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19/03/2024 | FRANCE | N°23/00402

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Pôle social, 19 mars 2024, 23/00402


1/Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00402 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XAN4
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

PÔLE SOCIAL

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JUGEMENT DU 19 MARS 2024

N° RG 23/00402 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XAN4

DEMANDERESSE :

Mme [H] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Comparante

DEFENDERESSE :

CARSAT DES [Localité 3] venant aux droits de la CARSAT [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Mme [S], dûment mandatée




COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président: Maryse MPUTU-COBBAUT, Juge
As

sesseur: Anne JALILOSSOLTAN, Assesseur du pôle social collège employeur
Assesseur: Pierre MEQUINION, Assesseur du pôle social collège salarié

Greffier...

1/Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00402 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XAN4
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

PÔLE SOCIAL

-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

JUGEMENT DU 19 MARS 2024

N° RG 23/00402 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XAN4

DEMANDERESSE :

Mme [H] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Comparante

DEFENDERESSE :

CARSAT DES [Localité 3] venant aux droits de la CARSAT [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Mme [S], dûment mandatée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président: Maryse MPUTU-COBBAUT, Juge
Assesseur: Anne JALILOSSOLTAN, Assesseur du pôle social collège employeur
Assesseur: Pierre MEQUINION, Assesseur du pôle social collège salarié

Greffier

Claire AMSTUTZ,

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 Janvier 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 19 Mars 2024.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par courrier en date du 7 juillet 2022, la CARSAT [Localité 4], aux droits de laquelle vient la CARSAT des [Localité 3], a notifié à Mme [H] [W] l'attribution d'une retraite personnelle au 1er juillet 2022, au taux plein de 50% au titre l'inaptitude au travail, calculée sur la base d'un revenu annuel moyen de 21 387,17 euros et d'une durée d'assurance de 124 trimestres retenus pour le calcul de la retraite dans le cadre de la liquidation unique des régimes alignés.

Par courrier du 31 août 2022, reçu le 2 septembre 2022, Mme [W] a saisi la commission de recours amiable de la CARSAT afin de contester le montant du salaire annuel moyen retenu pour le calcul de ses droits à pension de retraite personnelle.

Par courrier du 7 octobre 2022, la CARSAT a notifié à Mme [W] la modification des éléments de calcul de la retraite personnelle attribuée à compter du 1er juillet 2022, au taux plein de 50% au titre de l'inaptitude au travail. Cette retraite a été calculée sur la base d'un revenu annuel moyen de 22 236,66 euros et d'une durée d'assurance de 124 trimestres retenus pour le calcul de la retraite dans le cadre de la liquidation unique des régimes alignés.

Par lettre recommandée avec accusé réception expédiée le 10 mars 2023, Mme [W] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lille afin de contester le calcul de sa pension de retraite personnelle.

Les parties ayant été régulièrement convoquées à une première audience du 9 novembre 2023, après renvoi, l'affaire a été plaidée à l'audience du 23 janvier 2024.

À l’audience, Mme [W] demande au tribunal de :
- ordonner la réintégration de ses indemnités journalières de congé de maternité à ses revenus de l'année 1985,
- exclure du calcul de son salaire annuel moyen, pour le calcul de ses droits à pension, ses salaires des années 1978 et 1979,
- condamner la CARSAT à lui payer la différence entre la pension de retraite notifiée et la pension recalculée.

Au soutien des prétentions, sur la recevabilité de sa demande de reprise des indemnités journalières de 1985, Mme [W] soutient qu'elle a formulé cette demande dans son courrier de saisine du Médiateur de l'Assurance retraite.

Sur ses demandes au fond, Mme [W] fait valoir que la prise en compte des salaires de 1978 et 1979, pour le calcul de sa retraite, la pénalise alors qu'elle n'en a pas besoin pour valider les 167 trimestres requis. Elle explique qu'en 1978-1979, elle était étudiante boursière et été rémunérée dans le cadre d'emplois étudiants d'été ; que sa carrière a débuté en 1981.

La CARSAT des [Localité 3] demande au tribunal de :
- déclarer irrecevable la contestation de reprise des indemnités journalières de congé de maternité perçues en 1985,
- débouter Mme [W] de l'intégralité de ses demandes.

Au soutien de ses prétentions, sur la recevabilité de la demande de Mme [W] de reprise d'indemnités journalières perçues en 1985, la CARSAT fait valoir que cette demande ne figure pas dans le courrier de saisine de la commission de recours amiable par l'assurée.

Sur le fond, la CARSAT expose que la retraite de Mme [W] lui a été attribuée dans le cadre de la liquidation unique des régimes alignés (régime général, régime social des indépendants et régime des salariés agricoles) prévue à l'article L. 173-12 du code de la sécurité sociale pour les retraites prenant effet à compter du 1er juillet 2017 ; que Mme [W] a cotisé aux régimes alignés des salariés et des salariés agricoles, ainsi qu'à la CARPIMKO, régime non aligné.

