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18/03/2024 | FRANCE | N°21/06246

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 04, 18 mars 2024, 21/06246


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 04
N° RG 21/06246 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VT2H

JUGEMENT DU 18 MARS 2024

DEMANDEUR :

M. [H] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Alexandre CORROTTE, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DEFENDEUR :

La société MAIF - MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Stéphane ROBILLIART, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président:

Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice-présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJON, Juge

GREFFIER: Yacine BAH...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 04
N° RG 21/06246 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VT2H

JUGEMENT DU 18 MARS 2024

DEMANDEUR :

M. [H] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Alexandre CORROTTE, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DEFENDEUR :

La société MAIF - MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Stéphane ROBILLIART, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président: Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice-présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJON, Juge

GREFFIER: Yacine BAHEDDI, Greffier

DEBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 26 Avril 2023.

A l’audience publique du 08 Janvier 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 18 Mars 2024.

Leslie JODEAU, Juge rapporteur qui a entendu la plaidoirie en a rendu compte au tribunal dans son délibéré

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 18 Mars 2024 par Ghislaine CAVAILLES, Président, assistée de Yacine BAHEDDI, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

M. [H] [K] est propriétaire d'une maison d'habitation, située [Adresse 2], laquelle est assurée par la société Mutuelle Assurance des Instituteurs de France, ci-après la société MAIF.

M. [H] [K] a déclaré un sinistre à la société MAIF en 1996, consistant en une fissuration de ses murs extérieurs, suite à un épisode de sécheresse.

La société MAIF a missionné un expert. A l'issue de ces investigations, l'assureur a notifié le 20 juillet 1998 à son assuré son acceptation de prendre en charge 20 % du montant des travaux de réparation au motif que le sinistre était imputable « à des fondations insuffisantes, hétérogènes et fragiles, en tous cas inadaptées à ce site particulier et dont les déformations ont probablement été amplifiées par une phénomène de sècheresse ».

Le 4 décembre 2014, M. [H] [K] a repris contact avec la société MAIF faisant valoir qu'il avait découvert que les conclusions de l'expert reposaient sur un postulat erroné d'insuffisance de profondeur des fondations. L'assureur lui a opposé la prescription biennale.

En 2015, la société MAIF a cependant mandaté un nouvel expert qui a conclu le 17 décembre 2015 que « la réclamation actuelle présentée, laquelle porte sur la profondeur de fondation à 1,20 m sous TN [terrain naturel] n'est pas en lien avec les expertises précédemment menées lesquelles portaient sur le mur de parement aujourd'hui démoli ».
Sur la base de cette conclusion, la société MAIF a estimé le 31 mars 2016 qu'il n'était rapporté la preuve d'aucune faute commise par le premier expert et elle a classé l'affaire.

Par lettre recommandée du 22 mai 2017 suivi d'une relance le 18 décembre 2017, M. [H] [K] s'est plaint de la gestion de son sinistre par la société MAIF et a sollicité la recherche d'un arrangement amiable. L'assureur a répondu le 1er février 2018 qu'il restait sur sa position de refus et l'a invité, s'il le souhaitait, à soumettre le différend à un tiers expert selon la procédure contractuelle, lui rappelant la faculté de s'adresser au médiateur de l'assurance.

Par courrier du 22 août 2018, M. [H] [K] a fait adresser par son conseil une mise en demeure.

La société MAIF a proposé une procédure de tierce expertise ce que M. [H] [K] a refusé.

Il a alors saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille lequel a, par ordonnance en date du 29 septembre 2020, ordonné une mesure d'expertise confiée, après changement d'expert, à M. [S] [W].

L'expert a déposé son rapport le 25 mai 2021.

Par acte d’huissier en date du 15 octobre 2021, M. [H] [K] a fait assigner la société MAIF, devant le tribunal judiciaire de Lille afin principalement de faire valoir l'erreur dans l'appréciation des causes du sinistre de 1996 et d'obtenir le paiement d'une indemnité pour ce sinistre.

La société MAIF a saisi le juge de la mise en état d’un incident de prescription.

