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10/06/2024 | FRANCE | N°23/01437

France | France, Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, Chambre civile, 10 juin 2024, 23/01437


JUGEMENT DU :10 Juin 2024
MINUTE N°:24/
DOSSIER N° :N° RG 23/01437 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GLES





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE

CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT du 10 Juin 2024




Dans l’affaire entre :

DEMANDEUR

Monsieur [B] [G],
né le 12 mai 1977 à VILLEFRANCHE SUR SAONE (69)
demeurant 17, Chemin du Ferin - 01600 ST DIDIER DE FORMANS

représenté par Maître Charles SAVARY, avocats au barreau de Lyon, vestiaire : 1965


DEFENDERESSE

S.A. SURAVENIR ASSURANCES, immatrculée au RCS de Na

ntes sous le n°343 142 659
dont le siège social est sis 2, rue Vasco de Gama - 44800 ST HERBLAIN

représentée par Me Sandrine TRIGON, avocat postulan...

JUGEMENT DU :10 Juin 2024
MINUTE N°:24/
DOSSIER N° :N° RG 23/01437 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GLES

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE

CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT du 10 Juin 2024

Dans l’affaire entre :

DEMANDEUR

Monsieur [B] [G],
né le 12 mai 1977 à VILLEFRANCHE SUR SAONE (69)
demeurant 17, Chemin du Ferin - 01600 ST DIDIER DE FORMANS

représenté par Maître Charles SAVARY, avocats au barreau de Lyon, vestiaire : 1965

DEFENDERESSE

S.A. SURAVENIR ASSURANCES, immatrculée au RCS de Nantes sous le n°343 142 659
dont le siège social est sis 2, rue Vasco de Gama - 44800 ST HERBLAIN

représentée par Me Sandrine TRIGON, avocat postulant au barreau de l’Ain, vestiaire : T 115, Me Emeric DESNOIX, avocat plaidant au barreau de Tours

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT:Madame BLIN, Vice Présidente

GREFFIER:Madame LAVENTURE,

DÉBATS : à l’audience publique du 29 Avril 2024

JUGEMENT :rendu par mise à disposition au greffe, en premier ressort et contradictoire

EXPOSE DU LITIGE

Faits et procédure

Le 20 septembre 2021, monsieur [B] [G] a acheté auprès de la société allemande DREAM CAR, un véhicule de marque VOLSWAGEN, modèle GOLF 7 R, ayant pour numéro d'identification WVWZZZAUZEW264839, pour un prix de 24.800 euros.

Par un contrat en date du 21 septembre 2021, monsieur [B] [G] a souscrit une assurance pour son véhicule auprès de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES.

Le 25 mars 2022, monsieur [B] [G] a obtenu un certificat définitif d'immatriculation pour le véhicule qu'il avait acquis, désormais immatriculé GF-343-KR.

Le 14 juin 2022, Monsieur [B] [G] a déposé plainte pour le vol de son véhicule auprès des services de gendarmerie de Neuville sur Saône (69).

Le 15 juin 2022, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES a accusé réception de la déclaration de sinistre effectuée par monsieur [B] [G] au titre du vol de son véhicule, déclaration de sinistre signée et datée sur papier en date du 17 juin 2022.

Après que monsieur [B] [G] ait envoyé deux clés de son véhicule, une analyse électronique a été réalisée par le cabinet DIAG CONCEPT SERVICES sur ces clés et un rapport a été rendu le 30 juin 2022.

Se prévalant de l'irrespect par monsieur [B] [G] de ses obligations résultant du contrat d'assurance en raison d'une fausse déclaration de sinistre, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES lui a, par un courrier en date du 06 juillet 2022, opposé une déchéance de garantie.

Par un courrier du 15 août 2022, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES a notifié à monsieur [B] [G] la résiliation de son contrat d'assurance en raison d'une augmentation trop importante de ses sinistres.