La Caisse indique que Mme [W] totalise 28 années d'activité au régime général. Elle explique que pour calculer le revenu annuel moyen de l'assurée, en application des dispositions des articles R. 173-4-4-1, R. 351-9, R. 351-29, R. 351-29-1 et R. 351-11 du code de la sécurité sociale, elle a pris en compte les 25 meilleures années de travail de l'assurée après valorisation des salaires validant au moins un trimestre, sans tenir compte, d'une part, de l'année qui comprend le point de départ de la retraite du régime général et, d'autre part, des années comportant un report insuffisant pour valider un trimestre d'assurance (1977, 1996 et 2007).

Elle soutient qu'en revanche, Mme [W] a validé deux trimestres en 1978, un trimestre en 1979 et un trimestre en 1993, de sorte que c'est à juste titre que les salaires de ces trois années ont été inclus dans le revenu annuel moyen de Mme [W] car ils permettent la validation d'au moins un trimestre sur chacune des trois années.

Elle explique par ailleurs que la part de la retraite du régime général a été calculée en se basant sur une durée d'assurance de 124 trimestres, proratisés sur la durée d'assurance maximale retenue pour les assurés nés en 1960, soit 167 trimestres.

Enfin, elle précise que la révision de la pension de retraite notifiée le 7 octobre 2022 fait suite à la mise à jour définitive des cotisations au régime de la CARPIMKO, régime non aligné au régime général. Le revenu annuel moyen s'en est trouvé revalorisé en raison de l'application des nouveaux coefficients de revalorisation des salaires retenus pour le calcul de la retraite, pour les retraites attribuées à compter du 1er juillet 2022.

A l'issue des débats, les parties ont été informées que le jugement serait rendu après plus ample délibéré par décision mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de reprise des indemnités journalières de congé de maternité

Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Aux termes de l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au jour de saisine de la commission de recours amiable, les réclamations relevant de l'article L. 142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil, du conseil d'administration ou de l'instance régionale de chaque organisme.
La commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation.

Aux termes de l'article R. 142-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, lorsque la décision du conseil, du conseil d'administration ou de l'instance régionale ou de la commission n'a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai de deux mois, l'intéressé peut considérer sa demande comme rejetée.

Le délai de deux mois prévu à l'alinéa précédent court à compter de la réception de la réclamation par l'organisme de sécurité sociale. Toutefois, si des documents sont produits par le réclamant après le dépôt de la réclamation, le délai ne court qu'à dater de la réception de ces documents. Si le comité des abus de droit a été saisi d'une demande relative au même litige que celui qui a donné lieu à la réclamation, le délai ne court qu'à dater de la réception de l'avis du comité par l'organisme de recouvrement.

Aux termes de l'article R. 142-1-A III du code de la sécurité sociale, sans sa rédaction applicable au litige, s'il n'en est disposé autrement, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Ces délais ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l'accusé de réception de la demande.

Il résulte de la combinaison des dispositions qui précèdent que le tribunal ne peut être saisi d'une réclamation contre un organisme de sécurité sociale qu'après que celle-ci a été soumise à la commission de recours amiable.

L'étendue de la saisine de la commission de recours amiable de l'organisme se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation et non de celui de la décision ultérieure de cette commission.

En l'espèce, dans le cadre de son recours administratif obligatoire contre la notification de retraite du 7 juillet 2022, par courriers du 6 août 2022 et du 31 août 2022, Mme [W] a saisi la commission de recours amiable d'une contestation portant sur la prise en compte de ses salaires des 1978 et 1979 dans le calcul de sa pension de retraite. Elle y déplore également un manque d'information sur le mode de calcul de la pension basé sur les 25 meilleures années de salaire.

En revanche, elle n'a pas saisi la commission de recours amiable d'une demande de réintégration des indemnités journalières de maternité dans ses revenus de l'année 1985 pour le calcul de cette pension.

En effet, cette demande a été formulée pour la première fois après réception de la décision de rejet de la commission de recours amiable, dans le formulaire de saisine du Médiateur de l'Assurance maladie.

Dès lors, faute d'avoir soumis cette demande à recours administratif préalable obligatoire dans les conditions des dispositions précitées du code de la sécurité sociale, celle-ci est irrecevable devant la juridiction.

Sur la demande de révision du calcul des droits à la retraite du régime général

En application de l’article des articles L.351-1 et R.351-1 du code de la sécurité sociale, le montant de la pension de retraite est calculé d’après trois éléments :
- le revenu annuel moyen ;
- le taux applicable à ce revenu ;
- le nombre de trimestres au régime général plafonné au maximum autorisé.

En application de l’article R.351-1 de ce code, le droit à l’assurance vieillesse est déterminé en tenant compte des cotisations versées au titre de la législation sur les assurances sociales et arrêtées au dernier jour du trimestre civil précédant la date d’entrée en jouissance de la pension.

Aux termes du cinquième alinéa de l'article R. 351-9 du même code, pour la période d'assurance comprise entre le 1er janvier 1972 et le 31 décembre 2013, il y a lieu de retenir autant de trimestres que le salaire annuel correspondant aux retenues subies par l'assuré sur sa rémunération représente de fois le montant du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année considérée calculé sur la base de 200 heures, avec un maximum de quatre trimestres par année civile. En ce qui concerne les assurés ayant, au cours de tout ou partie d'une année déterminée, exercé leur activité dans l'un des départements mentionnés à l'article L. 751-1, le montant du salaire minimum de croissance à retenir est celui qui est en vigueur dans ledit département au 1er janvier de l'année considérée.

