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18/03/2024 | FRANCE | N°23/01510

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 04, 18 mars 2024, 23/01510


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 04
N° RG 23/01510 - N° Portalis DBZS-W-B7H-W3JU


JUGEMENT DU 18 MARS 2024



DEMANDEUR :

La S.A.R.L. AM, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Karl VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

DEFENDEUR :

Mme [X] [R]
[Adresse 2]
[Localité 5]
défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président: Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice Présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJO

N, Juge

GREFFIER: Yacine BAHEDDI, Greffier

DEBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 26 Avril 2023.

A l’audience publique du 08 Janvier 2...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 04
N° RG 23/01510 - N° Portalis DBZS-W-B7H-W3JU

JUGEMENT DU 18 MARS 2024

DEMANDEUR :

La S.A.R.L. AM, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Karl VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

DEFENDEUR :

Mme [X] [R]
[Adresse 2]
[Localité 5]
défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président: Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice Présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJON, Juge

GREFFIER: Yacine BAHEDDI, Greffier

DEBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 26 Avril 2023.

A l’audience publique du 08 Janvier 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 18 Mars 2024.

Leslie JODEAU, Juge rapporteur qui a entendu la plaidoirie en a rendu compte au tribunal dans son délibéré

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 18 Mars 2024 par Ghislaine CAVAILLES, Président, assistée de Yacine BAHEDDI, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique en date du 10 décembre 2021, la SARL AM a vendu, en l'état futur d'achèvement, à Mme [X] [R] les lots 11, 12 et 203, correspondant respectivement à l'appartement 51 du bâtiment A au 5ème étage, à la cave n°1 et à un parking couvert n°3, dans un ensemble immobilier situé [Adresse 7], pour un prix de 456.000 euros, TVA incluse.

Le jour de la signature de l'acte de vente, Mme [X] [R] a versé la somme de 91.200 euros correspondant à 20% du prix de vente, le solde du prix étant exigible en fonction de l'avancement des travaux.

Le 2 août 2022, la SARL AM a adressé à Mme [X] [R] un appel de fonds correspondant au stade « achèvement plancher haut R+4 » d'un montant de 136.800 euros, soit 30% du prix de vente.

Le 21 octobre 2022, un appel de fonds correspondant au stade « achèvement stade hors d'eau » d'un montant de 91.200 euros, soit 20% du prix de vente, lui a été adressé.

Le 30 novembre 2022, la SARL AM lui a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire.

Suivant exploit délivré le 6 février 2023, la SARL AM a fait assigner Mme [X] [R] devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de :

Vu l'article 1103 du code civil,
Vu les articles 1224 à 123 du code civil,
Vu l'article 1348 du code civil,

constater ou, à défaut, prononcer la résolution, à la date du 30 décembre 2022, de la vente en l'état futur d'achèvement intervenue par acte notarié du 10 décembre 2021 dressé par Me [P] [C], notaire à [Localité 6], publié au service de la publicité foncière de [Localité 6] 3 le 23 décembre 2021, volume 2021 P n°31573, entre elle et Mme [X] [R] portant sur le lot n°11 consistant en un lot à usage d'habitation situé au 5ème étage du bâtiment A, sur le lot n°12 consistant en une cave située au sous-sol du bâtiment A et sur le lot n°203 consistant en un parking couvert, situés dans un ensemble immobilier sis à [Adresse 7], cadastré section PR-N°[Cadastre 1]- lieudit « [Adresse 7] » pour une surface de 00 ha 09 a 08 ca,et ce, aux torts de l'acquéreur pour défaut de paiement d'une partie du prix de vente,
ordonner la restitution par elle de l'acompte de 91.200 euros versé par Mme [X] [R] sur le prix du bien vendu,condamner Mme [X] [R] au paiement de la somme de 45.600 euros au titre de l'indemnité contractuelle, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande,prononcer la compensation entre la créance de Mme [X] [R], correspondant à l'acompte à restituer, d'un montant de 91.200 euros, et sa créance, correspondant à l'indemnité contractuelle, d'un montant de 45.600 euros, outre les intérêts à due concurrence,condamner Mme [X] [R] à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,condamner Mme [X] [R] aux dépens et dire que, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, Me [I] [L] pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision,ordonner que le jugement à intervenir soit publié au service de la publicité foncière.Pour l’exposé des moyens de la demanderesse, il sera fait application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile et procédé au visa de l'assignation.