Le 07 septembre 2022, le conseil de monsieur [B] [G] a contesté le refus de prise en charge de son sinistre auprès de la S.A. SURVANENIR ASSURANCES, qui, dans une réponse du 21 novembre 2022, a maintenu son refus.

Après une réunion d'expertise le 07 janvier 2023 en présence de monsieur [B] [G] et de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES, un rapport d'expertise amiable portant sur les clés du véhicule était rendu le 22 mars 2023 par monsieur [Y] [L].

Par un acte de commissaire de justice en date du 02 mai 2023, monsieur [B] [G] a fait assigner la S.A. SURAVENIR ASSURANCES devant le tribunal judiciaire de Bourg en Bresse, afin de voir condamner cette société à lui payer la somme de 21.338 euros en application du contrat d'assurance souscrit et la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts.

Le juge de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction au 09 novembre 2023 par une décision du même jour.

Prétentions et moyens des parties

Aux termes de ses dernières conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 11 octobre 2023, monsieur [B] [G] sollicite du tribunal qu'il :
- Condamne la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à lui payer la somme de 21.338 euros en application du contrat d'assurance souscrit ;
- Condamne la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à lui payer la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts pour réticence abusive ;
- Condamne la S.A. SURAVENIR ASSURANCES aux dépens ;
- Condamne la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à lui payer la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre liminaire, monsieur [B] [G] se fonde sur l'article R. 631-3 du code de la consommation et affirme qu'il est domicilié dans le ressort du tribunal judiciaire de Bourg en Bresse et que ce tribunal est donc compétent.

Au soutien de sa demande au titre de l'application du contrat d'assurance, monsieur [B] [G] se fonde sur les articles 1104, 1353 et 2274 du code civil. En droit, il affirme que la déchéance de garantie se définit par la perte du droit à la garantie de l'assurance pour la totalité des dommages consécutifs au sinistre couvert par ce contrat frappé de déchéance. Il précise que la clause de déchéance de garantie n'est opposable à l'assuré que si elle a été portée à sa connaissance avant le sinistre. Il soutient que c'est à l'assureur qu'il revient d'apporter la preuve d'un cas de déchéance et qu'il doit prouver la mauvaise foi de l'assuré, sa bonne foi étant présumée selon lui. Il affirme que la déclaration auprès de son assurance par l'assuré suffit à établir le vol si aucun élément extérieur ne peut faire douter de sa réalité.

En l'espèce, il soutient qu'il a stationné son véhicule le vendredi 10 juin 2022 sur le parking de la gare de Saint-Germain-au-Mont-d'Or (69) et que le lundi 13 juin 2022, il a constaté que son véhicule avait été volé. Il ajoute avoir déposé plainte le mardi 14 juin 2022 et effectué une déclaration de sinistre auprès de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES. Il ajoute avoir fourni le récépissé de dépôt de plainte et les deux clés du véhicule à son assurance. Il conteste le rapport d'expertise faisant état de ce que les clés fournies ont été utilisées pour la dernière fois respectivement le 20 novembre 2015 et le 1er janvier 2017 en affirmant qu'il a acquis le véhicule le 20 septembre 2021 et que ce dernier affichait un kilométrage à 138.500 kilomètres. Il fait également valoir qu'il a effectué un contrôle technique le 05 janvier 2022 où le véhicule affichait 140.702 kilomètres. Il fait observer que de nombreux propriétaires de véhicule ont constaté que les données contenues dans les clés électroniques de leurs véhicules ne correspondaient pas à la dernière utilisation de ces véhicules, ce qu'un expert a pu confirmer dans un autre dossier. Il soutient que le rapport d'expertise du 22 mars 2023 confirme ces incohérences. Il ajoute que la S.A. SURAVENIR ASSURANCES ne prouve pas sa mauvaise foi ni l'existence d'une fausse déclaration. Il affirme que les données contenues dans les clés étaient synchronisées avec l'horloge interne du véhicule qui ne correspondait pas à la date et à l'heure réelles du sinistre et que ces données sont donc erronées.

