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08/03/2024 | FRANCE | N°23/00131

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jex, 08 mars 2024, 23/00131


COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024


N° RG 23/00131 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XCGV
N° RG 23/00178 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEP5


DEMANDERESSE :

Madame [G] [R] divorcée [L]
[Adresse 3]
[Localité 7]

représentée par Me Julie PENET, avocat au barreau de LILLE


DÉFENDEURS :

Monsieur [Y] [L]
[Adresse 4]
[Localité 6]

représenté par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI


S.E.L.A.R.L. GO

BERT PLASSY-SZYPULA ET ASSOCIES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Lauent DEVAUX, avocat au barreau de PARIS




MAGISTRAT TENANT L’...

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 08 Mars 2024

N° RG 23/00131 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XCGV
N° RG 23/00178 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XEP5

DEMANDERESSE :

Madame [G] [R] divorcée [L]
[Adresse 3]
[Localité 7]

représentée par Me Julie PENET, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS :

Monsieur [Y] [L]
[Adresse 4]
[Localité 6]

représenté par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI

S.E.L.A.R.L. GOBERT PLASSY-SZYPULA ET ASSOCIES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Lauent DEVAUX, avocat au barreau de PARIS

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Damien CUVILLIER, Premier Vice-Président Adjoint du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 12 Janvier 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 23 Février 2024, prorogé au 08 Mars 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00131 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XCGV

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

Madame [G] [R] et Monsieur [Y] [L] ont été mariés.

De leur union sont issus deux enfants :
[T], né le [Date naissance 1] 2000[C], né le [Date naissance 1] 2000.
Par décision en date du 25 juin 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de LILLE a prononcé le divorce des époux [L]-[R] par consentement mutuel.

S'agissant de la prise en charge des enfants, il était alors prévu les dispositions suivantes :
exercice conjoint de l'autorité parentale,fixation de la résidence des enfants chez la maman, organisation du droit de visite et d'hébergement du papa,fixation de la contribution de Monsieur [L] à l'entretien et l'éducation des enfants à la somme de 560 € par mois et par enfant, soit 1 120 € au total,partage par moitié des frais exceptionnels des enfants (frais de traitement médicaux ou d'orthodontie, voyages scolaires).
Par décision en date du 22 septembre 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de LILLE a, notamment :
constaté que l'enfant majeur [T] demeure à la charge principale de sa mère, Madame [G] [R],constaté que l'enfant majeur [C] est à la charge principale de son père depuis le 1er septembre 2018,supprimé à compter de cette date la contribution financière due par Monsieur [L] en faveur de [C],débouté Monsieur [L] de sa demande de contribution alimentaire à la charge de Madame [R], en faveur de [C], à compter de septembre 2018,rappelé que Monsieur [L] reste tenu, jusqu'à la présente décision, d'une pension alimentaire en faveur de l'enfant [T] d'un montant indexé de 610,81 €,supprimé à compter du 1er octobre 2020, la pension alimentaire due par chacun des parents en faveur de l'enfant qui n'est pas à sa charge principale,dit que les frais de scolarité des enfants étaient jusqu'alors à partager par moitié entre les parties;dit qu'à compter de la rentrée étudiante 2020-2021 les frais afférents aux études de chaque enfant, soit les frais de scolarité, seront partagés entre les parents à raison d'un quart à la charge de Madame [R], de trois quarts à la charge de Monsieur [L],débouté les parties de toute demande plus ample et contraire.
Monsieur [L] a souhaité obtenir remboursement des sommes par lui versées au titre de la pension alimentaire de [C].

Les discussions entre les parties ont échoué et Monsieur [L] a saisi le juge des référés pour obtenir condamnation de Madame [R] à lui payer la somme de 12 216,20 € outre 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par décision en date du 24 mai 2022, le juge des référés a cependant constaté la caducité de l'assignation en référé et a condamné Monsieur [L] au paiement d'une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte de commissaire de justice en date du 15 mars 2023, délivré à la demande de Monsieur [Y] [L], Madame [G] [R] s'est vue signifier un commandement aux fins de saie-vente pour obtenir paiement des pensions alimentaires indûment versées pour [C] entre septembre 2018 et octobre 2020.

