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29/07/2024 | FRANCE | N°19/00571

France | France, Tribunal judiciaire de Créteil, Ctx protection sociale, 29 juillet 2024, 19/00571


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T.J de Créteil - Pôle Social - GREJUG04 /
N° RG 19/00571 - N° Portalis DB3T-W-B7D-RCUQ
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRÉTEIL
Pôle Social

JUGEMENT DU 29 JUILLET 2024
___________________________________________________________________________

DOSSIER N° RG 19/00571 - N° Portalis DB3T-W-B7D-RCUQ

MINUTE N° 24/1084 Notification
CCC délivrée à la société [4] par LRAR + aux avocats par le vestiaire
CE délivrée à la CPAM du Val-de-Marne par LRAR
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PARTIES EN CAUSE :

DEMANDERESSE

La so...

__________________________________________________________________________________________________
T.J de Créteil - Pôle Social - GREJUG04 /
N° RG 19/00571 - N° Portalis DB3T-W-B7D-RCUQ
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRÉTEIL
Pôle Social

JUGEMENT DU 29 JUILLET 2024
___________________________________________________________________________

DOSSIER N° RG 19/00571 - N° Portalis DB3T-W-B7D-RCUQ

MINUTE N° 24/1084 Notification
CCC délivrée à la société [4] par LRAR + aux avocats par le vestiaire
CE délivrée à la CPAM du Val-de-Marne par LRAR
____________________________________________________________________

PARTIES EN CAUSE :

DEMANDERESSE

La société [4], dont le siège social est sis M. [S] [V] - [Adresse 1]
représentée par Maître Kamel TABI de la SELEURL K.T, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C0070

DÉFENDERESSE

La caisse primaire d’assurance maladie du Val-de-Marne, sise [Adresse 3]
représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1901

DÉBATS A L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 21 MAI 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL:

PRÉSIDENTE : Mme Manuela DE LUCA, juge

ASSESSEURS : Mme Janine PIEGAY, assesseure collège salarié
M. Philippe ROUBAUD, assesseur employeur

GREFFIÈRE : Mme Karyne CHAMPROBERT

Décision contradictoire et en premier ressort rendue au nom du peuple français, après en avoir délibéré le 29 juillet 2024 par la présidente, laquelle a signé la minute avec la greffière.

EXPOSE DU LITIGE

La caisse primaire d’assurance maladie du Val-de-Marne a procédé à une étude de la facturation présentée au remboursement par la société [4] sur la période de juillet 2016 à mars 2017.

Suite au constat d’anomalies de facturation, la caisse a notifié à la société [4], par courrier en date du 20 octobre 2017, un indu d’un montant de 17.101,98 euros.

La société [4] a saisi la commission de recours amiable de la caisse le 30 octobre 2017 afin de contester cette notification d'indu.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 avril 2019, la société [4] a saisi le tribunal de grande instance de Créteil sur rejet implicite de la commission de recours amiable.

En application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, les tribunaux de grande instance, spécialement désignés aux termes de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, sont devenus les tribunaux judiciaires à compter du 1er janvier 2020.

Après plusieurs renvois à la demande des parties, l'affaire a été appelée en dernier lieu à l'audience du 21 mai 2024.

La société [4] a comparu, représentée par son conseil. Elle demande au tribunal de débouter la caisse de sa demande reconventionnelle en paiement de l’indu et de sa demande au titre des frais irrépétibles, et sollicite la condamnation de la caisse aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. A titre subsidiaire, elle demande au tribunal de ne pas assortir le jugement de l’exécution provisoire pour lui permettre de faire appel de la décision. A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite l’octroi de délais de paiement.
Elle soutient que la société [4] n’est pas un professionnel de santé mais une société de transport exerçant sous la forme d’un taxi, et n’entre donc pas dans le champ d’application des dispositions de l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, mais relève de la convention type des entreprises de taxi et des organismes locaux d’assurance maladie publiée au JO du 23 septembre 2008. Elle soutient que la caisse ne vise aucun manquement à cette convention pour justifier sa demande de remboursement d’indu, et affirme à cet égard que le tableau récapitulatif produit par la caisse ne constitue pas une preuve suffisante du non-respect des règles de tarification et de facturation dans la mesure où ce tableau ne précise pas les références textuelles applicables. Elle relève qu’aucune obligation légale ou conventionnelle n’impose par exemple la délivrance d’une attestation de passage pour justifier le transport. Elle conteste également l’indu réclamé au titre de prescriptions non conformes en soutenant que selon la jurisprudence, le transporteur n’a aucun pouvoir et ne peut intervenir pour compléter ou modifier une prescription.

