COUR D’APPEL DE BORDEAUX
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
Cabinet du Juge des libertés et de la détention
N° RG 24/02550 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZPH4
N° Minute : 24/01738
ORDONNANCE DU 20 Août 2024
A l’audience publique du 20 Août 2024, devant Nous, Clémence CARON, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Bordeaux, Juge des libertés et de la détention assistée de Julie BOURGOIN, Greffier,
siégeant au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique de CADILLAC, dans une salle spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement et répondant aux exigences de l’article L 3211-12-2 du code de la santé publique,
DANS L’INSTANCE ENTRE :
REQUÉRANT :
Monsieur le PREFET DE LA GIRONDE
régulièrement avisé, non comparant,
DÉFENDEUR :
M. [C] [W]
né le 16 Octobre 2003 à LIMOGES (HAUTE VIENNE)
actuellement hospitalisé au Centre Hospitalier Spécialisé de CADILLAC
régulièrement convoqué, comparant assisté de Me Maëlys NABUCET, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat commis d’office,
MINISTÈRE PUBLIC :
Madame le Vice-Procureur de la République régulièrement avisée, non comparante,
****
Vu le code de santé publique, et notamment ses articles L. 3211-1, L. 3211-2-1, L. 3211-2-2, L. 3211-12-1, L. 3211-12-2, L. 3213-1 à L. 3213-11, L. 3214-3, R. 3211-7 à R. 3211-18, R. 3211-24 à R. 3211-26 et R. 3213-1 à R. 3213-3 ;
Vu les arrêtés préfectoraux du préfet de la Dordogne et du préfet de la Gironde du 09/08/2024 ordonnant la mise en œuvre de soins psychiatriques en faveur de Monsieur [C] [W] sous la forme d’une hospitalisation complète et transfert en Unité Hospitalière Spécialement Aménagée du Centre Hospitalier de Cadillac, par application des dispositions des article D. 398 du code de procédure pénale et L. 3214-3 du code de la santé publique,
Vu le bulletin de situation du 13/08/2024 mentionnant une entrée effective à 17 heures 24,
Vu la requête du préfet de la Gironde enregistrée au greffe le 14/08/2024 et les pièces jointes,
Vu l’arrêté préfectoral en date du 19 août 2024 maintenant l'intéressé en hospitalisation complète à l'issue de la période d'observation de 3 jours instituée par les dispositions de l'article L. 3211-2-2 du code de la santé publique,
Vu l’avis du Ministère public,
Vu la comparution de l’intéressé et ses explications à l'audience au terme desquelles il explique souhaiter la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète ; qu’il explique que la mesure d’hospitalisation complète l’empêche de voir sa mère qu’il rencontre au parloir de la Maison d’arrêt de PERIGUEUX ;
Vu les observations de son avocate au terme desquelles elle soulève une irrégularité de la procédure tirée du non-respect des dispositions des articles L3213-1 du CSP et L3211-2-3 du Code de la santé publique ; qu’elle soutient en conséquence la demande de mainlevée de la mesure formée par Monsieur [C] [W].
MOTIFS DE LA DECISION
Au terme des dispositions de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique : « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d'un établissement (...) que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies: 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis (...) d''une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète (...) »;
En vertu de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique « Le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire. »
L'article D. 398 du code de procédure pénale dispose que « Les détenus atteints des troubles mentaux visés à l'article L.3214-3 du code de la santé publique ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire. Au vu d'un certificat médical circonstancié et conformément à la législation en vigueur, il appartient à l'autorité préfectorale de faire procéder, dans les meilleurs délais, à leur hospitalisation d'office dans un établissement de santé habilité au titre de l'article L. 3214-1 du code de la santé publique. Il n'est pas fait application, à leur égard, de la règle posée au second alinéa de l'article D.394 concernant leur garde par un personnel de police ou de gendarmerie pendant leur hospitalisation ».