Par acte de commissaire de justice en date du 27 mars 2023, Madame [G] [R] a fait assigner Monsieur [Y] [L] à comparaître à l'audience du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de LILLE du 4 septembre 2023 aux fins de :
ordonner la compensation entre les créances respectives des époux,juger que Monsieur [Y] [L] est débiteur envers Madame [G] [R],ordonner la mainlevée du commandement aux fins de saisie-vente délivré le 15 mars 2023 à Madame [G] [R],juger que tous les frais de délivrance du commandement demeureront à charge de Monsieur [Y] [L],condamner Monsieur [Y] [L] au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Cette instance a été enrôlée sous le numéro RG 23/00131.

Par un second acte de commissaire de justice en date du 26 avril 2023, Madame [G] [R] a fait assigner Monsieur [Y] [L] et la SCP GOBERT PLASSY-SZYPULA ET ASSOCIES, Commissaires de Justice à l'audience du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de LILLE du 4 septembre 2023 aux fins de :
ordonner la compensation entre les créances respectives des époux,juger que Monsieur [Y] [L] est débiteur envers Madame [G] [R],ordonner la mainlevée de la saisie-attribution dénoncée le 3 avril 2023 à Madame [G] [R],condamner Monsieur [Y] [L] et la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES in solidum au paiement de la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts compte tenu du caractère abusif de la saisie attribution,juger que les frais de saisie-attribution resteront à la charge de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES et à défaut de Monsieur [Y] [L],condamner in solidum Monsieur [Y] [L] et la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Cette seconde instance a été enrôlée sous le numéro RG 23/00178.

Après plusieurs renvois à la demande des parties, celles-ci ont été entendues en leurs plaidoiries, sur les deux instances simultanément, à l'audience du 12 janvier 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A cette audience, et dans l'instance n° RG 23/00131, Madame [G] [R] a soutenu oralement ses écritures et formulé les demandes suivantes :
juger que les créances entre les parties sont connexes,ordonner la compensation entre les créances respectives des époux,juger que Monsieur [Y] [L] est débiteur envers Madame [G] [R],ordonner la mainlevée du commandement aux fins de saisie vente délivré le 15 mars 2023 à Madame [G] [R],à titre subsidiaire, cantonner la saisie attribution à la somme de 514,79 €,juger que tous les frais de délivrance de commandement demeureront à charge de Monsieur [Y] [L], débouter Monsieur [Y] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,condamner Monsieur [Y] [L] au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans l'instance n° RG 23/00178, Madame [R] a également soutenu oralement ses écritures et présenté les demandes suivantes :
ordonner la jonction des procédures 23/00178 et 23/00131,ordonner la compensation entre les créances respectives des époux,juger que Monsieur [Y] [L] est débiteur envers Madame [G] [R],ordonner la mainlevée de la saisie attribution dénoncée le 3 avril 2023 à Madame [R],condamner Monsieur [Y] [L] et la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES in solidum au paiement de la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts compte tenu du caractère abusif de la saisie attribution,juger que les frais de saisie attribution resteront à la charge de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES et à défaut de Monsieur [Y] [L],débouter Monsieur [Y] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,débouter la société GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,condamner in solidum Monsieur [Y] [L] et la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, Madame [G] [R] soutient qu'elle a elle-même des créances alimentaires à faire valoir à l'encontre de Monsieur [L] et qu'après compensation entre les sommes dues de part et d'autre, c'est Monsieur [L] qui serait principalement débiteur de Madame [R], les deux mesures d'exécution étant dès lors injustifiées et devant donc être levées.
A titre subsidiaire, Madame [R] indique qu'après compensation, les mesures d'exécution devront être cantonnées à la somme de 514,79 €.

