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18/07/2024 | FRANCE | N°15/06086

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6ème chambre civile, 18 juillet 2024, 15/06086


6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 18 Juillet 2024
60A

RG n° N° RG 15/06086

Minute n°






AFFAIRE :

[N] [Y]
C/
[U] [S] épouse [K], SA MAAF ASSURANCES, CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE





Grosse Délivrée
le :
à Avocats : Me Jennifer BROCHOT
la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES





COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats, du délibéré et de la mise à disposition :


Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
Madame Marie-Aude DEL BOCA, vice-président,
Madame Fanny CALES, juge,

greffier présente lors des débats et de la mise à disposition : Madame Elisab...

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 18 Juillet 2024
60A

RG n° N° RG 15/06086

Minute n°

AFFAIRE :

[N] [Y]
C/
[U] [S] épouse [K], SA MAAF ASSURANCES, CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE

Grosse Délivrée
le :
à Avocats : Me Jennifer BROCHOT
la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats, du délibéré et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
Madame Marie-Aude DEL BOCA, vice-président,
Madame Fanny CALES, juge,

greffier présente lors des débats et de la mise à disposition : Madame Elisabeth LAPORTE,

DEBATS:

A l’audience publique du 03 Avril 2024, la désision a été mise en délibéré au 05 juin 2024 pour être prorogée ce jour.

JUGEMENT:

Réputé contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDEUR

Monsieur [N] [Y]
né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 9]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 3]

représenté par Me Jennifer BROCHOT, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSES

Madame [U] [S] épouse [K]
domiciliée : chez Pompes Funèbres du Val de Leyre
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 4]

représentée par Maître Marie-Cécile GARRAUD de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocats au barreau de BORDEAUX

SA MAAF ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 8]
[Localité 6]

représentée par Maître Marie-Cécile GARRAUD de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocats au barreau de BORDEAUX

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur en exerice domicilié es qualités audit siège
[Adresse 10]
[Localité 2]

défaillante

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 23 août 2011, Monsieur [Y] a été victime d'un accident de la route alors qu'il était au volant de son véhicule, il a été percuté à l'arrière par la voiture de Madame [K], assurée auprès de la MAAF.

Plusieurs examens ont alors été réalisés successivement entre septembre 2011 et février 2012 et ont révélé que Monsieur [Y] souffrait d'un syndrome parkinsonien post-traumatique.

Par ordonnance de référé du 17 mars 2014, le professeur [W] a été désignée en qualité d'expert aux fins d'évaluation de son préjudice lié à l'accident.

Le professeur [W] rendait son rapport en date du 16 mars 2015.

M. [Y] assignait par actes des 3, 4 et 12 juin 2015, Mme [L], la MAAF et la CPAM de la Gironde aux fins d’homologation du rapport d’expertise et de liquidation de ses préjudices.

Selon jugement en date du 11 janvier 2017, le Tribunal de grande instance de Bordeaux jugeait que le véhicule conduit par Madame [U] [S] épouse [K] et assuré par la Société MAAF ASSURANCE était impliqué dans la survenance de l'accident du 23 août 2011, que le droit à indemnisation de Monsieur [N] [Y] était entier mais que le syndrome Parkinsonien n'était pas imputable à l'accident de la circulation survenu le 23 août 2011 et que la seule mise en évidence des symptômes de la maladie de Parkinson préexistante, son aggravation transitoire ainsi que le traumatisme cervical bénin subi par Monsieur [N] [Y] avait un lien de causalité directe et certain avec l'accident et lui étaient donc imputables. Le TGI fixait la date de consolidation au 6 avril 2012 et ordonnait la réouverture des débats aux fins d’obtenir la créance définitive de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Gironde.

Monsieur [Y] formait appel de la décision du 11 janvier 2017 par déclaration d'appel du 22 février 2017.

Par arrêt du 3 septembre 2018, la Cour d'appel de Bordeaux réformait partiellement le jugement de première instance et disait que la maladie de Parkinson avait été révélée par l'accident de circulation survenu le 23 août 2011 de sorte que cette affection était imputable à l'accident et que le droit à réparation de [N] [Y] était intégral. La Cour d’Appel entérinait le rapport d'expertise du professeur [F] et disait n'y avoir lieu à expertise complémentaire et elle renvoyait l'affaire devant le tribunal de grande instance de Bordeaux pour liquidation du préjudice de [N] [Y].

Les Madame [S] épouse [K] et la MAAFs formaient un pourvoi en cassation contre cette décision. Le 20 mai 2020, la Cour de cassation rejetait le pourvoi.

Par jugement du 2/11/2021, le présent tribunal a :
- ordonné une nouvelle expertise avec consignation à la charge de la MAAF
- invité M. [N] [Y] à produire une créance définitive de la CPAM de la Gironde tenant compte de l’ensemble de ses débours consécutifs à l’accident du 23 août 201, ce y compris les prestations liées à la maladie de Parkinson dont il est atteint ;
- invité M. [N] [Y] à justifier de ses avis d’imposition concernant ses revenus de 2009 et de 2010.