Par ordonnance en date du 27 septembre 2022, le juge de la mise en état a notamment rejeté la fin de non recevoir tirée de l'acquisition de la prescription, condamné la société MAIF aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties ont fait notifier leurs dernières écritures par voie électronique le 26 janvier 2023 pour M. [H] [K] et le 9 novembre 2022 pour la société MAIF.

La clôture des débats est intervenue le 26 avril 2023, et l’affaire fixée à l’audience du 8 janvier 2024.

****

Aux termes de ses dernières écritures, expurgées des moyens, M. [H] [K] demande au tribunal de :

Vu l'article L113-5 du code des assurances,
Vu les articles 1103 et suivants du code civile,

condamner la société MAIF à lui payer la somme de 180.000 euros au titre du sinistre déclaré en 1996,débouter la société MAIF de toutes ses demandes,condamner la société MAIF aux dépens d'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures, expurgées des moyens, la société MAIF demande au tribunal de :

Vu les articles L125-1 du code des assurances et 1103 et suivants du code civil,

débouter M. [H] [K] de sa demande de condamnation à hauteur de 180.000 euros au titre du sinistre déclaré en 1996,condamner M. [H] [K] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,condamner M. [H] [K] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour l’exposé des moyens des parties, il sera fait application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile et procédé au visa des dernières conclusions précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il y a lieu de dire qu’une demande tendant à “dire constater et juger” ne constitue pas une prétention en justice devant être tranchée par le tribunal mais simplement un exposé des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.

Sur la responsabilité recherchée de la société MAIF

M. [H] [K] entend, non pas réclamer la mise en oeuvre d'une garantie prévue au contrat, qu'il ne produit d'ailleurs pas, mais engager la responsabilité contractuelle de son assureur, lequel aurait commis une erreur dans l'appréciation des causes du sinistre déclaré en 1996 qui l'aurait conduit à refuser de le prendre en charge intégralement.

La responsabilité contractuelle est prévue par l'article 1231-1 du code civil lequel dispose que :
« le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure ».

Le demandeur vise l'article L113-5 du code des assurances lequel prévoit que « lors de la réalisation du risque ou à l'échéance du contrat, l'assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peut être tenu au-delà ». Il reproche ainsi à son assureur de ne pas avoir appliqué la garantie CAT NAT (catastrophe naturelle) prévue au contrat.

A ce stade, il doit être précisé que les parties, et en particulier le demandeur, n'ont pas jugé utile de verser au débat le contrat d'assurance souscrit par M. [H] [K]. Néanmoins, la société MAIF ne conteste pas que son assuré était bien couvert par la garantie CAT NAT.

En l'absence de définition contractuelle, il convient de se référer à la définition prévue par l'article L125-1 du code des assurances en son alinéa 3 :
« Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises. Sont également considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, et pris en charge par le régime de garantie associé les frais de relogement d'urgence des personnes sinistrées dont la résidence principale est rendue impropre à l'habitation pour des raisons de sécurité, de salubrité ou d'hygiène qui résultent de ces dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel. Les modalités de prise en charge de ces frais sont fixées par décret ».

Il appartient à M. [H] [K] de démontrer que le sinistre qu'il a déclaré en 1996 aurait eu pour cause déterminante un phénomène de sécheresse, ce que n'a pas considéré la société MAIF, et qu'en conséquence, celle-ci aurait refusé à tort sa garantie.

Il convient de reprendre l'historique de ce sinistre.

En 1996, M. [H] [K] a déclaré à son assureur l'apparition de fissures dans son habitation qui pourraient être dues à un phénomène de sécheresse. Il n'a pas transmis, dans le cadre de la présente instance, cette déclaration de sinistre, se contentant d'en reproduire le prétendu contenu dans ses conclusions.

La MAIF a mandaté M. [B] [E] aux fins de rechercher la cause du sinistre et notamment s'il peut être imputé aux effets de la sécheresse, rappelant qu'un arrêté interministériel du 12 mai 1997 a constaté, pour la commune de [Localité 6], l'état de catastrophe naturelle pour la période de janvier 1991 à septembre 1996 (pièce 3 du demandeur).

