TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE DRAGUIGNAN
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Chambre 1
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DU 28 Août 2024
Dossier N° RG 23/03206 - N° Portalis DB3D-W-B7H-J2YU
Minute n° : 2024/ 437
AFFAIRE :
S.C.I. ENDINE C/ [B] [K] épouse [I], [H] [I]
JUGEMENT DU 28 Août 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Madame Emmanuelle SCHOLL, Vice-présidente, statuant à juge unique
GREFFIER lors des débats : Madame Stéphanie STAINIER
GREFFIER lors de la mise à disposition : Madame Nasima BOUKROUH
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 Mai 2024
A l’issue des débats, les parties ont été avisées que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2024 prorogé au 28 Août 2024
JUGEMENT :
Rendu après débats publics par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort.
Copie exécutoire à la SELAS CABINET DREVET
Expédition à la l’ASSOCIATION FAURE MARCELLE ET CAPOROSSI DIDIER
Délivrées le
Copie dossier
NOM DES PARTIES :
DEMANDERESSE :
S.C.I. ENDINE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Didier CAPOROSSI , de l’ASSOCIATION FAURE MARCELLE ET CAPOROSSI DIDIER, avocat au barreau de TOULON
D’UNE PART ;
DEFENDEURS :
Madame [B] [K] épouse [I]
et
Monsieur [H] [I]
demeurant ensemble [Adresse 4]
[Localité 3]
représentés par Maître Serge DREVET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, avocat postulant et assistés par Maître Stéphane BOUILLOT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
D’AUTRE PART ;
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EXPOSE DU LITIGE
Par acte du 4 novembre 2013, la SCI ENDINE a consenti un bail commercial à la SARL BM LES ILES d’OR portant sur un local commercial sis à [Localité 5] pour un loyer mensuel 1.310 euros mensuels outre la prise en charge de la taxe foncière. Madame [B] [K] épouse [I] et monsieur [H] [I] se sont portés cautions pour le règlement des loyers, charges, intérêts de retard et taxe foncière.
Des loyers sont restés impayés et un commandement a été délivré 18 mai 2018 visant la clause résolutoire. Il a été dénoncé aux cautions le 25 mai 2018. Par ordonnance du 15 janvier 2019, le juge des référés a constaté l’acquisition de la clause résolutoire mais en a suspendu les effets en accordant des délais de paiement.
Par jugement en date du 20 octobre 2020, la SARL BM LES ILES D’OR a été placée en liquidation judiciaire. La restitution du local a eu lieu le 26 mars 2021.
Par actes d’huissier de justice du 1er octobre 2021, la SCI ENDINE a assigné madame [B] [I] née [K] et monsieur [H] [I] devant le tribunal judiciaire de Toulon aux fins de paiement.
Par ordonnance en date du 14 mars 2023, le juge de la mise en état s’est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Draguignan, juridiction devant laquelle l’affaire a été renvoyée.
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 2 février 2024, la SCI ENDINE demande de :
-CONDAMNER solidairement Madame [B] [K] épouse [I] et Monsieur [H] [I] à payer à la SCI ENDINE la somme de 13.908,50 € au titre de l’arriéré locatif dû par la personne morale dont ils se sont portés cautions.
- CONDAMNER solidairement Madame [B] [K] épouse [I] et Monsieur [H] [I] à payer à la SCI ENDINE la somme de 5000,00 € à titre de dommages-intérêts en l’état des difficultés, tracas et diligences que le bailleur a dû effectuer à la suite de la procédure collective, et en exécution du contrat de cautionnement.
- CONDAMNER solidairement Madame [B] [K] épouse [I] et Monsieur [H] [I] à payer à la SCI ENDINE la somme 6.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Le tribunal renvoie à la lecture des conclusions pour les moyens au soutien des prétentions.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 30 janvier 2024, les époux [I] demandent de:
- DEBOUTER la SCI ENDINE de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- CONDAMNER la SCI ENDINE à leur payer la somme de 6.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- CONDAMNER la SCI ENDINE aux entiers dépens.
Le tribunal renvoie à la lecture des conclusions pour les moyens au soutien des prétentions.
Par ordonnance en date du 8 février 2024, l’instruction a été close et l’affaire renvoyée à l’audience du 7 mai 2024, déplacée le 14 mai 2024.