Le rapport d'expertise de l’expert désigné, le docteur [J], était déposé le 3 février 2023 et concluait de la manière suivante :
"• Date des faits : 23 août 2011
• Arrêt des activités professionnelles à compter du 23 août 2011 et toujours en cours
• Déficit fonctionnel temporaire total : absence
• Déficit fonctionnel temporaire partiel :

• DFTP15 : du 23 août 2011 au 1er janvier 2015
• DFTP20 : du 1er janvier 2015 au 1er janvier 2016
• DFTP 25 : du 1er janvier 2016 1er janvier 2017
• DFTP30 : du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2019
• DFTP 35 : du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020
• DFTP40 : à compter du 1er janvier 2020 et encore à ce jour
• Date de consolidation (DCML) : Absence
• Souffrances endurées : Non 3,5/7/7
• Dommage esthétique permanent : Non 2,5/7/7
• Retentissement sur les activités de loisirs : Présent pour le bricolage
• Retentissement professionnel : Absence
• Taux d'AIPP : Non 35%
• Tierce personne de substitution :
• 1 heure par semaine du 23 mai 2014 au 31 décembre 2016
• 3 heures par semaine pendant la période de DFTP 30
• 1 heure quotidienne pendant la période de DFTP 35
• 1h30 quotidienne à ce jour et depuis le début de la période de DFTP 40
• Il apparaît nécessaire de procéder à l'adaptation de la salle de bains de Monsieur [Y]
• A ce jour et sauf découverte thérapeutique révolutionnaire, il y aura nécessairement des phases évolutives plus ou moins rapides dans le sens de l'aggravation clinique"

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par voie électronique le 16/10/2023, Monsieur [Y] demande au tribunal de :
- CONSTATER que le droit à indemnisation de Monsieur [Y] est entier.
- FIXER le préjudice de Monsieur [Y] comme suit et,
- CONDAMNER in solidum Madame [L] et la société MAAF Assurances à payer à Monsieur [Y] à titre d’indemnité :
- la somme de 124,70 € en remboursement des frais de kinésithérapie et d’ambulance ;
- la somme de 78.587,50 € correspondant à l’assistance d’un tiers pendant la période allant du
23 août 2011 au 30 décembre 2023, date prévisible de la décision à intervenir ;
- la somme de 1.401,84 € correspondant à ses pertes de gains professionnels actuels, après remboursement des indemnités journalières versées par la CPAM ;
- la somme forfaitaire provisionnelle de 30.000 € correspondant à ses dépenses de santé
futures pour l'appareillage aidant au déplacement non remboursé par la CPAM ;
- la somme provisionnelle de 6.000 € correspondant à la réfection de sa salle de bain ;
- la somme de 760.730,26 € correspondant à la perte de ses gains professionnels, en arrérages
échus ;
- la somme de 50.000 € pour indemnisation de l’incidence professionnelle ;
- la somme de 238.395 € pour indemnisation des frais futurs d’assistance par tierce personne, à verser sous forme de capital provisionnel ;
- la somme de 42.172,35 € en indemnisation du déficit fonctionnel temporaire ;
- la somme de 16.000 € en indemnisation de la souffrance endurée ;
- la somme provisionnelle de 89.870 € pour indemnisation du déficit fonctionnel permanent;
- la somme provisionnelle de 10.000 € au titre du préjudice esthétique permanent ;
- la somme provisionnelle de 50.000 € au titre du préjudice d’agrément ;
- la somme provisionnelle de 10.000 € au titre du préjudice sexuel ;
- la somme de 30.000 € au titre du préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive.
- DEDUIRE du total de ces sommes les provisions de 50.000 € versées par AXA FRANCE IARD et de 9.000 euros versée par MAAF Assurances.

- CONDAMNER la MAAF à payer à Monsieur [Y] le montant des indemnités allouées avec intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai, le 23 mars 2012, jusqu'au jour du jugement devenu définitif, en application de l’article L211-13 du Code des assurances.
- CONDAMNER in solidum Madame [L] et la société MAAF Assurances à payer à Monsieur [Y] une indemnité de 15.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, compte tenu de la durée de la procédure et de l’importance des diligences effectuées pendant 10 ans ;
- CONDAMNER in solidum Madame [L] et la société MAAF Assurances aux entiers dépens de la présente procédure et aux dépens de la procédure de référé, en ceux compris notamment le coût de l’expertise judiciaire du professeur [F].
- ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir dans son intégralité, nonobstant appel et sans caution, compte tenu de l’ancienneté de l’accident du 23 aout 2011.

Au terme des conclusions responsives notifiées par voie électronique le 30/01/2024, Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES demandent au tribunal de :
A titre principal,
- Débouter M. [Y] de sa demande formulée à l’encontre de MAAF ASSURANCES SA aux intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur les condamnations à intervenir, au visa de l’article L211-13 du code des assurances,
- Prononcer un sursis à statuer sur le surplus des réclamations, dans l’attente : de la production par M. [Y] des créances actualisées des tiers payeurs par application de l’arrêt par la chambre sociale section B de la cour d’appel de Bordeaux le 9 juillet 2020 (pièce 60 M. [Y]), tenant compte du syndrome de Parkinson,
A titre subsidiaire,
- Fixer comme suit l’évaluation des préjudices subis par M. [N] [Y] :

Poste de préjudice Evaluation Créance tiers payeur Solde victime
ATP temporaire 48 032,00 En attente En attente
PGPA 12 348,28 12 348,28 0,00
DSA 4 212,83 En attente En attente
PGPF rejet Non produit rejet
IP 0,00 Non produit 0,00
subsidiaire : 5 000,00 subsidiaire : 5 000,00
ATP à
compter du
30 décembre 2023 Sursis à statuer
Subsidiaire :
rente trimestrielle de : 2 190,00
DFTP 31 948,75 0,00 31 948,75
SET 16 000,00 0,00 16 000,00
DFP 0,00 0,00
Subsidiaire : 65 450,00
PEV 18 000,00 0,00 18 000,00
PA Rejet - voir PEV 0,00 0,00
PS Rejet - voir PEV 0,00 0,00
Total :
A titre principal :
130 541,86 En attente
A titre subsidiaire :
200 991,86 + rente ATP

