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13/06/2024 | FRANCE | N°24/00073

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jex, 13 juin 2024, 24/00073


COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 13 Juin 2024


N° RG 24/00073 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBK5


DEMANDERESSE :

Madame [L] [H]
[Adresse 3]
[Localité 4]

assistée par Me Laurence D’HERBOMEZ, avocat au barreau de LILLE


DÉFENDERESSE :

Madame [P] [H]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Me Laurent GUILMAIN, avocat au barreau de LILLE




MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Damien CUVILLIER, P

remier Vice-Président Adjoint du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREF...

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 13 Juin 2024

N° RG 24/00073 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBK5

DEMANDERESSE :

Madame [L] [H]
[Adresse 3]
[Localité 4]

assistée par Me Laurence D’HERBOMEZ, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

Madame [P] [H]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Me Laurent GUILMAIN, avocat au barreau de LILLE

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Damien CUVILLIER, Premier Vice-Président Adjoint du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 19 Avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2024, prorogé au 13 Juin 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 24/00073 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBK5

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

Par ordonnance de référé en date du 7 décembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de ROUBAIX a :
constaté que Madame [L] [H] occupe sans droit ni titre le logement situé [Adresse 2],dit en conséquence que Madame [L] [H] devra libérer l'immeuble de leur personne, de leurs biens et de tous occupants de leur chef,dit qu'à défaut pour Madame [H] d'avoir volontairement libéré les lieux, Madame [P] [H] pourra procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef,condamné Madame [L] [H] à verser à Madame [P] [H] une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle d'un montant mensuel de 1 000 € à compter de la présente décision et jusqu'à la date de la libération définitive des lieux caractérisée par la remise des clés.
Cette décision a été signifiée à Madame [L] [H] le 9 décembre 2022.

Le 3 janvier 2024, Madame [P] [H] a fait procéder à une saisie-attribution sur les comptes ouverts au nom de Madame [L] [H] dans les livres de la société CREDIT COOPERATIF.
Cette saisie-attribution a été dénoncée à Madame [L] [H] le 5 janvier 2024.

Par acte de commissaire de justice en date du 2 février 2024, Madame [L] [H] a saisi le juge de l'exécution aux fins de contestation de cette saisie-attribution.

Les parties ont comparu pour la première fois à l'audience du 8 mars 2024.

Après renvoi à leur demande, elles ont été entendues en leurs plaidoiries à l'audience du 19 avril 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A cette audience, Madame [L] [H] a formulé les demandes suivantes :
à titre principal :constater, dire et juger que Madame [P] [H] est mal fondée à agir à l'encontre de Madame [L] [H] pour exécuter l'ordonnance de référé du 7 décembre 2022,à titre subsidiaire :limiter le montant de la saisie attribution à hauteur de 1 700 €,en tout état de cause :débouter Madame [P] [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,condamner Madame [P] [H] à verser 5 000 € à Madame [L] [H] pour procédure abusive,condamner Madame [P] [H] à payer à Madame [L] [H] 2 000 € an titre de l'article 700 du code de procédure civile,condamner Madame [P] [H] aux entiers frais et dépens.
Au soutien de ses demandes, Madame [L] [H] fait d'abord valoir qu'elle occupait le logement mis à sa disposition par sa mère à titre gratuit. Elle soutient en conséquence que Madame [P] [H] est donc mal fondée à réclamer quelques sommes que ce soit à sa fille.

A titre subsidiaire, Madame [L] [H] demande le cantonnement de la saisie à la somme de 1 700 € en principal puisqu'elle a quitté le logement depuis janvier 2023 et que les sommes réclamées au titre de l'indemnité d'occupation de février 2023 à janvier 2024 ne sont donc pas dues. Madame [L] [H] n'a pas pu rendre les clés à sa mère puisque celle-ci a fait procéder sans prévenir au changement des serrures de l'appartement en janvier 2023, l'obligeant ainsi de fait à quitter les lieux. Madame [L] [H] ne dispose pas des nouvelles clés.

Madame [L] [H] estime que sa mère, qui n'a pas hésité à menacer des témoins, agit de façon abusive alors qu'elle lui avait laissé l'appartement à titre gratuit. Elle demande en conséquence l'allocation d'une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts.

