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08/03/2024 | FRANCE | N°23/00180

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jex, 08 mars 2024, 23/00180


COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024


N° RG 23/00180 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEZ4


DEMANDERESSE :

S.A.R.L. JPC
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Me Louise BARGIBANT, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Camille DOUTERLUINGNE


DÉFENDERESSE :

S.C.I. A.V.E.C.
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Jacques-Eric MARTINOT

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MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne DE MARICOURT, Juge du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Préside...

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024

N° RG 23/00180 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEZ4

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. JPC
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Me Louise BARGIBANT, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Camille DOUTERLUINGNE

DÉFENDERESSE :

S.C.I. A.V.E.C.
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Jacques-Eric MARTINOT

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne DE MARICOURT, Juge du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 02 Février 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 08 Mars 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00180 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEZ4

EXPOSE DU LITIGE

Par acte d’huissier du 28 mars 2023, la SCI AVEC a fait dénoncer à la société JPC une saisie conservatoire de créances diligentée le 22 mars 2023 sur ses comptes bancaires ouverts au sein de la CAISSE D’EPARGNE HAUTS DE FRANCE et ce, pour sûreté d’après l’acte d’une créance de 18.005,22 euros en principal ressortant d’un bail commercial liant la SCI AVEC en qualité de bailleur et la société JPC en qualité de preneur.

Par acte d’huissier en date du 28 avril 2023,la société JPC a fait assigner la SCI AVEC devant ce tribunal à l’audience du 25 septembre 2023 aux fins de contester cette mesure conservatoire.
Après plusieurs renvois à l’initiative des parties, l’affaire a été entendue à l’audience du 2 février 2024 au cours de laquelle les parties étaient représentées par leurs conseils.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l’audience par son conseil, la société JPC présente les demandes suivantes :
-Ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire du 22 mars 2023,
-Condamner la SCI AVEC à lui payer une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts,
-Condamner la SCI AVEC à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l’audience par son conseil, la SCI AVEC présente les demandes suivantes :
-Débouter la société JPC de ses demandes,
-La condamner à lui payer 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré à la date du 8 mars 2024.

Pour un exposé de l'argumentation des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, à ces conclusions et aux éléments repris dans la motivation du présent jugement.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en mainlevée.

Aux termes de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution, « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement. La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire ».

Aux termes de l’article L512-1 du même code, « même lorsqu'une autorisation préalable n'est pas requise, le juge peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article L. 511-1 ne sont pas réunies ».

En cas de contestation portée devant le juge de l’exécution à l’encontre d’une mesure conservatoire, il appartient au saisissant de démontrer que les conditions de la saisie conservatoire, soit l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe et de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement, sont réunies.

En l’espèce, s’agissant de la première condition, la société AVEC soutient que la société JPC ne se serait pas acquittée d’une somme de 20.754,77 euros TTC de loyers facturée au titre de quatre trimestres, d’une somme de 2.412,07 euros due en application de deux clauses pénales stipulées au bail et applicables en cas d’impayés (ces clauses étant bien stipulées dans le bail commercial versé aux débats) et au titre du coût d’un commandement de payer effectivement délivré le 30 septembre 2022 ainsi que d’une somme totale de 3.599,01 euros au titre de la taxe foncière, des consommations d’eau et de l’assurance propriétaire non-occupant (le bail contenant effectivement une clause de remboursement des charges au bailleur à hauteur de 1/5 des charges exposées, ce qui est conforme aux calculs du bailleur dans ses conclusions), soit une somme totale de 26.765,85 euros.

Il faut en premier lieu relever que le montant de la saisie conservatoire de 18.005,22 euros ne dépasse pas cette créance revendiquée par le bailleur.

Ensuite, face à ces prétentions du bailleur, la société JPC sur qui repose la charge de la preuve s’agissant de l’exécution de ses obligations en application de l’article 1353 alinéa 2 du code civil (“celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation”) ne conteste pas ce défaut de paiement. La société JPC se contente de faire valoir en premier lieu que la clause d’indexation stipulée au bail et appliquée par le bailleur devrait être réputée non-écrite. Néanmoins, à supposer même cette clause non-écrite, il resterait à sa charge au titre des quatre trimestres impayés une somme de 12.000 euros hors taxes compte tenu du loyer initialement convenu dans le bail et la saisie conservatoire à hauteur de 18.005,22 euros resterait justifiée compte tenu des autres sommes revendiquées par le bailleur. Par ailleurs, la société JPC se plaint de devoir supporter indûment l’éclairage des parties communes ainsi qu’une augmentation anormale des charges suite à des aménagements du bailleur dans l’immeuble, soit des contestations qui ne pourraient remettre en cause que marginalement les prétentions financières du bailleur.

De ces éléments, il doit être conclu que la société AVEC peut se prévaloir d’une créance apparaissant fondée en son principe.

Néanmoins, s’agissant de la condition tenant à l’existence d’une menace sur le recouvrement de la créance, force est de constater que la société AVEC ne fournit dans ses conclusions aucune argumentation pour en démontrer l’existence, sauf à rappeler de façon générale que cette condition peut s’entendre de la résistance du saisi à régler une dette incontestable, ce qui est d’évidence insuffisant.

Faute d’une telle démonstration, il y a lieu de conclure que les conditions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution ne sont pas réunies et d’ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire du 22 mars 2023.

Sur la demande indemnitaire de la société JPC.

Aux termes de l’article 1240 du code civil, «tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

L'engagement de la responsabilité civile d'autrui nécessite d'apporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute commise et le préjudice subi.

En l’espèce, le fait d’avoir diligenté de façon injustifiée une saisie conservatoire constitue une faute civile.

Néanmoins, s’agissant de son préjudice, la société JPC formule une demande globale à hauteur de 3.000 euros au titre d’un préjudice tant moral que financier sans indiquer à combien s’évaluerait respectivement chacun de ces préjudices.

Ensuite, s’agissant du préjudice moral, la société JPC évoque un préjudice moral “indéniable” sans en indiquer la consistance.

Par ailleurs, s’agissant du préjudice financier, la société JPC évoque le blocage de ses comptes bancaires sans soutenir qu’il en aurait découlé une perte financière. Ensuite, la demanderesse indique avoir dû fermer son établissement le mercredi 5 avril soir car elle n’avait pas de moyen de payer son fournisseur sans justifier aucunement de cet événement ni a fortiori de la perte financière qui en aurait découlé.

De l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de conclure que la société JPC ne démontre pas son préjudice. La demanderesse sera donc déboutée de sa demande.

Sur les dépens.

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l’espèce, la société AVEC qui succombe sera condamnée aux dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
 
Condamnée aux dépens, la société AVEC versera à la société JPC une somme qu'il est équitable de fixer à 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant par jugement prononcé par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

ORDONNE la mainlevée de la saisie conservatoire de créances diligentée par la SCI AVEC à l’encontre de la société JPC le 22 mars 2023 ;

REJETTE la demande indemnitaire de la société JPC ;

DEBOUTE la SCI AVEC de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la SCI AVEC à verser à la société JPC une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI AVEC aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est immédiatement exécutoire, le délai d’appel et l’appel lui-même des décisions du juge de l’exécution n’ayant pas d’effet suspensif en application de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution ;

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier,

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION
Sophie ARESEtienne DE MARICOURT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 23/00180
Date de la décision : 08/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-08;23.00180 ?
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