La caisse primaire d’assurance maladie du Val-de-Marne, régulièrement représentée par son conseil, demande au tribunal, à titre liminaire, que soient écartées des débats toutes les pièces produites par la société [4] non communiquées contradictoirement. Elle sollicite par ailleurs, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, le débouté des demandes de la société requérante et la condamnation de cette dernière, à titre reconventionnel, au paiement de la somme de 17.101,98 euros en répétition de l’indu et de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Elle soutient qu’elle n’a jamais été destinataire des pièces jointes au recours de la société requérante et demande qu’elles soient écartées des débats. Elle rappelle que la demanderesse est une société de taxi conventionnée qui bénéficie de la prise en charge des transports qu’elle réalise sur prescription médicale et qui a donc accepté en contrepartie de se soumettre aux règles conventionnelles de tarification et de facturation. Elle rappelle également la règle probatoire, précisant que l’indu déterminé dossier par dossier pour des patients déterminés à des dates identifiées à partir des données médico-administratives issues du contrôle opéré par le service médical de la caisse, le tout synthétisé dans un tableau, est parfaitement justifié, à charge ensuite pour le professionnel de santé de justifier du bien-fondé des facturations, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Elle soutient que l’ensemble des anomalies relevées ont pour base textuelle la convention locale des taxis conventionnés. Elle ajoute qu’aucune régularisation ne peut intervenir a posteriori. Elle s’oppose par ailleurs à la demande de délais de paiement formulée à titre infiniment subsidiaire, en soutenant d’une part que cette demande, formulée oralement au cours des débats, n’apparaît pas dans les conclusions produites, et d’autre part qu’eu égard à la date de l’indu, la société a largement eu le temps de provisionner la somme réclamée.

Pour l’exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures régulièrement visées et soutenues oralement à l’audience comme l’autorise l’article 455 du code de procédure civile.

A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré au 29 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de la caisse tendant à voir écarter des débats les pièces jointes à la requête initiale

Selon l’article 16 du code de procédure civile, en ses alinéas 1 et 2 :
« Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ».

Le tribunal observe en l’espèce qu’un certain nombre de pièces, non numérotées, sont jointes par la société [4] à sa requête initiale.
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T.J de [Localité 2] - Pôle Social - GREJUG04 /
N° RG 19/00571 - N° Portalis DB3T-W-B7D-RCUQ

Lors de l’audience, la caisse a indiqué que ces pièces ne lui avaient jamais été communiquées contradictoirement dans le temps de la procédure. Elle demande donc au tribunal que ces pièces soient écartées des débats.

Le conseil de la société [4] n’a pas contesté à l’audience l’absence de communication contradictoire de ces éléments et n’a formulé aucune observation sur la demande de la caisse. Il doit au demeurant être relevé que les écritures visées et soutenues oralement à l’audience par le conseil de la société requérante ne visent aucune de ces pièces et ne comportent d’ailleurs aucun bordereau de pièces.

Il convient par conséquent, en l’absence de communication contradictoire à la défenderesse et de mention à l’audience au soutien des moyens développés par la requérante, d’écarter des débats l’ensemble des pièces produites par la société [4] à l’appui de sa requête initiale du 17 avril 2019.

