REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG EN BRESSE
JCP juge des contentieux de la protection
JUGEMENT DU 18 JUILLET 2024
N° RG 24/00182 - N° Portalis DBWH-W-B7I-GXJL
N° minute : 24/00262
Dans l’affaire entre :
DEMANDERESSE
DYNACITE - OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DE L’AIN
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Annie MONNET SUETY avocat au barreau de l’Ain
et
DEFENDEUR
Monsieur [L] [V]
né le 11 Novembre 1996 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 1]
comparant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Magistrat : Madame RENAULT, Vice-Présidente
Greffier : Madame TALMANT, Greffier
Débats : en audience publique le 30 Mai 2024
Prononcé : décision rendue publiquement par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024
copies délivrées le 18 JUILLET 2024 à :
DYNACITE - OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DE L’AIN
Monsieur [L] [V]
formule(s) exécutoire(s) délivrée(s) le 18 JUILLET 2024 à :
DYNACITE - OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DE L’AIN
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé du 03 novembre 2022, l'Office Public de l'Habitat DYNACITE a consenti un bail d'habitation à Monsieur [L] [V] et à Madame [D] [T] portant sur un immeuble à usage d'habitation situé au 1er étage, [Adresse 3] à [Localité 5] (01) contre le paiement d'un loyer mensuel révisable de 612,62 euros, provision sur charges incluse.
Par courrier reçu par le bailleur le 05 juin 2023, Madame [D] [T] a indiqué quitter le logement au 04 juin 2023 et vouloir être désolidarisée du bail.
Par acte délivré par commissaire de justice le 18 mars 2024, dénoncé à la Préfecture de l'Ain par voie électronique avec accusé de réception revenu le 20 mars 2024, l'Office Public de l'Habitat DYNACITE a fait assigner Monsieur [L] [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de BOURG-EN-BRESSE aux fins d'obtenir sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- la constatation de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire,
- l'expulsion immédiate de Monsieur [L] [V], et de tout occupant, si besoin avec le concours de la force publique,
- la condamnation du locataire :
- au paiement de la somme de 5.860,26 euros au titre des loyers échus à fin février 2024, outre ceux restant dus jusqu'au jour de l'audience selon décompte actualisé au cours des débats,
- au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer mensuel indexé augmenté des charges, jusqu'à libération effective des lieux,
- à la production, en cas de résiliation du bail et sur demande du bailleur, d’une attestation d’assurance habitation pendant toute la durée d’occupation des lieux,
- au paiement d'une indemnité de 460 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- au paiement des entiers dépens de l'instance, comprenant notamment le coût du commandement de payer.
A l'audience du 30 mai 2024, l'Office Public de l'Habitat DYNACITE, représenté par son conseil, a réitéré l'ensemble de ses demandes, portant sa demande en paiement des impayés de loyers, indemnités d'occupation et charges à la somme de 7.067,07 euros arrêtée au 30 avril 2024.
En défense, Monsieur [L] [V], comparant en personne, n'a contesté ni le principe, ni le montant de la dette. Il a déclaré avoir déposé un dossier de surendettement. En outre, il a indiqué vouloir quitter le logement courant juin 2024.
Le diagnostic social et financier a été communiqué par la Préfecture avant la clôture des débats et il a été donné lecture de ses conclusions à l'audience.
L'affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 18 juillet 2024.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'action
Une copie de l’assignation a été notifiée au Préfet, représentant de l'Etat. Un accusé de réception électronique a été transmis au bailleur le 20 mars 2024, soit plus de six semaines avant l’audience, conformément aux dispositions nouvelles de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.
Par ailleurs, l'Office Public de l'Habitat DYNACITE justifie avoir saisi le 08 janvier 2024 la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX), conformément aux dispositions de l’article 24 II de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.
L’action est donc recevable.
Sur les demandes en constatation de la résiliation du bail et d'expulsion
L’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 rappelle que le paiement du loyer et des charges récupérables aux termes convenus constitue une obligation essentielle du locataire.
En l'espèce, le contrat de bail contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges après un délai expressément fixé à deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.
L’article 2 du code civil prévoit que la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif.
La modification de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 entrée en vigueur le 29 juillet 2023 ne relève pas d'un ordre public de protection du locataire. Elle n'a donc pas à s'appliquer immédiatement aux contrats en cours.
L'article 24, dans sa version en vigueur lors de la conclusion du bail, précise que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement de payer reproduit, à peine de nullité, les dispositions du présent article et des trois premiers alinéas de l'article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant la mise en œuvre du droit au logement, en mentionnant la faculté pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement, dont l'adresse de saisine est précisée.
Par acte délivré par commissaire de justice le 10 janvier 2024, l'Office Public de l'Habitat DYNACITE a fait commandement à Monsieur [L] [V] d’avoir à payer la somme en principal de 3.980,22 euros. Ce commandement délivré en personne reproduit la clause résolutoire insérée au contrat de bail et respecte les dispositions légales susvisées.
La situation n'a pas été régularisée dans le délai de deux mois suivant la signification du commandement de payer. Par ailleurs, le juge n’a pas été saisi par le locataire aux fins d’obtenir des délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire.
Il y a donc lieu de constater la résiliation du bail par l’effet de la clause résolutoire y étant insérée, acquise au 10 mars 2024 et d’ordonner la libération des lieux, et le cas échéant l’expulsion des occupants.
