6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 12 Juin 2024
60A
RG n° N° RG 22/07477
Minute n°
AFFAIRE :
[N] [D], [W] [D], [G] [V] épouse [D], [C] [D]
C/
GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES, CPAM DE LA GIRONDE, SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE
Grosse Délivrée
le :
à Avocats : la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES
la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES
Me Isabelle GUGENHEIM
Me Emilie HAAS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats en juge rapporteur :
Madame Louise LAGOUTTE, Vice-Président,
Madame Fanny CALES, juge,
Lors du délibéré et de la mise à disposition :
Madame Louise LAGOUTTE, Vice-Président,
Madame Marie-Aude DEL BOCA, Vice-présidente,
Madame Fanny CALES, juge,
greffier présente lors des débats et de la mise à disposition : Madame Elisabeth LAPORTE,
DEBATS:
A l’audience publique du 10 Avril 2024,
JUGEMENT:
Réputé contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe
DEMANDEURS
Monsieur [N] [D]
né le [Date naissance 1] 1991 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 7]
représenté par Maître Julie RAVAUT de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
Monsieur [W] [D]
né le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 13] (ALGERIE) (20000)
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 7]
représenté par Maître Julie RAVAUT de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
Madame [G] [V] épouse [D]
née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 7]
représentée par Maître Julie RAVAUT de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
Monsieur [C] [D]
né le [Date naissance 5] 1995 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 7]
représenté par Maître Julie RAVAUT de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSES
GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 3]
[Localité 10]
représentée par Maître Julie JULES de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocats au barreau de BORDEAUX
CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualités audit siège
[Adresse 14]
[Localité 6]
défaillante
SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 8]
[Localité 10]
représentée par Me Emilie HAAS, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Isabelle GUGENHEIM, avocat au barreau de PARIS
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 14 octobre 2017, Monsieur [N] [D] conducteur de son scooter a été victime d’un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Monsieur [K] [Z] assuré auprès de la S.A. GMF Assurances.
Il présentait les blessures suivantes :
- Un traumatisme crânien associant de multiples pétéchies évocatrices de lésions axonales diffuses, une hémorragie sous arachnoïdienne avec contingent hémorragique des citernes de la base,
- Un traumatisme facial associant des fractures des dents 24, 25 et 32,
- Une contusion pulmonaire gauche.
Il séjournait au sein du service de réanimation du CHU de BORDEAUX du 14 au 31 octobre 2017, date à laquelle il était transféré au sein du service de neurochirurgie de cet établissement.
A partir du 14 novembre 2017, Monsieur [D] était transféré dans le cadre de sa rééducation au Centre CHATEAU RAUZE spécialisé dans la prise en charge des personnes cérébrolésées.
Du 4 décembre 2017 jusqu’au 25 janvier 2018, Monsieur [D] se trouvait en hospitalisation de jour, 5 jours par semaine.
Monsieur [D] poursuivait, lors de son retour à domicile, la kinésithérapie dans un cadre libéral ainsi qu’un suivi régulier auprès d’une psychologue clinicienne.
Les suites étaient également marquées par des soins dentaires avec pose de prothèses dentaires, sur les dents 24, 25 et 32, 36, 35, 33 et 31, un suivi dermatologique en raison d’une cicatrice inesthétique présente au niveau de la paupière droite, outre une anosmie définitive (perte de l’odorat) avec phantosmie (hallucination olfactive).
Par ordonnance en date du 30 juillet 2018, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux statuant en référé a ordonné une mesure d'expertise médicale de Monsieur [N] [D] confiée au docteur [S] afin d’évaluer ses préjudices.
Le 02/09/2021, l'expert judiciaire a déposé son rapport d'expertise définitif. Il fixait notamment la consolidation au 07/02/2020 et un DFP de 23 % pour l’anosmie et les séquelles cognitives.
Faute de proposition d’indemnisation amiable, Monsieur [N] [D] et ses proches à savoir Monsieur [W] [D], Madame [G] [V] épouse [D] et Monsieur [C] [D], ont, par actes délivrés le 05/10/2022, fait assigner devant le présent tribunal la S.A. GMF Assurances pour voir indemniser leur préjudice ainsi que, en qualité de tiers payeurs, la CPAM de la Gironde et la mutualité SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE.