Sur les dispositions applicables

Aux termes de l’article L. 322-5 alinéas 1 et 2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige :
« Les frais de transport sont pris en charge sur prescription médicale, établie conformément aux articles L. 162-4-1 et L. 162-5-15. La prescription précise le mode de transport le plus adapté à l'état du patient et si cet état est incompatible avec un transport partagé, compris comme véhiculant ensemble au moins deux patients. Dans le respect de la prescription, les frais de transport sont pris en charge sur la base du trajet le moins onéreux, compte tenu des conditions de transport et du nombre de patients transportés.
Les frais d'un transport effectué par une entreprise de taxi ne peuvent donner lieu à remboursement que si cette entreprise a préalablement conclu une convention avec un organisme local d'assurance maladie. Cette convention, conclue pour une durée au plus égale à cinq ans, conforme à une convention type établie par décision du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie après avis des organisations professionnelles nationales les plus représentatives du secteur, détermine, pour les prestations de transport par taxi, les tarifs de responsabilité qui ne peuvent excéder les tarifs des courses de taxis résultant de la réglementation des prix applicable à ce secteur et fixe les conditions dans lesquelles l'assuré peut être dispensé de l'avance des frais. Elle peut également prévoir la possibilité de subordonner le conventionnement à une durée d'existence préalable de l'autorisation de stationnement ».

Il résulte de ce texte que la prise en charge des frais de transports des assurés est conditionnée à la signature d'une convention locale entre les organismes d'assurance maladie et les entreprises de taxis.

En l’espèce, la société [4] indique elle-même que l’étude de la facturation litigieuse doit se faire au regard des dispositions de la convention locale des taxis communaux du Val-de-Marne, signée le 25 février 2014, qui est une déclinaison de la convention nationale type instaurée par une décision du 8 septembre 2008 relative à l’établissement d’une convention type à destination des entreprises de taxis et des organismes locaux d’assurance maladie.

La caisse confirme oralement à l’audience qu’en tant qu’entreprise de taxi conventionnée, la société [4] bénéficie de la prise en charge des transports qu’elle réalise sur prescription médicale. En contrepartie, elle s’est engagée à respecter les règles de facturation issues de la convention locale fixant la tarification dans le Val-de-Marne et de se soumettre au contrôle a posteriori de la caisse.

L’indu notifié à la société et la demande de remboursement au titre de cet indu seront donc examinés au regard de ces dispositions sur lesquelles les parties se rejoignent.

Sur l’indu

Selon l’article L. 133-4 2° du code de la sécurité sociale, en cas d’inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation des frais de transport mentionnés à l’article L. 160-8, l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement.

Selon l’article R. 133-9-1 du même code, dans sa version applicable au litige :
« I.-La notification de payer prévue à l’article L. 133-4 est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, à l'établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.
Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l'intéressé peut présenter des observations écrites à l'organisme d'assurance maladie.
[…] ».

Par ailleurs, aux termes de l’article 1302 du code civil, « Tout paiement suppose une dette; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution ». L’article 1302-1 du même code précise que « celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu ».

Il appartient à l’organisme social qui engage une action en répétition de l’indu fondée, en application de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, sur la méconnaissance des règles de tarification et de facturation, d’établir l’existence d’un paiement d’une part, son caractère indu d’autre part. La preuve du caractère indu du paiement peut être rapportée par tout moyen.

La jurisprudence juge de façon constante que s’il appartient à la caisse, comme le souligne la société [4], de rapporter au soutien de sa demande de remboursement d’un indu, la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation, cette preuve peut être rapportée par la production d’un tableau récapitulatif qui permet au professionnel d’en discuter la pertinence et d’apporter la preuve contraire.

En l’espèce, la caisse produit, en annexe de sa notification d’indu, un tableau synthétisant les anomalies observées qui comporte le nom de l’assuré, son numéro de sécurité sociale, la nature et la date de la prestation, la date du mandement, le lot de facture concerné, le numéro de facture, l’anomalie constatée, le montant de l’indu en résultant et le total de la somme due.

La société [4] ne conteste ni avoir effectué les transports litigieux, ni en avoir obtenu le remboursement par la caisse. Elle a été en mesure de confronter les informations figurant sur le tableau produit par la caisse à ses propres données puisque ce tableau lui a permis de connaître les factures litigieuses qu’elle a télétransmises à la caisse. Elle était donc parfaitement à même de produire des éléments pour se justifier.

Les informations figurant sur ce tableau suffisent à établir le bien-fondé de l’indu qu’elle réclame.

