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17/06/2024 | FRANCE | N°24/00106

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jex, 17 juin 2024, 24/00106


COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 17 Juin 2024


N° RG 24/00106 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YD65


DEMANDERESSE :

Madame [R] [P] divorcée [L]
[Adresse 1]
[Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/1405 du 01/02/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LILLE)

représentée par Me Raffaele MAZZOTTA, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Laura BARATA


DÉFENDERESSE :

URSSAF NORD PA

S DE CALAIS
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Me Charlotte HERBAUT, avocat au barreau de LILLE




MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : ...

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 17 Juin 2024

N° RG 24/00106 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YD65

DEMANDERESSE :

Madame [R] [P] divorcée [L]
[Adresse 1]
[Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/1405 du 01/02/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LILLE)

représentée par Me Raffaele MAZZOTTA, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Laura BARATA

DÉFENDERESSE :

URSSAF NORD PAS DE CALAIS
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Me Charlotte HERBAUT, avocat au barreau de LILLE

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Damien CUVILLIER, Premier Vice-Président Adjoint du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 19 Avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2024, prorogé au 17 Juin 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 24/00106 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YD65

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

Par décision en date du 18 juin 2021, le Tribunal correctionnel de LILLE a condamné solidairement Madame [R] [P] divorcée [L] et Monsieur [V] [K] à payer à l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS la somme de 64 233 € outre 800 € au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

Par arrêt en date du 8 novembre 2022, la Cour d'Appel de DOUAI a confirmé cette décision et, y ajoutant, a également condamné Madame [R] [P] divorcée [L] à payer à l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS la somme de 750 € par application des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

Le 3 janvier 2024, l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS a fait procéder à une saisie-attribution sur les comptes ouverts au nom de Madame [R] [P] divorcée [L] dans les livres de la société CIC NORD OUEST.
Cette saisie-attribution a été dénoncée à Madame [P] divorcée [L] le 9 janvier 2024.

Par acte de commissaire de justice en date du 9 février 2024, Madame [L] a fait assigner l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS devant le juge de l'exécution aux fins de contestation de cette saisie-attribution.

Les parties ont comparu pour la première fois à l'audience du 15 mars 2024.

Après renvoi à leur demande, elles ont été entendues en leurs plaidoiries à l'audience du 19 avril 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A cette audience, Madame [R] [P] divorcée [L] a formulé les demandes suivantes :
dire mal fondée la saisie-attribution pratiquée,ordonner qu'il soit fait mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 3 janvier 2024 et dénoncée le 9 janvier 2024 par exploit de la SELARL GOBERT PLASSY-SZYPULA ET ASSOCIES,dire qu'à défaut de mainlevée dans un délai de 15 jours à compter de la décision, l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS sera condamnée à verser une astreinte de 50 € par jour de retard,condamner l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS à 500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,condamner l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS à 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance conformément à l'article 696 du code de procédure civile,débouter l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS de l'ensemble de ses demandes plus amples et contraires.
Au soutien de ses demandes, Madame [P] divorcée [L] fait d'abord valoir que la saisie-attribution critiquée a été pratiquée sur un compte joint mais n'a pas été dénoncée au co-titulaire de ce compte.
Par ailleurs toutes les sommes figurant sur le compte saisi appartiennent au compagnon de Madame [L] et non à elle-même. Ces fonds ne pouvaient donc pas être saisis.

Madame [L] ajoute que la mesure pratiquée est disproportionnée puisque le coût de l'acte est supérieur aux sommes saisies lesquelles sont dérisoires en rapport avec les sommes dues.

En défense, l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS a pour sa part formulé les demandes suivantes :
débouter Madame [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions,constater que la saisie-attribution litigieuse est parfaitement fondée et régulière,Tribunal judiciaire de Lille N° RG 24/00106 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YD65

condamner Madame [L] au paiement d'une somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,condamner Madame [L] aux entiers dépens et frais d'instance.
Au soutien de ses demandes, l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS fait d'abord valoir que le tiers saisi, la société CIC NORD OUEST, n'a pas mentionné que le compte saisi était un compte joint et aucun autre nom que celui de Madame [P] divorcée [L] n'est renseigné.
L' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS ne pouvait donc deviner devoir dénoncer la saisie-attribution à un co-titulaire de compte non identifié.
Par ailleurs, l'absence de dénonciation au co-titulaire d'un compte n'est sanctionnée par aucun texte et ne peut dès lors pas entraîner la nullité de la saisie ou sa caducité.

L' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS ajoute qu'en tout état de cause il appartient au débiteur saisi ou au co-titulaire du compte de justifier que les fonds saisis appartiennent au co-titulaire uniquement et ce afin de les exclure de l'assiette de la saisie ce qui n'est pas fait en l'espèce.

