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19/03/2024 | FRANCE | N°21/06361

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 02, 19 mars 2024, 21/06361


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 02
N° RG 21/06361 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VT4M


JUGEMENT DU 19 MARS 2024



DEMANDEUR :

M. [M] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Jean-roch PARICHET, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

S.A.R.L. GENTLEMEN BATISSEURS Il s’agit d’une constitution aux lieu et place de Maître laurent CALONNE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Sylvie DE SAINTIGNON - KUBATKO, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Prési

dent : Claire MARCHALOT, Vice Présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Jud...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 02
N° RG 21/06361 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VT4M

JUGEMENT DU 19 MARS 2024

DEMANDEUR :

M. [M] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Jean-roch PARICHET, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

S.A.R.L. GENTLEMEN BATISSEURS Il s’agit d’une constitution aux lieu et place de Maître laurent CALONNE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Sylvie DE SAINTIGNON - KUBATKO, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Claire MARCHALOT, Vice Présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

GREFFIER

Dominique BALAVOINE, Greffier

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 08 Décembre 2023 ;

A l’audience publique du 16 Janvier 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 19 Mars 2024.

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 19 Mars 2024, et signé par Claire MARCHALOT, Président, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.

[M] [K], propriétaire d’une maison située [Adresse 2], a confié, suivant devis n°213.7-17 signé le 11 février 2018, à la SARL Gentlemen Bâtisseurs, dans le cadre d’un projet de rénovation et d’extension de son habitation, des travaux de fabrication et pose de murs en ossature bois, de charpente et plancher, de finition extérieure ainsi que d’étanchéité, moyennant le prix de 38.328,70 € TTC.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 4 février 2019, [M] [K] a mis en demeure la société d’exécuter sous huitaine les travaux de pose des portes de placards Trespa aux pieds d’arches et panneaux trop courts, d’étanchéité non réalisées au-dessus de l’arche de garage, de raccordement d’évacuation des eaux de pluie côté salon et la reprise de gouttière au-dessus de l’extension non réalisée côté cuisine, de solution pour éviter le déversement des eaux de pluie sur la bavette côté baie panoramique entraînant un bruit insupportable, de solution pour que la bavette ne se soulève plus avec le vent, de bavette et bardage au bas de la baie fixe côté cuisine.

[M] [K] a déclaré le litige à son assureur protection juridique, qui a organisé une expertise amiable le 28 mai 2019. Le rapport d’expertise amiable a constaté l’absence d’achèvement des travaux et de paiement du solde correspondant, outre des ouvrages inachevés et devant être repris pour les rendre conforme.

Par acte d’huissier en date du 5 juin 2020, [M] [K] a fait assigner la SARL Gentlemen Bâtisseurs devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille. Par ordonnance du 29 septembre 2020, le juge des référés a désigné M. [J] en qualité d'expert. L’expert judiciaire a déposé son rapport le 7 juin 2021.

Par actes d’huissier du 21 octobre 2021, [M] [K] a assigné la SARL Gentlemen Bâtisseurs, devant le tribunal judiciaire de Lille.

Par ordonnance d’incident en date du 28 février 2023, le juge de la mise en état a déclaré irrecevable comme prescrite, la demande en paiement formulée à titre reconventionnel par la société Gentlemen Bâtisseurs à l’encontre de [M] [K].

