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09/07/2024 | FRANCE | N°22/09548

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7ème chambre civile, 09 juillet 2024, 22/09548


N° RG 22/09548 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 09 Juillet 2024
50G

N° RG 22/09548
N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

Minute n° 2024/



AFFAIRE :

S.A.S. FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE,
S.A.S. GAMB,
S.C.P. CBF ASSOCIÉS (Intervenant volontaire),
S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES Intervenant Volontaire,
S.E.L.A.R.L. FIRMA Intervenant volontaire,
S.E.L.A.R.L. EKIP Intervenant volontaire

C/

S.A.S. GAMBE

TTA REVIVAL 8 (aujourd’hui dénommée SAS GAMBETTA 26),
S.A.S. DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES





Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Valérie MONP...

N° RG 22/09548 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 09 Juillet 2024
50G

N° RG 22/09548
N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

Minute n° 2024/

AFFAIRE :

S.A.S. FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE,
S.A.S. GAMB,
S.C.P. CBF ASSOCIÉS (Intervenant volontaire),
S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES Intervenant Volontaire,
S.E.L.A.R.L. FIRMA Intervenant volontaire,
S.E.L.A.R.L. EKIP Intervenant volontaire

C/

S.A.S. GAMBETTA REVIVAL 8 (aujourd’hui dénommée SAS GAMBETTA 26),
S.A.S. DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Valérie MONPLAISIR
Me Eléonore TROUVE

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats et du délibéré :
Madame Anne MURE, Vice-Présidente,
Madame Alice VERGNE, Vice-Présidente,
Madame Sandrine PINAULT, Juge

Lors des débats :
Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier
Lord du prononcé :
Madame Elodie GUILLIEU, Adjoint administratif faisant fonction de greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 09 Avril 2024,
Délibéré au 18 Juin 2024 et prorogé au 09 Juillet 2024.

JUGEMENT :

Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe

DEMANDERESSES

S.A.S. FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE
[Adresse 4]
[Localité 16]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

S.A.S. GAMB
[Adresse 3]
[Localité 9]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

S.C.P. CBF & ASSOCIÉS (siège social : [Adresse 2]), représentée par Me [R] [C], en sa qualité d’administrateur judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 15 Février 2023 (défendeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 11]
[Localité 16]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES, représentée par Me [I] [B], en sa qualité d’administrateur judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 15 Février 2023 (défendeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 15]
[Localité 14]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

S.E.L.A.R.L. FIRMA en sa qualité de mandataire judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 15 Février 2023 (défendeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 10]
[Localité 16]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

S.E.L.A.R.L. EKIP’ en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 15 Février 2023 (défendeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 5]
[Localité 16]

représentée par Me Eléonore TROUVE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me Mickael BENMUSSA de la SELARL MICKAEL BENMUSSA, avocat au barreau de PARIS et de LYON, avocat plaidant

DEFENDERESSES

S.A.S. GAMBETTA REVIVAL 8 aujourd’hui dénommée SAS GAMBETTA 26 (demandeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 6]
[Localité 8]

représentée par Me Valérie MONPLAISIR, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me François VITERBO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

S.A.S. DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES (demandeurs au RG 23/04321, jonction du 22/05/2023)
[Adresse 6]
[Localité 8]

représentée par Me Valérie MONPLAISIR, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant et Me François VITERBO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
****************************

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 23 juillet 2018, la SCI AG2R PATRIMOINE s’est unilatéralement engagée à vendre à la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE (ci-après, FIB) un immeuble situé à [Localité 16], au [Adresse 7] et [Adresse 1], cadastré section KD n° [Cadastre 12] et [Cadastre 13], au prix de 15 000 000 euros, pour une durée expirant le 30 novembre 2018, avec faculté de substitution au profit du bénéficiaire.
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Un acte authentique de vente est intervenu le 30 septembre 2021 au prix de 13 600 000 euros entre la SAS AGLM IMMO, venant aux droits de la venderesse, et, après acte de substitution du même jour, la SAS GAMBETTA REVIVAL 8, laquelle est détenue par la SAS DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES.

