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27/05/2024 | FRANCE | N°22/01148

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 04, 27 mai 2024, 22/01148


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-
Chambre 04
N° RG 22/01148 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V4YH
JUGEMENT DU 27 MAI 2024
DEMANDEURS :

M. [C] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (ESPAGNE)
représentée par Me Charlotte DESMON, avocat postulant au barreau de LILLE, Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS,

Mme [J] [H] épouse [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (ESPAGNE)
représentée par Me Charlotte DESMON, avocat postulant au barreau de LILLE, Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS,

DEFENDEURS :

M. [S] [M]<

br>[Adresse 5]
[Localité 7] (BELGIQUE)
représenté par Me Jean-pierre VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

Mme [W] [...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-
Chambre 04
N° RG 22/01148 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V4YH
JUGEMENT DU 27 MAI 2024
DEMANDEURS :

M. [C] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (ESPAGNE)
représentée par Me Charlotte DESMON, avocat postulant au barreau de LILLE, Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS,

Mme [J] [H] épouse [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (ESPAGNE)
représentée par Me Charlotte DESMON, avocat postulant au barreau de LILLE, Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS,

DEFENDEURS :

M. [S] [M]
[Adresse 5]
[Localité 7] (BELGIQUE)
représenté par Me Jean-pierre VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

Mme [W] [P] épouse [M]
[Adresse 5]
[Localité 7] (BELGIQUE)
représentée par Me Jean-pierre VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

Me [T] [U]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE

La S.A.R.L. [N], [E], [R], [U], [F], [Z], Notaires Associés
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président: Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice-présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJON, Juge

GREFFIER: Yacine BAHEDDI, Greffier

DEBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 24 Mai 2023.

A l’audience publique du 01 Février 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 18 avril 2024 puis prorogé au 27 Mai 2024.

Ghislaine CAVAILLES, Juge rapporteur qui a entendu la plaidoirie en a rendu compte au tribunal dans son délibéré

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 27 Mai 2024 par Ghislaine CAVAILLES, Président, assistée de Yacine BAHEDDI, greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique daté du 29 juin 2020, Monsieur [S] [M] et Madame [W] [P] épouse [M] (ci-après « les époux [M] » ou « les vendeurs ») ont consenti une promesse synallagmatique de vente à Madame [J] [H] épouse [B] portant sur une maison individuelle à usage d'habitation et les fonds et terrain en dépendant sis [Adresse 6] (Nord), moyennant le prix de 2.600.000 euros, dont 249.000 euros au titre de mobilier.

Il était, notamment, expressément stipulé à l'acte que Monsieur et Madame [M] s'engageaient à justifier auprès de Madame [B], avant la réitération par acte authentique, du bon fonctionnement des principaux équipements de la maison dont liste était précisée et ce, au moyen d'attestations émanant de professionnels reconnus.

Par acte authentique en date du 28 août 2020, reçu par Maître [T] [U], notaire à [Localité 4], avec la participation de Maître [I] [V], assistant les acquéreurs, Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] (ci-après ''les acquéreurs'' ou ''les époux [B]'') ont, ainsi, fait l’acquisition dudit immeuble.

Se plaignant du mauvais état de fonctionnement de certains des équipements de l'immeuble, les époux [B] ont, par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 21 avril 2021 par l'intermédiaire de leur conseil, mis en demeure les époux [M] d'avoir à leur verser sous huitaine la somme de 25.127,60 euros à parfaire, au titre des premières dépenses de réparation devant être effectuées pour la remise en conformité des installations alléguées défaillantes.

Aucune solution amiable n'ayant été trouvée, Monsieur et Madame [B] ont, suivant actes d'huissier de Justice en dates des 1er, 07 et 08 février 2022, assigné Monsieur et Madame [M], Maître [T] [U] et la SARL ''[K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés'' devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins d’obtenir principalement prise en charge des frais de mise en conformité du bien et indemnisation de leurs préjudices.

La clôture est intervenue le 24 mai 2023 par ordonnance du même jour et l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoiries du 1er février 2024.