En l’état de ses dernières écritures notifiées le 2 octobre 2023, [M] [K] demande au tribunal, au visa des articles 1792, 1792-6 du code civil, subsidiairement, au visa des articles 1231 et suivants du code civil, de l’article L. 218-2 du code de la consommation, de la garantie dite des désordres intermédiaires, de :
-voir prononcer la réception des travaux au 1er Juillet 2018 assortie des réserves synthétisées dans le tableau en page 11 du rapport d’expertise judiciaire de M. [J], à l’exception des désordres affectant les panneaux pour lesquels la responsabilité décennale de la société Gentlemen Bâtisseurs est recherchée,
-voir condamner la Société Gentlemen Bâtisseurs à lui payer la somme de 58.398,35 € de dommages et intérêts au titre de ses préjudices matériels,
-voir condamner la Société Gentlemen Bâtisseurs à lui payer la somme de 167,50 € de dommages et intérêts au titre de ses préjudices immatériels, par mois à compter du 1er Juillet 2018 jusqu’au prononcé du jugement à intervenir,
-voir condamner la Société Gentlemen Bâtisseurs à lui payer la somme 3.000 € de dommages et intérêts pour résistance abusive.
-voir prononcer l’irrecevabilité de la demande reconventionnelle de la Société Gentlemen Bâtisseurs au titre du solde des travaux pour être prescrite,
-voir débouter la Société Gentlemen Bâtisseurs de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-voir condamner la Société Gentlemen Bâtisseurs à lui payer la somme de 3.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

En l’état de ses dernières écritures notifiées le 21 septembre 2023, la SARL Gentlemen Bâtisseurs demande au tribunal, de :
-débouter [M] [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-condamner [M] [K] à supporter la charge des reprises,
-condamner [M] [K] à libérer le solde à compter de la décision à intervenir sur le sort réservé à la réception ou sa compensation à compter de ladite décision si une condamnation est retenue à son encontre,
-condamner [M] [K] à la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-laisser à la charge de [M] [K] les frais et dépens en ce compris les frais d’expertise,
-écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I-Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle de la société Gentlemen Bâtisseurs

La société Gentlemen Bâtisseurs demande que [M] [K] soit condamné « à libérer le solde à compter de la décision à intervenir sur le sort réservé à la réception ou sa compensation à compter de ladite décision si une condamnation est retenue à l’encontre de la société gentlemen Bâtisseurs ». Elle soutient que c’est à tort que le juge de la mise en état a déclaré sa demande irrecevable car prescrite et que le solde de la facture a été fixé à la somme de 2.338,49 € par l’expert judiciaire.

[M] [K] soutient que la demande reconventionnelle de la société Gentlemen Bâtisseurs au titre du solde des travaux est irrecevable pour être prescrite, cette demande ayant déjà été tranchée par le juge de la mise en état.

Par ordonnance en date du 28 février 2023, le juge de la mise en état a déclaré irrecevable comme prescrite, la demande en paiement formulée à titre reconventionnel par la société Gentlemen Bâtisseurs à l’encontre de [M] [K] au motif que la prescription était acquise, la société n’ayant formulé sa demande en paiement du solde de sa facture, que pour la première fois par conclusions notifiées le 1er juillet 2022.

Force est de constater que l’actuelle demande de la société Gentlemen Bâtisseurs à voir libérer le solde ou voir ordonner la compensation doit s’analyser comme une demande en paiement du solde des travaux et qu’il ne peut être que constaté que le juge de la mise en état est seul compétent au titre de l’article 122 du code de procédure civile lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation et jusqu’à son désistement, a déclaré cette demande irrecevable, ce qu’il a fait par ordonnance du 28 février 2023. Conformément à l’article 1355 du code civil, en matière d’autorité de la chose jugée, la demande de la société Gentlemen Bâtisseurs doit donc être déclarée irrecevable.

II-Sur les demandes de [M] [K]

Sur la réception judiciaire des travaux
[M] [K] sollicite que la réception judicaire soit prononcée en juillet 2018 assortie de la liste des réserves, désordres et non-façons synthétisés dans le tableau de l’expert judiciaire. Cependant il fait valoir que les désordres affectant les panneaux Trespa apparus ultérieurement et repris par l’expert ne doivent pas être retenus dans les réserves, ceux-ci étant qualifiés ultérieurement par l’expert judiciaire de désordre évolutif de nature décennale.

La SARL Gentlemen Bâtisseurs soutient que la réception de l’ouvrage est possible depuis le 1er juillet 2018 avec une liste de réserves telles que dressées par l’expert.

