JUGEMENT DU :27 Juin 2024
MINUTE N°: 24/
DOSSIER N° :N° RG 23/01233 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GKSD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE
CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 27 Juin 2024
Dans l’affaire entre :
DEMANDERESSE
Madame [T] [K] épouse [G]
née le 03 Août 1976 à BOURG EN BRESSE (01000),
demeurant 1414 route des trois rivières - 01660 MEZERIAT
représentée par Me Seri GUEFFIE, avocat au barreau de Lyon, vestiaire : 3509
DEFENDERESSE
S.A. GENERALI VIE SA, immatriculée au RCS de PARIS sous le n°602 062 481, société appartenant au Groupe GENERALI immatriculé sur le registre italien des groupes d’assurances sous le numéro 026,
dont le siège social est sis 2 rue Pillet Will - 75009 PARIS
représentée par Me Jacques BERNASCONI, avocat postulant au barreau de l’Ain, vestiaire : T 4, Me Olivia RISPAL-CHATELLE, avocat plaidant au barreau de Paris, vestiaire : P516
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré :
PRESIDENT:Monsieur GUESDON, 1er Vice Président
ASSESSEURS:Madame BLIN, Vice Présidente
Monsieur DRAGON, Juge
GREFFIER:Madame LAVENTURE,
DÉBATS :tenus à l’audience publique du 21 Mars 2024
JUGEMENT : rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, en premier ressort et Contradictoire
A l’audience, Monsieur Guesdon a fait le rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par acte daté du 17 avril 2023, Mme [T] [K], épouse [G], contestant le refus de la société Generali Vie de mobiliser les garanties du contrat de prévoyance de groupe auquel elle a adhéré avec prise d’effet au 1er avril 2022, a fait assigner l’assureur à comparaître devant le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse en paiement d’indemnités diverses destinées à réparer le préjudice qu’elle a subi du fait de la maladie qui lui a été diagnostiquée, selon elle, seulement le 15 juillet 2022.
Aux termes du dispositif de ses conclusions récapitulatives notifiées le 31 août 2023, Mme [K] demande en définitive au tribunal de :
“PRONONCER l’inopposabilité du délai d’attente
A TITRE SUBSIDIAIRE
JUGER que le délai d’attente n’excluait pas la mise en oeuvre de la garantie de la SA GENERALI VIE
A TITRE TRES SUBSIDIAIRE
JUGER que la prise en charge du sinistre est due au titre d’un état antérieur
EN TOUT ETAT DE CAUSE
DEBOUTER la SA GENERALI VIE de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions plus amples ou contraires aux présentes.
CONDAMNER la SA GENERALI VIE à verser à Mme [G] la somme de 41 760 € au titre de sa garantie « revenu de remplacement »
CONDAMNER la SA GENERALI VIE au paiement des intérêts légaux de retard jusqu’au versement effectif de sa garantie, soit la somme à parfaire de 1 355,02 €
CONDAMNER la SA GENERALI VIE à verser la somme de 3 000 € à Mme [G] en réparation de son préjudice
CONDAMNER la SA GENERALI VIE à verser la somme de 2 500 € à Mme [G] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance”.
À l’appui de ses prétentions, Mme [K] soutient entre autres :
• que le certificat d’adhésion et les conditions générales de la police ne sont pas signés, de telle sorte que la clause litigieuse lui est inopposable ;
• que quelle que soit l’analyse médicale retenue, l’assureur doit sa garantie dès lors que la période d’attente de 90 jours avait expiré le 29 juin 2022, donc avant le constat médical de la maladie ou de toute autre anomalie s’y rapportant, c’est-à-dire à l’issue de la biopsie (dont les résultats ont été connus le 15 juillet 2022) et que les symptômes du cancer du sein (la plage de mastose ou la douleur au sein gauche) ont fait l’objet d’une première constatation médicale antérieurement à la prise d’effet des garanties.
Le dispositif des conclusions récapitulatives notifiées le 9 octobre 2023 par la société Generali Vie est ainsi rédigé :
“Vu l’article 1103 du Code civil,
Vu le certificat d’adhésion dument signé par Madame [G],
Vu l’opposabilité des dispositions contractuelles,
Vu l’article 5.2.1 de la notice d’assurance,
Vu la période d’attente de 90 jours, du 1er avril 2022 au 30 juin 2022,
Vu la consultation médicale du 22 juin 2022,
Vu la mammographie pratiquée le 30 juin 2022,
DÉBOUTER Madame [G] de l’intégralité de ses demandes.
A titre subsidiaire,
Vu la notice d’assurance définissant les garanties incapacité temporaire totale de travail et invalidité permanente partielle,
Vu l’article 30.2 de ladite notice d’assurance,
Si par impossible le Tribunal entrait en voie de condamnation,
DEBOUTER en l’état Madame [G] de toute demande d’indemnisation dans l’attente de l’expertise médicale de contrôle qui sera diligentée à la demande de la SA GENERALI VIE en application des dispositions contractuelles.