- FIXER les modalités de paiement de l’indemnisation du poste ATP à échoir à compter du 30 décembre 2023, dans l’hypothèse où une indemnisation serait due, sous forme de rente viagère et trimestrielle de 2190 €, à terme échu, revalorisable conformément à la loi du 5 juillet 1985 et qui sera suspendue en cas de prise en charge du blessé dans un établissement médical durant plus de 45 jours.
- LIMITER l’application de la sanction de l’article L211-13 du code des assurances :
* à la période du 16 août 2015 au 1 er octobre 2015, et calculée sur l’offre contenue dans les conclusions du 1 er octobre 2015
* à la période du 20 octobre 2020 au dépôt des conclusions notifiées le 25 mars 2021, calculée sur l’offre contenue dans les présentes conclusions concernant les préjudices résultant du syndrome de Parkinson et uniquement sur les rentes échues au 20 octobre 2020
- ENTENDRE la CPAM de la GIRONDE prendre telles conclusions qu’il lui plaira,
- REDUIRE à de plus justes proportion l’indemnité susceptible d’être allouée à M. [Y] en application des dispositions de l’article 700 du CPC,
- REJETER toute demande complémentaire dirigées à l’encontre des concluantes comme étant irrecevable et en tout état de cause mal fondée,
- DEDUIRE des sommes allouées les provisions à valoir sur la réparation des préjudices corporels de M. [Y] versées à hauteur de 59 000 €
- STATUER ce que de droit sur les dépens dont distraction au profit de la SCP DEFFIEUX GARRAUD JULES en application des dispositions de l’article 699 du CPC.

La CPAM n’a pas constitué avocat.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de sursis à statuer

Il est constant que Monsieur [Y] a été invité à produire une créance actualisée de la caisse de sécurité sociale incluant les sommes engagées par la sécurité sociale pour les troubles les liés à son syndrome parkinsonien, et ce tant par la Cour d'appel dans son arrêt du 3 septembre 2018 retenant l’imputabilité de la maladie de Parkinson que par le présent tribunal dans son jugement ordonnant une nouvelle expertise du 2 novembre 2021.

La CPAM n'a pas constitué avocat. Néanmoins, Monsieur [Y] produit un mail en date du 26 juin 2023 émanant de la direction financière et juridique, service recours contre tiers de la caisse primaire d'assurance-maladie de la Gironde, au terme duquel sa créance définitive portant sur un total de 10 853 € ne diffère pas de la dernière créance envoyée le 17 mars 2022 avec cette précision que « aucune prestation n'est actualisable dans cette créance puisqu'il s'agit de prestations échues ». La Caisse n’entend ainsi pas inclure les prestations liés à la maladie de Parkinson dans sa créance malgré l’arrêt de la Cour d’Appel du 3/09/18.

Dès lors que la caisse de sécurité sociale considère avoir listé de manière définitive des créances imputables à l'accident après plusieurs demandes faites par l'avocat de la partie civile, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente d'une créance qui n'a pas vocation à évoluer.

Sur les demandes au titre des préjudices de Monsieur [Y]

Le rapport du Docteur [J] indique que Monsieur [Y], né le [Date naissance 5] 1955, exerçant la profession de rôtisseur dans un restaurant au moment des faits, a présenté suite aux faits des cervicalgies post-traumatiques avec décharges électriques dans le membre supérieur gauche et le membre inférieur gauche puis à compter du mois d'octobre 2011 une cervicobrachialgie droite du fait de la contusion cervicale indirecte sur un terrain d'arthrose cervicale étagée. Il précise à compter du mois de janvier 2012 un scanner a confirmé le diagnostic de maladie de Parkinson.

L'expert précise qu'il s'agit d'une maladie évolutive pour laquelle compte tenu de son aggravation progressive parfois rapide, une consolidation médicolégale ne peut pas être déterminée. L'expert indique que dès lors, ces conclusions portent sur des postes de préjudice dit plancher.

Il précise qu'au mois de mars 2022, ses symptômes étaient les suivants : tremblement majeur du membre supérieur droit mais également axial avec diffusion au chef, une adynamie, une amimie (perte de l'expression gestuelle), une raideur importante hémi-corporelle, des troubles mnésiques, l'arrêt de la conduite depuis 2/3 ans selon ses dires.

Le requérant sollicite la liquidation de son préjudice corporel de manière définitive ou en lui allouant une provision sur les postes de préjudice suivants : dépenses de santé futures, frais d'adaptation du logement, déficit fonctionnel permanent, préjudice esthétique permanent, préjudice d'agrément, préjudice sexuel . Il sollicite en outre une somme au titre du préjudice lié à la conscience d'une pathologie évolutive.

Madame [S] épouse [K] et la MAAF considèrent que si une somme est allouée à Monsieur [Y] au titre de la pathologie évolutive, ce poste inclut le préjudice esthétique permanent, le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel permanent.

La jurisprudence a consacré l'autonomie d'un poste de préjudice qui concerne toutes les pathologies évolutives, s'agissant maladies incurables susceptibles d’évoluer et dont le risque d’évolution constitue en lui-même un chef de préjudice distinct qui doit être indemnisé en tant que tel.

