024 et 1 200 euros le 30 mai 2024.

Il a également joint à ce courriel des pièces justificatives de sa situation.

Il en ressort qu’il est technicien approvisionneur en contrat à durée indéterminée pour la société Topsec depuis le 8 avril 2024, à temps plein, moyennant une rémunération mensuelle nette de 1 664 euros environ.

Il exerce en parallèle une activité d’auto-entrepreneur qui a dégagé un chiffre d’affaires de 959 euros au premier trimestre 2024.

Il a constitué un dossier FSL qui est en cours d’étude.

Il a enfin deux enfants à charge nés en 2010 et 2015 et perçoit des prestations sociales d’un montant mensuel de 931,81 euros, suivant l’attestation de la caisse d’allocation familiales du 30 mai 2024.

D’après le décompte actualisé produit par la bailleresse, M. [G] reste devoir, au 3 juin 2024, la somme de 3 507,60 euros au titre des loyers et charges impayés, échéance de juin 2024 incluse.

Il a notamment procédé à un règlement de 1 200 euros le 8 mars 2024, de 1 050 euros le 8 avril 2024, de 500 euros le 8 mai 2024 et de 1 200 euros le 31 mai 2024.

Aux termes de son courriel transmis en cours de délibéré, la bailleresse, représentée par son conseil, indique qu’elle n’est pas opposée à des délais de paiement compte tenu des efforts de M. [G].

Compte tenu des règlements significatifs intervenus avant et après l’audience, il convient de suspendre les effets de la clause résolutoire contenue dans le bail et d’accorder à M. [G] des délais pour apurer la dette suivant les modalités précisées dans le dispositif de la présente ordonnance.

Sur les sommes dues

Aux termes de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer les loyers et les charges récupérables aux termes convenus.

Par ailleurs, le préjudice subi par le bailleur du fait de l'occupation indue de son bien immobilier est réparée par l’allocation d’une indemnité mensuelle d’occupation équivalente au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l’absence de résiliation du bail.

En l’espèce, suivant le décompte actualisé transmis en cours de délibéré par la bailleresse, la dette de M. [G] au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 3 juin 2024 est de 3 507,60 euros, échéance de juin 2024 incluse.

Il convient donc de condamner M. [G] à payer cette somme à Mme [E] et de l’autoriser à s’en acquitter selon les modalités reprises dans le dispositif de la présente ordonnance.

Sur les demandes accessoires

En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. [G] qui succombe à l’instance sera condamné aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 19 décembre 2023.

Par ailleurs, il sera condamné à payer à Mme [E] la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin, la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de droit en application de l'article 514-1 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant en référé à l’issue de débats tenus en audience publique, par ordonnance contradictoire rendue en premier ressort, et par mise à disposition au greffe,

CONSTATONS que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail dressé par Maître [U] [P], notaire à [Localité 5] le 21 décembre 2016 avec effet au 22 décembre 2016, entre [V] [R] et Mme [X] [R] épouse [E] d’une part, et M. [I] [G] et Mme [W] [T], d’autre part et portant sur une maison d’habitation située [Adresse 3] à [Localité 6], étaient réunies le 20 février 2024 ;

CONDAMNONS M. [I] [G] à payer à Mme [X] [E] la somme provisionnelle de 3 507,60 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 3 juin 2024, échéance de juin 2024 incluse ;
AUTORISONS M. [I] [G] à s’acquitter de cette somme provisionnelle en 36 mensualités de 95 euros, en sus du loyer courant, la dernière mensualité devant toutefois être ajustée pour permettre de régler le solde restant dû ;
DISONS que pendant le délai ainsi consenti, à défaut de paiement à l'échéance du montant ainsi convenu ou du loyer courant et à la suite d'une mise en demeure adressée à M. [I] [G] et restée infructueuse pendant plus de 15 jours :
1°) la totalité de la somme restant due redeviendra exigible ;
2°) la clause résolutoire produira ses effets et la résiliation du bail sera constatée au 20 février 2024 ;
3°) il pourra être procédé, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, à l'expulsion de M. [I] [G] et de tous occupants de son chef des lieux loués à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois suivant la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux en application de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;
4°) les meubles se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais des personnes expulsées, en un lieu désigné par celles-ci et, à défaut, laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrit avec précision par le commissaire de justice chargé de l’exécution avec sommation aux personne expulsées d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois suivant la signification du procès-verbal d’expulsion en application des articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution à Mme [X] [E] une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal à celui du loyer qui aurait été payé en cas de non résiliation du bail, augmenté du coût des charges récupérables sur justificatifs, jusqu'à la libération effective des lieux ;
CONDAMNONS M. [I] [G] à payer à Mme [X] [E] la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS M. [I] [G] aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire du 19 décembre 2023 ;
RAPPELONS que la présente ordonnance est assortie de l’exécution provisoire de droit.

Ainsi jugé et prononcé le 17 juin 2024 par mise à disposition au greffe.

LE GREFFIERLE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Référés jcp
Numéro d'arrêt : 24/00475
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée en référé avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.00475 ?
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