Il résulte de l'article R. 351-11, I du même code que, par principe, il est tenu compte, pour l'ouverture du droit et le calcul des pensions de vieillesse prévues à l'article L. 351-1, de toutes les cotisations d'assurance vieillesse versées pour les périodes antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, quelle que soit la date de leur versement.

Il résulte de l'article R351-29 du code de la sécurité sociale que pour l'application de l'article L. 351-1, le salaire servant de base au calcul de la pension est le salaire annuel moyen correspondant aux cotisations permettant la validation d'au moins un trimestre d'assurance selon les règles définies par l'article R351-9 et versées au cours des vingt-cinq années civiles d'assurance accomplies postérieurement au 31 décembre 1947 dont la prise en considération est la plus avantageuse pour l'assuré.

Les salaires exonérés de cotisations entre le 1er avril et le 31 décembre 1987 en application de l'article L241-10 entrent en compte, s'il y a lieu, dans la détermination du salaire servant de base au calcul de la pension. Le salaire servant de base au calcul de la pension est celui correspondant, pour chaque année prise en compte, aux cotisations versées par le salarié au titre des gains et rémunérations perçus au cours de cette année, sans que ce salaire puisse excéder, le cas échéant tous emplois confondus, le montant du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L241-2 en vigueur au cours de cette année. Les indemnités journalières mentionnées au 2° de l'article L330-1 sont assimilées à un salaire au sens du présent alinéa et prises en compte à hauteur de 125% de leur montant.

Lorsque l'assuré ne justifie pas de vingt-cinq années civiles d'assurance postérieurement au 31 décembre 1947, les années antérieures sont prises en considération en remontant à partir de cette date jusqu'à concurrence de vingt-cinq années pour la détermination du salaire de base.

Les salaires annuels pris en considération pour déterminer le salaire de base sont les salaires revalorisés par application des dispositions mentionnées à l'article L351-11.

Aux termes de l'article R. 351-29-1 I du même code, les durées de vingt-cinq années fixées aux premier et troisième alinéas de l'article R. 351-29 sont applicables aux assurés nés après 1947, quelle que soit la date d'effet de leur pension.

En outre, en application des articles L. 173-1-2 et R. 173-4-4-1 du code de la sécurité sociale, lorsque la retraite de base est attribuée dans le cadre de la liquidation unique, le revenu annuel moyen de base est calculé en tenant compte des salariés soumis à cotisations des régimes alignés.

En l'espèce, à titre liminaire, alors que Mme [W] indique avoir cotisé 186 trimestres pour en déduire que cette durée d'assurance était suffisante pour ne pas prendre en compte ses 25 meilleurs revenus annuels, il est constaté que ce décompte comprend les 62 trimestres cotisés au régime non aligné de la CARPIMKO. Aussi, en application des dernières dispositions du code de la sécurité sociale susvisées, la CARSAT était fondée à retenir un calcul de la part de la retraite du régime général sur la base d'une durée d'assurance de 124 trimestres.

Sur ce, Mme [W] reproche à la CARSAT d'avoir retenu les années 1978 et 1979 pour le calcul du salaire annuel moyen déterminant ses droits à la retraite du régime général.

Il résulte des pièces 6 bis, 8 et 9 de la CARSAT que Mme [W] a, sur les rémunérations perçues au cours des années litigieuses (758 euros en 1978 et 759 euros en 1979) suffisamment cotisé pour, au moins, valider un trimestre au titre du régime général pour chacune de ces années, celles-ci ne pouvaient être écartées du calcul du salaire annuel moyen prenant en compte les 25 meilleures années.

En conséquence, Mme [W] ne démontre pas que le montant de sa pension vieillesse versé par la CARSAT serait erroné.

En conséquence, la requérante sera déboutée de sa demande de révision du calcul de ses droits à la retraite du régime général, ainsi que de sa demande en paiement subséquente.

Sur les mesures accessoires

Sur les dépens

En application de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [W], partie succombante, sera condamnée aux dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, par décision contradictoire rendue en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable la demande de Mme [H] [W] visant à la réintégration des indemnités journalières de congé de maternité à ses revenus de l'année 1985 ;

DÉBOUTE Mme [H] [W] de sa demande de révision du calcul de ses droits à la retraite du régime général ;

DÉBOUTE Mme [H] [W] de sa demande en paiement subséquente ;

CONDAMNE Mme [H] [W] aux dépens ;

DIT que le présent jugement sera notifié à chacune des parties conformément à l’article R.142-10-7 du Code de la Sécurité Sociale par le greffe du Tribunal.

La GREFFIERELa PRESIDENTE
Claire AMSTUTZMaryse MPUTU-COBBAUT

Expédié aux parties le :
1 CE à la CARSAT
1 CCC à Mme [W]


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Pôle social
Numéro d'arrêt : 23/00402
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;23.00402 ?
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