L'article L. 3214-3 du code de la santé publique poursuit que « Lorsqu'une personne détenue nécessite des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui, le préfet de police à Paris ou le représentant de l'Etat dans le département dans lequel se trouve l'établissement pénitentiaire d'affectation du détenu prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, son admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète dans les conditions prévues au II de l'article L. 3214-1. Le certificat médical ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil. Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les hospitalisations ordonnées en application de l'article L. 3213-1. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu la mesure de soins psychiatriques nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade et sont inscrits sur le registre mentionné à l'article L. 3212-11. »
L’article L. 3214-1 II du code de la santé publique prévoit que « Lorsque leurs troubles mentaux rendent impossible leur consentement, les personnes détenues peuvent faire l'objet de soins psychiatriques sans consentement en application de l'article L. 3214-3. Les personnes détenues admises en soins psychiatriques sans consentement sont uniquement prises en charge sous la forme mentionnée au 1° du I de l'article L.3211-2-1 », soit sous la forme de l'hospitalisation complète. « Leur hospitalisation est réalisée dans un établissement de santé mentionné à l'article L.3222-1 au sein d'une unité hospitalière spécialement aménagée ou, sur la base d'un certificat médicale, au sein d'une unité adaptée ».
L’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique prévoit que « I. L'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le représentant de l'Etat (…) ait statué sur cette mesure (...) : 1° Avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission (…). II. La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l'avis motivé d'un psychiatre de l'établissement se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète. ».
Il résulte des éléments figurant au dossier que l’intéressé a été admis en provenance de la Maison d’arrêt de Périgueux au sein de l’Unité Hospitalière Spécialement Aménagée du Centre Hospitalier Spécialisé de Cadillac en raison de troubles psychiatriques aiguës avec des thématiques de persécution et d’hétéro-agressivité.
A l’audience, le Conseil de Monsieur [C] [W] fait valoir que les dispositions tant de l’article L3213-1 du CSP que celles de l’article L3211-2-3 du Code de la santé publique n’ont pas été respectées ;
En l’espèce, il convient cependant de constater que Monsieur [C] [W] était détenu au sein de la Maison d’arrêt de PERIGUEUX et qu’il a été examiné par un médecin de l’UCSA sans faire l’objet d’une prise en charge par un établissement de santé ; que la prise en charge effectivement au sein du CHS de CADILLAC n’est intervenue que le 13/08/2024 à 17 heures 24 comme le précise le bulletin de situation présent à la procédure ; que dans ces conditions, les certificats médicaux des 24h et 72h ont été régulièrement établis les 14 et 16 août 2024 ; que dans ces conditions, il convient de rejeter les moyens de nullité soulevés et de déclarer la procédure régulière ;
Il convient de constater que l'avis médical motivé prévu par l'article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique établi le 19 août 2024 relève que l'état mental de l'intéressé nécessite toujours des soins assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, et ce au regard de la persistance des troubles psychiques chez le patient qui nécessite une consolidation de sa prise en charge institutionnelle et chimiothérapique.
En toute hypothèse, une sortie prématurée serait de nature à présenter des risques de rechute rapide.
Dans ces conditions, la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisé s'impose encore, afin de garantir l'observance des soins, et le cas échéant la réadaptation du traitement, ce qui ne peut se faire qu'en milieu hospitalier.
De plus, au regard des circonstances qui ont donné lieu à la mesure d'hospitalisation et des troubles dont il souffre, l'état de santé de Monsieur [C] [W] doit être regardé comme pouvant compromettre la sûreté des personnes ou porter atteinte, de façon grave, à l'ordre public.
Dès lors, le maintien de l'hospitalisation complète de l'intéressé apparaît à ce jour justifié.
PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition au greffe le 20 Août 2024, par décision contradictoire rendue en premier ressort après débats en audience publique du 20 Août 2024,
Accorde l’aide juridictionnelle provisoire à M. [C] [W],
Rejetons le moyen de nullité soulevé
Autorise le maintien de l’hospitalisation complète de M. [C] [W],
Dit que la présente décision sera notifiée à :
M. [C] [W]
Me Maëlys NABUCET
Ministère public
Monsieur le préfet de la Gironde
et adressée pour information au Directeur du Centre Hospitalier de CADILLAC.
Dit que les dépens comprenant les frais d’expertise seront supportés par le Trésor Public, en application des dispositions de l’article R 93-2° du Code de Procédure Pénale.
Le Greffier, Le Juge des Libertés et de la Détention,
Cette décision peut être frappée d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification par déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de BORDEAUX - Place de la République - 33 000 BORDEAUX. Cette déclaration peut notamment être envoyée par courriel à cette adresse : ho.ca-bordeaux@justice.fr
Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai.
N° RG : N° RG 24/02550 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZPH4
M. [C] [W]
Ordonnance en date du 20 Août 2024
Reçu notification de la présente le
Le patient
signature :
Reçu notification de la présente ordonnance le
le Directeur du Centre Hospitalier Spécialisé DE CADILLAC,
signature