C’est dans ce contexte qu’a également été régularisée le 1er octobre 2021 une promesse de cession de l’intégralité des titres de la société GAMBETTA REVIVAL 8 détenus par la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES au profit de la société FIB, la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES promettant de céder les titres de la société GAMBETTA REVIVAL 8 à première réquisition de la société FIB. Cette promesse a été consentie pour une durée d’une année commençant à courir le 30 septembre 2021 pour se terminer le 29 septembre 2022, le bénéficiaire devant lever l’option au plus tard le 15 septembre 2022 à minuit.

Le 16 septembre 2022, la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES indiquait à la société FIB que la promesse était caduque, faute de levée d’option conforme à la promesse.

Par acte du 17 novembre 2022, la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE et la SAS GAMB, se présentant comme acquéreur du bien immobilier, bénéficiaire des échanges intervenus entre la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et la société FIB valant vente parfaite à son profit, ont fait assigner la SAS GAMBETTA REVIVAL 8 et la SAS DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX aux fins principalement de régularisation de l’acte authentique de vente au profit de la société GAMB et d’indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 15 février 2023, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’égard de la société FIB et ont été désignés, en qualité d’administrateurs judiciaires, la SCP CBF & ASSOCIES représentée par Maître [R] [C] et la SELARL AJASSOCIES représentée par Maître [I] [B] et, en qualité de mandataires judiciaires, la SELARL FIRMA et la SELARL EKIP’.

Suivant acte du 8 avril 2023, les défenderesses ont assigné en intervention forcée les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires de la société FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE.

La proposition de médiation présentée par le juge de la mise en état a été refusée par les parties.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 février 2024, la société FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE, la société GAMB ainsi que la SCP CBF & ASSOCIES, la SELARL AJASSOCIES, la SELARL FIRMA et la SELARL EKIP, chacune ès qualités, demandent au tribunal de :
- recevoir les sociétés SCP CBF & ASSOCIES, SELARL AJASSOCIES, SELARL FIRMA et SELARL EKIP en leur intervention volontaire accessoire,
- à titre principal,
- condamner la société GAMBETTA REVIVAL 8 à se présenter devant notaire pour signer l’acte authentique de vente avec la société GAMB portant sur un immeuble élevé sur un niveau de sous-sol, un rez de chaussée et quatre étages cadastré Section KD n°[Cadastre 12] [Adresse 7] d’une surface de 00 ha 09 a 35 ca et Section KD n°[Cadastre 13] [Adresse 1] d’une surface de 00 ha 00 a 80 ca au prix de 15 136 000 euros, situé au [Adresse 7] et [Adresse 1] à [Localité 16] (33) sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et dire qu’à défaut, le jugement à intervenir vaudra vente et pourra être publié au service de la publicité foncière du lieu de situation de l’immeuble pour assurer l’opposabilité de la vente aux tiers ;
- condamner solidairement les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA REVIVAL 8 au paiement de la somme de 1 500 000 euros, aux demanderesses, en réparation du préjudice subi par les sociétés FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE et GAMB résultant de l’inexécution des accords intervenus ;
- à titre subsidiaire,
- faire interdiction à la société GAMBETTA REVIVAL 8 de bénéficier de la plus-value sur revente de l’immeuble élevé sur un niveau de sous-sol, un rez de chaussée et quatre étages cadastré Section KD n°[Cadastre 12] [Adresse 7] d’une surface de 00 ha 09 a 35 ca et Section KD n°[Cadastre 13] [Adresse 1] d’une surface de 00 ha 00 a 80 ca au prix de 15 136 000 euros, situé au [Adresse 7] et [Adresse 1] à [Localité 16] (33) ;
- en conséquence, condamner la société GAMBETTA REVIVAL 8 à verser entre les mains de la société FIB une somme égale à la plus-value sur la revente de l’immeuble sus désigné en cas de cession à un tiers ;
- débouter les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA REVIVAL 8 de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;
- condamner solidairement les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA REVIVAL 8 au paiement de la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à chacune des demanderesses ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 5 décembre 2023, les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA 26, nouvelle dénomination de la société GAMBETTA REVIVAL 8, concluent ainsi :
- à titre principal, débouter les sociétés FINANCIÈRE IMMOBILIÈRE BORDELAISE et GAMB de l’ensemble de leurs demandes et ordonner la publication du jugement au Service de la Publicité Foncière de [Localité 16] 1, aux frais des sociétés FINANCIÈRE IMMOBILIÈRE BORDELAISE et GAMB ;
- subsidiairement, pour le cas où il aurait existé une vente à la date du 15 septembre 2022, prononcer la résolution de celle-ci pour défaut de paiement du prix ;
- plus subsidiairement encore, si le tribunal devait ordonner la comparution de la société GAMBETTA 26 par-devant notaire à l’effet de signer l’acte de vente, ordonner que la signature devra intervenir dans le délai d’un mois à compter du prononcé du jugement à intervenir et que, à peine de résolution de la vente, quinze jours avant la date de signature, le notaire instrumentaire devra disposer sur son compte ouvert en les livres de la Caisse des Dépôts et Consignations de la somme de 15 136 000 euros correspondant au prix net vendeur revenant à la société GAMBETTA 26 faute de quoi la vente sera caduque de plein droit aux torts exclusifs des acquéreurs ;
- reconventionnellement, condamner in solidum les sociétés GAMB et FINANCIERE IMMOBILIÈRE BORDELAISE au paiement de la somme de 5 400 000 euros au titre des préjudices résultant de l’impossibilité de vendre ou de louer le bien à raison de l’engagement de la présente procédure manifestement mal fondée, et fixer la créance de la société GAMBETTA 26 au passif de la FINANCIÈRE IMMOBILIÈRE BORDELAISE à la somme de 5 400 000 euros ;
- condamner les sociétés FINANCIÈRE IMMOBILIÈRE BORDELAISE et GAMB à verser la somme de 5 000 euros aux sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA 26 au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance, avec recouvrement direct par Maître Valérie MONPLAISIR, avocat au Barreau de Bordeaux, par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 mars 2024.