Madame [R] soutient par ailleurs que la saisie attribution critiquée présente un caractère parfaitement abusif puisque cette mesure d'exécution a été diligentée alors même que Monsieur [L] et la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES connaissaient les contestations opposées par Madame [R] à la première mesure de saisie-vente.

En défense, et dans les deux instances, Monsieur [Y] [L] a pour sa part formulé les demandes suivantes :
ordonner la jonction des deux instances ;juger que Madame [G] [R] est débitrice envers Monsieur [Y] [L] de la somme de 12 216,20 €,juger que Monsieur [Y] [L] est débiteur envers Madame [G] [R] de la somme de 3 508,06 €,juger que le commandement de payer aux fins de saie vente délivré le 15 mars 2023 et la saisie- attribution dénoncée le 3 avril 2023 à Madame [G] [R] sont parfaitement légitimes et bien fondés,débouter Madame [G] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,condamner Madame [G] [R] à régler à Monsieur [Y] [L] la somme de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,condamner Madame [G] [R] aux entiers dépens en ce compris les frais de délivrance du commandement de payer aux fins de saisie vente et du procès-verbal de saisie attribution.
Au soutien de ses demandes, Monsieur [L] soutient qu'après compensation entre les sommes dues de part et d’autre, Madame [R] lui reste redevable d'une somme de 8 708,14 €.
Si la convention initiale de divorce prévoyait un partage par moitié des frais exceptionnels pour les enfants, Monsieur [L] fait valoir que Madame [R] se prévaut de dépenses qui ne revêtent aucunement le caractère de dépenses exceptionnelles ou qui, de caractère exceptionnel, ne sont pas en lien avec une décision prise d'un commun accord des parents.
Monsieur [L] prétend notamment que les frais engagés pour les cours de pilotage de [T] alors qu'il était encore au Lycée résultent d'une décision unilatérale de Madame [R] dont le financement a été intégralement assuré par le grand-père maternel des enfants, s'agissant en fait d'un cadeau.
Monsieur [L] reconnaît cependant parfaitement être redevable de certaines autres dépenses, notamment de soin qu'il a d'ores et déjà déduites des sommes réclamées par les deux mesures d'exécution contestées.
S'agissant particulièrement des frais de scolarité de [T] à l'EDHEC, Monsieur [L] prétend que, par accord avec Madame [R] et [T], il a été décidé que les parents financent cette formation à hauteur de 24 000 € et que le reste soit pris en charge par [T].
Monsieur [L] prétend qu'en application de cet accord aujourd'hui dénoncé par Madame [R], il a pris en charge les trois quart des 24 000 € conformément à la dernière décision du juge aux affaires familiales.
Monsieur [L] soutient donc qu'après comptes entre les parties, Madame [R] lui reste redevable d'une somme de 8 708,14 € qui rend légitimes les deux mesures d'exécution critiquées.

Dans l'instance 23/00178, la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES a pour sa part également soutenu oralement ses écritures et formulé les demandes suivantes :
débouter Madame [G] [R] de l'ensemble de ses prétentions à l'encontre de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES,condamner Madame [G] [R] à payer à la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES la somme de 3 000 €sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
Au soutien de ses demandes, la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES fait d'abord valoir que la compensation judiciaire aujourd'hui invoquée par Madame [R] n'a pas encore été établie et n'existait en tout état de cause pas au moment de la délivrance des mesures d'exécution critiquées. Au moment de la délivrance des actes contestés il n'existait donc aucun motif de surseoir à l'exécution forcée des décisions exécutées.
La SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES souligne par ailleurs que Madame [R] ne s'est jamais prévalu d'aucune compensation avant de se voir notifier les deux mesures d'exécution critiquées alors qu'elle aurait pu s'en prévaloir devant le JAF comme devant le juge des référés.
Madame [R] est dès lors dans l'incapacité de prouver une quelconque faute de la part de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES et elle devra être purement et simplement déboutée de ses demandes.