L’article 1792-6 alinéa 1 du code civil dispose que la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

Si [M] [K] fait valoir qu’il a dans un premier temps refusé la réception au regard des multitudes de non-conformités, malfaçons et désordres, force est de constater qu’il n’est plus contesté par les parties, qu’elle doit être fixée au 1er juillet 2018 et ce conformément au rapport d’expertise concernant les réserves.

L’expert judiciaire a repris 11 réserves concernant :
1-la porte de placard Trespa en pied d’arches (terrasse et garage),
2-la bavette menuiserie côté cuisine pignon garage,
3-les panneaux Trespa trop courts et ébréchés,
4-l’étanchéité de l’arche garage,
5-la reprise de la gouttière salon et garage et le raccordement réseau eaux de pluie,
6-la pose extension sur cale en bois sur surbot béton hors niveau,
7-l’absence de grilles anti rongeurs,
8-la dégradation de la plateforme en IPE accès garage,
9-le mauvais assemblage des panneaux Trespa,
10-l’absence de pare pluie d’étanchéité derrière les panneaux Trespa,
11-l’absence de trop plein sur la terrasse.

L’expert retient que les désordres 4 et 9 sont apparus au fil du temps. Ils ne seront donc pas retenus au titre des réserves à la réception.

Dès lors la réception judiciaire des travaux sera prononcée au 1er juillet 2018, avec les réserves suivantes concernant : la porte de placard Trespa en pied d’arches (terrasse et garage) ; la bavette menuiserie côté cuisine pignon garage ; les panneaux Trespa trop courts et ébréchés ; la reprise de la gouttière salon et garage et le raccordement réseau eaux de pluie ; la pose extension sur cale en bois sur surbot béton hors niveau ; l’absence de grilles anti rongeurs ; la dégradation de la plateforme en IPE accès garage ; l’absence de pare pluie d’étanchéité derrière les panneaux Trespa ; l’absence de trop plein sur la terrasse.

Sur les désordres
[M] [K] fonde ses demandes à titre principal au visa de l’article 1792 du code civil ainsi que de l’article 1792-6 du code civil et subsidiairement au visa des articles 1231 et suivants du code civil. Il fait valoir qu’au terme du rapport d’expertise il existe deux types de réclamations, celles afférentes à des réserves de non-conformités ou non-façons constatables à la réception et celles afférentes à des désordres évolutifs de nature décennal.

L’article 1792 du code civil dispose que « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère. ».

L’article 1792-6 du code civil dispose que « (…) La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné. En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant. L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement. La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage. ». Le tribunal relève cependant que cette garantie ne peut permettre d'obtenir des dommages et intérêts, mais uniquement la réalisation des travaux d'achèvement par le professionnel ou, en l'absence d'accord sur les délais ou en cas d'inexécution et après une mise en demeure infructueuse, le remboursement des travaux effectués aux frais et risques des entrepreneurs défaillants. Par conséquent, [M] [K] sollicitant des dommages et intérêts, la garantie de parfait achèvement ne saurait être invoquée en l’espèce. Seul le fondement contractuel ou décennal sera dès lors examiné.

Enfin, l'article 1231-1 de ce même code précise que « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. ».

1.Sur les désordres liés à l’habillage en panneau Trespa – la finition des portes – la reprise de l’arche et l’étanchéité de l’arche du garage

Sur la porte de placard Trespa en pied d’arches (terrasse et garage)
L’expert note l’absence des portes de placard Trespa prévues au pied des arches de la terrasse et du garage. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception. Il engage donc uniquement la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.

La société ne conteste pas cette non-façon, faisant valoir qu’elle attendait la réalisation de la terrasse à charge pour [M] [K] de lui fournir l’altimétrie de la terrasse et que la prestation n’a pu être réalisée compte tenu de la résistance de ce dernier à lui régler ses prestations.

[M] [K] fait valoir que la société ne rapporte pas la preuve de ses allégations.