N° RG 22/09548 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

MOTIFS

La recevabilité de l’intervention volontaire à titre accessoire des administrateurs et mandataires judiciaires de la société FIB n’est pas contestée et sera prononcée, par application de l’article 330 du code de procédure civile.

Sur la demande principale

Les demanderesses prétendent à l’existence d’un accord sur la chose et le prix valant vente parfaite de l’immeuble situé [Adresse 7] et [Adresse 1] à [Localité 16] au profit de la société GAMB, par application de l’article 1583 du code civil. Elles font valoir à ce titre que l’opération immobilière a, dès l’origine, été destinée à permettre à la société FIB, qui ne disposait pas des fonds nécessaires à l’acquisition immobilière, d’y procéder par l’intermédiaire de son partenaire financier, la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES, prêteur, qu’à l’approche de la levée d’option prévue au 15 septembre 2022 pour la cession de titres consentie à cet effet, la société FIB a convenu avec la société GAMB qu’elle procède à l’acquisition de l’actif immobilier dans un objectif de revente à la société FIB, que les parties sont alors convenues au terme d’échanges de courriels du 15 septembre 2022 des conditions de la vente immobilière à intervenir au profit de ce tiers substitué, et que la levée d’option parallèlement opérée par la société FIB dans le cadre de la cession de parts sociales le 15 septembre 2022 n’avait qu’un objectif purement conservatoire. Elles sollicitent en conséquence la réalisation de la vente et la condamnation des défenderesses sur le fondement des articles 1231-1 et 1231-2 du code civil à réparer leurs préjudices, résultant de l’inexécution par les défenderesses de leurs obligations ainsi convenues, et liés au profit espéré sur l’opération envisagée, à savoir la réhabilitation de l’ensemble immobilier pour y ouvrir un grand magasin.