Citée à étude, à l'adresse déclarée dans l'acte de vente, Mme [X] [R] n'a pas constitué avocat.

La clôture des débats est intervenue le 26 avril 2023, et l’affaire fixée à l’audience du 8 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la qualification du jugement

Mme [X] [R] n'ayant pas constitué avocat et la décision étant susceptible d’appel, il sera statué par jugement réputé contradictoire, conformément à l’article 474 du code de procédure civile.

Conformément à l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond ; le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable, et bien fondée.

Sur la résolution de la vente

L'article 1224 du code civil prévoit que :
“ La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice”.

Selon l'article 1229 du même code :
“La résolution met fin au contrat.
La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.
Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation”.

En l'espèce, l'acte de vente du 10 décembre 2021 contient une clause résolutoire reprise sous l'article 18.2 rédigée comme suit :
“18.2.1. En outre, il est expressément convenu qu'à défaut de paiement à son échéance exacte d'une somme quelconque formant partie du prix de la vente, celle-ci sera résolue de plein droit si bon semble au VENDEUR, un mois après commandement de payer demeuré infructueux, délivré au domicile élu par l'ACQUEREUR, et indiquant l'intention du VENDEUR de se prévaloir de la présente clause.
18.2.1.2 Par application de l'article L261-13 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation, l'ACQUEREUR pourra, pendant le délai d'un mois, demander en justice l'octroi d'un délai supplémentaire, conformément à l'article 1244 du code civil.
18.2.1.3 Pendant le cours des délais qui seraient judiciairement octroyés à l'ACQUEREUR dans les conditions de l'article 1244 du code civil, les effets de la clause de résolution de plein droit seraient suspendus.
18.2.1.4 Cette clause serait réputée n'avoir jamais joué si l'ACQUEREUR se libérait dans les conditions déterminées par le juge”.

Aux termes du contrat de vente en l'état futur d'achèvement, Mme [X] [R] avait l'objet de s'acquitter du prix de vente d'un montant de 456.000 euros, TVA incluses. Ce paiement devait se faire de manière échelonnée, en fonction de l'avancement des travaux. Il est acquis qu'une première fraction du prix, soit 91.200 euros, a été réglée le jour de la signature de l'acte de vente.

Pour le solde, l'acte de vente prévoyait les échelonnements suivants :
30% à l'achèvement du plancher haut R+420% à la mise hors d'eau15% à la mise hors d'air10% à l'achèvement des travaux5% à la livraison.
La SARL AM a adressé à Mme [X] [R] deux appels de fonds correspondant aux stades « achèvement du plancher haut R+4 » et « mise hors d'eau », accompagnés chacun d'une attestation de l'architecte confirmant l'achèvement de ces deux stades, mais indique que les fonds n'ont pas été versés, soit la somme de 228.000 euros, raison pour laquelle elle a fait délivrer à Mme [X] [R], le 30 novembre 2022, un commandement de payer visant la clause résolutoire. Elle fait valoir que ce commandement de payer est resté infructueux.

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 1353 du code civil, il appartient au débiteur qui se prétend libérer de justifier de son paiement. Or, Mme [X] [R], qui n'a pas constitué avocat, ne justifie pas qu'elle aurait réglé les sommes réclamées par la SARL AM, étant précisé à ce stade que la créance de cette dernière est établie par le contrat de vente.

Il est ainsi établi que Mme [X] [R] a manqué à son obligation de payer le prix.

Dans ces conditions, il convient de constater, conformément à la clause résolutoire figurant au contrat, la résolution de plein droit de la vente conclue le 10 décembre 2021 entre la SARL AM et Mme [X] [R], aux torts de l'acquéreur, à la date du 30 décembre 2022.

La résolution entraîne de plein droit la restitution par la SARL AM de l'acompte versé par Mme [X] [R] à hauteur de 91.200 euros.