Il en conclut que la S.A. SURAVENIR ASSURANCES est tenue de l'indemniser pour le vol de son véhicule à hauteur de 22.000 euros, valeur estimée par l'expert lors de l'expertise amiable du 22 mars 2022, déduction faite de la franchise contractuelle de 762 euros, soit la somme totale de 21.338 euros.

A l'appui de sa demande de dommages-intérêts pour réticence abusive, monsieur [B] [G] affirme que la S.A. SURAVENIR ASSURANCES fait preuve de mauvaise foi en ne l'indemnisant pas. Il ajoute que cette mauvaise foi lui a nécessairement causé un préjudice puisqu'il ne peut pas acquérir un nouveau véhicule.

Aux termes de ses conclusions n°1 notifiées par voie électronique le 07 septembre 2023, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES demande au tribunal de :
- A titre principal, débouter monsieur [B] [G] de ses demandes ;
- A titre reconventionnel, condamner monsieur [B] [G] à lui payer la somme de 1.920 euros au titre des frais d'expertise ;
- Condamner monsieur [B] [G] aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Sandrine TRIGON ;
- Condamner monsieur [B] [G] à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de sa demande de rejet, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES affirme en droit que si l'assuré bénéficie d'une présomption de bonne foi, l'assureur peut prouver qu'il est de mauvaise foi.

Elle fait valoir qu'en l'espèce, les conditions générales du contrat d'assurance souscrit prévoient qu'une déchéance de garantie peut intervenir en cas de fausse déclaration de vol du bien objet du contrat. Elle précise que ces conditions générales ont force de loi entre les parties et qu'elles sont opposables à monsieur [B] [G] dans la mesure où les conditions particulières que ce dernier a signées y font référence. Elle ajoute que cette pratique de la clause de renvoi au sein des conditions particulières vers les conditions générales est admise et rend opposables, lorsqu'elles sont signées par l'assuré, les conditions générales à ce dernier. Elle fait valoir que monsieur [B] [G] a menti sur le nombre de clés en sa possession dans le cadre de sa déclaration de sinistre puisque les deux expertises réalisées ont conclu à ce que les deux clés qu'il a fournies font état d'une dernière utilisation les 20 novembre 2015 et 1er janvier 2017 alors que le véhicule a été acheté le 20 septembre 2021. Elle soutient que cette fausse déclaration a pu être faite dans l'objectif d'éviter une restriction de garantie et rend incertaines les circonstances du sinistre, ce qui justifie qu'elle oppose à monsieur [B] [G] la déchéance totale de garantie.

Elle ajoute que le rapport d'expertise a été soumis au débat contradictoire et est donc recevable.

La S.A. SURAVENIR ASSURANCES rejette par ailleurs le moyen avancé par monsieur [B] [G] tendant à remettre en question la fiabilité des données des clés, en ce que les pièces produites par celui-ci pour appuyer ses moyens, qui résident dans des témoignages sur des forums d'automobilistes, ne permettent pas d'identifier les auteurs de ces témoignages et ne visent, selon elle, qu'à jeter le discrédit sur les analyses réalisées par les experts. Elle ajoute que les témoignages produits ne valent pas attestation au sens de l'article 202 du code de procédure civile.

Pour rejeter la demande au titre de la résistance abusive formulée par monsieur [B] [G], la S.A. SURAVENIR ASSURANCES se fonde sur l'article 1231-3 du code civil ainsi que sur l'article 1231-6 du même code. Elle soutient que seuls peuvent être octroyés des intérêts légaux, dès lors qu'ils sont dus. Elle ajoute que le juge ne peut octroyer une indemnité que s'il constate l'existence d'un préjudice subi, certain, né et actuel, ce qui exclut les indemnités de principe et les indemnités forfaitaires. Selon elle, l'octroi d'une indemnité ne doit pas permettre un enrichissement illégitime du demandeur. Elle fait valoir qu'elle n'a commis aucun manquement dans l'instruction de son dossier ni aucun défaut de diligence.