En tout état de cause,
CONDAMNER Madame [G] à verser à GENERALI VIE la somme de 2500€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
La CONDAMNER en tous les dépens.”
Pour la défense de ses intérêts, la société Generali Vie écrit notamment :
• que la clause du contrat selon laquelle toute maladie (pathologie) survenant dans les 90 jours suivant la date d’effet de l’adhésion ne donne pas lieu à indemnisation (et ce pendant toute la durée de l’adhésion) créée un délai d’attente applicable aux garanties en cas d’incapacité ou d’invalidité de 90 jours, soit du 1er avril 2022 au 30 juin 2022;
• que quand bien même la maladie n’a pas été étiquetée comme cancéreuse le 30 juin 2022, il n’en demeure pas moins que l’anomalie constatée le 20 juin 2022 a été médicalement confirmée à cette date, la classification ACR 5 du nodule ne laissant cependant aucun doute sur la réalité d’une maladie, ce qui empêche toute indemnisation du sinistre avant le 91ème jour, soit le 1er juillet 2022.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 9 novembre 2023.
Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION
La société Generali Vie produit des copies du bulletin d’adhésion et du questionnaire de santé (pièce n° 1) ainsi que du certificat d’adhésion (pièce n° 2) portant tous la signature de Mme [G], de sorte que, contrairement aux affirmations de cette dernière, les stipulations du contrat lui sont parfaitement applicables.
Le contrat prévoyance auquel Mme [G] a adhéré prévoit que les garanties en cas d’incapacité ou d’invalidité (ce qui est le cas des effets du cancer qui l’affecte) sont subordonnées à un délai d’attente excluant l’indemnisation de toute maladie (pathologie) survenant dans les 90 jours suivant la date d’effet de l’adhésion fixée au 1er avril 2022.
La maladie au sens du contrat est définie comme toute altération pathologique de la santé constatée par une autorité médicale compétente et n’ayant pour origine ni un accident ni le fait volontaire de l’assuré ou d’un tiers.
Or il est établi que Mme [G], qui a consulté sa gynécologue le 20 juin 2022 pour une consultation annuelle systématique, a subi ensuite successivement un examen d’imagerie (le 30 juin 2022), puis une microbiopsie le 1er juillet 2022 dont les résultats, connus seulement le 15 juillet, ont finalement justifié qu’un arrêt de travail (initial) lui soit prescrit à compter du 21 juillet.
Des développements précédents, il convient de considérer que la maladie a été objectivement constatée une fois seulement les résultats de la biopsie révélés, de sorte que les conditions de l’indemnisation de l’assurée sont réunies.
La société Generali Vie ne peut s’opposer à l’indemnisation immédiate des préjudices de Mme [G] au motif que son état de santé devrait être préalablement vérifié dans les conditions du contrat, c’est-à-dire en recourant à une expertise diligentée par l’assureur, alors que l’absence de tout contrôle médical résulte de son refus (injustifié) de prendre en compte la maladie de son assurée.
Les productions, en particulier les avis successifs d’arrêt de travail qui lui ont été prescrits du 21 juillet 2022 jusqu’au 30 juin 2023, ainsi que la lecture de l’article 19.1 de la notice d’information du contrat, justifient de fixer la valeur des indemnités journalières en cas d’incapacité temporaire totale dues à Mme [K] au montant exact qu’elle sollicite, soit la somme de 41 760 euros.
La société Generali Vie est en demeure de payer sa dette depuis le 2 février 2023, date du courrier circonstancié que le conseil de Mme [K] lui a adressé. La condamnation prononcée ci-dessus emportera donc intérêt au taux légal à compter de cette date.
Mme [K] ne prouve avoir subi un préjudice particulier complémentaire causé par l’attitude supposée fautive de son assureur. Sans fondement, sa demande en paiement de dommages et intérêts compensatoires sera rejetée.
Partie perdante, la société Generali Vie sera condamnée aux dépens et versera à Mme [K] une juste indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile d’un montant égal à la valeur à laquelle les deux parties ont estimé leurs frais de procédure.
PAR CES MOTIFS,
le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Condamne la société Generali Vie à payer à Mme [K] la somme de 41 760 euros avec intérêt au taux légal à compter du 2 février 2023 ;
Déboute Mme [K] de sa demande en paiement de dommages et intérêts compensatoires complémentaires ;
Condamne la société Generali Vie à payer à Mme [K] la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Generali Vie aux dépens.
Le greffierLe président
copie exécutoire + ccc le :
à
Me Jacques BERNASCONI
Me Seri GUEFFIE