Force est de constater que l’absence de ces portes n’est pas contestée et qu’aucun élément de l’expertise ne permet d’établir que leur pose nécessitait l’achèvement de la terrasse. Cette non-façon se rattache donc à l’inexécution d’une obligation contractuelle. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur les panneaux Trespa trop courts et ébréchés
L’expert note que certains panneaux présentent des petits éclats en rives, consécutif à leur découpe. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception. Il engage donc uniquement la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.

[M] [K] sollicite l’entérinement du rapport d’expertise.

La société Gentlemen Bâtisseurs ne conteste pas cette non-conformité.

Pour la découpe de ses panneaux, le fournisseur Trespa préconisait l’utilisation d’une scie à enture alternée pour ne pas avoir d’éclat. La société Gentlemen Bâtisseurs n’a pas respecté ces préconisations du fournisseur et se faisant a commis une faute en lien avec le préjudice. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur l’étanchéité de l’arche du garage
L’expert note que les eaux de pluie, mal drainées compte tenu de l’absence de pente, passent pour partie contre le mur de la maison et ruissellent le long du crépi clair, en laissant des traces de coulure. Il indique qu’il s’agit d’un non-respect aux règles de l’art. Ce désordre n’a pas été retenu comme faisant l’objet d’une réserve lors de la réception. Il s’agit d’un dommage intermédiaire qui engage la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.
[M] [K] fait valoir qu’il n’est pas à l’origine de ce projet constructif, l’entreprise restant la seule professionnelle habilitée en la matière à présenter des descriptifs de travaux et à assurer les travaux conformes aux règles de l’art. Il fonde sa demande sur l’article 1231-1 du code civil.

La société Gentlemen Bâtisseurs soutient que [M] [K] avait la maîtrise de son projet, qu’il a indiqué à l’équipe de pose qu’il ne souhaitait plus le système prévu, mais juste un recouvrement de l’enduit sur les panneaux car plus esthétique et qu’il appartenait à l’entreprise de faire un joint après la pose de l’enduit.

S’il n’est pas contesté que les travaux d’étanchéité de l’arche du garage ont été modifiés, cependant il convient de constater que les modifications ne sont pas conformes aux règles de l’art, de surcroît s’il apparaît dans les échanges de mails entre les parties, l’existence de ces modifications quant aux devis, force est de constater que la société répond à [M] [K] qu’il n’y a « pas de soucis techniques pour moi pour la pose du bardage après la pose de l’enduit en Trespa ». Elle a donc commis une faute, l’étanchéité de l’arche du garage ne répondant pas aux règles de l’art attendu d’un professionnel du bâtiment. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur l’absence de grilles anti rongeurs

L’expert note l’absence de ces grilles. Il indique qu’il s’agit d’une non-conformité aux prescriptions Trespa qui prévoient la présence de grilles anti rongeur. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet d’une réserve lors de la réception. Il engage donc uniquement la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.

[M] [K] fait valoir que la société ne rapporte pas la preuve de ses allégations et qu’il avait interrogé la société le 24 juillet 2018 sur la mise en place des grilles, le constructeur lui ayant répondu qu’elles étaient prévues.

La société Gentlemen Bâtisseurs soutient qu’il existe des grilles anti rongeurs sur tous les murs d’habitation revêtus de bardage et que les murs non bardés n’ont pas de grille.

Force est de constater que l’expert note définitivement l’absence des grilles anti rongeurs, que la société n’apporte aucun justificatif quant à leur présence. Cette absence relève d’une non-conformité aux prescriptions du fournisseur. La société a donc commis une faute. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur le mauvais assemblage des panneaux Trespa

L’expert note un mauvais assemblage des panneaux Trespa, de nombreux assemblages étant incertains et irréguliers. Ce désordre n’a pas été retenu comme faisant l’objet d’une réserve lors de la réception, il n’était pas apparent.

[M] [K] fonde son recours sur la garantie décennale.

La société Gentlemen Bâtisseurs fait valoir que la pose est conforme.