Dans le cas présent d'une maladie de Parkinson qui ne saurait être assimilé à un préjudice de contamination par un virus donnant lieu à une possible guérison sans nécessaire développement de nouveaux symptômes, il convient de réparer le préjudice de la victime, en l'absence de date de consolidation, sur la base des préjudices temporaires échus et, au titre des préjudices temporaires à échoir, sur la base de provisions.

Il convient donc d'examiner les demandes de Monsieur [Y] au titre de chacun des postes de préjudice échus au 1/07/2024 et, pour ceux qui perdurerent au-delà de cette date, de lui allouer une provision lorsque la demande n’est pas formée à titre définitif.

Sur les préjudices

I - Préjudices patrimoniaux :

Dépenses de santé et adaptation du logement :

Ils’évince du relevé de débours de la CPAM que la créance de la sécurité sociale imputable au titre des dépenses de soins doit être limitée à la somme de 289,42 € pour la période du 24 août 2011 au 21 octobre 2011 selon le décompte de la caisse qui n’inclut pas les effets de la maladie de Parkinson. La caisse ne prévoit aucunes dépenses de santé futures imputables.

Il convient de retenir au titre des dépenses de soins restées à la charge de Monsieur [Y] :
- 32,83 € au titre des frais d'ambulance ressortant de la facture du 14 février 2019 après déduction de la prise en charge de la sécurité sociale
- 6000 € au titre du coût de réfection de la salle de bains : le besoin d'un aménagement de la salle de bains avec mise en place d'une douche à l'italienne et plusieurs barres d'appui ressort du courrier du Docteur [B] du 14 janvier 2019 mais également du rapport d'expertise du Docteur [J] ; l'ancienneté du devis de réfection produit (4180 € TTC au 13 mars 2019) justifie de réévaluer à 6000 € la somme au titre de ce poste de préjudice

En revanche, il n'y a pas lieu de retenir de frais restés à charge pour :
- la facture de kinésithérapie du 12 octobre 2017 qui mentionne une somme à régler avec nécessité pour le patient de la régler avec sa carte vitale, ce qui suppose un remboursement de la caisse de sécurité sociale
- des frais et de kinésithérapie pour la période postérieure à cette date ; en effet, si le besoin indéniable de séances de kinésithérapie ressort du rapport d'expertise du Docteur [J] et de plusieurs documents médicaux versés par Monsieur [Y], ce dernier ne justifie pour la période passée d'aucune somme restée à sa charge au titre de frais de kinésithérapie, et ce alors que les defendeurs soutiennent que la maladie de Parkinson fait partie des affections de longue durée donnant lieu à une exonération du ticket modérateur
- les équipements suivants dont le besoin depuis plusieurs années est établi par les documents médicaux produits par Monsieur [Y] mais sans aucune justification d’un reste à charge pour le patient : cannes anglaises, déambulateur et rehausseur pour les toilettes

Dès lors, ce poste de préjudice sera fixé à la somme totale de 6322,25€.

Assistance temporaire d’une tierce personne pour les besoins de la vie courante.

Il s’agit du préjudice lié à la nécessité, pour la victime, du fait de son handicap, d’être assistée par une tierce personne, spécialisée (infirmière, kinésithérapeute...) ou non s’agissant notamment du ménage, des actes de la vie courante, d’une incitation ou simple surveillance nocturne...

Il est constant que ces frais sont fixés en fonction des besoins de la victime et du rapport d’expertise et que l’indemnisation de ce poste de préjudice n’est pas subordonnée à la production de justificatifs et n’est pas réduite en cas d’assistance bénévole par un membre de la famille. Il convient en outre de rappeler que la tierce personne s’entend de l’aide pour tous les actes essentiels de la vie courante.

Le rapport d'expertise du Docteur [J] retient un besoin d'elle tierce personne à hauteur de:
- 1 heure par semaine du 23 mai 2014 au 31 décembre 2016
- 3 heures par semaine du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2019
- 1 heure par jour du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020
- 1h30 par jour depuis le 1er janvier 2020

Monsieur [Y] sollicite que soit retenu un besoin additionnel d'une heure par semaine pour la période antérieure, soit du 23 août 2011, date de l'accident, au 22 mai 2014. Il soutient qu'il a eu besoin d'une assistance par tierce personne dès l'apparition des premiers symptômes de la maladie de Parkinson ; il précise à cet égard qu’est établie l'apparition des premiers tremblements dès les premiers jours qui ont suivi l'accident et que le rapport d'expertise du professeur [F] a révélé qu'il souffrait de tremblements incessants du membre supérieur droit l'obligeant à caler son bras pour calmer le tremblement, d'une gêne pour effectuer les actes fins de la main droite, de douleurs de l'épaule, de difficultés pour bricoler et pour écrire…

Les défendeurs s'opposent à cette demande additionnelle faisant valoir que l'expert a répondu aux dires de l'avocat de Monsieur [Y] en justifiant sa position.

Il sera retenu un taux horaire de 20 € s’agissant d’une aide nécessaire qui ne requierait jusqu'à présent aucune qualification spécialisée

Il est exact que le docteur [J] ne retient pas de besoin d'aide humaine avant le 22 mai 2014 considérant que les besoins de Monsieur [Y] avant l’expertise du Pr [F] sont imputables à son état antérieur lié notamment un syndrome d'apnée du sommeil et à des paresthésies préexistantes et que les tremblements constatés à la suite de l'accident étaient initialement localisés au niveau du membre supérieur droit.