Au soutien de sa demande au titre des frais d'expertise, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES se fonde sur les articles 1302 et 1302-1 du code civil et rappelle qu'en cas de déchéance, elle a doit au remboursement des indemnités éventuellement déjà versées ainsi qu'au remboursement des frais de gestion engagés, comme les frais d'expertise ou les frais d'enquête. Elle ajoute qu'en cas de fraude, le droit à restitution de l'assureur est total. Elle précise qu'en l'espèce, elle a été amenée à prendre en charge les frais d'expertise d'un montant de 1.920 euros.

Il sera renvoyé aux dernières conclusions susvisées pour plus ample exposé de leurs moyens, conformément aux dispositions de l'article du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des conclusions n°2 de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES

L'article 16 du code de procédure civile énonce que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

L'article 850 du même code dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l'exception de la requête mentionnée à l'article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique.

En l'espèce, à l'audience de plaidoirie du 29 avril 2024, l'avocat postulant de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES a déposé son dossier de plaidoirie dans lequel se trouvent uniquement des conclusions papier intitulées "conclusions récapitulatives n°2", qui forment un certain de nombre de moyens nouveaux par rapport à ses écritures intitulées "conclusions récapitulatives n° 1", ainsi qu'une nouvelle demande reconventionnelle de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

Cependant, elle ne justifie pas avoir notifié ces écritures à monsieur [B] [G] ou à son conseil, ni les avoir transmises au tribunal par voie dématérialisée comme l'article 850 du code de procédure civile l'impose à peine d'irrecevabilité relevée d'office par le tribunal.

En effet, la consultation du logiciel Winci démontre au contraire que les dernières conclusions qui ont été notifiées au tribunal et au demandeur par le conseil de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES sont les n°1, notifiées le 7 septembre 2023.

Par conséquent, il y a lieu de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions intitulées "conclusions récapitulatives n° 2" produites par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES en ce qu'elles n'ont pas été transmises par voie électronique à la juridiction et qu'il n'est pas démontré ni invoqué qu'elles aient été portées à la connaissance du demandeur, ce qui est contraire au principe de la contradiction.

Il sera donc statué uniquement sur les conclusions intitulées "conclusions récapitulatives n° 1" notifiées le 7 septembre 2023.

Sur la demande en paiement au titre du contrat d'assurance formulée par monsieur [B] [G]

En application de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1104 du même code dispose que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L'article 2274 du même code précise que la bonne foi est toujours présumée, et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver.

Dans le cadre d'un contrat d'assurance, l'assureur peut prévoir une déchéance de garantie en cas de fausse déclaration de sinistre par l'assuré. Il lui appartient alors de prouver que l'assuré, présumé être de bonne foi, a effectué une fausse déclaration de sinistre. Cette preuve, qui porte sur un fait juridique, peut être apportée par tout moyen, conformément à l'article 1358 du code civil.

En l'espèce, il résulte de l'examen de la page 22 des conditions générales de la police d'assurance qui ont force de loi entre les parties, ce qui n'est pas contesté, qu'en cas de non-respect des obligations de l'assuré, figure la clause suivante : "Nous pouvons être amenés à appliquer une déchéance sur l'ensemble de vos garanties si, à l'occasion d'un sinistre :
-vous faites une fausse déclaration portant sur les causes, les circonstances et les conséquences du sinistre,
-vous prétendez détruits ou volés des objets n'existant pas au moment du sinistre ou n'ayant pas été détruits ou volés,
-vous ne déclarez pas l'existence d'autres assurances couvrant le même risque,
-vous utilisez des documents et justificatifs inexacts ou usez de moyens frauduleux."

Il appartient donc à la S.A. SURAVENIR ASSURANCES de prouver que monsieur [B] [G] a effectué une fausse déclaration en déclarant le vol de son véhicule le 17 juin 2022.