MOTIFS
Sur la demande en paiement:
Aux termes de l’article 37 II de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, les cautionnements souscrits avant le 1er janvier 2022 demeurent soumis à la loi ancienne.
Aux termes de l’article 2288 ancien du code civil, celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même.
Aux termes de l’article 2292 du code civil, le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.
Le point litigieux concerne la qualification de la nature de la dette à savoir s’il s’agit de loyers ou d’indemnités d’occupation. La raison de cette divergence provient de l’ordonnance de référé qui, après avoir constaté l’acquisition de la clause résolutoire le 19 juin 2018, a accordé des délais en disant que la débitrice pouvait s’acquitter de sa dette par versement en sus du loyer de 550 euros le 1er de chaque mois. S’il n’est pas contesté que tous les paiements sont intervenus, les défendeurs soutiennent qu’ils ont été en retard de sorte que la clause résolutoire est acquise et qu’il s’agit d’indemnité d’occupation exclue de leur obligation. La SCI ENDINE considère que l’ensemble de la dette locative ayant été réglé, le contrat de bail a repris ses droits de sorte qu’il s’agit d’une créance de loyer, comprise dans l’engagement de caution.
Il a été admis et notamment par arrêt du 22 octobre 2020 (n°19-19.542) qu’il résulte de l’article L145-41 du code de commerce que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre les effets d'une clause résolutoire, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice passée en force de chose jugée. La clause résolutoire est réputée n'avoir jamais produit ses effets si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Dès lors que l'ordonnance de référé est passée en force de chose jugée et en l'absence de décision contraire statuant au principal, le bailleur ne peut plus, en cas de non-respect par le preneur des délais de paiement conditionnant la suspension des effets de la clause résolutoire, demander unilatéralement l'exécution du bail résilié.
En l’espèce, il ressort des pièces que les règlements sont intervenus pour certains d’entre eux tardivement par rapport à la date fixée par le juge des référés (1er de chaque mois) à savoir: le remboursement du mois de mars 2019 est intervenu le 7 mars 2019, celui du mois de mai 2019 le 6 mai 2019, celui du mois de juin 2019 le 6 juin 2019, celui du mois de juillet 2019 le 3 juillet 2019, celui du mois de septembre 2018 le 6 septembre 2019, celui du mois d’octobre 2019 le 4 octobre 2019, celui du mois de novembre 2019 le 6 novembre 2019 et celui du mois de décembre 2019 le 6 décembre 2019.
Il convient également de relever l’ambiguïté de la position de la SCI ENDINE qui évoque des loyers dans ses courriers et échanges avec la locataire, avec les cautions dans la présente procédure, mais se prévaut du non respect des délais fixés par le juge des référés dans ses échanges avec le mandataire liquidateur.
Il en résulte que dans la mesure où il est constaté que des paiements sont intervenus postérieurement à la date fixée par le juge des référés, la clause résolutoire est acquise et la SCI ENDINE ne peut plus se prévaloir de loyer à compter de la date d’acquisition de la clause résolutoire soit le 19 juin 2018.
L’acte de cautionnement ne prévoyant pas la prise en charge d’indemnités d’occupation, la SCI ENDINE ne peut demander le paiement des indemnités d’occupation, ni même de la taxe foncière, le contrat étant résolu et la décision judiciaire ne le prévoyant pas au titre des indemnités d’occupation.
En conséquence, la demande sera rejetée.
Il en sera de même pour la demande au titre des dommages et intérêts, aucune faute ne pouvant être retenue à l’égard des cautions.
Sur les demandes accessoires :
Déboutée au principal, la SCI ENDINE sera condamnée aux dépens.
Elle sera en outre condamnée à verser une indemnité aux époux [I] au titre de l’article 700 qu’il est équitable de fixer à 6.000 euros.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal,
Rejette la demande en paiement de la SCI ENDINE,
Rejette la demande en dommages et intérêts formée par la SCI ENDINE,
Condamne la SCI ENDINE à payer à madame [B] [I] née [K] et monsieur [H] [I] la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI ENDINE aux dépens.
ainsi jugé et signé
LE GREFFIER LA PRESIDENTE