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03/06/2024 | FRANCE | N°23/08338

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jcp, 03 juin 2024, 23/08338


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 4]


☎ :[XXXXXXXX01]




N° RG 23/08338
N° Portalis DBZS-W-B7H-XQWD

N° de Minute : L 24/00366

JUGEMENT

DU : 03 Juin 2024





S.A. FRANFINANCE


C/

[V] [G] [S]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 03 Juin 2024






DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)


S.A. FRANFINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 3]


représentée par Me Charlotte HERBAUT, avocat au barreau

de LILLE

ET :


DÉFENDEUR(S)

M. [V] [G] [S], demeurant [Adresse 2]

non comparant




COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 25 Mars 2024

Eléonora ONGARO, Juge, assistée de S...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 4]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 23/08338
N° Portalis DBZS-W-B7H-XQWD

N° de Minute : L 24/00366

JUGEMENT

DU : 03 Juin 2024

S.A. FRANFINANCE

C/

[V] [G] [S]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 03 Juin 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

S.A. FRANFINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Charlotte HERBAUT, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

M. [V] [G] [S], demeurant [Adresse 2]

non comparant

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 25 Mars 2024

Eléonora ONGARO, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 03 Juin 2024, date indiquée à l'issue des débats par Eléonora ONGARO, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

EXPOSÉ DES FAITS

Suivant offre de contrat acceptée le 5 avril 2018, la société anonyme FRANFINANCE a consenti à M. [V] [G] [S] un crédit à la consommation sous la forme d’un prêt personnel d’un montant de 15 000 euros, remboursable en 84 mensualités de 213,24 euros, moyennant un taux d’intérêt annuel nominal de 5,18 % et un taux annuel effectif global de 5,30 %.

Des mensualités étant restées impayées à leur échéance, la société FRANFINANCE a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 avril 2022, mis en demeure M. [V] [G] [S] de s’acquitter des mensualités échues impayées, dans un délai de 15 jours, sous peine de déchéance du terme. Puis, par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 septembre 2022, la société FRANFINANCE lui a finalement notifié la déchéance du terme, et l'a mis en demeure de rembourser l’intégralité du crédit.

Par acte de commissaire de justice du 22 août 2023, la société FRANFINANCE a ensuite fait assigner M. [V] [G] [S] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes, afin d’obtenir sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :

8 853,72 euros au titre de l’intégralité des sommes restant dues en exécution du contrat du 5 avril 2018, outre intérêts au taux contractuel de 5,18 % à compter de la mise en demeure,
500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, en plus des entiers dépens.

L'affaire a été appelée à l'audience du 25 mars 2024, où le juge des contentieux de la protection a relevé d’office les moyens pris de la forclusion et de la déchéance du droit aux intérêts contractuels.

La société FRANFINANCE, représentée par son conseil, s’en rapporte aux demandes contenues dans l’assignation et actualise sa créance au montant de 5 736,52 euros.

M. [V] [G] [S] reconnaît le principe de sa dette mais sollicite des délais de paiement compte tenu de sa situation financière. Il s’oppose au paiement d’intérêts de retard, indiquant ne pas être en retard dans le règlement des échéances, et souligne avoir régularisé de nombreux impayés entre les mains de l’huissier mandaté par l’établissement de crédit.

L’affaire a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où le présent jugement a été rendu par mise à disposition au greffe.

MOTIVATION

Selon l’article R.632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions de ce code.

Il convient donc, en l'espèce, d'appliquer d’office au contrat litigieux les dispositions du code de la consommation, dans leur numérotation et rédaction en vigueur au 5 avril 2018, sur lesquelles les parties ont été en mesure de présenter leurs observations, conformément aux dispositions de l'article 16 du code de procédure civile.

I. Sur la demande en paiement du solde du crédit

- Sur la recevabilité de l’action

Il résulte des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile que le délai de forclusion est une fin de non-recevoir. Par application de l’article 125 du même code, les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

En application des dispositions de l'article R.312-35 du code de la consommation créé par le décret n°2016-884 du 29 juin 2016, les actions engagées au titre d’un crédit à la consommation doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, ou le premier incident de paiement non régularisé, ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable, ou le dépassement, au sens du 13° de l'article L.311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à l'article L.312-93.

Les dispositions de l’article R.312-35 du code de la consommation étant d’ordre public, la forclusion doit être soulevée d’office.

En l'espèce, il ressort de l'offre préalable de prêt, de l'historique du prêt et du récapitulatif de l'état des comptes que le premier impayé non régularisé est intervenu le 30 avril 2022 en sorte que l'action introduite par assignation signifiée le 22 août 2023est recevable et sera déclarée comme telle.

- Sur l'exigibilité du solde du prêt

La déchéance du terme du prêt a été prononcée le 6 septembre 2022 après mise en demeure de payer les échéances impayées adressée par courrier recommandé du 7 avril 2022 avec accusé de réception revenu avec la mention pli avisé et non réclamé, le débiteur ne s'étant pas exécuté dans le délai de 15 jours fixé par le prêteur.

