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15/03/2024 | FRANCE | N°23/00015

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Expropriations, 15 mars 2024, 23/00015


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION

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Expropriations
N° RG 23/00015 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XSQ3

JUGEMENT DU 15 MARS 2024

DEMANDERESSE :

La MÉTROPOLE EUROPÉENNE DE [Localité 36], représentée par M. [X] [Y], agissant en qualité de vice-président et de délégué à la stratégie et à l’action foncière et patrimoniale de la métropole, domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 7] - [Localité 15]
représentée par M. [N] [T], muni d’un pouvoir régulier


DÉFENDEURS, les h

éritiers supposés de Mme [A] [U] [Z] veuve [S] (née le 05-05-1916 - décédée le 05-02-2015)

Mme [K] [R] [C] épouse [F] demeur...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION

-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Expropriations
N° RG 23/00015 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XSQ3

JUGEMENT DU 15 MARS 2024

DEMANDERESSE :

La MÉTROPOLE EUROPÉENNE DE [Localité 36], représentée par M. [X] [Y], agissant en qualité de vice-président et de délégué à la stratégie et à l’action foncière et patrimoniale de la métropole, domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 7] - [Localité 15]
représentée par M. [N] [T], muni d’un pouvoir régulier

DÉFENDEURS, les héritiers supposés de Mme [A] [U] [Z] veuve [S] (née le 05-05-1916 - décédée le 05-02-2015)

Mme [K] [R] [C] épouse [F] demeurant [Adresse 24] [Localité 20]
non comparante

M. [X] [E] [M] demeurant [Adresse 8] [Localité 19]
non comparant

Mme [P] [B] épouse [L] demeurant [Adresse 2] - [Localité 1] - BELGIQUE
non comparante

En présence de Madame [J] [I], commissaire du gouvernement par délégation du directeur régional des Finances publiques

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Aurélie VERON, Vice-présidente au Tribunal Judiciaire de Lille, juge titulaire de l’expropriation du département du Nord, désignée par ordonnance du premier président de la Cour d’appel de Douai, à compter du 1er septembre 2021, en conformité des dispositions des articles L. 311-5 et R. 211-2 du code de l’expropriation, assistée de Isabelle LASSELIN, greffier, secrétaire de la juridiction.

DÉBATS : A l’audience publique du 09 Février 2024, après avoir entendu :

M. [T]
Mme [I]

date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties présentes ont été avisées que le jugement serait rendu le 15 Mars 2024.

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe le 15 Mars 2024
EXPOSE DU LITIGE

La Métropole européenne de [Localité 36] (MEL) porte un projet situé entre le centre-bourg de [Localité 37] et la M257 sur les communes de [Localité 37] et de [Localité 43] consistant en la réalisation d'une voie nouvelle d'une longueur de 700 mètres pour réduire le trafic dans les voies d'accès actuelles de la commune, la restructuration du chemin historique existant en une voie douce sécurisée dédiée aux piétons et aux cyclistes et la création d'un giratoire se connectant à la route 257.

Par arrêté du 4 mai 2017, le préfet du Nord a prescrit l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique.

Par arrêté du 13 février 2018, prorogé par arrêté du 13 juin 2022, le préfet du Nord a déclaré le projet d'utilité publique.

Par arrêté préfectoral du 20 septembre 2019, les immeubles nécessaires à la réalisation du projet ont été déclarés immédiatement cessibles au profit de la MEL.

L'immeuble sis [Adresse 27] à [Localité 43], parcelle cadastrée D [Cadastre 4], d'une superficie de 117 m², est concerné par le projet.

L’ordonnance du juge de l’expropriation du 26 juin 2020, rectifiée par ordonnance du 18 novembre 2022, a opéré le transfert de la propriété de cette parcelle appartenant aux héritiers de [A] [D], laquelle est décédée le 5 février 2015.

Le 3 mai 2023, le service des Domaines a estimé la valeur de la parcelle à 105 euros, outre une indemnité de remploi de 27 euros.

La Métropole européenne de [Localité 36], autorisée à acquérir les immeubles nécessaires à l’exécution du projet, a adressé son mémoire valant offre par lettre recommandée avec avis de réception datée du 1er juin 2023 aux héritiers présumés de [A] [D]:
Mme [K] [W] ;M. [X] [S] ;Mme [P] [O].
Par mémoire du 1er juin 2023 parvenu au greffe le 26 septembre 2023, la Métropole européenne de [Localité 36] a saisi le juge de l’expropriation aux fins de voir fixer l’indemnité d’expropriation revenant aux héritiers potentiels de [A] [D] à 105 euros outre 27 euros de remploi.