Or, elle se prévaut pour ce faire d'un premier compte-rendu d'analyse électronique qui conclut, dans un rapport en date du 30 juin 2022, à ce que les deux clés fournies par monsieur [B] [G] lors de la déclaration de son sinistre ont été utilisées pour la dernière fois le 20 novembre 2015 pour la clé enregistrée en position numéro 1 sur le véhicule, et le 1er janvier 2017 pour la clé numéro 2. Elle fait état par ailleurs d'un second rapport en date du 22 mars 2023 résultant d'une expertise amiable réalisée contradictoirement qui conclut aux mêmes dates de dernière utilisation pour ces clés.

Cette expertise amiable contradictoire, régulièrement versée aux débats, qui a fait l'objet d'un débat contradictoire des parties et est corroborée par le premier rapport du 30 juin 2022, tend à démontrer que les clés fournies par monsieur [B] [G] présentent des données erronées quant aux dates de dernière utilisation du véhicule.

En effet, la théorie de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES selon laquelle monsieur [B] [G] aurait en sa possession au moins une troisième clé du véhicule, qu'il aurait utilisée depuis son achat le 20 septembre 2021 et qu'il n'aurait pas fournie ni déclarée à son assureur lors de la déclaration de son sinistre le 17 juin 2022, n'est corroborée par aucun élément probant.

Au contraire, il ressort des deux rapports d'expertise que les clés analysées sont les clés originales associées au véhicule tant dans leurs éléments externes de fabrication que dans leurs composés électroniques internes. Le premier rapport d'analyse conclut que les deux clés sont associées au véhicule litigieux en position numéros 1 et 2. De plus, les données recueillies signifieraient que les deux clés auraient été utilisées pour la dernière fois à une date de plus de quatre années antérieure à celle de la vente. Le second rapport conclut également à des incohérences sur les données des clés quant au niveau d'huile du véhicule par rapport au niveau d'huile théorique, outre à des incohérences liées au kilométrage et à la date de dernière utilisation. Ce même rapport conclut en outre à ce que les incohérences des données des clés peuvent résulter d'une absence de réinitialisation de ces clés. Il conclut également à ce qu'à la suite d'une recherche dans l'historique d'interventions du véhicule, un évènement en date du 10 septembre 2015 fait état d'une intervention sur le véhicule dans le réseau VOLKSWAGEN avec un kilométrage de 113.243 kilomètres.

De plus, la réponse de la conseillère experte du service consommateur du groupe VOLKSWAGEN France, madame [H] [K], produite par monsieur [B] [G], fait état de ce que la date enregistrée dans les clés des véhicules correspond à la date lue dans le port instruments du véhicule lors du dernier cycle de conduite. Selon elle, un déréglage de l'heure et/ou de la date sur le véhicule générera un relevé de données erronées.

Par conséquent, sans qu'il soit nécessaire de s'appuyer sur les témoignages issus de forums d'automobilistes produits par le demandeur, on peut déduire de ces éléments que les données contenues dans les clés fournies par monsieur [B] [G] lors de la déclaration de son sinistre peuvent ne pas correspondre à l'utilisation réelle faite par ce dernier du véhicule. En effet, le caractère d'origine des clés fournies, leurs positions d'association avec le véhicule en numéros 1 et 2, les incohérences quant aux kilométrages et dates de dernière utilisation par rapport à la date de vente du véhicule, les incohérences quant au niveau d'huile ainsi que les incohérences par rapport à l'historique d'intervention du véhicule, permettent de considérer que les données contenues dans les clés ne doivent donc pas être interprétées comme indiquant de manière certaine la date de dernière utilisation du véhicule.

L'incertitude quant à la fiabilité du contenu des données des clés fournies par monsieur [B] [G] ne permet pas de caractériser l'existence d'une fausse déclaration lui étant imputable. Par conséquent, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES ne démontre pas suffisamment que son assuré a menti sur le nombre de clés en sa possession et qu'il a ainsi établi une fausse déclaration de sinistre.