En défense, Madame [P] [H] a pour sa part formulé les demandes suivantes :
constater que l'ordonnance de référé a été régulièrement signifiée par acte extrajudiciaire du 9 décembre 2022,constater que Madame [L] [H] ne justifie pas d'une libération effective des lieux caractérisée par la remise des clés ;en conséquence, dire bien fondée la saisie-attribution et débouter Madame [L] [H] de l'intégralité de ses demandes,à titre reconventionnel, condamner Madame [L] [H] à verser une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive par application combinée des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil,condamner Madame [L] [H] à payer une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, Madame [P] [H] fait d'abord valoir que Madame [L] [H] ne démontre par aucune pièce utile et valable avoir libéré les lieux en janvier 2023, Madame [Y] attestant n'avoir jamais rédigé l'attestation produite par la demanderesse. Madame [L] [H] ne démontre pas avoir remis les clés de l'appartement à sa mère.

Madame [P] [H] ne fait qu'exécuter une décision valablement signifiée. Sa procédure ne saurait être qualifiée d'abusive.

A l'issue des débats les parties ont été informées que la décision serait rendue, après plus ample délibéré, par jugement mis à disposition au greffe le 24 mai 2024.

Ce délibéré a dû être prorogé au 13 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA SAISIE ATTRIBUTION

Aux termes de l'article L 211-1 du code de procédure civile, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

En l'espèce, si Madame [P] [H] a pu laisser un temps l'appartement du [Adresse 2] à la disposition de sa fille à titre gratuit, elle bénéficie aujourd'hui d'une décision de justice, exécutoire par provision et régulièrement signifiée, ordonnant à Madame [L] [H] de quitter les lieux et de payer une indemnité d'occupation.
Madame [P] [H] dispose donc d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et elle est donc bien fondée à en poursuivre l'exécution.

Par cette saisie-attribution, Madame [P] [H] demande à sa fille paiement des indemnités d'occupation dues du mois de décembre 2023 au mois de janvier 2024, soit la somme en principal de 14 000 € outre 700 € dus au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [L] [H] prétend avoir quitté le logement depuis janvier 2023 mais n'avoir pas remis les clés à sa mère pensant cela inutile puisque les serrures étaient changées.
Madame [L] [H] produit trois attestations aux débats indiquant qu'elle a bien quitté les lieux en janvier 2023.
Même à ne pas tenir compte de l'attestation de [G] [U], fille mineure de Madame [L] [H], ni de celle de Madame [Y], discutée, il reste l'attestation de Madame [D], laquelle indique clairement et sans ambiguïté, que Madame [L] [H] a bien quitté les lieux en janvier 2023.

Si la remise des clés caractérise normalement le fait de quitter les lieux, le contexte particulier de ce dossier, entre une mère et sa fille, les relations étant visiblement particulièrement tendues et conflictuelles et l'agressivité patente – voir en ce sens la main courante déposée par Madame [Y] à l'encontre de Madame [P] [H] – il a lieu de considérer la preuve par attestation suffisante pour caractériser le départ des lieux.

Dans ces conditions, si la saisie- attribution doit être validée, elle doit être cantonnée, en principal, à la somme de 1 700 €, soit l'indemnité d'occupation due pour le seul mois de janvier 2023 et la somme due au titre de l'article 700 en suite de la procédure de référé.

Le Commissaire de justice procèdera au re-calcul des intérêts dus.

SUR LES DOMMAGES ET INTERETS

Sur les dommages pour saisie abusive
La saisie-attribution a été conduite en exécution d'une décision exécutoire par provision conférant à Madame [P] [H] un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.
La saisie-attribution critiquée est validée même si cantonnée.

Dans ces conditions, la saisie-attribution ne saurait être qualifiée d'abusive et Madame [L] [H] sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive
Madame [P] [H] ne démontre aucunement l'abus que sa fille aurait commis en défendant ses droits dans le cadre d'une procédure régulièrement introduite.

La saisie attribution est certes validée mais fortement cantonnée. Madame [L] [H] avait donc des raisons légitimes à intenter cette procédure.

En l'absence de tout abus à agir, Madame [P] [H] ne pourra qu'être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

En conséquence, il convient de débouter les parties de leurs demandes de dommages et intérêts.

SUR LES DEPENS

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par une décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, les parties succombent partiellement en leurs demandes.

En conséquence, il convient de dire que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

SUR LES FRAIS DE PROCEDURE

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, chacune des parties succombe partiellement en ses demandes.

En conséquence, il convient de débouter les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe,

VALIDE la saisie-attribution critiquée mais la cantonne, en principal, à la somme de 1 700 € ;

DIT que le commissaire de justice calculera à nouveau le montant des intérêts dus en fonction de ce principal ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes de dommages et intérêts ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.

La greffièreLe Président

Sophie ARESDamien CUVILLIER

Expédié aux parties le :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 24/00073
Date de la décision : 13/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-13;24.00073 ?
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