Dans son rapport du 11 août 1997 (pièce 4 en défense), M. [B] [E] a constaté que l'habitation de M. [H] [K] était hétérogène puisque, à la construction initiale réalisée en 1962, ont été ajoutées en 1970 des extensions en façade arrière. Puis, les combles ont été aménagés en 1981 avec création d'un étage et de toitures tuiles et en 1985, M. [H] [K], après avoir réalisé des fondations, a fait habiller les façades par des contre mur en briques par l'entreprise [N]. En 1986 ou 1987, des fissures étaient apparues et avaient donné lieu à une expertise réalisée par M. [O].

M. [B] [E] a constaté des fissures sur les murs en briques de la façade sur rue, au droit de plusieurs linteaux de baies du bâtiment en partie habillées de briques, sur les murs extérieurs non habillés de briques, sur le mur prolongé de garage.
Une seule fissure intérieure a été constatée au dessus de la cloison légère séparant le garage et la buanderie.

Aux termes de ses constatations, il a estimé que « la cause première des désordres est liée à la construction elle-même par ajouts successifs et augmentation considérable de la charge appliquée en sol, d'abord par création de combles habitables, avec charpente bois et couverture tuiles, puis par l'habillage extérieur en briques. Les fondations d'origine ne sont certainement pas adaptées à cette surcharge ». Il a ajouté que « la variation de la teneur en eau du substrat s'est ajoutée à cet état de fait. La cause Catastrophe Naturelle est donc seconde par rapport à la première ».

Il a préconisé la réalisation d'une étude des sols. Il a mandaté l'entreprise de sondages SADE, laquelle a sollicité l'assistance technique du bureau d'études géotechniques Sols Etudes Fondations. Dans son rapport (pièce 2 en demande), le bureau d'études a indiqué : « les fondations observées sont faiblement encastrées : 20 à 30 cm en notant par ailleurs, en F4 et F5 que la semelle béton repose sur un hérisson en cassons de briques (15 à 20 cm d'épaisseur) ». Sur la cause des désordres, après avoir analysé les sols argileux, il a conclu en indiquant « dans ce contexte, on peut donc évoquer comme cause des désordres, des fondations insuffisantes, hétérogènes et fragiles en tous cas inadaptées à ce site particulier et dont les déformations ont probablement été amplifiées par un phénomène de sécheresse ».

Dans un rapport complémentaire du 5 janvier 1998, après avoir pris connaissance du rapport établi par M. [O] en juillet 1988, M. [B] [E] a indiqué qu'il avait été à l'époque constaté une fissure horizontale sous l'appui de fenêtre (fissure qu'il a lui même constaté sur le mur briques en façade rue) et relevé une insuffisance évidente de la fondation périmétrique réalisée par le sociétaire pour tenir le parement de briques ainsi que le risque de mouvement de cet ensemble par l'inadaptation de cette fondation à la nature argileuse du terrain (pièce 5 en demande). Il a ajouté que, depuis 1988, aucun confortement de la fondation ni reprise de fissure n'a été exécuté et que « les fissures apparues à divers emplacements de la maçonnerie de parement ont pour cause le défaut de fondation exécutée par le sociétaire et accepté par l'entreprise en 1985. La garantie Catastrophe Naturelle ne peut donc valablement être invoquée à leur sujet ».

Dans un rapport complémentaire du 12 mai 1998, faisant suite à l'étude des sols, M. [B] [E] a relevé que le rapport du bureau d'études faisait ressortir que les fouilles d'observation réalisées ont mis en évidence une manifeste insuffisance de fondations de l'habillage briques de 1985 réalisée par le sociétaire. Il a repris la conclusion du bureau d'études sur la cause des désordres. Au final, il a préconisé une reprise en sous-oeuvre complète de tous les murs porteurs de l'immeuble après approfondissement de la recherche de fondation. Compte tenu de la complexité de la « construction », une reprise par puits avec longrines avec creusement de galeries pour atteindre tous les murs de fondation périphériques et intérieurs a été évoquée, tout en précisant qu'une étude par bureau d'étude spécialisé est indispensable. Il était ainsi préconisé la réalisation de travaux très importants dont il a estimé le coût entre 700.000 francs HT et 1.000.000 environ HT. Il a terminé son rapport en indiquant « il est confirmé que les désordres constatés sont dûs à la structure hétérogène de la construction et non au phénomène de sécheresse survenu entre janvier 1991 et septembre 1996 ».