Les défenderesses répliquent qu’aucun accord n’est intervenu portant sur la vente de l’immeuble, seuls des pourparlers ayant été engagés entre les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et FIB et la levée d’option d’achat des actions par cette dernière y étant incompatible. Elles soutiennent qu’à tout le moins, aucun accord n’est intervenu sur une telle vente au profit de la société GAMB qui n’a été constituée que le 23 septembre 2022 et au profit de laquelle aucune stipulation de faculté de substitution ni cession de contrat n’est intervenue, alors que par ailleurs elle n’a jamais justifié avoir donné pouvoir de signer un acte de vente et avoir disposé des fonds nécessaires à cette vente. Elles concluent en conséquence au rejet des demandes adverses par application des articles 1114 et 1118 du code civil.

Aux termes de l’article 1114 du code civil, l'offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation. A défaut, il y a seulement invitation à entrer en négociation.

L’article 1118 du même code dispose que l’acceptation est la manifestation de volonté de son auteur d'être lié dans les termes de l'offre. Tant que l'acceptation n'est pas parvenue à l'offrant, elle peut être librement rétractée, pourvu que la rétractation parvienne à l'offrant avant l'acceptation. L'acceptation non conforme à l'offre est dépourvue d'effet, sauf à constituer une offre nouvelle.

Il résulte par ailleurs de l’article 1583 du code civil que la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé. Selon l'article 1589 du même code, la promesse de vente vaut vente lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. Ce consentement, qui n'est soumis à aucune condition de forme, doit également porter sur les éléments essentiels du contrat.
N° RG 22/09548 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XKPF

Il résulte en l’espèce des échanges de courriels intervenus du 26 août 2022 au 15 septembre 2022 entre les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et FIB, dont les demanderesses se prévalent, qu’un accord a pu intervenir entre elles quant au prix de l’acquisition, l’abandon par la société FIB de l’indemnité d’immobilisation versée à hauteur de 400 000 euros dans le cadre de la promesse de vente du 23 juillet 2018, et la prise en charge d’une part par la société FIB des frais d’assurance de l’immeuble litigieux, d’autre part par la société FIB et “l’acquéreur” de l’incidence d’une procédure contentieuse avec la société 3B, enfin par “l’acquéreur” des “contrats Stanley et TotalEnergies” et de la taxe foncière 2022, en vue d’une éventuelle vente de cet immeuble par la signature d’un acte authentique.

Toutefois, outre le fait qu’il n’est pas démontré que le nom de l’acquéreur aurait été communiqué à la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES, aucun accord n’est surtout justifié sur la condition, présentée comme essentielle et déterminante de son consentement par la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES dans ses courriels des 26 août 2022, 13 septembre 2022 et 15 septembre 2022, de la signature de l’acte au plus tard le 29 septembre 2022 avec paiement simultané du prix d’acquisition entre les mains du notaire. Aucune signature n’est ainsi intervenue à cette date et les sociétés FIB et GAMB, qui n’ont versé aucune somme à ce titre, ne démontrent par ailleurs nullement avoir justifié que cette dernière disposait effectivement des fonds nécessaires à l’acquisition.

La preuve n’est donc pas rapportée de l’existence d’un consentement qui serait intervenu dans les mêmes termes pour la vente du bien immobilier litigieux entre la société GAMBETTA 26, propriétaire du bien, et la société GAMB, créée le 23 septembre 2022 et immatriculée le 26 septembre suivant.

Par suite, la demande de réalisation de la vente sera rejetée.

Il n’est pas contesté qu’alors que la promesse de cession de parts sociales conclue le 1er octobre 2021 entre les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et FIB stipulait une levée d’option au plus tard le 15 septembre 2022 à minuit par lettre recommandée avec demande d’avis de réception accompagnée de la justification des modalités de financement, la société FIB n’y a procédé que par un courrier du 15 septembre 2022 non accompagné d’un tel justificatif, de sorte que la promesse est devenue caduque du seul fait de la société FIB.

