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08/03/2024 | FRANCE | N°23/00395

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jex, 08 mars 2024, 23/00395


COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024


N° RG 23/0000395- N° Portalis DBZS-W-B7H-XRQ6


DEMANDEUR :

Monsieur [R] [W]
[Adresse 3]
[Adresse 5]
[Localité 4]

représenté par Me Christophe WERQUIN, avocat au barreau de LILLE


DÉFENDEURS :

Monsieur [N] [D]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représenté par Me Valérie REDON-REY , avocat au barreau de TOULOUSE, substituée par Me DEBROISE

Madame [L] [I]
[Adresse 1

]
[Localité 2]

représentée par Me Valérie REDON-REY , avocat au barreau de TOULOUSE, substituée par Me DEBROISE.


MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne...

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024

N° RG 23/0000395- N° Portalis DBZS-W-B7H-XRQ6

DEMANDEUR :

Monsieur [R] [W]
[Adresse 3]
[Adresse 5]
[Localité 4]

représenté par Me Christophe WERQUIN, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS :

Monsieur [N] [D]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représenté par Me Valérie REDON-REY , avocat au barreau de TOULOUSE, substituée par Me DEBROISE

Madame [L] [I]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Me Valérie REDON-REY , avocat au barreau de TOULOUSE, substituée par Me DEBROISE.

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne DE MARICOURT, Juge du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 19 Janvier 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 08 Mars 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00395 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XRQ6

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 13 novembre 2019, Monsieur [D] et Madame [I] ont donné en location à Monsieur [W] un logement situé [Adresse 3] à [Localité 4] moyennant le paiement d’un loyer mensuel charges comprises d’un montant de 395 euros.

Suite à des impayés, et par acte d’huissier du 19 février 2020, les bailleurs ont fait délivrer à Monsieur [W] un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail.

Par ordonnance du 7 juin 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille, saisi par les bailleurs en résolution du bail, a notamment :
-constaté l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail,
-condamné Monsieur [W] à payer la somme de 2.355,13 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté fin avril 2021,
-autorisé Monsieur [W] à se libérer de cette dette par mensualités de 70 euros,
-suspendu l’effet de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais et dit qu’elle sera réputée n’avoir jamais joué si les délais sont respectés,
-à défaut, dit que l’intégralité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire sera acquise, ordonné l’expulsion de Monsieur [W] et fixé une indemnité mensuelle d’occupation de 397 euros.

Cette décision a été signifiée à Monsieur [W] le 20 juillet 2021.

Par acte d’huissier en date du 5 janvier 2023, Monsieur [D] et Madame [I] ont fait délivrer à Monsieur [W] un commandement de quitter les lieux.

Par requête reçue au greffe le 20 septembre 2023, Monsieur [W] a sollicité l’octroi d’un délai à la mesure d’expulsion.

Le locataire et les bailleurs ont été invités à comparaître devant ce tribunal à l’audience du 15 décembre 2023.

Après un renvoi à l’initiative des parties, l’affaire a été retenue à l’audience du 2 février 2024.

A cette audience, les parties étaient représentées par leurs conseils.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l’audience par son conseil, Monsieur [W] sollicite un délai d’un an pour quitter les lieux.

Dans leurs conclusions soutenues oralement à l’audience par leur conseil, Monsieur [D] et Madame [I] demandent le rejet de la demande de Monsieur [D] et sa condamnation à leur payer 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.

L’affaire a été mise en délibéré au 8 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de délais pour quitter les lieux.

Aux termes des articles L. 412-3 et L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d'habitation ou de locaux à usage professionnel dont l'expulsion aura été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales. Pour la fixation de la durée de ces délais qui ne peuvent être inférieurs à un mois et supérieurs à un an, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de
famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

Au cas présent, il ressort des pièces du dossier que Monsieur [W] vit seul dans le logement. Ce dernier explique le non respect de ses obligations locatives par des difficultés de santé auxquelles se sont ajoutées des difficultés administratives pour percevoir ses indemnités journalières de la CPAM. Il expose dans sa requête qu’ il n’a actuellement toujours pas perçu ses indemnités et que les allocations chômage qu’il percevait jusqu’en octobre 2023 ont pris fin. Néanmoins, au sein des dernières pièces que Monsieur [W] verse aux débats se trouvent deux attestations de paiement de la CPAM en date du 29 janvier 2024 pour des périodes d’arrêt maladie au cours de l’année 2023 ainsi qu’une preuve de virement de la CPAM de la somme de 2.810,64 euros à son profit à la même date. Le requérant verse une attestation antérieure établie quelques jours auparavant, le 23 janvier 2024, pour la même période de l’année 2023 et qui ne laissait apparaître aucun droit à indemnité. Monsieur [W] justifie donc des difficultés pour percevoir ses indemnités journalières qu’il évoque et du déblocage récent de la situation. Le requérant fait valoir et justifie qu’il a dès le lendemain ordonné un virement aux bailleurs d’une somme de 270 euros au titre de la part résiduelle de son loyer et de la mensualité d’apurement fixée par le juge des référés.