Dans ses conclusions reçues au greffe le 7 décembre 2023, Mme le commissaire du gouvernement indique que le prix proposé de 0,89 €/m² lui paraît satisfactoire.

La visite des lieux s’est déroulée le 23 janvier 2024, en présence du représentant de la Métropole européenne de [Localité 36] et de Mme le commissaire du gouvernement, mais en l'absence des propriétaires régulièrement convoqués.

L'affaire a pu être utilement retenue à l'audience du 9 février 2024, à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré au 15 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il ressort des articles L321-1, L322-1 et L322-2 du code de l’expropriation pour cause de l'utilité publique que :
- les indemnités allouées par la juridiction de l’expropriation doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation ;
- la consistance du bien s’apprécie à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété ;

l’estimation du bien s’effectue à la date de la décision de première instance, sauf à prendre en considération l’usage effectif du bien, les critères de qualification et les possibilités de construction à la date de référence.
I- Sur l'indemnité principale d'expropriation

1/ Sur la consistance du bien

La parcelle est située [Adresse 27] à [Localité 43]. Elle est cadastrée D[Cadastre 4] et a une contenance de 117 m². Il s'agit d'une petite parcelle de forme triangulaire, en bordure de voie, en nature de terre agricole.

Elle est occupée.

Le terrain est classé en zone A.

2/ Sur la date de référence

Aux termes de l'article L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance.
Toutefois, et sous réserve de l'application des dispositions des articles L. 322-3 à L. 322-6, est seul pris en considération l'usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L.1 ou, dans le cas prévu à l'article L. 122-4, un an avant la déclaration d'utilité publique ou, dans le cas des projets ou programmes soumis au débat public prévu par l'article L. 121-8 du code de l'environnement ou par l'article 3 de la loi n°2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat ou, lorsque le bien est situé à l'intérieur du périmètre d'une zone d'aménagement concerté mentionnée à l'article L. 311-1 du code de l'urbanisme, à la date de publication de l'acte créant la zone, si elle est antérieure d'au moins un an à la date d'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique.
Il est tenu compte des servitudes et des restrictions administratives affectant de façon permanente l'utilisation ou l'exploitation des biens à la date correspondante pour chacun des cas prévus au deuxième alinéa, sauf si leur institution révèle, de la part de l'expropriant, une intention dolosive.
Quelle que soit la nature des biens, il ne peut être tenu compte, même lorsqu'ils sont constatés par des actes de vente, des changements de valeur subis depuis cette date de référence, s'ils ont été provoqués par l'annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d'utilité publique est demandée, par la perspective de modifications des règles d'utilisation des sols ou par la réalisation dans les trois années précédant l'enquête publique de travaux publics dans l'agglomération où est situé l²'immeuble.

En application de cet article, la date de référence est celle à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le PLU et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.

Il convient de fixer la date de référence, en application de cet article et de l'article L. 213-4 du code de l'urbanisme susmentionné à la date à laquelle la dernière modification du document d'urbanisme délimitant la zone où est situé le bien est devenue opposable, soit le PLU de la MEL approuvé le 12 décembre 2019 modifié par arrêté du 23 octobre 2020.

3/ Sur la méthode à appliquer

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

La méthode privilégiée de détermination du prix est celle de la comparaison par rapport aux transactions les plus représentatives du marché. Pour fixer les indemnités dues pour l'expropriation, la juridiction tient ainsi compte des offres, des demandes, des cessions de toute nature intervenues dans le même secteur géographique pour des biens comparables ainsi que de la situation des biens au regard des règles d'urbanisme.

La méthode par comparaison autorise la prise en compte de mutations de terrains d'un zonage équivalent, intervenues dans une période récente dans un secteur géographique comparable

La méthode par comparaison implique de retenir des biens situés dans une même zone soumise aux mêmes contraintes ou avantages en termes d'urbanisme, de taille comparable, situés dans un secteur géographique proche du bien à estimer, de nature analogue, et selon des évaluations effectuées à une date proche de la décision de première instance.