Dans son courrier du 20 juillet 1998, la société MAIF a repris les conclusions du bureau d'études, à savoir que le présent sinistre est imputable « à des fondations insuffisantes, hétérogènes et fragiles, en tout cas inadaptées à ce site particulier et dont les déformations ont probablement été amplifiées par un phénomène sécheresse ». Elle a indiqué, ce que le tribunal n'a toutefois pas retrouvé dans les rapports de M. [B] [E], que selon son expert, la quote-part de chacune de ces deux causes est respectivement de 80% et 20%. Elle a repris les travaux préconisés par celui-ci et indiqué « compte tenu du doute qui subsiste quant à l'action de la sécheresse, nous acceptons d'intervenir à concurrence de 20% du montant des travaux ». Elle a demandé à M. [H] [K] de faire établir des devis relatifs aux travaux de remise en état à réaliser afin de les soumettre, pour avis, à son expert (pièce 4 en demande).

Il est acquis que M. [H] [K] n'a finalement pas donné suite à ce courrier.

Dans le cadre de son action en responsabilité, M. [H] [K] considère que la société MAIF a fait une mauvaise appréciation des causes du sinistre en retenant que les fondations « fragiles » et « insuffisantes » avaient fragilisé l'immeuble et provoqué les fissurations. Selon lui, la société MAIF a retenu que les fondations étaient inadaptées car elles ne faisaient que 20 à 30 cm de profondeur, alors même qu'il a découvert, en 2014, que les fondations de son habitation font 1,20 m, ce qui n'est pas contesté. Or, contrairement à ce qu'indique le demandeur, à aucun moment dans son courrier la société MAIF n'a fait état de cette faible profondeur, pas plus d'ailleurs que M. [B] [E] dans ses différents rapports.

Cette profondeur n'apparaît que dans le rapport du bureau d'études. Sur ce point, l'expert judiciaire a retenu qu'il existait « une ambiguïté dans le rapport SEF qui a investigué sur la périphérie de l'immeuble et sur des fondations qui étaient entre 20 et 30 cm de profondeur ». Il a relevé que l'hétérogénéité de la construction a été soulignée mais que toutes les fondations n'ont pas été investiguées, notamment celles des annexes construites en 1970 et chargées par une charpente et couverture en 1981.

En réalité, le tribunal comprend de la lecture des différents rapports que M. [H] [K] a réalisé lui-même les fondations avant qu'une société n'intervienne pour poser les briques de parement sur les façades de la construction. Ce sont ces fondations qui se trouvent entre 20 et 30 cm de profondeur et qui ont été considérées comme étant fragiles et de nature à entraîner les fissurations constatées sur la façade en brique. L'expert judiciaire indique d'ailleurs, en page 8 de son rapport, que tous les experts étaient d'accord sur ce point. Etant précisé à ce stade, que les fissurations principales relevées à l'époque se situaient, ainsi que l'indique l'expert judiciaire dans son rapport, sur le mur de parement réalisé en 1985, quelques fissures seulement ayant été relevées par M. [B] [E] sur les constructions annexes.

S'agissant de celles-ci, il ressort clairement des rapports de M. [B] [E] que le phénomène de fissurations constaté, y compris sur les murs n'ayant pas le parement en brique, est lié à la structure hétérogène de la construction, les fondations de la construction initiale n'étant pas suffisantes pour supporter les différentes constructions ultérieures.

C'est donc à tort que M. [H] [K] soutient que le refus de la société MAIF est fondé sur une erreur d'appréciation du bureau d'études qui a indiqué que les fondations de l'immeuble faisaient 20 à 30 cm de profondeur alors qu'elles faisaient 1,20 m. Contrairement à ce qu'il indique, le bureau d'études n'a pas indiqué que les fondations de toute la construction faisaient 20 à 30 cm et le tribunal comprend au contraire, à la lecture des autres pièces, ce qu'a d'ailleurs relevé M. [B] [E] lui-même dans son rapport du 12 mai 1998, qu'il s'agissait uniquement des fondations réalisées par M. [H] [K] lui-même pour la pose des briques de parement.