Aucune circonstance ne justifie la demande d'expulsion "immédiate" et la suppression du délai de deux mois à compter du commandement de quitter les lieux prévu par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution. Cette demande sera donc rejetée.
Sur la demande de production d'une attestation d'assurance
L’anéantissement du titre fondant l’obligation d’assurance ayant été constaté, Monsieur [L] [V] ne sera pas tenu de produire au bailleur, même à sa demande, une attestation d'assurance d'habitation.
Par conséquent, la demande de l'Office Public de l'Habitat DYNACITE sur ce point sera rejetée.
Sur la demande en paiement au titre des indemnités d’occupation
En application de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Monsieur [L] [V] occupe les lieux sans droit ni titre depuis le 10 mars 2024. Il convient de réparer ce dommage et de le condamner à payer à l'Office Public de l'Habitat DYNACITE une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer mensuel, augmenté des charges, qui aurait été du en cas de non résiliation du bail.
Sur la demande en paiement des loyers, charges et indemnités d'occupation
En application de l'article 7 (a) de la loi du 06 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
En l'espèce, le bailleur fait la preuve de l'obligation dont il se prévaut en produisant le bail signé le 03 novembre 2022 et un dernier décompte faisant état à la date du 27 mai 2024 d'une dette de 7.067,07 euros.
Il y a donc lieu de condamner Monsieur [L] [V] à payer à l'Office Public de l'Habitat DYNACITE la somme de 7.067,07 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés arrêtés au 27 mai 2024, échéance du mois d'avril 2024 incluse.
Sur les délais de paiement
Il résulte de l'article 24 de la loi du 06 juillet 1989, dans sa version entrée en vigueur le 29 juillet 2023 et d'application immédiate, que :
V. - Le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. (...)
VII. - Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais accordés par le juge dans les conditions prévues aux V et VI du présent article. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.
En l'espèce, Monsieur [L] [V] n'a pas repris le paiement intégral du loyer courant avant la date de l'audience. Plus encore, aucun versement n'a été fait depuis le mois de novembre 2023.
Il a déclaré travailler depuis le 06 mai 2024 en CDD jusqu'au 30 septembre 2024 et percevoir un salaire d'environ 1.200 euros. En outre, il a indiqué avoir déposé un dossier de surendettement (mais n’en a pas justifié).
Monsieur [L] [V] n'a pas formulé de demande en délais de paiement car il souhaite quitter le logement avec sa compagne courant juin 2024.
Il n'y a donc pas lieu d'octroyer des délais de paiement ni de suspendre les effets de la clause résolutoire.
En cas de mise en place d’une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans ladite procédure.
Sur les demandes accessoires
La présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire, conformément aux articles 489 et 514 du code de procédure civile, dans leur version en vigueur à la date d’introduction de l’instance.
Monsieur [L] [V], qui succombe à l'instance, devra supporter les dépens, qui comprendront notamment les frais de commandement de payer du 10 janvier 2024 et de l'assignation du 18 mars 2024.
Il n'apparaît par ailleurs pas inéquitable de laisser à la charge de l'Office Public de l'Habitat DYNACITE l’intégralité des sommes avancées par lui et non comprises dans les dépens pour assurer la défense de ses droits et intérêts en justice, le locataire devant concentrer ses efforts financiers sur le remboursement de la dette locative. Sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée.
PAR CES MOTIFS,
Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Constate que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée au contrat de bail du 03 novembre 2022 conclu entre l'Office Public de l'Habitat DYNACITE d’une part et Monsieur [L] [V] d’autre part, et portant sur un immeuble à usage d’habitation situé au 1er étage, [Adresse 3] à [Localité 5] (01) sont réunies au 10 mars 2024,
Ordonne la libération des lieux,
Dit qu'à défaut par Monsieur [L] [V] d'avoir libéré les lieux DEUX MOIS après la signification d'un commandement d’avoir à quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, avec l’assistance de la force publique, si besoin est, et au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais de l’expulsé dans tel garde-meuble désigné par ce dernier ou à défaut par le bailleur,
Condamne Monsieur [L] [V] à payer à l'Office Public de l'Habitat DYNACITE une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer mensuel révisé, augmenté des charges, qui aurait été payé en cas de non résiliation du bail et ce jusqu'à la libération effective des lieux (caractérisée par la remise des clés ou l'expulsion),
Condamne Monsieur [L] [V] à payer à l'Office Public de l'Habitat DYNACITE la somme de 7.067,07 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 27 mai 2024, échéance du mois d'avril 2024 incluse,
Dit n'y avoir lieu à des délais de paiement,
Rappelle qu’en cas de mise en place d’une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans ladite procédure,
Deboute l'Office Public de l'Habitat DYNACITE de sa demande de production d'une attestation d'assurance,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [L] [V] aux entiers dépens de l’instance qui comprendront notamment les frais du commandement de payer du 10 janvier 2024 et de l'assignation du 18 mars 2024,
Dit que la présente décision sera notifiée par le greffe du tribunal à la Préfecture de l’Ain en application de l’article R.412-2 du code des procédures civiles d'exécution,
Rappelle que l’exécution provisoire de la décision est de droit,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
AINSI JUGE ET PRONONCE, LES JOUR, MOIS et AN SUSDITS,
LE GREFFIER, LE JUGE,