Force est de constate que si [M] [K] soutient qu’un excès de serrage des vis des panneaux empêche toute dilatation normale, aboutissant à ce que les panneaux finissent par se gondoler et que les vis tombant les panneaux se détachent, ce qui constitue un risque pour les personnes, cependant les éléments apportés par l’expert qui note uniquement sans autre constat et sans reprendre les arguments du demandeur, que la solidité de l’ouvrage est compromise, que les joints entre les panneaux sont très approximatifs et peuvent varier du simple au double, conférant un aspect esthétique amoindri à celui escompté, sont insuffisants pour caractériser une atteinte à la solidité de l’ouvrage relevant de la garantie décennale.

Il y a donc lieu de rechercher la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs au titre de ce désordre, qui se rattache à l’inexécution d’une obligation contractuelle du constructeur, qui se devait d’assembler correctement les panneaux Trespa. La société a commis une faute qui se rattache à l’inexécution d’une obligation contractuelle. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur la reprise des désordres liés à l’habillage en panneau Trespa – la finition des portes – la reprise de l’arche

L’expert a évalué les réparations à ce titre, aux sommes de 8.432,73 € HT au titre de l’habillage en panneau Trespa, des finitions des portes en Trespa et de la reprise de l’arche, de 3.406,43 € HT au titre de l’étanchéité de l’arche du garage et à la somme de 2.161,40 € HT au titre de la reprise des enduits extérieurs.

Si la société Gentlemen Bâtiment conteste cette évaluation, il convient de constater qu’elle ne saurait reprocher à l’expert de ne pas pris en compte son propre chiffrage, celui-ci ayant été adressé à l’expert le 5 juillet 2021, alors même que le rapport d’expertise avait été déposé le 5 juin 2021, le pré-rapport ayant été émis le 22 avril 2021, sans réaction de la société.

Il convient donc pour ces désordres de retenir l’évaluation reprise par l’expert soit au total la somme de 14.000,56 € HT et de condamner la société Gentlemen Bâtisseurs à verser cette somme à [M] [K].

2.Sur les désordres liés à la bavette - aux gouttières – au trop plein

Sur la bavette menuiserie côté cuisine pignon garage

L’expert note que la bavette est fixée à chaque extrémité comme normalement prévu. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet d’une réserve lors de la réception. Il engage donc uniquement la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.

[M] [K] sollicite l’entérinement du rapport d’expertise.

La société Gentlemen Bâtisseurs fait valoir qu’aucune demande ne peut prospérer.

Force est de constater qu’aucune inexécution contractuelle ne peut être reprochée à la société et que de surcroît [M] [K] ne fait qu’évoquer ce désordre sans démontrer une faute quelconque de la société.

Il convient donc de rejeter la demande à ce titre.

Sur la gouttière salon et garage et le raccordement réseau eaux de pluie

L’expert note qu’il manque un branchement des EP côté salon et un tronçon de gouttière côté pignon garage. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception. Il engage donc uniquement la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtisseurs dès lors qu’il est démontré qu’elle a commis une faute.

[M] [K] soutient que l’expert a constaté cette non-façon.

La Société Gentlemen Bâtisseurs fait valoir que compte tenu de l’absence d’installation de regard par [M] [K], elle ne pouvait poser de gouttière, que de surcroît cette prestation n’avait pas été prévue au devis, qu’elle a donc fermé la gouttière restante et a simplement posé une naissance et une première longueur de descente.

Il ressort du devis, que concernant l’étanchéité EPDM était prévu la fourniture et la pose d’une sortie d’eau horizontale ainsi que la fourniture et la pose d’un trop plein. Aucune gouttière et aucun branchement au regard ne sont repris au devis.

Il ne peut donc être reproché à la société Gentlemen Bâtisseurs une inexécution de ses obligations contractuelles à ce titre. Il convient donc de rejeter la demande de [M] [K].

Sur l’absence de trop plein sur terrasse

L’expert note qu’il n’a pas été constaté de présence de dispositif de trop plein en toiture et qu’il s’agit d’une non-conformité aux règles de l’art. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception.