Néanmoins, il est exact que le docteur [J] retient dans son rapport d'expertise, suite à l'accident, les cervicalgies post-traumatiques avec décharges électriques dans le membre supérieur et inférieur gauche puis à compter du mois d'octobre 2011 une cervico-brachialgie droite du fait de la contusion cervicale indirecte, ainsi que les tremblements du membre supérieur droit justifiant la réalisation d'un I.R.M. au mois de novembre 2011. Il note en juin 2013 une lenteur motrice hémicorporelle droite avec tremblements et somnolence diurne.

Dans ces circonstances, il est justifié de retenir un besoin en aide humaine à hauteur de :
- 5 594,29 € correspondant à 1 heure par semaine du 23 août 2011 au 31 décembre 2016 soit 1958 jours/7
- 6 257,14 € correspondant à 3 heures par semaine du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2019 soient 316 heures (52 semaines x 3 heures x 2)
- 7 300 € correspondant à 1 heure par jour du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020 soit 365 heures
- 49 320 € correspondant à 1h30 par jour du 1er janvier 2020 au 1er juillet 2024 soit 1644 jours

Total : 68 471,43 € échus pour la période du 23/08/2011 au 1er juillet 2024.

Pour la période à venir, Monsieur [Y] sollicite l'allocation d'une somme correspondant à la capitalisation viagère d'une somme de 1150 € par mois correspondant à 1h30 par jour, soit 46 heures par mois. Madame [S] épouse [K] et la MAAF concluent à un sursis à statuer pour que Monsieur [Y] justifie de la perception une allocation de majoration tierce personne imputable sur ce poste de préjudice. À titre subsidiaire, les défendeurs proposent de réparer ce poste de préjudice sous forme de rente.

Monsieur [Y] produit un relevé détaillé des mensualités versées par la Carsat correspondant à quatre prestations ne faisant apparaître le versement d'aucune prestation de sécurité sociale imputable sur ce poste de préjudice, notamment majoration tierce personne.

Dès lors il peut être statué sur les demandes au titre de ce poste de préjudice. En l'absence de consolidation de l'état de Monsieur [Y], il convient de lui allouer une provision au titre de l'aide humaine nécessaire pour la période à échoir. Rien ne s'oppose à ce que cette provision soit accordée sous forme de rente trimestrielle, comme proposé par les défendeurs, la rente étant la modalité d'indemnisation la plus à même de permettre une réparation, même provisionnelle, sans perte ni profit pour la victime.

Dès lors, la provision allouée à ce titre sera fixée à une rente trimestrielle de 2 737,50 € :
(1h30 x 365/4 x 20). En revanche, il n’y a pas lieu de prévoir une supension en cas d’hopitalisation dès lors qu’il s’agit d’une provision.

Perte de gains professionnels :

Dans ses conclusions, le docteur [J] retient un arrêt des activités professionnelles imputable à compter du 23 août 2011 “toujours en cours“. En réponse à un dire, l'expert précise qu'il est difficile de qualifier et de quantifier l'existence d'un retentissement professionnel en l'absence de consolidation médicolégale. Il ajoute que bien évidemment Monsieur [Y] ne peut plus faire son activité professionnelle de rôtisseur.

Monsieur [Y] sollicite que sa perte de gains échus soit calculée sur la base d'un salaire de référence de 1 662 € par mois correspondant à ses salaires de juillet et août 2011. Il indique ne plus avoir perçu d'indemnités journalières après le 6 avril 2012, date de sa consolidation par la CPAM. Il sollicite la fixation de ce poste de préjudice, avant imputation de la créance de la CPAM, sur la base de ce revenu mensuel jusqu'au mois de mars 2022, date de ses 67 ans.

Il soutient que doivent être soustraites de la somme ainsi calculée les sommes de :
- 41 231,46 euros correspondant à l'allocation adulte handicapée perçue entre le 1er janvier 2013 et le 31 juillet 2017
-10 564,16 € correspondant aux indemnités journalières versées par la CPAM pour la période du 23 août 2011 au 6 avril 2012
-1 753,32 € correspondant à un versement complémentaire de la CPAM pour la période du 7 avril au 31 mai 2012 en liquidation de ses droits suite à l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 9 juillet 2020
- 58 862,96 € correspondant à la retraite nette mensuelle perçue du 1er août 2017 au 31 décembre 2021.

Les défendeurs soutiennent que comme l'a justement relevé le docteur [J], il n’existe “pas de notion d'activité professionnelle entre 2005 date de la fermeture de la discothèque dans laquelle il travaillait comme physionomiste et le CDD” de rôtisseur en 2011. Les défendeurs ajoutent qu'un arrêt de la chambre sociale de

la cour d'appel de Bordeaux a dit que le syndrome parkinsonien devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle relative aux accidents de trajet puis en maladie.

Il est établi que depuis la date de l'accident, les troubles rencontrées par Monsieur [Y] ne lui permettaient pas de reprendre son activité de rôtisseur, ni de retrouver un emploi lui procurant des revenus comparables à ses revenus antérieurs. Monsieur [Y] ne produit comme justificatif de ses revenus antérieurs que les bulletins de paye du mois de juillet et août 2011, qui mentionne une entrée uniquement au 1er juillet 2011. Les revenus fiscaux déclarés au titre de l'année 2009 portaient sur un total de 13 113 € et ceux au titre de l'année 2010 de 1 euro. Malgré les observations du docteur [J] à cet égard et malgré les conclusions de Madame [S] épouse [K] et de la MAAF, Monsieur [Y] ne verse aucun autre justificatif de ses emplois et revenus antérieurs notamment au titre du premier semestre 2011.