Partant, la déchéance de garantie qu'elle a unilatéralement opposée à son assuré n'est pas valable et le contrat doit être mis en œuvre en ce qu'il indemnise l'assuré en cas de vol du véhicule.

Le montant de cette indemnisation doit correspondre au montant de la valeur estimée du véhicule, déduction faite de la franchise contractuelle restant à la charge de l'assuré.

En l'espèce, la valeur du véhicule a été estimée par le cabinet VAE SERVICE, estimation à laquelle se réfère le rapport d'expertise amiable, à la somme de 22.000 euros. Le contrat d'assurance prévoit une franchise à la charge de l'assuré d'un montant de 762 euros.

Ainsi, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES doit indemniser monsieur [B] [G] à hauteur de 21.238 euros, et non de 21.338 euros comme ce dernier le sollicite.

Il convient donc de condamner la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à payer à monsieur [B] [G] la somme de 21.238 euros au titre de l'exécution du contrat d'assurance.

Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive formulée par monsieur [B] [G]

L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est de principe que si le droit de se défendre n'est pas, en soi, constitutif d'une faute, tel n'est pas le cas si ce droit dégénère en abus, notamment lorsque le défendeur fait preuve de mauvaise foi.

Or, en l'espèce, le retard dans l'exécution de son obligation par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES n'est pas caractéristique d'une mauvaise foi mais résulte d'une interprétation erronée des données contenues dans les clés.

Ainsi, si son refus de garantir le sinistre était erroné, il n'était toutefois pas abusif et ne saurait donner lieu à des dommages et intérêts différents des intérêts moratoires.

En conséquence, la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive formulée par monsieur [B] [G] doit être rejetée.

Sur la demande reconventionnelle en remboursement des frais d'expertise formulée par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES

En l'espèce, les sommes liées à l'expertise réalisée par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES sur les clés fournies par monsieur [B] [G] ne correspondent pas à un indu donnant droit à restitution puisqu'en l'espèce, aucune déchéance n'a été valablement opposée à l'assuré.

Faute pour la S.A. SURAVENIR ASSURANCES d'établir l'existence d'une fausse déclaration ou d'une fraude commise par l'assuré et faute de déchéance du droit à garantie, les frais d'expertise qu'elle a exposés doivent rester à sa charge, d'autant qu'ils ont été exposés du fait de son choix erroné de contester sa garantie.

La demande en remboursement des frais d'expertise formulée par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES doit donc être rejetée.

Sur l'exécution provisoire et les frais du procès

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.

En l'espèce, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES a perdu le procès, si bien qu'il y a lieu de la condamner aux dépens.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, la S.A. SURAVENIR ASSURANCES étant condamnée aux dépens, il n'apparaît pas contraire à l'équité de la condamner à payer à monsieur [B] [G] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'exécution provisoire

En application de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il est ainsi rappelé qu'en l'espèce, l'exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DECLARE IRRECEVBABLES les conclusions intitulées "conclusions récapitulatives n°2" produites par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES ;

CONDAMNE la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à payer à monsieur [B] [G] la somme de 21.238 euros en application du contrat d'assurance ;

REJETTE la demande en remboursement des frais d'expertise formulée par la S.A. SURAVENIR ASSURANCES ;

REJETTE la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive formulée par monsieur [B] [G] ;

CONDAMNE la S.A. SURAVENIR ASSURANCES aux dépens ;

CONDAMNE la S.A. SURAVENIR ASSURANCES à payer à monsieur [B] [G] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de la S.A. SURAVENIR ASSURANCES au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE l'exécution provisoire de la présente décision.

Le greffierLe président

copie exécutoire + ccc le :
à
Maître Charles SAVARY
Me Sandrine TRIGON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/01437
Date de la décision : 10/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-10;23.01437 ?
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