* * *

Au terme de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 31 janvier 2023 et expurgées des moyens, Monsieur et Madame [B] sollicitent de voir le tribunal, sur le fondement des articles 1103, 1603, 1604, 1615, 1217, 1231-1 et1240 du Code civil :

- les déclarer recevables et bien fondés dans leurs moyens, demandes et prétentions formées à l’encontre des époux [M], de Maître [U] et de la société [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés ;
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions des époux [M] ;
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de Maître [U] ;
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de la société [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés,

Y faisant droit :

A titre principal :
- Sur le manquement par les vendeurs à leur obligation de délivrance conforme : condamner solidairement les époux [M] à leur verser la somme de 25.127,6€, à parfaire, au titre des frais de mise en conformité du bien ;
- Sur les préjudices des époux [B] : condamner solidairement les époux [M] à leur verser :
- la somme de 10.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance ;
- la somme de 10.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;
- la somme de 10.000€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

A titre subsidiaire, sur les manquements de Maître [U] à ses obligations : condamner solidairement Maître [U] et la société [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés, à relever et garantir les époux [M] de toutes les condamnations pécuniaires susceptibles d’être prononcées à leur encontre par le Tribunal judiciaire de LILLE à leur propre profit au titre de la présente instance ;

En tout état de cause,
- condamner solidairement les époux [M], Maître [U] et la société [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés, au paiement à leur bénéfice de la somme de 7.500€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner in solidum les époux [M], Maître [U] et la société [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés, aux entiers dépens de la procédure ;
- rappeler que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est de droit.

Au terme de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 23 mars 2023 et expurgées des moyens , Monsieur et Madame [M] sollicitent de voir le tribunal, au visa des articles 1103, 1603, 1604, 1614, 1240 du Code civil et 9, 541 et 700 du Code de procédure civile :

A titre principal :
- rejeter toutes prétentions, fins, moyens et conclusions des Consorts [B] ;
- écarter les pièces des Consorts [B] numérotées 8 et 9 ;
- débouter les Consorts [B] de leur demande fondée sur un manquement des Consorts [M] à leur obligation de délivrance conforme ;
- débouter les Consorts [B] de leur demande de condamnation des Consorts [M] au paiement d’une somme de 25.127,60 euros à parfaire ;
- débouter les Consorts [B] de leur demande formulée en réparation d’un prétendu préjudice de jouissance ;
- débouter les Consorts [B] de leur demande formulée en réparation d’un prétendu préjudice de moral ;
- débouter les Consorts [B] de leur demande formulée au titre d’une prétendue résistance abusive des Consorts [M] ;
- condamner les Consorts [B] au paiement d’une somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile au profit des Consorts [M] et aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire :
- condamner Maître [T] [U] et la société SARL « [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U] et [O] [F], Notaires associés » sur le fondement de leur responsabilité civile professionnelle à leur payer une somme représentant 95% du montant total des condamnations pécuniaires que la présente juridiction pourrait prononcer à l’encontre des Consorts [M] ;
- condamner Maître [T] [U] et la société SARL « [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U] et [O] [F], Notaires associés » au paiement d’une somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile au profit des Consorts [M] ;
- condamner solidairement les Consorts [B], Maître [T] [U] et la société SARL « [K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U] et [O] [F], Notaires associés » aux entiers dépens.

Au terme de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 24 novembre 2022, Maître [U] et la société de notaires sollicitent de voir le tribunal, au visa de l'article 1240 du Code civil :

- rejeter toutes prétentions, fins et conclusions de Monsieur et Madame [B] et de Monsieur et Madame [M], les en débouter ;
- les condamner solidairement ou l’un à défaut de l’autre à leur verser la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du CPC ;
- les condamner solidairement ou l’un à défaut de l’autre aux entiers frais et dépens de l’instance ;
- ordonner à Monsieur et Madame [B] de communiquer leur nouvelle adresse ;
- à titre subsidiaire, écarter l’exécution provisoire.

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties susvisées pour l'exposé des moyens, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il y a lieu de dire qu’une demande tendant à voir “juger” ou à “constater” ne constitue pas une prétention au sens juridique du terme devant être tranchée par le tribunal. Ces demandes n'ont, par conséquent, pas été retenues en tant que telles mais seront, le cas échéant, étudiées en leur qualité de moyens des parties.