Pour contester l’indu, la société [4] affirme simplement :
- s’agissant du grief relatif aux transports dont la réalité et la justification ne sont pas établies, qu’aucune disposition n’impose à l’entreprise de taxi conventionnée de fournir une attestation de passage délivrée par l’établissement de soins (1),
- s’agissant du grief relatif aux facturations non conformes, que la caisse ne cite pas les règles de facturation violées pour justifier les anomalies relevées (2),
- s’agissant du grief relatif aux prescriptions médicales non conformes, que le transporteur n’a aucun pouvoir pour compléter ou modifier une prescription et a l’obligation d’exécuter littéralement la prescription (3),
- s’agissant du grief relatif aux transports facturés sur la base d’une prescription médicale établie a posteriori, que la caisse ne précise pas de quel transport il s’agit ni si ce transport n’était pas effectué dans l’urgence (4).

Il convient d’y répondre point par point.

(1) Conformément à l’article R. 322-10 1° du code de la sécurité sociale, les frais de transport de l'assuré ou de l'ayant droit se trouvant dans l'obligation de se déplacer pour recevoir les soins ou subir les examens appropriés à son état sont pris en charge dans un certain nombre de cas limitativement énumérés par l’article. Il en résulte que les frais de transport ne peuvent faire l’objet d’une prise en charge que dans des cas nécessairement liés à la réalisation de soins.

En l’espèce, la caisse explique qu’elle a retenu un indu lorsqu’elle a constaté qu’à la date du transport litigieux, aucune prestation n’avait été facturée par l’établissement de soins où l’assuré avait été transporté. En l’absence d’attestation de passage délivrée par l’établissement de soins, dont la délivrance n’est effectivement pas imposée par les textes, la caisse a estimé que la réalité du transport et sa justification au regard des règles de prise en charge des frais de transport n’était pas établie et en a déduit un indu.

Conformément aux règles probatoires explicitées plus haut, il appartient donc à la société [4] de justifier de la réalité du transport effectué et de sa justification au regard des dispositions de l’article R. 322-10 1° du code de la sécurité sociale, notamment par la délivrance d’une attestation de passage ou autre pièce justifiant la réalité du transport au regard des règles de prise en charge des frais de transports édictées à l’article R. 322-10 du code de la sécurité sociale.

Or force est de constater que la société [4] ne produit aucun élément pour démontrer que l’indu réclamé par la caisse à ce titre ne serait pas fondé.

L’indu réclamé au titre de transports dont la réalité et la justification ne sont pas établies est donc justifié et sera confirmé.

(2) Conformément à l’article R. 322-10-5 I du code de la sécurité sociale, « Le remboursement des frais de transport mentionnés aux b à f du 1° de l’article R. 322-10 est calculé sur la base de la distance séparant le point de prise en charge du malade de la structure de soins prescrite appropriée la plus proche ».

La convention locale à laquelle renvoie l’article L. 322-5 du code de la sécurité sociale précité doit prévoir les dispositions tarifaires applicables notamment les tarifs applicables par zone tarifaire, et les mesures additionnelles comme les frais d’approche ou les coûts de temps d’attente.

En l’espèce, la caisse explique que de nombreuses factures contrôlées ne sont pas apparues conformes à ces règles de facturation que ce soit au regard du montant facturé par rapport au trajet prescrit (nombre de kilomètres, approche, prise en charge, zone tarifaire appliquée), ou d’un point de vue plus formel vu la manière dont la facture a été établie.

Le tribunal observe que le tableau récapitulatif produit par la caisse précise, pour chacun des lots concernés, l’anomalie constatée et notamment la mention non conforme figurant sur la facture (par exemple numéro de prescripteur erroné, adresse de l’assuré erronée…).

Conformément aux règles probatoires explicitées plus haut, il appartient donc à la société [4] de justifier le montant de facturation appliqué conformément aux règles de tarification de la convention locale applicable, et de produire tout élément permettant de justifier les erreurs commises lors de la facturation.

Là encore, force est de constater la société [4] ne produit aucun élément en ce sens. L’indu réclamé au titre de facturations non conformes est donc établi et sera confirmé.

(3) La caisse explique que de nombreux transports ont été facturés sur la base d’une prescription non conforme présentant des incohérences ou des mentions absentes alors qu’obligatoires comme l’adresse de départ ou d’arrivée, l’identification de l’assuré ou du prescripteur ou encore le mode de transport prescrit. Elle soutient qu’aucune prise en charge ne peut intervenir sur la base d’une prescription médicale non conforme.