L' URSSAF ajoute qu'elle ne pouvait connaître le solde figurant au compte saisi avant de pratiquer cette saisie.
L'URSSAF ajoute qu'avant de faire procéder à la saisie attribution, elle a proposé à Madame [P] divorcée [L] de régler sa dette sur 60 mois. Madame [L] a refusé cet échéancier et demandé à pouvoir régler sa dette en 109 ans, ce qui n'était évidemment pas acceptable.

En effectuant la saisie-attribution contestée, l'URSSAF indique n'avoir voulu qu'exécuter la décision prononcée à son profit et n'avoir commis aucune faute le solde à laisser à la disposition du débiteur saisi étant fixé par la loi et étant invariant quelque soit la composition de la famille.

A l'issue des débats les parties ont été informées que la décision serait rendue, après plus ample délibéré, par jugement mis à disposition au greffe le 24 mai 2024.

Ce délibéré a dû être prorogé au 17 juin 2024.

MOTIFS DE [P] DECISION

SUR [P] SAISIE ATTRIBUTION

Aux termes de l'article L 211-1 du code de procédure civile, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

Aux termes de l'article L 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats, et notamment de la pièce n°1 produite par Madame [P] divorcée [L], que, dans sa réponse à la saisie-attribution pratiquée, la société CIC NORD OUEST n'a pas indiqué que le compte saisi était un compte joint et n'a pas précisé l'identité d'un éventuel co-titulaire.
L' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS ne pouvait pas deviner ce qui ne lui était pas dit et elle ne pouvait pas savoir avoir à dénoncer la saisie à un co-titulaire d'un compte joint.

Par ailleurs, si l'article R 211-22 du code des procédures civiles d'exécution prévoit la dénonciation de la saisie-attribution au co-titulaire d'un compte joint, cette dénonciation n'est pas sanctionnée et son absence ne peut donc entraîner ni la nullité ni la caducité de la mesure de saisie-attribution pratiquée.

Avant de pratiquer la saisie-attribution, le créancier peut ne pas savoir si l'un des comptes saisis est ou non commun à un co-titulaire. C'est donc au co-titulaire du compte joint non tenu d'aucune solidarité avec le débiteur principal, d'établir que les sommes figurant au compte joint lui appartiennent.
Tribunal judiciaire de Lille N° RG 24/00106 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YD65

De par la loi, la saisie attribution contestée a porté sur l'ensemble des comptes ouverts au nom de Madame [P] divorcée [L].
Dans sa réponse à la saisie-attribution, la société CIC NORD OUEST indique d'ailleurs : « sauf erreur de notre part les comptes de notre client présentent, au 03 janvier 2024 un solde de [704,05 €]. Des comptes de notre client sont soumis à une convention de fusion de comptes et nos déclarations en tiennent compte ».
Le solde créditeur indiqué par le tiers détenteur résulte donc du solde de tous les comptes détenus par Madame [L] fusionnés.
Si Madame [L] démontre que le compte joint qu'elle détient avec son compagnon est principalement alimenté par ce dernier, elle ne démontre pas qu'il s'agit là du seul et unique compte qu'elle détient dans les livres de la société CIC NORD OUEST. Le solde de ce compte joint – 238,36 € le 29 décembre 2023, n'est par ailleurs pas en corrélation avec le solde saisi le 3 janvier 2024.
La seule production des relevés de compte du compte joint détenu par Madame [L] et son compagnon est donc insuffisante à démontrer que les sommes saisies appartiennent uniquement à ce dernier.

Dans ces conditions, la saisie-attribution contestée doit être regardée comme régulière et bien fondée.

Le saisissant ne peut enfin pas connaître le solde des comptes saisis avant d'avoir pratiqué la saisie-attribution. Il ne saurait donc être reproché à l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS d'avoir pratiqué la saisie-attribution contestée pour ne récupérer finalement que 96 €.
La somme recouvrée étant importante – 64 233 €, la saisie-attribution n'était pas une voie d'exécution disproportionnée.

En conséquence, il convient de débouter Madame [R] [P] de l'ensemble de ses demandes.

SUR LES DEPENS

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par une décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, Madame [R] [P] divorcée [L] succombe en ses demandes.

En conséquence, il convient de la condamner au entiers dépens de l'instance.

SUR LES FRAIS DE PROCEDURE

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, Madame [P] divorcée [L] succombe en ses demandes et reste tenue aux entiers dépens de l'instance.

En conséquence, il convient, d'une part, de la débouter de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, d'autre part, de la condamner à payer à l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS

Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe,

DEBOUTE Madame [R] [P] divorcée [L] de l'ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE Madame [R] [P] divorcée [L] aux entiers dépens de l'instance ;

DEBOUTE Madame [R] [P] divorcée [L] de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [R] [P] divorcée [L] à payer à l' URSSAF NORD PAS-DE-CALAIS la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.

La greffièreLe Président

Sophie ARESDamien CUVILLIER

Expédié aux parties le :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 24/00106
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.00106 ?
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