Sur la demande tendant à voir écarter certains pièces justificatives

Monsieur et Madame [M] demandent au tribunal d'écarter les pièces numérotées 8 et 9 produites à la cause par les époux [B].

Outre que les défendeurs n'indiquent pas sur quel texte ils fondent leur prétention à ce titre, force est de constater que cette dernière n'est pas étayée dans le corps des conclusions, sauf à souligner que les procès-verbaux de constats critiqués ont été établis non-contradictoirement, ce qui n'est jamais un motif d'irrecevabilité, le tribunal devant seulement s'assurer que ces éléments ont ensuite été soumis à la contradiction des parties dans le cadre de la présente instance, ce qui est le cas.

La demande sera rejetée.

Sur l'existence d'un défaut de délivrance conforme

Conformément à l'article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L'article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aux termes de l'article 1603 du Code civil, le vendeur a deux obligations principales : celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.

Les articles 1604 et 1605 du même code précisent, à cet égard, que la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur ; l'obligation de délivrer la chose comprenant ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel.

En application de ces dispositions, le vendeur est ainsi tenu de délivrer une chose conforme aux prescriptions contractuelles et cela quand bien même il n’aurait pas lui-même connu le défaut de conformité au moment de la vente.

Si tel n’est pas le cas, l’acquéreur est en droit de solliciter, soit la résolution de la vente, soit l’allocation de dommages intérêts, sous réserve de justifier de l’existence d’un préjudice.

En l'espèce, Monsieur et Madame [B] se plaignent d'avoir découvert le mauvais fonctionnement de certains des équipements de l'immeuble et notamment du chauffage, de la ventilation double flux, de la piscine, du jacuzzi, du hammam et de la domotique, faisant valoir, notamment :

- un problème général de VMC, avec un débit d'air insuffisant pour chaque pièce de l'habitation et une absence de cache de bouche d'aération voire de bouche d'aération dans certains pièces,
- un défaut d'étanchéité de la piscine,
- l'absence de fonctionnement du coffret électrique commandant le volet de la piscine,
- un défaut de chauffage de la piscine, du jacuzzi et du hammam, avec notamment une absence de fonctionnement du réchauffeur électrique du jacuzzi,
- le dysfonctionnement du chauffage au sol de l'habitation, plusieurs servomoteurs étant hors service et les collecteurs planchers des chambres des enfants étant à remplacer.

Ils sollicitent ainsi la prise en charge financière par les vendeurs des travaux de réparation et de mise en conformité desdits équipements aux stipulations de l'acte de vente, ainsi que l'indemnisation de leurs préjudices.

Sur ce, il est constant que la promesse synallagmatique de vente conclue le 29 juin 2020 reprenait les clauses habituelles en la matière s'agissant de l'état du bien et de ses meubles, prévoyant ainsi que le bénéficiaire prendrait le bien dans l'état où il se trouvait au jour de la signature de l'acte, tel qu'il l'avait vu et visité, sans pouvoir exercer de recours en garantie contre les vices apparents ou cachés, sauf exceptions classiques, ni de recours en raison du mauvais fonctionnement, du mauvais état, du défaut d'entretien ou de la vétusté des meubles (pièce n°1 demandeurs, page 12).

La promesse contenait, néanmoins, en pages 23 et 24, la stipulation particulière suivante :

« Etat des équipements

Le PROMETTANT s’est engagé à justifier au BENEFICIAIRE dès que possible, et en tout état de cause avant la réitération de l’acte objet des présentes, du bon fonctionnement des principaux équipements suivants de la maison, au moyen d’attestations émanant de professionnels reconnus, savoir :

- Attestation de bon fonctionnement de la piscine, de son système de filtration et du volet de sécurité ;
- Attestation de bon fonctionnement de l’équipement domotique (comprenant les éléments de sécurité), télévision, cinéma et sonorisation de la maison ;
- Attestation de bon fonctionnement de chauffage et ventilation double flux ;
- Attestation de bon fonctionnement de la cave à vin ;
- Attestation de bon fonctionnement de la cuisine équipée ;
- Attestation de bon fonctionnement du jacuzzi et du hammam ».