Dans ces circonstances, il convient de retenir un revenu annuel moyen correspondant à la moyenne des années 2009 et 2010, soit 6 557 €.

Il est établi que Monsieur [Y] a pris sa retraite le 28 décembre 2017.

Dès lors, sur la base de revenus annuels de 6557 €, la perte de revenus échus au 1er juillet 2024 correspond à 84 284,77 € (6 557 × 12 ans +10 mois + 1 semaine). Sur cette somme s'imputent les sommes suivantes :
- 10 564,16 € correspondants aux indemnités journalières versées par la CPAM pour la période du 23 août 2011 au 6 avril 2012
- 1 753,32 € correspondants un versement complémentaire deux la CPAM pour la période du 7 avril au 31 mai 2012 en liquidation de ses droits suite à l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 9 juillet 2020
- 58 862,96 € correspondant à la retraite net mensuelle perçue du 1er août 2017 au 31 décembre 2021
+ 33 959,40 € de retraites perçues du 1/01/2022 au 1/07/2024 (1 131,98 x 30 mois).

Dès lors, le solde revenant à Monsieur [Y] est nul.

La seule perte de gains professionnels à laquelle peut prétendre Monsieur [Y] pour la période postérieure au 1er juillet 2024 est sa perte de droits à la retraite, préjudice qu'il convient d’examiner au titre de l'incidence professionnelle comme demandé.

Incidence professionnelle

Après son accident survenu à l'âge de 56 ans, Monsieur [Y] a pris sa retraite au mois de décembre 2017 à l'âge de 62 ans. Il sollicite une somme de 50 000 € au titre de l'incidence professionnelle faisant valoir qu'il n'a pas pu cotiser pendant 10 ans à l'assurance retraite ce qui a diminué le montant de sa retraite mensuelle. Il ajoute avoir été privé de la possibilité de retrouver un travail.

Madame [S] épouse [K] et la MAAF soutient qu'en l'absence de perte de gains professionnels il n'y a pas lieu de retenir une incidence professionnelle, laquelle ne peut a fortiori être liquidée qu'après consolidation. À titre subsidiaire, ils proposent 5 000 €.

Il est constant, au vu de l'âge de Monsieur [Y] à la date du jugement, que même sans consolidation acquise, l'incidence professionnelle est un poste de préjudice d'ores et déjà échu.

Au regard de l'impossibilité pour Monsieur [Y] de reprendre son emploi de rôtisseur et de l'impossibilité de cotiser à la retraite pendant les 10 ans qui ont suivi l'accident survenu à l'âge de 56 ans, il convient d’allouer à Monsieur [Y] à ce titre une somme de 30 000 €.

II - Préjudices extrapatrimoniaux :

Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :

Il inclut pour la période antérieure à la consolidation, la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d’agrément,
éventuellement le préjudice sexuel temporaire.

En l'absence de consolidation, ce poste de préjudice qui inclut le préjudice d'agrément temporel préjudice sexuel, doit être fixé jusqu'à la date du jugement. Pour l'avenir, il convient d'allouer une provision, la demande de provision formée au titre du déficit fonctionnel permanent correspondant en réalité à une provision au titre du déficit fonctionnel temporaire.

Le rapport d'expertise du Docteur [J] retient un déficit fonctionnel temporaire de :
15 % du 23 août 2011 au 1er janvier 2015
20 % du 1er janvier 2015 au 1er janvier 2016
25 % du 1er janvier 2016 au 1er janvier 2017
30 % du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2019
35 % du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020
40 % depuis le 1er janvier 2020.

Monsieur [Y] sollicite une application de ce poste de préjudice sur une base de 33 € par jour pour un déficit fonctionnel temporaire total. Madame [S] épouse [K] et la MAAF proposent que ce poste soit liquidé sur la base de 25 € par jour.

Au titre du préjudice d'agrément qui est inclus dans le déficit fonctionnel temporaire, Monsieur [Y] soutient qu'il ne peut plus pratiquer de vélo et de course à pied ce qu'il faisait auparavant régulièrement.
S'agissant du préjudice sexuel, Monsieur [Y] rappelle qu'il était considéré par le professeur [F] comme important.

De son côté, les défendeurs soutiennent que le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel doivent être inclus dans le préjudice de pathologie évolutive pour lequel ils offrent une somme globale de 18 000 €. Ils soutiennent que Monsieur [Y] ne justifie pas l'exercice d'activités sportives dans le cadre de licence ou de club et ajoutent que son préjudice sexuel n'a pas été médicalement retenu.

Monsieur [Y] justifie de l'exercice antérieur de vélo et de course à pied, activité qui ne sont pas compatibles avec les troubles décrits par le rapport d'expertise du docteur [J].

Concernant préjudice sexuel, il n'est pas décrit par le docteur [J] et ne se déduit ni des troubles décrits par ce dernier, ni de ceux décrits par le rapport du professeur [F].