A l'issue des débats les parties ont été informées que la décision serait rendue, après plus ample délibéré, par jugement mis à disposition au greffe le 23 février 2024.

Ce délibéré a dû être prorogé au 8 mars 2024 en raison d'une surcharge conjoncturelle du magistrat rédacteur.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA JONCTION DES PROCEDURES

Il résulte de l'article 367 du code de procédure civile que le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble.

En l'espèce, il existe un lien étroit entre les deux instances et il est de bonne administration de la justice d'en ordonner la jonction.

En conséquence, il convient d'ordonner la jonction des instances RG 23/00131 et RG 23/00178 sous le numéro RG 23/00131.

SUR LE COMMANDEMENT AUX FINS DE SAISIE VENTE ET SUR LA SAISIE ATTRIBUTION

Les deux mesures d'exécution ne sont aucunement critiquées sur la forme mais uniquement quant à leur bien fondé, lequel dépend de savoir si Monsieur [L] était bien créancier de Madame [R] au moment de la délivrance des actes contestés.

La solution du litige dépend donc avant tout des comptes à établir entre les parties.

SUR LES COMPTES ENTRE LES PARTIES

Il résulte de l'article 1353 du code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

L'article 1342-8 du code civil précise que le paiement se prouve par tout moyen.

L'article 1348 du même code dispose que la compensation peut être prononcée en justice, même si l'une des obligations, quoique certaine, n'est pas encore liquide ou exigible. A moins qu'il n'en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses effets à la date de la décision.

L'article 1348-1 du même code précise que Le juge ne peut refuser la compensation de dettes connexes au seul motif que l'une des obligations ne serait pas liquide ou exigible.
Dans ce cas, la compensation est réputée s'être produite au jour de l'exigibilité de la première d'entre elles.
Il résulte de l'article 9 du code de procédure civile qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, le jugement de divorce en date du 25 juin 2009 a mis à la charge de Monsieur [L] une pension alimentaire indexée de 560 € par mois et par enfant ainsi qu'un partage par moitié entre les parents des frais exceptionnels des enfants définis comme « frais de traitement médicaux ou d'orthodontie, voyages scolaires ».

Par décision en date du 22 septembre 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de LILLE a cependant, et notamment :
supprimé à compter du 1er septembre 2018 la contribution financière due par Monsieur [L] en faveur de [C],rappelé que Monsieur [L] reste tenu, jusqu'à la présente décision, d'une pension alimentaire en faveur de l'enfant [T] d'un montant indexé de 610,81 €,supprimé à compter du 1er octobre 2020, la pension alimentaire due par chacun des parents en faveur de l'enfant qui n'est pas à sa charge principale,dit que les frais de scolarité des enfants étaient jusqu'alors à partager par moitié entre les parties ;dit qu'à compter de la rentrée étudiante 2020-2021 les frais afférents aux études de chaque enfant, soit les frais de scolarité, seront partagés entre les parents à raison d'un quart à la charge de Madame [R], de trois quarts à la charge de Monsieur [L].

Sur les sommes dues par Madame [R] à Monsieur [L]
Il s'agit des pensions alimentaires indument versées par Monsieur [L] pour l'entretien et l'éducation de [C] entre le 1er septembre 2018 et le mois d'octobre 2020.

Monsieur [L] réclame à ce titre 12 216,20 €.

Madame [R] ne se reconnaît redevable que de la somme de 11 605,39 € prétendant que Monsieur [L] n'a pas versé la pension alimentaire du mois d'octobre 2020.

Monsieur [L], sur qui pèse la charge de la preuve, ne produit aucune pièce pour justifier du montant total des sommes dont il réclame remboursement. Il ne justifie pas en particulier avoir payé une pension alimentaire pour le mois d'octobre 2020.

Dans ces conditions, les sommes dues par Madame [R] à Monsieur [L] doivent être retenues pour un montant de 11 605,39 €.