L'acte authentique de vente finalement régularisé le 28 août 2020 confirme l'existence d'une clause de non-garantie des vices cachés et de non-garantie de mauvais fonctionnement, de mauvais état, de mauvais entretien et de vétusté des meubles, sous réserve, toutefois, des dispositions particulières stipulées à l'acte relativement à certains éléments d'équipements et ainsi rédigées (pièce n°2, pages 10 et 20) :

«  [...]

Aux termes de la promesse de vente, le VENDEUR s’est engagé à justifier à l’ACQUEREUR du bon fonctionnement des principaux équipements de la maison au moyen d’attestations émanant de professionnels reconnus. Pour satisfaire à cet engagement, le VENDEUR a produit à l’ACQUEREUR dès avant ce jour, les justificatifs suivants, dont copies demeurées ci-annexées :

- Factures de la société JC CONCEPT, dont le siège est à [Adresse 8] portant sur le nettoyage du filtre, le changement d’ampoule du vidéoprojecteur ainsi le contrôle de l’installation audio et vidéo ;
- Facture de la société MAISON NET SYSTEMES, dont le siège est à [Adresse 9], portant sur la révision et la vérification générale du système domotique ;

- Devis de la société FRS, dont le siège est à [Adresse 10], portant sur le remplacement du moteur du volet de la piscine et le système de filtration de la piscine et du SPA ;
- Facture de la société R2S, dont le siège est à [Adresse 11], portant sur la remise à niveau du système d’alarme, de vidéosurveillance et d’incendie ;
- Factures de la société MGC, dont le siège est à [Adresse 12], portant sur le contrôle des électrovannes du plancher chauffant, le remplacement des pompes primaires Salmson et corps de vanne 3 voies, la remise en route du chauffage, le remplacement des plaques de l’échangeur piscine et le remplacement de la tuyauterie.

Le VENDEUR déclare en outre que chacun de ces équipements fonctionne normalement à ce jour. Il précise que le projecteur de la salle de cinéma est actuellement en cours de réparation, la facture étant d'ores et déjà acquittée par le VENDEUR et sera réinstallée à ses frais dès son retour. ».

Il se déduit de cette formulation que les époux [M] ne se sont engagés, au terme de l'acte authentique de vente, à la délivrance en état de fonctionnement ''normal'' que des équipements suivants, à l'exclusion de tous autres :

système de vidéo-projection de l'immeuble,système domotique,piscine et volet de sécurité de cette dernière,système de filtration de la piscine et du SPA (ou jacuzzi),système d'alarme, de vidéosurveillance et d'incendie,système de chauffage, en ce compris plancher chauffant.
Or, le tribunal observe que les acquéreurs n'ont pas formulé et inséré à l'acte authentique de quelconque réserve relativement aux autres éléments d'équipement non-visées par les factures et devis susvisés, de sorte qu'ils ne sont plus admis à formuler recours contre les vendeurs à ces titres, y ayant renoncé aux termes de l'acte authentique du 28 août 2020.

Les réclamations formulées par les époux [B] concernant l'existence de désordres affectant le système de ventilation double flux ainsi que le hammam ne sauraient, dans ces conditions, aboutir, en application de la clause de non-garantie insérée à l'acte authentique de vente.

Pour le surplus, au soutien de l'existence de défauts de conformité affectant la piscine, le jacuzzi, le système de chauffage voire le système domotique de l'immeuble objet du litige, les époux [B] versent aux débats les éléments suivants :

- un devis établi le 05 janvier 2021, soit environ quatre mois après la transaction, par l'entreprise FRS FRANK [L] SERVICES, chiffrant pour un montant total de 15.101,60 euros HT (après déduction des frais relatifs au hammam), notamment, le nettoyage des lames du volet de la piscine et de la rouille des pièces inox, la réparation de la couverture immergée de la piscine, le remplacement de certaines pièces (filtre de piscine, lampes UV de la piscine et du SPA, masse filtrante et réchauffeur électrique du SPA), mais également la fourniture et l'installation d'éléments a priori nouveaux tels que des projecteurs subaquatiques pour la piscine et des panneaux de désinfection ; sont également chiffrés des produits consommables relatifs à l'entretien normal de la piscine et du SPA (chlore, pastilles de floculant, etc.) – pièce n°4 ;
- un devis établi le 19 janvier 2021 par la société MGC MAINTENANCE GENIE CLIMATIQUE, chiffrant le remplacement des collecteurs « défectueux » des planchers chauffants des chambres des enfants de l'habitation à la somme de 945,75 euros H.T. soit 1.040,32 euros T.T.C. – pièce n°6 ;
- une attestation établie le 02 février 2021 par la société MGC MAINTENANCE GENIE CLIMATIQUE, laquelle certifie « n'avoir réalisé aucune prestation de maintenance au domicile de Monsieur et Madame [M] au [Adresse 6] pour l'année 2020 » – pièce n°7.