Dans ces circonstances, il convient de calculer le déficit fonctionnel temporaire échu sur la base de 27 € par jour pour un déficit fonctionnel temporaire total. Pour la période passée, l'indemnité sera en conséquence fixée à la somme de 36 502,65 € correspondant à un déficit fonctionnel temporaire de :
- 4 961,25 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 15 % du 23 août 2011 au 1er janvier 2015 soit 1225 jours selon le calcul commun des parties
- 1 971 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 20 % du 1er janvier 2015 au 1er janvier 2016 soit 365 jours
- 2 463,75 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 25 % du 1er janvier 2016 au 1er janvier 2017 soit 365 jours
- 5 913 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 30 % du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2019 soit 730 jours
- 3 449,25 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 35 % du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020 soit 365 jours
- 17 744,40 € pour la période de déficit fonctionnel temporaire de 40 % du 1er janvier 2020 au 1er juillet 2024, soit 1643 jours

Pour la période à échoir à compter du 1er juillet 2004, il convient de fixer la provision à la somme de 10 000 euros.

Souffrances endurées (SE) :

Le rapport d'expertise du docteur [J] les évalue à 3,5/7 . Il est constant que les symptômes de la maladie de Parkinson qui se sont progressivement et rapidement aggravés, ce qui a eu un retentissement sur l'état psychique de Monsieur [Y] qui invoque une aggravation de son syndrome dépressif.

Monsieur [Y] sollicite à ce titre une somme de 16 000 € au titre de l'indemnisation définitive de ce poste de préjudice, et non à titre de provision. Madame [S] épouse [K] et la MAAF s'accordent sur une indemnisation définitive à hauteur de 16 000 € au titre de ce poste de préjudice. Il convient donc de fixer ce poste de préjudice à ladite somme.

Préjudice esthétique

Le docteur [J] a retenu une préjudice esthétique plancher de 3,5/7 sans détailler ce qu’il impute à ce poste de préjudice. L'expert précise que Monsieur [Y] a besoin d'une canne simple pour les déplacements extérieurs qui ne serait pas utilisée en pratique. Le rapport d'expertise du professeur [F] ne détaille pas les composantes du préjudice esthétique.

Monsieur [Y] sollicite la liquidation de ce préjudice, à titre de provision, à hauteur de 10 000 euros.

Dès lors, il convient de fixer la somme échue à la date du 1/07/24 à ce titre à 5 000 €.

Préjudice de pathologie évolutive

La jurisprudence a consacré l'autonomie d'un poste de préjudice qui concerne toutes les pathologies évolutives, s'agissant maladies incurables susceptibles d’évoluer et dont le risque d’évolution constitue en lui-même un chef de préjudice distinct qui doit être indemnisé en tant que tel.

Le rapport d'expertise du docteur [J] retient qu'il est impossible de consolider Monsieur [Y] dont l'état s'est progressivement aggravé ces dernières années. Il précise qu'il y aura nécessairement des phases évolutives plus ou moins rapides dans le sens de l'aggravation clinique.

Monsieur [Y] sollicite à ce titre 30 000 €. Madame [S] épouse [K] et la MAAF proposent une somme de 18 000 € incluant le préjudice esthétique le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel, poste qui ont été provisoirement réparés distinctement.

Il convient de tenir compte de ce poste de préjudice distinct des souffrances endurées réparées à titre définitif et correspondant aux douleurs physiques et morales associés aux troubles eux-même, mais non à l'anxiété qu'implique le caractère évolutif de la maladie de Parkinson.

Dans ces circonstances, il convient de fixer ce poste de préjudice à la somme de 16 000 €.

Sur la créance des tiers payeurs et la répartition des créances:

La créance des tiers payeurs au titre des prestations évoquées ci avant pour chaque poste de préjudice s’imputera conformément ainsi :
- 289.42 € pour les dépenses de soins
-10 564,16 € correspondant aux indemnités journalières versées par la CPAM pour la période du 23 août 2011 au 6 avril 2012 s’imputant sur les pertes de gain professionnels.

Après déduction de la créance des tiers-payeurs et déduction des provisions versées , le solde dû à Monsieur [Y] et à la charge in solidum de Madame [U] [S] épouse [K] et de son assureur, la Société MAAF ASSURANCES, au titre des préjudices échus s’élève à la somme de 129 006,91€, somme incluant une provision de 10 000 € sur le DFT à échoir.

Conformément aux dispositions de l’article 1231-7 du Code Civil, les indemnités allouées à la victime porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.

Sur le doublement des intérêts au taux légal

Aux termes de l’article L 211-9 du code des assurances, une offre d’indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l’accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l’assureur n’a pas, dans les trois mois de l’accident, été informé de la consolidation de l’état de la victime. L’offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d’offre dans les délais impartis par l’article L 211-9 du code des assurances, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime, produit, en vertu de l’article L 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.

La pénalité s'applique soit, à l'offre complète (conforme aux prescriptions légales) proposée à la victime par l'assureur retardataire, soit, en l'absence d'offre complète ou suffisante, à l'indemnisation fixée par le juge avant imputation de la créance des organismes sociaux et avant déduction des provisions versées.
En cas d'offre irrégulière c'est-à-dire incomplète ou manifestement insuffisante, elle s'applique jusqu'à la décision devenue définitive.
En cas d'offre régulière mais tardive, elle s'applique à compter de la date à laquelle l'offre complète aurait dû être faite jusqu'à la date de l'offre ainsi faite.
Le versement de provisions ne suffit pas à caractériser une offre provisionnelle complète portant sur tous les éléments indemnisables du préjudice conformément aux prescriptions de l'article R211- 40 du code des assurances.
La charge de la preuve du caractère régulier de l'offre, dans son contenu comme dans son délai, incombe à l'assureur.