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00131 - N° Portalis DBZS-W-B7H-XCGV

* Sur les sommes dues par Monsieur [L] à Madame [R]

Aux termes de ses écritures, Madame [R] se prétend créancière des sommes suivantes :
sommes « exceptionnelles » exposées pour [T] et [C] :9 488,99 €mutuelle de [C] :1 588,61 €timbre de plaidoiries de l'instance en référé : 13,00 €frais de scolarité EDHEC de [T] :6 135,00 €.
Monsieur [L] se reconnaît redevable des frais de mutuelle de [C] pour un montant de 1 588,61 €.

Le timbre de plaidoiries dû au titre de la procédure de référé n'est pas connexe aux frais d'entretien et d'éducation des enfants et sera donc exclu de la compensation demandée par Madame [R].

S'agissant des frais « exceptionnels », définis notamment comme les frais médicaux et de scolarité, dont la partage était prévu par moitié par le jugement de divorce, Madame [R] produit en vrac, sans explication, une série de pièces en timbre n°6 avec mission pour le magistrat de s'en débrouiller. De ce fatras de pièces peut être retenu ce qui suit :

frais médicaux : Monsieur [L] se reconnaît redevable de la moitié des dépenses justifiées par les factures produites par Madame [R] sous timbre 6 à l'exception de la facture de la grande pharmacie en date du 23 octobre 2018.
Le jugement de divorce a défini ces frais « exceptionnels » comme se composant notamment des frais de traitement médicaux. Il convient dès lors d'y intégrer la facture de la grande pharmacie en date du 23 octobre 2018 dont Monsieur [L] devra supporter la moitié.

Au titre de ces frais médicaux il convient donc de retenir la somme de : 529,45 + (83,03 / 2) = 570,96 €.

L'achat d'ordinateurs portables représente une dépense de nature exceptionnelle car non courante.
A ce titre, Madame [R] justifie par les pièces produites avoir exposé les dépenses suivantes :

3 550,75 + 2 588,65 +81,19 = 6 220,59 €

S'agissant de dépenses importantes et exceptionnelles, exposées dans l'intérêt des enfants, la préservation des droits de chaque ex-époux requiert que ces dépenses soient engagées d'un commun accord indépendamment du niveau de revenu de l'un ou de l'autre.

Monsieur [L], qui prétend que tel n'a pas été le cas et qu'il n'a pas donné son aval à ces dépenses, ne peut apporter la preuve négative d'une absence de consentement.

C'est donc à Madame [R] de démontrer, par tout moyen à sa convenance, que Monsieur [L] était d'accord pour l'engagement de ces dépenses.

Cette preuve n'est pas rapportée en l'espèce.

Monsieur [L] n'ayant pas consenti à ces dépenses exceptionnelles non obligatoires, Madame [R] supportera seule leur coût.

les dépenses liées à l'obtention du permis de conduire sont également des dépenses exceptionnelles qui supposent l'accord des deux parents.
Si Madame [R] démontre avoir exposé les frais inhérents à la passation des deux permis de conduire des enfants, elle ne démontre pas que ces dépenses ont été engagées d'un commun accord avec Monsieur [L]. Elle devra donc en supporter le coût.
frais de scolarité de [C] « Sup Médical LILLE » :il s'agit d'une facture au nom de [C] [L], alors majeur sur laquelle est apposée en face de certaines échéances « non payé par [Y] ». Ce document ne prouve pas que ces sommes -lesquelles d'ailleurs – ont été exposées par Madame [R]. Monsieur [L] se reconnaît cependant redevable à cet égard de la somme de 1 390 €.
Sur les frais d'école de pilotage.
Il s'agit là encore d'une dépense exceptionnelle soumise, au cours de la minorité de l'enfant, à l'accord des parents.

Si par sa pièce 26 Madame [R] démontre que Monsieur [L] était au fait que son fils souhaitait devenir pilote de ligne et qu'il a participé à cette fin à une réunion d'information d'une école belge de formation de pilotes, il n'est établi par aucune pièce au dossier qu'il a consenti à l'engagement de dépenses antérieures pour la passation du brevet de pilote privé.