4/ Sur l’estimation du bien

Termes de comparaison cités par la MEL, en valeur occupée :

Réf. enregistrement
Ref. Cadastrales
Commune
Adresse
Date mutation
Surface terrain (m²)
Prix total
Prix/m²
5914P03 2023P04062
[Adresse 11]
[Localité 30]
[Adresse 42]
23/01/2023
65
65
1,00
5914P03 2021P04196
[Adresse 12]
[Localité 30]
[Adresse 34]
01/06/2021
2 842
1 700
0,60
5914P03 2022P35658
[Adresse 9]
[Localité 30]
[Adresse 34]
20/09/2022
14 664
14 664
1,00
5914P03 2020P06549
[Adresse 10]
[Localité 30]
[Adresse 33]
23/09/2020
4 468
5 000
1,12
5914P03 2022P01467
[Adresse 13]
[Localité 39]
[Adresse 38]
28/12/2021
7 200
5 000
0,69
5914P03 2022P07511
[Adresse 14]
[Localité 40]
[Adresse 31]
21/02/2022
17 550
14 040
0,80
5914P03 2020P08105
[Adresse 16]
[Localité 43]
[Adresse 25]
17/11/2020
11 660
10 500
0,90
5914P03 2021P24947
[Adresse 18]
[Localité 44]
[Adresse 26]
20/10/2021
13 995
15 000
1,07
5914P01 2021P05475
[Adresse 17]
[Localité 44]
[Adresse 32]
06/05/2021
3 858
3 858
1,00
5914P03 2022P23251
[Adresse 29]
[Localité 43]
[Adresse 35]
14/06/2022
9 720
7 290
0,75
5914P03 2022P23253
[Adresse 28]
[Localité 43]
[Adresse 35]
14/06/2022
13 821
10 366
0,75

Termes de comparaison cités par le commissaire du gouvernement :

1° 2021D06605 – attestation de propriété avec acceptation de la succession – décès de Mme [A] [U] [Z] – mêmes héritiers – parcelles cadastrées D [Cadastre 3], [Cadastre 5], [Cadastre 21], [Cadastre 22], [Cadastre 23], contenance 57 508 m² [Adresse 27] à [Localité 43] – prix = 21 556,14 € soit 0,37 €/m² valeur occupée.
2° Acte du 13/04/2023 – MEL/indivision Lalau – parcelle cadastrée D [Cadastre 6], contenance 7m² – terre agricole – [Adresse 41] à [Localité 43] – prix = 4,90 € soit 0,70 €/m².

Tous les termes de comparaison cités sont des cessions et acquisitions de parcelles de terre agricoles occupées, situées dans le même secteur géographique.

Le prix moyen de ces termes s'établit à 0,82 €/m², avec une fourchette allant de 0,37€/m² à 1,12€/m².

Le prix de 0,89€/m² offert par l'autorité expropriante apparaît donc satisfactoire.

En conséquence, au regard de l’ensemble de ces éléments, l’indemnité de dépossession revenant aux héritiers potentiels de [A] [D] doit être fixée à 105 euros (0,89€ x 117m²= 104,13 € arrondi à 105€).

II- Sur l'indemnité de remploi

Aux termes de l'article R. 322-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l'indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant de l'indemnité les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l'acquisition de biens de remplacement.
Toutefois, il ne peut être prévu de remploi si les biens étaient notoirement destinés à la vente, ou mis en vente par le propriétaire exproprié au cours de la période de six mois ayant précédé la déclaration d'utilité publique.

L'indemnité de remploi est destinée à couvrir de manière forfaitaire les frais de tous ordres qui seraient exposés par les expropriés pour acquérir un bien similaire.

Il convient de fixer l'indemnité de remploi de la manière suivante :
- 105 euros x 25 % = 26,25 euros.

III- Sur les demandes accessoires

Compte tenu de la nature du litige, les dépens resteront à la charge de la Métropole européenne de [Localité 36].

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'expropriation du Nord, statuant par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et mis à disposition au greffe,

FIXE la date de référence au 23 octobre 2020 ;

FIXE l’indemnité de dépossession revenant aux héritiers de [A] [D], pour l'immeuble sis [Adresse 27] à [Localité 43], parcelle cadastrée D [Cadastre 4] d'une superficie de 117 m², à 131,25 euros se décomposant ainsi :
indemnité principale : 105 euros indemnité de remploi : 26,25 euros ;
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

LAISSE les dépens à la charge de La Métropole européenne de [Localité 36].

Le GreffierLe juge de l'expropriation


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Expropriations
Numéro d'arrêt : 23/00015
Date de la décision : 15/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-15;23.00015 ?
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