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12/03/2024 | FRANCE | N°23/01621

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Référés, 12 mars 2024, 23/01621


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référé
N° RG 23/01621 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XXUV
SL/CG

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 12 MARS 2024




DEMANDERESSE :

S.P.P.I SOFIMMO
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Christophe EVERAERE, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Claude RYCHTER, avocat au barreau de PARIS, plaidant




DÉFENDERESSE :

S.D.C. [Adresse 2] pris en la personne de son syndic la SAS FONCIA HAUTS DE FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par

Me Caroline LOSFELD-PINCEEL, avocat au barreau de LILLE






JUGE DES RÉFÉRÉS : Carine GILLET, Première vice-présidente, suppléant le Président en vertu ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référé
N° RG 23/01621 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XXUV
SL/CG

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 12 MARS 2024

DEMANDERESSE :

S.P.P.I SOFIMMO
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Christophe EVERAERE, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Claude RYCHTER, avocat au barreau de PARIS, plaidant

DÉFENDERESSE :

S.D.C. [Adresse 2] pris en la personne de son syndic la SAS FONCIA HAUTS DE FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Caroline LOSFELD-PINCEEL, avocat au barreau de LILLE

JUGE DES RÉFÉRÉS : Carine GILLET, Première vice-présidente, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 13 Février 2024

ORDONNANCE du 12 Mars 2024

LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

La société de Placement à Prépondérance immobilière à Capital variable (SPPI) SOFIMMO est propriétaire des lots n°1, 2, 3, 9, 10 et 13, qu’elle a acquis auprès de la SCI FONCIÈRE MONNAIE et qui dépendent d’un immeuble soumis au régime de la copropriété, situé à [Localité 4] (59), [Adresse 2], dont le syndic en exercice est la société FONCIA [Localité 4], qu’elle a donnés à bail commercial à la SAS CERISE & CHOCOLAT suivant acte sous seing privé du 09 janvier 2023, pour une durée de neuf ans à compter du 09 janvier 2023.

La SPPI SOFIMMO expose qu’à l’occasion des travaux d’aménagement du local par la preneuse, il est apparu divers désordres qui ont été constatés le 27 février 2023 par [O] [C], expert judiciaire, précédemment désignée dans le cadre d’un référé préventif en décembre 2021 et par le Bureau VERITAS le 1er mars 2023, mandaté par le syndic. La SPPI SOFIMMO indique que suivant assemblée générale du 26 juin 2023, les copropriétaires ont voté l’exécution de travaux de réparation du mur du rez-de-chaussée du local commercial.

Exposant que tous les travaux d’aménagement dans le local commercial ont été interrompus en janvier 2023 et invoquant l’inertie du syndic à faire procéder aux travaux, en dépit d’une lettre de mise en demeure du 17 juillet 2023 et du 24 octobre 2023, la SPPI SOFIMMO a, par acte du 28 novembre 2023, fait assigner le syndicat des copropriétaires pris en la personne de son syndic, aux fins de condamnation du défendeur à l’exécution des travaux, sous astreinte, outre condamnation au paiement d’une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice et d’une indemnité pour frais irrépétibles.

L’affaire a été appelée à l’audience du 19 décembre 2023 et renvoyée à la demande des parties pour être plaidée le 13 février 2024.

A cette date, la SPPI SOFIMMO sollicite le bénéfice de son exploit introductif d’instance repris oralement, aux fins de :
Vu l’article 835 du code de procédure civile,
Vu les articles 8, 9, 14, 18 et 43, d’ordre public de la loi du 10 jui1let 1965.
Vu l’article 37 du Décret du 17 mars 1967.
-Débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes,
-Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à exécuter sous astreinte de 5 000 euros par jour à compter de la date de prononcé de l’ordonnance de référé les travaux de réparation du mur du rez-de-chaussée dams le lot 1 par l’entreprise Structure Bâtiment décidés par l’assemblée générale du 26 juin 2023.

En application des articles, d’ordre public, 14 dernier alinéa et 9. III de la loi du 10 juillet 1965 instaurant la responsabilité d’ordre public et de plein droit du syndicat des copropriétaires pour les préjudices ayant leur origine dans les parties communes :
-Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] représenté par son syndic à payer à la SPPI SOFIMMO :
Une provision de 40 000 euros à valoir sur le préjudice subi par la SPPI SOFIMMO.
Une indemnité de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Les dépens.