Lorsque la société MAIF a eu à se prononcer sur la prise en charge du sinistre au titre de la garantie catastrophes naturelles, si elle a repris in extenso la conclusion du bureau d'études, elle s'est également basée sur les rapports de M. [B] [E] qui concluait, sans aucune ambiguïté possible, que les désordres étaient dûs à la structure hétérogène de la construction et non au phénomène sécheresse.

M. [H] [K] ne peut, par un raisonnement a contrario, soutenir que, puisqu'une erreur a été faite s'agissant de la profondeur des fondations, les désordres ne peuvent être imputables aux fondations de l'immeuble et ont nécessairement pour cause la sécheresse.

Aucune erreur n'a été commise sur la profondeur des fondations. Ce sont bien celles du mur de parement qui sont profondes de 20 à 30 cm.

D'ailleurs, l'expert judiciaire retient lui aussi que la cause déterminante des désordres est liée au défaut de conception qui a fait apparaître des fissures très rapidement, en 1986 sans qu'un phénomène de sécheresse exceptionnelle ne soit déclaré à l'époque, ce qui a également été le cas en 2005 (note en expertise n°2 page 7 du rapport). Informé dès 1986 du défaut de conception, M. [H] [K] n'a pris aucune mesure pour y remédier.

Au vu de ces éléments, il est démontré que les fondations situées entre 20 et 30 cm par M. [H] [K] n'étaient pas suffisamment solides pour supporter les briques de parement et que de manière générale, les fondations de la construction initiale n'étaient pas suffisantes pour supporter les différentes constructions ultérieures.

Le demandeur échoue à établir que le phénomène de sécheresse serait la cause déterminante de son sinistre et qu'en conséquence, la société MAIF aurait manqué à ses obligations contractuelles en refusant de prendre totalement en charge le coût des travaux.

En l'état de ces constatations, il ne peut être reproché à la société MAIF, qui avait accepté de prendre en charge 20% des travaux, sous réserve de la fourniture de devis, dans la mesure où un doute subsistait quant à l'action de la sécheresse, de ne pas avoir procédé à des investigations complémentaires. En réalité, elle a accepté, même si les conditions de la garantie n'étaient pas acquises, de prendre une charge une partie du sinistre, ce à quoi M. [H] n'a pas donné suite. Cela ne peut être interprété comme une reconnaissance par l'assureur du droit à indemnisation intégrale de son assuré dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle.

De manière surabondante, il convient de relever que M. [H] [K] sollicite la somme de 180.000 euros TTC correspondant au montant maximum chiffré par M. [B] [E] en 1998 pour réaliser la reprise en sous-oeuvre de la maison, le brochage de dalles, les reprises des fissures, sans fournir la moindre pièce permettant d'évaluer de manière plus précise les dits travaux pour lesquels l'expert amiable n'avait fait qu'une estimation à titre indicatif, précisant que des études techniques devaient être réalisées. En outre, il doit être relevé que ce montant intégrait des travaux de reprise des fissures alors qu'il est acquis que depuis lors, M. [H] [K] a effectué de nombreux travaux et que ces fissures n'existent plus puisque tous les habillages briques ont été enlevés. D'ailleurs, l'expert judiciaire n'a constaté aucune fissure sur la maison d'origine ni à l'intérieur de la construction.

En conséquence, M. [H] [K] sera débouté de sa demande d'indemnisation.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’article 696 du Code de procédure civile dispose : « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile que“Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; [...]
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. [...]”.

Succombant en l'instance, M. [H] [K] sera condamné aux dépens, ce qui entraîne rejet de sa demande au titre des frais irrépétibles.

L'équité commande d'allouer à la MAIF la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Déboute M. [H] [K] de sa demande d'indemnisation formée à l'encontre de la société MAIF,

Condamne M. [H] [K] aux dépens,

Condamne M. [H] [K] à payer à la société MAIF la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 04
Numéro d'arrêt : 21/06246
Date de la décision : 18/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-18;21.06246 ?
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