Surtout, si Madame [R] démontre par des extraits du grand livre de l'association support de l'aéroclub au sein duquel [T] a passé son premier brevet que des dépenses ont été engagées à cette fin pour [T] à hauteur de 4 306,07 €, elle n'établit pas avoir personnellement effectué ces dépenses alors que Monsieur [L] affirme que ces dépenses ont été effectuées par le grand père maternel de [T] à titre de cadeau à son petit fils.

Ces sommes ne peuvent donc être retenues comme étant partiellement dues par Monsieur [L].

Sur les frais de scolarité à l'EDHEC :
La dernière décision du juge aux affaires familiales est très claire : à compter de la rentrée universitaire 2020, les frais de scolarité des enfants, devenus majeurs et choisissant donc seuls leur parcours, sont à partager entre les parents à hauteur de ¾ pour Monsieur [L] et ¼ pour Madame [R].

Par sa pièce n° 15, Madame [R] démontre que les frais de scolarité de [T] à l'EDHEC s'élèvent à un total de 38 730 € à étaler sur les années universitaires 2022/2023, 2023/2024 et 2024 /2025.

Par application de la dernière décision du juge aux affaires familiales, Monsieur [L] doit donc prendre en charge ces frais de scolarité aux trois quarts.

Pour faire échec aux dispositions claires de cette dernière décision, Monsieur [L] ne peut se prévaloir d'un accord qui serait intervenu entre Madame [R], [T] et lui, limitant sa participation aux frais de scolarité de ce dernier, la réalité de ce prétendu accord ne pouvant être démontrée par un document signé du seul Monsieur [L].

Le fait que les relevés de compte de [T] laissent apparaître qu'il bénéficie d'autres financements – notamment apparemment une aide de ses grands parents maternels et un prêt étudiant, ne démontre pas qu'il a acquiescé à l'accord revendiqué par son père mais seulement qu'en l'absence de la part de financement paternel due, il a dû trouver d'autres solutions.

Monsieur [L] doit donc payer trois quart des frais de scolarité de son fils [T].

Toutefois, pour que les sommes dues par Monsieur [L] à ce titre puissent être retenues par Madame [R] au titre de la compensation, il faudrait que celle-ci démontre avoir dû payer elle-même les sommes non prises en charge de Monsieur [L] ou avoir à les payer. Pour pouvoir exiger remboursement, il faut démontrer avoir décaissé les sommes ou démontrer que les sommes lui sont dues à elle. Or, ces sommes, sont dues à [T] et / ou à son école, mais pas à Madame [R], à moins qu'elle n'ait dû les exposer elle-même et pouvoir ainsi en demander remboursement.

Dans ces écritures, en page 10, Madame [R] indique que les frais de scolarité de [T] à l'EDHEC sont payés par des prélèvements de 1 113 € par mois sur le compte de celui-ci.
Des relevés de compte de [T] produits aux débats résulte que ces frais de scolarité sont couverts par des versements mensuels de Monsieur [Y] [L], à hauteur de 520 € - et donc ne représentant pas les ¾ des frais de scolarité -, un virement de 500 € par mois émanant des grands parents maternels de [T] – Monsieur et Madame [B] [R] – et de virements que [T] se fait à lui-même au moyen semble-t-il d'un prêt étudiant.

De ces éléments ne résulte pas que Madame [R] ait payé les frais non couverts par Monsieur [L].
N'ayant pas exposé ces frais, elle ne peut en demander le remboursement. Ces sommes, qu'elle n'a pas exposées et qui sont en réalité dues à [T], ne lui sont pas dues à elle et elle ne peut donc exciper d'une quelconque compensation pour leur montant.