Le syndicat des copropriétaires, représenté par son avocat a développé oralement ses écritures déposées à l’audience, formant les prétentions suivantes :
Vu les dispositions des articles 835 et suivant du code de procédure civile
Vu les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 en particulier en son article 42,
-Débouter la société SOFIMMO de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Reconventionnellement,
-Condamner la société SOFIMMO au paiement d’une somme de 4000 euros en
application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers
dépens de la présente instance.

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La présente décision susceptible d’appel est contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution de travaux

La SPPI SOFIMMO se fondant sur les dispositions d’ordre public de la loi du 10 juillet 1965 et de son décret d’application et 835 du code de procédure civile, poursuit l’exécution de travaux par le syndic, responsable de plein droit des dommages causés par les parties communes et tenu d’exécuter les travaux de remise en état, estimant que l’impossibilité de jouir et d’exploiter le local commercial dont elle est propriétaire du fait des désordres en provenance des parties est constitutive d’un trouble manifestement illicite. Elle ajoute que si postérieurement à l’assignation, le syndic lui a remis l’ordre de service donné à l’entreprise, les travaux n’ont toujours pas commencé à ce jour.

Le syndicat des copropriétaires conclut au rejet de cette prétention, indiquant qu’elle a fait diligence et que ne disposant pas des fonds correspondant aux appels de fond, faute par la SPPI SOFIMMO de les avoir réglés à leur date d’exigibilité, elle n’a pu commander les travaux qu’après réception de leur intégralité le 30 novembre 2023.
Le défendeur ajoute qu’en vertu des dispositions de l’article 42 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965, il ne pouvait ni commander, ni faire exécuter les travaux, avant l’expiration du délai de recours suite à la notification du procès-verbal d’assemblée générale ayant voté la réalisation des travaux. Enfin, les travaux sont programmés semaine 4 de 2024, de sorte que la demande est sans objet.

Selon article 835 du code de procédure civile “Le président du tribunal judiciaire (...) peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé, les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il [le président du tribunal judiciaire] peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire”.

En application des dispositions de l’article 14 in fine de la loi du 10 juillet 1965, “Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toute action récursoire”.
En vertu des articles 18 du même texte et 37 du décret du 17 mars 1967, le syndic est chargé “d’administrer l’immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d’urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l’exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci”.

En vertu du premier de ces textes, le syndicat des copropriétaires est de plein droit responsable du dommage subi par la SPPI SOFIMMO, dès lors qu’il n’est pas contesté que le dommage invoqué par la demanderesse provient de “la présence de fissures sur les murs de maçonnerie et d’anciennes cheminées, déposées sans confortement”, qui constituent des parties communes (pièces SOFIMMO n° 1 : article 2 a/ du règlement de copropriété, n°3 et 4).

En revanche, dès lors que le syndic en exercice n’a pas été assigné, à titre personnel, les dispositions des article 18 et 37 précités, qui ont trait à la responsabilité personnelle du syndic, ces dispositions n’ont pas vocation à s’appliquer et ne concernent pas le syndicat des copropriétaires.

Les dispositions de l’article 42 de la loi précitée, imposant la suspension de l’exécution des travaux décidés en assemblée générale, dans l’attente du délai de deux mois pour exercer une action en contestation de la décision de l’assemblée générale, ne sont pas en l’espèce applicables, puisque les travaux litigieux, adoptés en assemblée générale du 26 juin 2023 (résolutions n°10-2 et 10-3 page 8), ont été votés à la majorité de l’article 24 et non pas aux majorités des articles 25 et 26. Le syndic n’avait donc pas comme il le soutient, à différer la mise en oeuvre de la délibération, dans l’attente de l’expiration du délai de contestation. C’est si vrai que le syndic a émis un premier appel le 24 juillet 2023 à hauteur de 50 %, soit sans attendre l’expiration du délai qu’il revendique, et un second le 1er septembre 2023.

Si le syndicat a rencontré des difficultés pour l’établissement de devis (ce dont au demeurant elle ne justifie pas) et a attendu le paiement de l’intégralité des appels de fonds, notamment par la société SOFIMMO, le dernier paiement étant intervenu le 17 octobre 2023 (pièce SOFIMMO n° 7-1), il n’a été procédé à la commande des travaux que le 30 novembre 2023 (pièce défendeur n°1), soit un mois et demi après ce règlement et après la délivrance de l’assignation et les travaux ont été programmés semaine 4 de 2024, soit la semaine du 22 janvier 2024 (pièce n°5 défendeur).

Cependant au jour de l’audience de renvoi du 13 février 2024, le syndicat des copropriétaires n’établit pas que les travaux ont été effectivement réalisés, de sorte qu’il ne peut raisonnablement soutenir que la demande d’exécution de travaux serait sans objet.