Les demandeurs versent également à la cause un procès-verbal de constat dressé le 18 mars 2021, soit près de sept mois après la vente de l'immeuble, aux termes duquel Maître [X] reprend principalement les déclarations de l'un des intervenants de la société MGC MAINTENANCE GENIE CLIMATIQUE, lequel, notamment (pièce n°8) :

- indique que les deux collecteurs du local technique de la salle de jeux ne sont plus étanches et doivent être changés, l'eau continuant de circuler dans les circuits du plancher chauffant desservant les chambres des enfants même lorsque le chauffage est éteint,
- mentionne l'existence d'un problème de débit d'eau au niveau du chauffe eau, sans que le motif de ce dysfonctionnement n'ait été décelé.

Les seules constatations personnelles de l'huissier de Justice concernent l'existence de traces de rouille et de traces de coulures sur la carrosserie du ballon thermodynamique au sein du local technique de centrale de traitement d'air double flux, l'absence de certaines bouches d'aération (dans les toilettes de la suite parentale, la salle de cinéma et à l'extérieur du hammam), ainsi que l'existence, lors de l'augmentation de la fréquence de fonctionnement du moteur d'extraction de la piscine, d'une amplification sensible du bruit avec important bruit de roulement, sans, toutefois, que la déclaration selon laquelle ce bruit se ferait entendre jusque dans l'habitation et causerait une importante gêne n'ait été vérifiée par l'huissier.

Enfin, il est produit un procès-verbal de constat dressé le 26 mars 2021 par ce même huissier de Justice, lequel, reprenant les déclarations d'un domoticien, Monsieur [A], et du responsable entretien et maintenance de la piscine, du jacuzzi et du hammam de l'habitation, Monsieur [L], selon lesquels, notamment (pièce n°9) :

il existerait un défaut d'étanchéité de la piscine entre le plastique et le béton, ainsi qu'une fuite au niveau des skimmers dans le vide sanitaire (avec baisse du niveau d'eau de la piscine d'environ six centimètres sur deux mois), l'huissier y ayant constaté des traces de calcaire blanchâtres et des traces d'infiltration, sans que leur caractère récent ou ancien n'ait été daté ;le coffret électrique commandant le volet de la piscine était, de même que les projecteurs LED, hors service à l'entrée dans les lieux suite à la vente, ce que l'huissier de Justice n'a pas pu vérifier, les travaux de réparation étant en cours,le système de pompe à chaleur ne permet pas, en hiver, de chauffer simultanément la maison et la piscine ;l’alimentation domotique était hors service et a dû être remplacée ;dix servomoteurs du chauffage au sol, qui étaient hors service, ont dû être changés (sans que justificatif de ces travaux ne soit communiqué).
Pour le surplus, il est fait état de nombreux changements réalisés au sein de l'habitation, notamment en terme de domotique, sans que ces modifications soient reliées à de quelconques défectuosités, mais plutôt aux souhaits et besoins particuliers des nouveaux propriétaires.

Il n'est, au-delà de ces éléments, produit à la cause aucune expertise, qu'elle soit amiable ou judiciaire.

Or, les éléments versés aux débats ci-dessus repris et qui émanent des mêmes professionnels (la société MGC pour le système de chauffage - pièces n°6 à 8 ; M. [L] pour la partie piscine/jacuzzi – pièces n°4 et 9 ; M. [A] pour la partie domotique – pièce N°9 uniquement), qui sont au demeurant employés réguliers des époux [B], ne sont pas corroborés par d'autres éléments de preuve et ne sauraient permettre, à eux seuls, de démontrer l'existence d'un dysfonctionnement du système domotique, de la piscine et de son volet, ni du système de chauffage, non plus, a fortiori, que l'existence de ces dysfonctionnements au jour de la transaction.