Il y a lieu d'ordonner la publication du présent jugement au service de la publicité foncière.

Sur la demande d'indemnité

L’article 1231-5 du code civil prévoit que “lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a provoqué au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent. Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite. Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure”.

Il résulte de cet article que les parties peuvent insérer à leur contrat une clause pénale prévoyant de manière anticipée le montant forfaitaire des dommages intérêts dus par une partie en cas d’inexécution contractuelle. Cette clause survit à la résolution amiable du contrat. Le juge peut en modifier le montant s’il le juge dérisoire ou excessif par rapport au préjudice réellement subi par la partie non défaillante.

En l'espèce, le contrat de vente prévoit en son article 18.3 intitulé « indemnité en cas de résolution » que :
« 18.3.1.1 En cas de résolution amiable ou judiciaire de la vente, la partie à laquelle cette résolution serait imputable sera recevable envers l'autre d'une indemnité égale à DIX POUR CENT (10%) du prix de la présente vente.
18.3.1.2 Toutefois, la partie à laquelle la résolution serait imputable demeurera tenue de réparer le préjudice que l'autre aura effectivement subi, si cette dernière partie le demande ».

La résolution étant imputable au non paiement par Mme [X] [R] du prix de vente, elle devra être condamnée à verser à la SARL AM la somme de 45.600 euros correspondant à 10% du prix de vente. En application de l'article 1231-7 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision et non à compter de la demande comme sollicité.

Sur la compensation

L'article 1347 du code civil prévoit que :
« La compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes.
Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies ».

La compensation n'a lieu qu'entre deux obligations fongibles, certaines, liquides et exigibles. Sont fongibles les obligations de somme d'argent.

L'article 1348 du même code dispose que :
« La compensation peut être prononcée en justice, même si l'une des obligations, quoique certaine, n'est pas encore liquide ou exigible. A moins qu'il n'en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses effets à la date de la décision ».

En l'espèce, la SARL AM et Mme [X] [R] sont créancières l'une de l'autre de sommes d'argent. Les obligations, bien que non encore liquides ou exigibles, sont certaines de sorte qu'il y a lieu d'ordonner la compensation entre les créances réciproques.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’article 696 du Code de procédure civile dispose : « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile que“Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; [...]
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. [...]”.

Succombant en l'instance, Mme [X] [R] sera condamnée aux dépens, lesquels seront recouvrés directement par Me Karl Vandamme, avocat au barreau de Lille, conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

L'équité commande de condamner Mme [X] [R] à verser à la SARL AM la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Constate la résolution de plein droit, à la date du 30 décembre 2022, de la vente en l'état futur d'achèvement intervenue par acte notarié du 10 décembre 2021 dressé par Me [P] [C], notaire à [Localité 6], entre la SARL AM et Mme [X] [R] portant sur les lots 11, 12 et 203, correspondant respectivement à l'appartement 51 du bâtiment A au 5ème étage, à la cave n°1 et à un parking couvert n°3, dans un ensemble immobilier situé [Adresse 7], cadastré section PR-N°[Cadastre 1]- lieudit « [Adresse 7] » pour une surface de 00 ha 09 a 08 ca,et ce, aux torts de Mme [X] [R] pour défaut de paiement d'une partie du prix de vente,

Ordonne la restitution par la SARL AM à Mme [X] [R] de l'acompte de 91.200 euros versé le jour de la signature de l'acte de vente,

Condamne Mme [X] [R] à payer à la SARL AM la somme de 45.600 euros au titre de l'indemnité contractuelle, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Dit que les sommes dues réciproquement par la SARL AM d'une part et Mme [X] [R] d'autre part seront réglées par compensation,

Condamne Mme [X] [R] à payer à la SARL AM la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [X] [R] aux dépens et autorise, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, Me Karl Vandamme, avocat au barreau de Lille, à recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision,

Ordonne la publication de la présente décision au service chargé de la publicité foncière du lieu de situation de l’immeuble,

Rappelle que la présente décision est exécutoire de droit par provision.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 04
Numéro d'arrêt : 23/01510
Date de la décision : 18/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-18;23.01510 ?
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