L’obligation du syndicat des copropriétaires de faire exécuter les travaux n’est pas sérieusement contestable, de sorte qu’il sera fait droit à la demande de ce chef selon les modalités exposées au dispositif de la présente décision.

Sur la demande en paiement provisionnel

La SPPI SOFIMMO sollicite au visa des articles 9 III et 14 in fine, de la loi du 10 juillet 1965, la condamnation à titre provisionnel du syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 40.000 euros, à valoir sur l’indemnisation de son préjudice généré par la perte de jouissance de son lot et par l’impossibilité de l’exploiter et d’en tirer des revenus issus de sa mise à bail.

Le syndicat des copropriétaires s’oppose à cette prétention, soutenant avoir rencontré des difficultés à l’établissement des devis de réparation, avoir été contraint de respecter le délai de deux mois avant mise à exécution de la délibération portant adoption de travaux et n’avoir pu disposer des fonds nécessaires à l’exécution des travaux.

En application de l’article 9 III de la loi sur la copropriété, “Les copropriétaires qui subissent un préjudice par suite de l’exécution de travaux, en raison soit d’une diminution définitive de la valeur de leur lot, soit d’un trouble de jouissance grave, même s’il est temporaire, soit de dégradations, ont droit à une indemnité”.

En l’occurrence, la SPPI SOFIMMO n’indique pas à quelle date elle a acquis les locaux, qui se trouvaient sous expertise suivant ordonnance du 16 décembre 2022 et qu’elle a donnés à bail commercial suivant acte sous seing privé du 09 janvier 2023, à compter de cette date, moyennant une franchise de loyers jusqu’au 07 juin 2023 (pièce SOFIMMO n°3). Suivant avenant n°1 du 04 juillet 2023, les parties au bail ont reporté la date de prise d’effet du bail, au premier jour du premier mois civil, qui suivra la date d’achèvement des travaux de reprise des murs parties communes, par le syndicat des copropriétaires. (pièce SOFIMMO n°11).

Comme indiqué précédemment, le syndicat des copropriétaires ne peut exécuter des travaux en urgence, seul le syndic peut le faire et il n’est pas dans la cause à titre personnel, et il est acquis que la société SOFIMMO n’a réglé le deuxième acompte au titre de l’appel pour travaux, que le 17 octobre 2023.
Dans ces conditions, la condamnation provisionnelle au paiement du syndicat des copropriétaires en réparation du préjudice lié à l’indisponibilité des lieux doit être limitée à la somme de 15.000 euros, le syndicat des copropriétaires ne pouvant notamment être tenu pour responsable de l’indisponibilité de l’entreprise désignée pour exécuter les travaux.

Sur les autres demandes

Le syndicat des copropriétaires réclame la condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de 4.000 euros, au motif que la SPPI SOFIMMO l’a contrainte à s’adresser à justice.
Le syndicat des copropriétaires qui succombe supportera les dépens et ses propres frais. Sa demande pour frais irrépétibles sera rejetée.

Il sera en outre condamné à payer à la SPPI SOFIMMO la somme de 2.000 euros, au titre des frais irrépétibles qu’il a exposés pour assurer sa défense et sa représentation et préserver ses droits, qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge.
La présente décision est exécutoire par provision en application des articles 484 et 514 et 514-1 alinéa 3 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS,

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Ordonnons au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son syndic, de faire exécuter sous astreinte de 200 euros par jour de retard, passé le délai de quinze jours suivant la notification de la présente ordonnance, les travaux de remise en état du mur du rez-de-chaussée du lot n°1, dépendant de la copropriété, par la société STRUCTURE BÂTIMENT, adoptés suivant assemblée générale du 26 juin 2023,

Disons que le juge des référés se réserve la liquidation de l’astreinte,

Condamnons le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son syndic en exercice, à payer à la SPPI SOFIMMO la somme provisionnelle de 15.000 euros, à valoir sur l’indemnisation de son préjudice résultant de l’indisponibilité des lieux qui lui appartiennent,

Condamnons le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son syndic en exercice, à payer à la SPPI SOFIMMO, la somme de 2.000 euros (deux mille euros) au titre des frais irrépétibles,

Condamnons le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son syndic en exercice, aux dépens,

Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Carine GILLET


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Référés
Numéro d'arrêt : 23/01621
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Ordonne de faire ou de ne pas faire quelque chose avec ou sans astreinte

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.01621 ?
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