Il est, à cet égard, intéressant de relever que Monsieur [A] a indiqué à l'huissier que, lors du contrôle du système domotique préalablement à la vente, celui-ci fonctionnait à 95% et ne présentait, en tout état de cause, pas le problème d'alimentation ayant conduit à être reconnu hors service (page 26). Au terme de la fiche d'intervention datée du 26 juin 2020, Monsieur [A] avait, pourtant, assuré que « tout [était] fonctionnel » (cf. fiche d'intervention M@ISONNET SYSTEMES annexée à l'acte authentique de vente).

De même, lors des opérations de constat, Monsieur [L] a reconnu avoir lui-même démonté, à une date non-précisée, les enjoliveurs des deux skimmers de la piscine et qu'à cette occasion, « des carreaux de mosaïque se sont décollés », dégradation dont il ne peut être exclu qu'elle a contribué à l'apparition d'une fuite, à supposer cette dernière démontrée, l'huissier ne l'ayant pas personnellement constatée (page 2).

Dans ces conditions, il ne peut qu'être constaté que les époux [B] défaillent à rapporter la preuve d'un défaut de délivrance par les vendeurs d'un bien conforme aux stipulations contractuelles.

L'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre des époux [M], pour lesquels aucune faute contractuelle et, partant, aucune résistance abusive, ne sont rapportées, devra être rejetée.

Dans ces conditions, et sans qu'il y ait lieu à rechercher l'existence d'un quelconque manquement de la part du notaire instrumentaire, les prétentions formulées à titre subsidiaire tendant à voir condamner Maître [U] et sa société à relever et garantir les époux [M] de tout ou partie des condamnations pécuniaires susceptibles d'être prononcées à leur encontre au profit des époux [B] ne saurait davantage prospérer.

Sur la demande reconventionnelle en communication de la nouvelle adresse des demandeurs

Conformément à l'article 133 du Code de procédure civile, si la communication des pièces n'est pas faite, il peut être demandé, sans forme, au juge d'enjoindre cette communication.

En l'espèce, Maître [U] et la société de notaires demandent, enfin, au tribunal, au terme du dispositif de leurs conclusions, d'ordonner à Monsieur et Madame [B] de communiquer leur nouvelle adresse.

Néanmoins, la demande ne repose sur aucun fondement juridique explicite.

Aucun élément n'est produit relativement au défaut d'actualisation allégué de l'adresse de Monsieur et Madame [B].

Le demande doit être rejetée.

Sur les demandes accessoires

L’article 696 du Code de procédure civile dispose : « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

Il résulte des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile que « dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

En l'espèce, Monsieur et Madame [B], qui succombent en leurs demandes, seront condamnés in solidum aux entiers dépens de l'instance. Ils seront, dès lors, déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.

Par ailleurs, l’équité commande qu’il soit fait application des dispositions de l’article 700 précité au profit des vendeurs, d'une part, et du notaire instrumentaire et de sa société, d'autres part, lesquels ont été contraints d’exposer des frais irrépétibles non-compris dans les dépens de l'instance pour se défendre en Justice. Il leur sera accordé, à ce titre, la somme de 3.500 euros.

Enfin, l'assignation ayant été délivrée postérieurement au 1er janvier 2020, date d'entrée en vigueur du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, il convient de rappeler que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire, en application du nouvel article 514 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,

Rejette la demande tendant à voir écarter les pièces numérotées 8 et 9 communiquées par Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] ;

Déboute Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] de l'intégralité de leurs demandes ;

Condamne Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] à payer à Monsieur [S] [M] et Madame [W] [P] épouse [M] la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] à payer à Maître [T] [U] et la SARL ''[K] [N], [Y] [E], [D] [R], [T] [U], [O] [F] et [O] [Z], notaires associés'' la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum Monsieur [C] [B] et Madame [J] [H] épouse [B] aux entiers dépens de l'instance ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Rappelle que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit ;

Le Greffier,La Présidente.


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 04
Numéro d'arrêt : 22/01148
Date de la décision : 27/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-27;22.01148 ?
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