S’agissant de ses démarches, le requérant justifie d’un suivi depuis septembre 2023 par l’association APU, d’une demande de logement social de décembre 2018 renouvelée le 26 juillet 2023, de démarches de relogement auprès de SOLIHA (demande de logement signée le 27 septembre 2023) et auprès de l’agence immobilière à vocation sociale du Nord (“en fin d’année 2023" d’après l’attestation de l’agence), d’un recours DALO du 19 septembre 2023 rejeté le 5 décembre 2023, du dépôt d’un dossier FSL déclaré recevable le 11 octobre 2023 et de demandes auprès du 115 sur la période du 4 au 9 octobre 2023.

Monsieur [W] justifie par ses pièces des difficultés de santé invalidantes qu’il évoque, y compris dans la période récente, notamment de deux opérations en date du 15 novembre et du 18 décembre 2023. L’association APU indique que le suivi de Monsieur [W] et les démarches de ce dernier ont dû être suspendues au cours de cette période.

Dans leurs conclusions, Monsieur [D] et Madame [I] font pour leur part valoir que Monsieur [W] n’a pas respecté l’échéancier judiciaire qui lui avait été octroyé démontrant ainsi sa mauvaise volonté ; qu’il ne justifierait pas de démarches de relogement alors qu’il a connaissance de la nécessité de se reloger depuis 2021 ; qu’il ne démontre pas que son expulsion entraînerait des conséquences particulièrement préjudiciables.

Aussi, pour statuer sur la demande, il faut certes relever que Monsieur [W] justifie d’une situation sociale et sanitaire complexe ayant pu le mettre en difficulté pour respecter ses obligations locatives puis pour respecter les délais judiciaires qui lui avaient été octroyés.

Il faut considérer également que Monsieur [W] justifie aujourd’hui de multiples démarches de relogement, lesquelles restent à ce jour infructueuses. Le requérant démontre ainsi que son relogement ne peut à ce jour avoir lieu dans des conditions normales.

Néanmoins, ces démarches n’ont été initiées que très tardivement, à savoir depuis le mois de septembre 2023 et le début du suivi par l’APU, alors que Monsieur [W] s’est vu dénoncer les délais judiciaires le 17 novembre 2021, qu’il a reçu commandement de quitter les lieux le 5 janvier 2023 et a fait l’objet d’une tentative d’expulsion le 18 avril 2023.

Il faut tenir compte par ailleurs de la situation de Monsieur [D] et de Madame [I], bailleurs privés, qui subissent les impayés locatifs depuis plusieurs années.

Compte tenu de ces éléments, et pour ménager un équilibre entre les intérêts du locataire et des bailleurs, il apparaît justifié de faire droit à la demande de Monsieur [W] à hauteur de 4 mois en conditionnant néanmoins le maintien du bénéfice de ce délai au paiement régulier de l’indemnité d’occupation résiduelle et de la mensualité de 70 euros prévue par le juge des référés dans son ordonnance du 7 juin 2021.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00395 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XRQ6

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Par ailleurs, en application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l’espèce, Monsieur [D] et Madame [I] succombent suite à l’octroi d’un délai à Monsieur [W]. Néanmoins, dès lors que l’octroi de ce délai vise à repousser l’exécution d’une décision de justice obtenue par les bailleurs en leur faveur, l’équité commande de condamner Monsieur [W] aux dépens.

Parties perdantes, Monsieur [D] et Madame [I] seront déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant par jugement prononcé par mise à disposition au greffe, contradictoire et susceptible d’appel,

ACCORDE à Monsieur [R] [W] un délai de 4 mois pour quitter les lieux à compter de la date de ce jugement ;

DIT que le maintien du bénéfice de ce délai est conditionné au paiement par Monsieur [W] de l’indemnité d’occupation résiduelle (APL déduite) et de la mensualité de 70 euros prévue par le juge des référés dans son ordonnance du 7 juin 2021 ;

DIT que ces paiements devront intervenir au plus tard à compter du 5 du mois suivant la notification de ce jugement par le greffe puis chaque 5 du mois ;

DIT qu’à défaut le délai sera caduc 8 jours après une mise en demeure infructueuse et que l’expulsion pourra être poursuivie ;

REJETTE la demande de Monsieur [N] [D] et de Madame [L] [I] au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [R] [W] aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est immédiatement exécutoire, le délai d’appel et l’appel lui-même des décisions du juge de l’exécution n’ayant pas d’effet suspensif en application de l’article R12121 du code des procédures civiles d’exécution ;

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.

La greffière Le juge de l'exécution
Sophie ARES Etienne DE MARICOURT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 23/00395
Date de la décision : 08/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-08;23.00395 ?
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