[M] [K] sollicite l’entérinement du rapport d’expertise.

La société Gentlemen Bâtisseurs ne conteste pas ce désordre, se plaignant uniquement du tarif excessif du montant de la reprise et rappelle que les non-façons sont mineures au regard de l’ampleur des travaux réalisés. Cette absence relève d’une inexécution contractuelle. L’ouvrage n’étant pas conforme aux stipulations contractuelles. Dès lors la responsabilité contractuelle de la société Gentlemen Bâtiment est engagée à ce titre.

Sur la reprise des désordres liés à l’absence de trop plein sur la terrasse

L’expert a évalué les réparations au titre du trop-plein, en retenant le chiffrage du devis de l’EURL Bertrand Belmer, le devis retient au titre d’un « patch trop plein EPDM Firestone D60 » la somme de 46,15 €.
Il convient donc pour ce désordre de condamner la société Gentlemen Bâtisseurs à verser la somme de 46,15 € à [M] [K].

3.Sur les désordres liés aux terrasses en bois dégradées

L’expert note l’existence de dégradations ponctuelles visibles sur 2 des 4 portions de terrasse en bois. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception.

[M] [K] fait valoir qu’en cours d’expertise la société n’a pas contesté être à l’origine des dégradations commisses et qu’à défaut d’état des lieux contradictoire avant travaux, les lieux sont présumés avoir été fournis à la garde de l’entreprise sans la présence de désordres. Il sollicite l’indemnisation intégrale de son préjudice, aucune vétusté ne pouvant affecter l’ouvrage.

La société Gentlemen Bâtisseurs conteste être à l’origine du dommage, aucun constat préalable n’ayant été réalisé par le maître d’ouvrage au démarrage des travaux. Elle fait valoir que de surcroit la plateforme en bois était vétuste.

Force est de constater que [M] [K] ne fait qu’affirmer sans le démontrer que la société Gentlemen Bâtisseurs est à l’origine des dégradations de la terrasse en bois, d’autant que lors des travaux, d’autres entreprises sont également intervenues.

A défaut de démontrer une faute de la société, la demande en réparation de ce désordre sera rejetée.

4.Sur les désordres liés à la pose d’une extension sur cale en bois sur surbot hors béton

L’expert note que le callage en panneau de particule est encore présent. Ce désordre a été retenu comme faisant l’objet de réserve lors de la réception. L’expert retient qu’il s’agit d’une non-conformité aux règles de l’art.

[M] [K] soutient que la société Gentlemen Bâtisseurs qui a accepté le support est responsable de ce désordre.

La société Gentlemen Bâtisseurs fait valoir qu’elle avait sollicité de [M] [K] un rajout de béton dans l’angle de l’extension, qu’elle a calé provisoirement son ossature en rappelant à ce dernier la nécessaire réalisation d’un ajout de béton et qu’elle n’a pas à souffrir des carences des autres corps d’état.

Force est de constater que l’expert n’a pas fixé le montant de la reprise de ce désordre à la charge de la société et que le devis de la SARL Gentlemen Bâtisseurs ne comprenait pas la réalisation d’un surbot en béton.

Il ne peut donc être reproché à la société Gentlemen Bâtisseurs une inexécution de ses obligations contractuelles à ce titre. Il convient donc de rejeter la demande de [M] [K].

Sur les préjudices immatériels

Sur le préjudice de jouissance

[M] [K] soutient que les travaux n’ont pas été réalisés dans les délais convenus, qu’ils avaient pour objet d’apporter un standing certain à la maison, lequel a été affecté par les désordres. Il évalue son préjudice à 10% de la valeur locative du bien, soit la somme de 167,50 € par mois à compter du 1er juillet 2018.

La société Gentlemen Bâtisseurs soutient qu’aucun préjudice ne peut être retenu au titre de la terrasse qui a continué à être utilisée, que le préjudice esthétique consistant en des coulures des eaux de pluies sur le crépi n’empêche pas en rien la jouissance du bien, que les désordres étaient mineurs au regard de l’ampleur des travaux, qu’ainsi les demandes sont manifestement excessives.