De ce qui précède résulte donc que :
Monsieur [L] peut se prévaloir à l'encontre de Madame [R] d'une créance de 11 605,39 €,Madame [R] peut se prévaloir à l'encontre de Monsieur [L] d'une créance connexe de 1 588,61 + 570,96 + 1 390 = 3 549,57 €
Après compensation entre les créances connexes respectives, Madame [R] reste redevable envers Monsieur [L] de la somme de 11 605, 39 – 3 549,57 = 8 055,82 €.

Il appartiendra seulement à Monsieur [L] d'assumer devant ses enfants ces décisions de ne pas participer pleinement à leurs frais d'éducation en dépit de ses revenus plus que confortables.

Dans ces conditions, Monsieur [R] ayant une créance certaine et liquide en principal de 8 055,82 €, les mesures d'exécution critiquées, uniquement sur leur bien fondé, étaient justifiées.

En conséquence, il convient de valider les deux mesures d'exécution critiquées en les cantonnant, en principal, à la somme de 8 055,82 €.

SUR LES DOMMAGES ET INTERETS

Il résulte de l'article 1240 du code civil que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, la mesure de saisie attribution était bien fondée, Madame [R] étant bien débitrice à l'égard de Monsieur [L].

Aucune faute ne peut donc être caractérisée en l'encontre de Monsieur [L] et de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES.

En conséquence, Madame [R] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

SUR LES DEPENS

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par une décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, Monsieur [L] et Madame [R] sont co-responsables du fait d'avoir dû recourir à justice pour faire les comptes entre eux.

Dans ces conditions, ils conserveront chacun la charge de leurs propres dépens.

Madame [R] a pour sa part attrait en justice de manière infondée la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES.

Dans ces conditions, il convient de condamner Madame [R] au paiement des dépens exposés par la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES.

En conséquence, il convient de dire que Madame [R] et Monsieur [L] conserveront leur propres dépens mais de condamner Madame [R] au paiement des dépens exposés par la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES.

SUR LES FRAIS DE PROCEDURE

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, Monsieur [L] et Madame [R] restent tenus de leurs propres dépens mais Madame [R] succombe en ses demandes à l'encontre de la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES à qui elle doit rembourser les dépens.

En conséquence, il convient de débouter Monsieur [L] et Madame [R] de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner Madame [R] à payer à la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES la somme de 1 500 € au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe,

ORDONNE la jonction des instances RG 23/00131 et RG 23/00178 sous le numéro RG 23/00131 ;

DIT que Monsieur [Y] [L] peut se prévaloir à l'encontre de Madame [G] [R] d'une créance de 11 605,39 € ;

DIT que Madame [G] [R] peut se prévaloir à l'encontre de Monsieur [Y] [L] d'une créance connexe de 3 549,57 € ;

ORDONNE la compensation entre ces deux sommes ;

DIT en conséquence que Monsieur [Y] [L] peut se prévaloir à l'encontre de Madame [G] [R], d'une créance, en principal, de 8 055,82 € ;

VALIDE en conséquence le commandement aux fins de saisie vente délivré le 15 mars 2023 à Madame [G] [R] mais ORDONNE son cantonnement, en principal, à la somme de 8 055,82 € ;

VALIDE en conséquence, la saisie attribution dénoncée le 3 avril 2023 à Madame [G] [R] mais en ORDONNE son cantonnement, en principal, à la somme de 8 055,82 € ;

DEBOUTE Madame [G] [R] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
DIT que Monsieur [Y] [L] et Madame [G] [R] conserveront chacun la charge de leurs propres dépens ;

CONDAMNE Madame [G] [R] à payer les dépens exposés par la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES ;

DEBOUTE Monsieur [Y] [L] et Madame [G] [R] de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [G] [R] à payer à la SELARL GOBERT PLASSY SZYPULA ET ASSOCIES la somme de 1 500 € - mille cinq cents euros – au titre des frais par elle exposés pour les besoin de sa défense et non compris dans les dépens.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION
Sophie ARESDamien CUVILLIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 23/00131
Date de la décision : 08/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-08;23.00131 ?
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