Monsieur [Y] soutient qu'aucune provision de ne lui a été offerte dans les huit mois de l'accident. Il ajoute que suite au dépôt du rapport d'expertise du professeur [F] du 16 mars 2015 fixant la consolidation de son état de santé au 6 avril 2012, la première offre de l'assureur a été faite par conclusions du 1er octobre 2015, soit plus de cinq mois après le rapport d'expertise. Il ajoute que cette offre est incomplete dès lors que l'imputabilité de la maladie de Parkinson à l'accident était établie mais que l'offre de la MAAF ne portait pas sur tous les éléments du préjudice en lien avec la maladie de Parkinson.

La MAAF soutient de son côté avoir bien adressé à Monsieur [Y] une offre de provision dans les 8 mois de l'accident, une offre définitive lui ayant été adressée le 5 avril 2012 suite au dépôt du rapport d'expertise du docteur [P].

La MAAF soutient que son offre formée par conclusions récapitulatives du 1/10/15, aprés dépôt du rapport d’expertise judiciaire du Pr [F] était lègèrement tardive mais soutient qu’elle était complète, de ce rapport d’expertise ne retenant pas l’imputabilité de la maladie de Parkinson.

L’offre adressée le 5/04/12 par la Société MAAF ASSURANCES, soit dans les 8 mois de l'accident, doit être considérée comme constituant a minima une offre de provision.

Par ailleurs, le rapport du professeur [F] du 16/03/15 qui fixait une date de consolidation, ne retenait pas de manière certaine l'imputabilité à l’accident de la maladie de Parkinson contrairement à ce qu’affirme le réquérant. L'offre émise par conclusions le 1/10/2015 doit être considérée comme complète dès lors qu’elle portait sur l’ensemble des postes de préjudices indiscutablement retenus par le rapport du professeur [F]. Le requérant ne considére cette offre comme incomplète qu'au regard de l’absence de prise en compte des troubles liés à la maladie de Parkinson.

Néanmoins, cette offre intervenue plus de cinq mois après l'information donnée à l'assureur de la consolidation est tardive.
Dès lors, il convient de dire que la somme proposée, soit 6 975,95 € portera intérêts au double du taux légal du 16/08/15 au 1/10/2015.

Sur les autres dispositions du jugement

Succombant à la procédure,Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES seront condamnés aux dépens dans lesquels seront inclus les frais antérieurs à l'engagement de l'instance relatifs à l’instance de référé expertise ayant préparé la présente instance.

D’autre part, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [Y] les frais non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner in solidum Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES à une indemnité en sa faveur au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, l’ancienneté des faits justifie que l’exécution provisoire soit ordonnée.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, après en avoir délibéré, statuant par décision mise à disposition au Greffe

Ecarte la demande de sursis à statuer en l’attente d’une créance de la CPAM incluant les dépenses liées à la maladie de Parkinson ;

Fixe le préjudice subi par Monsieur [Y], suite à l’accident dont il a été victime le 23/08/2011 à la somme totale de 198 860.49 € suivant le détail suivant :


Evaluation du préjudice
Créance
CPAM
Créance
victime
PREJUDICES DEFINITIFS
et ECHUS AU 1/07/2024
-Dépenses de soin et FLA
6 322,25 €
289,42 €
6 032,83 €
- ATP assistance tiers personne
68 471,43 €

68 471,43 €
-PGP perte de gains professionnels
10 564,16 €
10 564,16 €
0,00 €
- IP incidence professionnelle
30 000,00 €

30 000,00 €
- DFT déficit fonctionnel temporaire partiel (incluant le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel)
36 502,65 €

36 502,65 €
- SE souffrances endurées
16 000,00 €

16 000,00 €
- PE Préjudice esthétique (provision)
5 000,00 €

5 000,00 €
-Préjudice de pathologie évolutive
16 000,00 €

16 000,00 €
PREJUDICES A ECHOIR
- ATP (provision)

Rente trimestrielle 2737,50€
- DFT déficit fonctionnel temporaire partiel (provision)
10 000,00 €

10 000,00 €

- TOTAL
198 860,49 €
10 853,58 €
188 006,91 €
Provision

59 000,00 €
TOTAL aprés provision

129 006,91 €

Condamne in solidum Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES à payer à Monsieur [Y] :
- la somme de 119 006,91€ au titre de ses préjudices définitifs et échus au 1/07/2024, après déduction des provisions préalablement versées et de la créance des tiers payeurs,
- 10 000 € à titre de provision à valoir sur son déficit fonctionnel temporaire postérieur au 1/07/2024
- une rente trimestrielle de 2 737,50 € à titre de provision à valoir sur ses frais d’assistance tierce personne à compter du 1/07/2024, payable au début de chaque trimestre avant le 30 du 1er mois du trimestre ;

Condamne in solidum Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES à payer à Monsieur [Y] une somme représentant les intérêts au double du taux légal du 16/08/15 au 1/10/2015 sur la somme de 6 975,95 € en application des dispositions de l’article L211-13 du code des assurances ;

Condamne in solidum Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES à payer 6 000 € à Monsieur [Y] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Madame [U] [S] épouse [K] et la Société MAAF ASSURANCES aux dépens, qui comprendront ceux de l’instance ayant donné lieu à l’ordonnance de référé du 17/03/2014 et ses frais d’exécution ainsi que le coût de l’expertise judiciaire et dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l’avance sans avoir reçu provision en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision ;

Rejette les autres demandes des parties.

Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 6ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 15/06086
Date de la décision : 18/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-18;15.06086 ?
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