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27/06/2024 | FRANCE | N°24/00024

France | France, Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, Chambre civile 2, 27 juin 2024, 24/00024


JUGEMENT DU :27 juin 2024
MINUTE N°: 24/230
DOSSIER N° :N° RG 24/00024 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GTBV




TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE

CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 27 juin 2024



Dans l’affaire entre :

DEMANDERESSE

Société GMF ASSURANCES
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 398 972 901, représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, dont le siège social est sis 148 rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS-PERRET

représent

ée par Me Philippe REFFAY, avocat au barreau de l’Ain (T. 16)




DÉFENDERESSE

Madame [O] [Y]
née le 15 mai 1975 à ANNEMASSE (74100)
...

JUGEMENT DU :27 juin 2024
MINUTE N°: 24/230
DOSSIER N° :N° RG 24/00024 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GTBV

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE

CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 27 juin 2024

Dans l’affaire entre :

DEMANDERESSE

Société GMF ASSURANCES
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 398 972 901, représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, dont le siège social est sis 148 rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS-PERRET

représentée par Me Philippe REFFAY, avocat au barreau de l’Ain (T. 16)

DÉFENDERESSE

Madame [O] [Y]
née le 15 mai 1975 à ANNEMASSE (74100)
demeurant 85 rue des Transporteurs - 01170 GEX

représentée par Me Benoît CONTENT, avocat au barreau de l’Ain (T. 70), avocat postulant, Me Juliette COCHET-BARBUAT, avocat au barreau de Chambéry, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT:Monsieur THEVENARD, vice-président,

ASSESSEURS:Madame POMATHIOS, vice-présidente,
Madame JOUHET, juge,

GREFFIER:Madame BOIVIN,

DÉBATS :tenus à l’audience publique du 23 mai 2024

JUGEMENT : rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, en premier ressort et contradictoire

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [O] [Y], victime le 8 mai 2016 d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société GMF assurances, a saisi le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse par actes d’huissier de justice des 15 et 17 novembre 2021 aux fins d’indemnisation de ses préjudices.

Par jugement réputé contradictoire du 19 octobre 2023, le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a notamment fixé à 311 018,40 euros l’indemnité due à Madame [Y] au titre de l’assistance par tierce personne permanente.

Par requête aux fins de rectification d’erreur matérielle reçue au greffe le 12 décembre 2023, la société GMF assurances a saisi le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse aux fins de rectification de l’erreur matérielle affectant le jugement du 19 octobre 2023 en ce qui concerne le poste de l’assistance par tierce personne permanente, sollicitant que l’indemnité allouée à ce titre soit fixée à 48 448 euros.

Dans ses dernières écritures (conclusions en réplique n° 2 aux fins de rectification suite à une décision ultra petita), notifiées par voie électronique le 22 mai 2024, la société GMF assurances demande au tribunal de :

“Vu le jugement en date du 19 octobre 2023,
Vu les articles 463/464 du Code de Procédure Civile,
Vu la pièce versée aux débats,

Procéder à la rectification d’erreur matérielle au titre des heures de tierce personne viagère à la somme de 48.448 €

Débouter Madame [O] [Y] de ses prétentions.”

Au soutien de ses prétentions, la société GMF assurances expose que :
- aucun appel n’a été régularisé contre la décision compte tenu de la présente procédure,
- les dispositions des articles 463 et 464 [du code de procédure civile] sont applicables,
- il appartient au juge de première instance de statuer suite à l’action en rectification de sa décision,
- une erreur existe concernant les heures de tierce personne viagère puisqu’il a été fixé par le juge une somme de 48 448 euros,
- le magistrat a repris le calcul qu’elle a effectué, mais ce calcul ne permet pas d’aboutir au montant évoqué,
- la juridiction est tenue de statuer dans les termes du litige et donc du calcul opéré,
- cette erreur ouvre le droit à une requête en rectification sur le fondement de l’article 464 du code de procédure civile,
- l’argumentation de Madame [Y] est contestée, puisque la lecture de ses conclusions n° 3 révèle qu’elle a offert la somme globale de 250 870 euros,
- le juge de première instance ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations,
- dans son calcul, il opère une erreur dans le montant de 311 018,40 euros, lequel ne correspond pas à celui de ses conclusions.

Dans ses dernières écritures (conclusions en réponse n° 2 à requête aux fins de rectification d’erreur matérielle), notifiées par voie électronique le 15 mai 2024, Madame [Y] présente les demandes suivantes :

“Vu le jugement rendu le 19 octobre 2023 par le Tribunal Judiciaire de Bourg en BRESSE,
Vu l’article 462 du Code de procédure civile,
Vu l’article 768 du Code de procédure civile,
Vu la pièce versée aux débats,

Qu’il est donc sollicité de débouter la société GMF ASSURANCES de sa demande de rectification d’erreur matérielle des dispositions du jugement ayant fixé le préjudice de tierce personne permanente à 311.018,40 €.

Enfin, il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [Y] les frais irrépétibles engendrés par la présente procédure, il lui sera alloué la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.”