Les pourparlers intervenus par la suite quant à l’acquisition du bien immobilier auprès de la société GAMBETTA 26 n’ayant échoué, là encore, que par l’absence d’engagement effectif et de justification par la société FIB, ou par l’acquéreur qu’elle entendait se voir substituer, d’un paiement du prix le jour de la signature de l’acte envisagé par les parties, la demande de dommages et intérêts sera rejetée.

Sur la demande subsidiaire

Les sociétés FIB et GAMB ne sauraient être fondées à demander subsidiairement le versement à la société FIB de l’éventuelle plus-value à opérer du fait de la revente du bien litigieux par la société GAMBETTA 26 à un tiers, pour enrichissement sans cause tel que prévu à l’article 1303 du code civil : aucun éventuel enrichissement injustifié au détriment d’autrui en cas d’une telle revente avec plus-value potentielle n’est caractérisé, en l’absence de tout droit acquis de la société FIB à acquérir ce bien, aucun engagement du propriétaire du bien à ce titre n’étant démontré.

Sur la demande reconventionnelle

Les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA 26 demandent, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, la réparation des préjudices qu’elles estiment subir du fait de l’engagement par les demanderesses d’une procédure qu’elles savaient vouée à l’échec en l’absence évidente de toute vente au 15 septembre 2022 avec une société inexistante à cette date et de tous fonds nécessaires à l’acquisition, et uniquement destinée à bloquer la revente de l’immeuble du fait de la publication de l’assignation, les dits préjudices étant liés à l’impossibilité de percevoir les fruits d’une telle revente pendant le temps de la procédure estimé à cinq ans, aux coûts afférents au portage de l’immeuble pendant cette période, à la perte de revenus résultant de l’impossibilité de donner le bien à bail commercial et à la perte du régime fiscal favorable de marchand de bien à l’issue du délai de cinq ans.

Les sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA 26 versant à ce titre pour toutes pièces les avis de taxe foncière pour 2022 et 2023 afférents à l’immeuble, sans justifier de la situation locative du bien et des éventuels revenus perçus à ce titre, ou de l’impossibilité de le donner à bail, et sans démontrer la perte effective du régime fiscal favorable allégué et ses éventuelles conséquences financières, elles seront déboutées de leur demande de dommages et intérêts par application des articles 1240 du code civil et 9 du code de procédure civile.

Sur les autres demandes

Les sociétés FIB et GAMB, parties perdantes, supporteront les dépens et paieront aux sociétés DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et GAMBETTA 26 une somme que l’équité commande de fixer à 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ces condamnations donneront lieu à fixation au passif de la procédure collective ouverte à l’égard de la société FIB.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

DECLARE l’intervention volontaire à titre accessoire de la SCP CBF & ASSOCIES représentée par Maître [R] [C] et la SELARL AJASSOCIES représentée par Maître [I] [B], chacune en qualité d’administrateur judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE et de la SELARL FIRMA et la SELARL EKIP’, chacune en qualité de mandataire judiciaire de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE, recevable ;

REJETTE l’intégralité des demandes de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE et de la SAS GAMB ;

FIXE au passif de la procédure collective de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE la créance de la SAS DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et la SAS GAMBETTA 26, ensemble, à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS GAMB à payer à la SAS DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et la SAS GAMBETTA 26, ensemble, la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SAS DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et la SAS GAMBETTA 26 pour le surplus ;

ORDONNE la publication du présent jugement au Service de la Publicité Foncière de [Localité 16] 1, aux frais de la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE et de la SAS GAMB ;

CONDAMNE la SAS FINANCIERE IMMOBILIERE BORDELAISE, sous la forme d’une fixation au passif de la procédure collective ouverte à son égard, et la SAS GAMB aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La présente décision est signée par Madame Anne MURE, Vice-Présidente, et Madame Elodie GUILLIEU, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 7ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/09548
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;22.09548 ?
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