- Sur le montant total de la créance

La société FRANFINANCE demande à bénéficier des intérêts au taux contractuel.

Il lui appartient donc de démontrer, conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil, que la formation du contrat du 5 avril 2018 et son exécution sont conformes aux dispositions d'ordre public du code de la consommation.

L’article L.341-2 du code de la consommation prévoit que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L.312-14 et L.312-16 du code de la consommation est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L’article L.312-16, auquel ce texte fait référence, impose au prêteur de consulter, avant de conclure le contrat de crédit, le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels, géré par la Banque de France, et prévu à l'article L.751-1 du même code.
L’article L.341-2 du code de la consommation prévoit que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L.312-14 et L.312-16 du code de la consommation est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L’article L.312-16, auquel ce texte fait référence, impose au prêteur de consulter, avant de conclure le contrat de crédit, le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels, géré par la Banque de France, et prévu à l'article L.751-1 du même code.

Si cet article n’impose, dans sa rédaction applicable au litige, aucun formalisme quant à la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers par les organismes prêteurs, l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction applicable au litige, qu’en application de l’article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu’ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l’article 2, conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable.

L’article 13 II de l’arrêté du 26 octobre 2010 dispose que les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er mettent en place des procédures internes leur permettant de justifier que les consultations du fichier ne se sont effectuées qu’aux fins mentionnées à l’article 2 et à elles seules.

Pour démontrer avoir satisfait à son obligation de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, la société FRANFINANCE communique un document mentionnant la date d’interrogation le 16 avril 2018 (pièce n°12). Ce document comporte le prénom, nom et date de naissance de l’emprunteur, le type de crédit ainsi que la mais ne précise ni la date de réponse, ni le numéro de consultation obligatoire, ni le résultat de la consultation.

En l’absence de mention du résultat de la consultation du fichier, la société FRANFINANCE, qui ne justifie pas avoir conservé le résultat de la consultation sur un support durable, ne satisfait pas aux obligations de l’article L.312-16 du code de la consommation. En application de l’article L.341-2 précité, il convient de la déchoir totalement de son droit aux intérêts.

Conformément à l'article L 341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital. Cette déchéance s’étend donc aux intérêts et à tous leurs accessoires.

Par ailleurs, ces dispositions doivent être interprétées conformément à la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs, dont les dispositions nationales ne sont que la transposition, et qui prévoit en son article 23 que les sanctions définies par les États membres en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Au regard de cette dernière exigence, la déchéance du droit aux intérêts prononcée à l'encontre du prêteur doit donc également comprendre les intérêts au taux légal.

Il convient, en conséquence, d'écarter toute application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L 313-3 du code monétaire et financier et de dire que les sommes dues au prêteur ne produiront aucun intérêt, même au taux légal.

Les sommes dues se limiteront par conséquent à la somme de 15000 euros, correspondant à la différence entre le montant effectivement débloqué au profit de M. [V] [G] [S], soit la somme de 15 000 euros et celui, justifié et non contesté, des règlements effectués par ce dernier soit 8 414,06 euros outre 20 mensualités de 220 euros soit un montant total de 4 400 euros entre les mains de l’huissier.

M. [V] [G] [S] sera donc condamné à verser à la société FRANFINANCE la somme de 2 185,94 euros.

- Sur les délais de paiement

L’article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

En l’espèce, M. [V] [G] [S] s’est acquitté, depuis la transmission du dossier à un huissier de justice, de la somme de 220 euros par mois en règlement du contrat de crédit. Il démontre donc être en capacité de régulariser sa dette par versements successifs. Il sera donc autorisé à s’acquitter du solde du crédit en 11 mensualités selon les modalités précisées au dispositif.

II. Sur les autres demandes

En application de l'article 696 du code de procédure civile, M. [V] [G] [S], qui succombe à l'instance, sera condamné aux dépens.

En revanche, l’équité et la situation économique respective des parties commandent d’écarter toute condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin, selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DECLARE recevable l’action de la société anonyme FRANFINANCE ;

PRONONCE la déchéance totale du droit aux intérêts de la société anonyme FRANFINANCE au titre du crédit souscrit le 5 avril 2018 par M. [V] [G] [S],

ÉCARTE l'application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L.313-3 du code monétaire et financier,

CONDAMNE M. [V] [G] [S] à payer à la société FRANFINANCE la somme de 2 185,94 euros, à titre de restitution des sommes versées en application du contrat précité,

DIT que cette somme ne produira pas d'intérêt, même au taux légal,

AUTORISE M. [V] [G] [S] à se libérer de sa dette en 10 mensualités, 10 mensualités d’un montant de 200 euros et la 11ème mensualité soldant la dette,

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [V] [G] [S] aux dépens,

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire.

Ainsi signé par la juge et la greffière susnommées et mis à disposition des parties le 3 juin 2024.

La GreffièreLa Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jcp
Numéro d'arrêt : 23/08338
Date de la décision : 03/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-03;23.08338 ?
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