Contrairement à ce que soutient la société [4], le tableau produit par la caisse détaille pour chacun des lots concernés les prescriptions non conformes (identification du transporteur ou de l’assuré non renseigné, numéro du prescripteur absent, adresse de domicile différente).

La société [4] ne produit aucun élément d’explication ou de contestation. Elle se contente de produire deux jurisprudences qui sont parfaitement inopérantes et inapplicables au cas d’espèce dans la mesure où elles ne visent pas des omissions ou erreurs formelles figurant sur les prescriptions, mais s’attachent à la nature même du transport prescrit (transport vers une structure insusceptible de prise en charge ou mode de transport prescrit inadapté).

En l’absence d’autres éléments produits par la société requérante, l’indu réclamé par la caisse au titre de prescriptions non conformes est établi et sera confirmé.

(4) L’article R. 322-10-2 du code de la sécurité sociale dispose, en ses alinéas 1 et 2 :
« La prise en charge des frais de transport est subordonnée à la présentation par l'assuré de la prescription médicale de transport […].
En cas d'urgence, la prescription médicale peut être établie a posteriori ».

La caisse explique que pour l’assuré [X] [Z], la société [4] a facturé à la caisse un transport manifestement réalisé sur la base d’une ordonnance établie après la réalisation du transport.

Les informations portées sur le tableau produit par la caisse, notamment la date du transport, le numéro de lot ou encore le numéro de la facture, permet à la société [4] de savoir de quel transport il s’agit.

En affirmant que la caisse ne précise pas si le transport en question n’était pas effectué dans l’urgence, la société [4] inverse la charge de la preuve. Conformément aux règles probatoires rappelées plus haut, c’est en effet à la société requérante de démontrer que l’ordonnance a été établie avant la réalisation du transport ou, le cas échéant, que le transport a été effectué dans l’urgence.

En l’absence de tout élément produit en ce sens, l’indu réclamé à ce titre est établi et sera donc confirmé.

***

Il résulte de tout ce qui précède que la société [4] ne démontre pas que l’indu réclamé serait infondé dans son principe ou dans son montant, de sorte qu’elle doit être déboutée de son recours.

Il est donc fait droit à la demande reconventionnelle en paiement de la caisse pour un montant total de 17.101,98 euros.

Sur la demande de délais de paiement

Conformément à l’article L. 256-4 du code de la sécurité sociale, « A l'exception des cotisations et majorations de retard, les créances des caisses nées de l'application de la législation de sécurité sociale, notamment dans des cas mentionnés aux articles L. 244-8, L. 374-1, L. 376-1 à L. 376-3, L. 452-2 à L. 452-5, L. 454-1 et L. 811-6, peuvent être réduites en cas de précarité de la situation du débiteur par décision motivée par la caisse, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausses déclarations », ce qui exclut, selon une jurisprudence constante, toute compétence des juridictions de sécurité sociale.

Les caisses ont en effet seules qualité pour réduire le montant de leurs créances autres que de cotisations et majorations de retard nées de l’application de la législation de sécurité sociale.

Le tribunal est donc incompétent pour se prononcer sur la demande de délais de paiement formulée par la société [4].

Sur les demandes accessoires

Dans la mesure où la société [4] succombe en ses demandes, il n’y a pas lieu de lui accorder une somme au titre des frais irrépétibles.

L’équité commande de ne pas faire droit à la demande de la caisse au titre des frais irrépétibles.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner la société [4] aux dépens de l'instance dès lors qu'elle succombe.

Eu égard à l’ancienneté du litige, il convient d’ordonner l’exécution provisoire du jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

ECARTE des débats l’ensemble des pièces non numérotées produites par la société [4] au soutien de sa requête initiale ;

DÉBOUTE la société [4] de toutes ses demandes ;

CONDAMNE la société [4] à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie du Val-de-Marne la somme de 17.101,98 euros au titre d’irrégularités de facturation sur la période de juillet 2016 à mars 2017 ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société [4] aux dépens ;

ORDONNE l’exécution provisoire du jugement.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Créteil
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 19/00571
Date de la décision : 29/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 12/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-29;19.00571 ?
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