La défenderesse allègue que, contrairement à ce que prétend la société GMF assurances, le tribunal n’a pas statué ultra petita mais fixé le poste de préjudice de la tierce personne permanente au montant proposé par la société GMF assurances dans le dispositif de ses écritures, soit 311 018,40 euros, et que le juge ne pouvait effectivement pas lui accorder pour ce poste moins que ce qui avait été proposé par la société GMF assurances.

A l’audience du 23 mai 2024, la décision a été mise en délibéré au 27 juin 2024.

Par note en délibéré notifiée par voie électronique le 31 mai 2024, la société GMF assurances soulève l’incompétence du tribunal pour interpréter sa décision, expliquant avoir interjeté appel du jugement du 19 octobre 2023 signifié le 27 mai 2024.

Par note en délibéré notifiée par voie électronique le 3 juin 2024, Madame [Y] soulève l’irrecevabilité de la note en délibéré de la société GMF assurances au visa de l’article 445 du code de procédure civile.

MOTIFS

1 - Sur la recevabilité de la note en délibéré de la société GMF assurances :

La société GMF assurances a, de sa propre initiative et sans autorisation du tribunal, adressé à la juridiction de nouvelles observations et pièces reçues au greffe le 31 mai 2024.

Ces observations et pièces, produites après la clôture des débats, n’ont pas pu être soumises à un débat contradictoire. Elles doivent être déclarées irrecevables en application des articles 16, 135 et 445 du code de procédure civile.

2 - Sur la demande de rectification du jugement du 19 octobre 2023 :

Aux termes de l’article 463 du code de procédure civile, “La juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s’il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

La demande doit être présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l’arrêt d’irrecevabilité.

Le juge est saisi par simple requête de l’une des parties, ou par requête commune. Il statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées.

La décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement et donne ouverture aux mêmes voies de recours que celui-ci.”

Aux termes de l’article 464 du même code, “Les dispositions de l’article précédent sont applicables si le juge s’est prononcé sur des choses non demandées ou s’il a été accordé plus qu’il n’a été demandé.”

En l’espèce, le jugement du 19 octobre 2023 a fixé à 311 018,40 euros l’indemnité due à Madame [Y] au titre de l’assistance par tierce personne permanente, aux motifs suivants :

“Le total de ce poste se monte à 48 448 euros, alors que l’offre formulée par la société GMF Assurances dans le dispositif de ses écritures est de 311 018,40 euros. La juridiction étant tenue de statuer dans la limite des termes du litige, il sera alloué à Madame [O] [Y] la somme de 311 018,40 euros de ce chef.”

Il résulte de l’article 4 du code de procédure civile que “L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.”

L’article 768 du même code dispose notamment que “Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.”

Il résulte de la combinaison de ces textes que les termes du litige sont définis par les prétentions figurant au dispositif des dernières écritures des parties.

S’agissant du poste de l’assistance par tierce personne après la consolidation, Madame [Y], demanderesse, a demandé la somme de 704 948 euros (conclusions récapitulatives notifiées le 9 novembre 2022, page 34) et la société GMF assurances, défenderesse, a proposé la somme de 311 018,40 euros (conclusions n° 3 valant réitération de l’offre d’indemnisation, page 45).

C’est donc à tort que la société GMF assurances soutient que la juridiction aurait statué au-delà de ce qui est demandé, la somme de 311 018,40 euros allouée en réparation du préjudice étant égale au montant de l’offre de la défenderesse et inférieure à la demande de la demanderesse.

Il s’ensuit que la demande de rectification du jugement du 19 octobre 2023 sera rejetée.

3 - Sur les frais et dépens :

La société GMF assurances, partie perdante, sera condamnée aux dépens de l’instance.

Elle sera condamnée à payer à Madame [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

4 - Sur l’amende civile :

Aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile, “Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.”

La société GMF assurances soutient, en contradiction flagrante avec les règles fondamentales de la procédure civile et au mépris de la motivation parfaitement claire du jugement critiqué, que la juridiction aurait dû allouer à la demanderesse une somme inférieure au montant de son offre, telle qu’elle figure au dispositif de ses dernières écritures.

Parfaitement consciente que sa demande ne peut pas prospérer sur le fondement de l’article 464 du code de procédure civile, la société GMF assurances a fini par interjeter appel du jugement du 19 octobre 2023.

La requête en rectification présentée par la société GMF, manifestement dénuée de fondement, présente un caractère abusif, ce qui justifie de condamner celle-ci au paiement d’une amende civile de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal judiciaire, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Déclare irrecevables les observations et pièces adressées par la société GMF assurances après la clôture des débats,

Déboute la société GMF assurances de sa demande de rectification du jugement du 19 octobre 2023,

Condamne la société GMF assurances à payer une amende civile de 5 000 euros,

Condamne la société GMF assurances à payer à Madame [O] [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société GMF assurances aux dépens de l’instance.

Prononcé le vingt-sept juin deux mille vingt-quatre par mise à disposition de la décision au greffe du tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Stéphane Thévenard, vice-président, et par Camille Boivin, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffierLe président

copie exécutoire + ccc le :
à
Me Philippe REFFAY
Me Benoit CONTENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 24/00024
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-27;24.00024 ?
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