L’expert note que la maison est habitable, que les désordres n’intéressent que les parties extérieures, qu’ainsi le préjudice peut être fixé sur 12 mois à un montant forfaitaire de 10% de la valeur locative.

Force est de constater qu’aucune faute n’ayant été retenue au titre des désordres liés à la terrasse, seul le préjudice esthétique lié aux coulures des eaux de pluies sur le crépi clair peut être retenu. De plus l’expert ne retient aucun préjudice lié aux éventuels retards dans les travaux. Il convient donc de fixer le montant forfaitaire mensuel à la somme de 30 € par mois du 1er juillet 2018 au 21 octobre 2021, date de l’assignation, somme que la société Gentlemen Bâtisseurs sera condamnée à verser à [M] [K].

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Il ressort de l'article 32-1 du code de procédure civile et de l'article 1240 du code civil que le droit de se défendre en justice n'ouvre droit à dommages et intérêts que s'il a dégénéré en abus.

En l'espèce, [M] [K] a été débouté d’une partie de ses demandes, si bien que la résistance de la SARL Gentlemen Bâtisseurs ne saurait être considérée comme abusive.

Cette demande sera donc rejetée.

III-Sur les demandes accessoires

Sur les dépens
L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La SARL Gentlemen Bâtisseurs succombant principalement, il convient de la condamner aux dépens qui comprendront les frais d’expertise.

Sur l’article 700 du code de procédure civile
En vertu de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

Il convient de condamner la SARL Gentlemen Bâtisseurs à verser la somme de de 1.500 € à [M] [K] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

L’article 514-1 du même code précise que le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire. Il statue, d’office ou à la demande d’une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, la SARL Gentlemen Bâtisseurs ne justifie pas que l'exécution provisoire entraînerait, des conséquences manifestement excessives pour elle. Sa demande sera donc rejetée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable la demande de la SARL Gentlemen Bâtisseurs au titre du solde du paiement des travaux ;

PRONONCE la réception judiciaire des travaux réalisés par la SARL Gentlemen Bâtisseurs au domicile de [M] [K], situé [Adresse 2], au 1er juillet 2018, avec les réserves suivantes concernant : la porte de placard Trespa en pied d'arches (terrasse et garage) ; la bavette menuiserie côté cuisine pignon garage ; les panneaux Trespa trop courts et ébréchés ; la reprise de la gouttière salon et garage et le raccordement réseau eaux de pluie ; la pose extension sur cale en bois sur surbot béton hors niveau ; l'absence de grilles anti rongeurs ; la dégradation de la plateforme en IPE accès garage ; l'absence de pare pluie d'étanchéité derrière les panneaux Trespa ; l'absence de trop plein sur la terrasse ;

CONDAMNE la SARL Gentlemen Bâtisseurs à verser la somme de 14.000,56 € HT à [M] [K], au titre des désordres liés à l'habillage en panneau Trespa, de la finition des portes, de la reprise de l'arche et de l'étanchéité de l'arche du garage ;

CONDAMNE la SARL Gentlemen Bâtisseurs à verser la somme de 46,15 € HT à [M] [K], au titre des désordres liés à l'absence de trop plein sur la terrasse ;

DÉBOUTE [M] [K] du surplus de ses demandes au titre des désordres ;

CONDAMNE la SARL Gentlemen Bâtisseurs à verser à [M] [K] la somme de 30 € par mois du 1er juillet 2018 au 21 octobre 2021, date de l'assignation, au titre de son préjudice de jouissance ;

DÉBOUTE [M] [K] de ses demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

CONDAMNE La SARL Gentlemen Batisseurs aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise ;

CONDAMNE La SARL Gentlemen Batisseurs à payer à [M] [K] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Dominique BALAVOINE Claire MARCHALOT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 02
Numéro d'arrêt : 21/06361
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;21.06361 ?
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