Par une ordonnance du 22 mars 2023, le Juge de la mise en état a condamné la GMF à verser à Monsieur [D] une provision de 30 000 € outre la somme de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 10 avril 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour, les parties en ayant été informées selon les modalités de l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par voie électronique le 16/10/2023,les consorts [D] demandent au tribunal de :
- CONDAMNER la compagnie GMF à indemniser les préjudices de Monsieur [N] [D]
de la manière suivante :
Postes Montant Créance CPAM Créance Mutuelle créance victime
DSA 39 014, 46 € 37 516, 44 € - 1 498, 02 €
Frais divers 15 494, 23 € 12 082, 49 € - 3 411, 74 €
TP temporaire 2 560,00 € -- 2 560,00 €
PGPA11 032,00 € 11 000, 32 €- 0,00 €
DSF 2 382, 66 € 2 382, 66 € -521,00 €
IP 150 000,00 € 127 642,48 € - 22 357, 52 €
DFT 8 557, 50 € -- 8 557, 50 €
SE20 000,00 €--20 000 €
PET 1 800,00 € -- 1 800 €
DFP72 335,00 €--72 335 €
PEP 2 000,00 €-- 2 000 €
PA25 000,00 €--25 000 €
Préj 15 000,00 € --15 000 €
d’établissement
TOTAL
SAUF MEMOIRE
368 107, 93 € 193 588, 15 € MEMOIRE 175 040, 78 €
- CONDAMNER la compagnie GMF au paiement des intérêts de plein droit au double du taux d’intérêt légal à compter du 02.02.2022 jusqu’à la date de la décision à intervenir,
- ORDONNER la capitalisation desdits intérêts en vertu de l’article 1343-2 du Code Civil,
- CONDAMNER la compagnie GMF à indemniser les préjudices de Monsieur [G] [D],
en sa qualité de victime par ricochet des blessures subies par son fils, de la façon suivante: - Préjudice d’affection : 10 000 €
- Troubles dans les conditions d’existence : 6 000 €
- CONDAMNER la compagnie GMF à indemniser les préjudices de Monsieur [W] [D], en sa qualité de victime par ricochet des blessures subies par son fils, de la façon suivante :
- Préjudice d’affection : 10 000 €
- Troubles dans les conditions d’existence : 6 000 €
- Frais divers : 838, 98 €
- CONDAMNER la compagnie GMF à indemniser les préjudices de Monsieur [C] [D], agissant en son nom personnel en sa qualité de victime par ricochet des blessures subies par son frère aîné, la somme de 8 000 € au titre de son préjudice d'affection ;
- CONDAMNER la GMF à verser à Monsieur [N] [D] la somme de 3500 € au titre de l’article 700 CPC outre la somme de 800 € pour chaque victime par ricochet ;
- CONDAMNER la GMF aux entiers dépens.
- DIRE n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire qui est de droit.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 31/05/2023, la compagnie SWISSLIFE demande au tribunal, au visa de la loi du 05/07/1985 et subsidiairement de l’article L 121-12 du code des assurances de :
- la déclarer recevable et bien fondée à exercer à l’encontre de la GMF, le recours subrogatoire dont elle dispose au titre des prestations versées dans les suites de l’accident dont a été victime Monsieur [N] [D] le 14 octobre 2017,
- Condamner la GMF à lui payer les sommes suivantes, sous réserve des prestations non connues à ce jour et de celles qui pourraient être ultérieurement versées :
- 17.073,11 € en remboursement des frais d’hospitalisation, appareillage et frais médicaux, ladite somme d’imputant sur le poste des dépenses de santé actuelles,
- 10,00 €, en remboursement des frais de transport, ladite somme s’imputant sur le poste frais divers,
- Avec intérêts au taux légal à compter de la signification des présentes conclusions,
-Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du Code Civil,
- Réserver les droits de la Société SWISSLIFE PREVOYANCE et SANTE au titre des prestations versées non connues à ce jour et celles pouvant être versées ultérieurement,
- Condamner la GMF à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
- dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;
- condamner la GMF aux entiers dépens.
Au terme des conclusions responsives notifiées par voie électronique le 12/02/2024 , la S.A. GMF Assurances demande au tribunal de :
- Fixer le préjudice de Monsieur [N] [D] dans les suites de l’accident du 14 octobre 2017, et payable en capital, comme suit :
Préjudice Montant Dû à la victime Créance CPAM
DSA 52 686,19 € 123,50 € 52 562,69 €
FD hors TP 2 886,74 € 2 886,74€ -
ATP temp 1 768,00 € 1 768,00 € -
PGPA 11 000,32 € - 11 000,32 €
DSF 2 382,00 € Débouté 2 382,00 €
IP 50 000,00 € 0 € 5 000,00 €
(127 642,48 € Rente AT)
DFT 7 131,25 € 7 131,25 € -
SE 16 000,00 € 16 000,00 €-
PET 1 800,00 € 1 800,00 €-
DFP 72 335,00 € 0 € 72 335,00 €
(Solde rente AT 77642,48 €)
PEP 2 000,00 € 2 000,00 € -
PA 10 000,00 € 10 000,00 € -
PE débouté --
TOTAL 229 989,50 € 41 709,49 € 188 280,01 €
- Déduire de l’indemnité revenant à Monsieur [N] [D], les provisions versées à hauteur de 10 000 € ;
- Débouter Monsieur [N] [D] du surplus de ses demandes ;
- Fixer à la somme de 3.000 € l’indemnité revenant à Monsieur [W] [D] et [G] [V], parents, au titre du préjudice d’affection et 1.000 € celle revenant à Monsieur [C] [D], frère de Monsieur [N] [D] et les débouter du surplus de leurs demandes ;
- Fixer le préjudice de Monsieur [W] [D] au titre des frais de déplacement à la somme de 838,98 € ;
- Débouter Monsieur [W] [D] et Madame [G] [V] du surplus de leur demande et notamment au titre des troubles dans les conditions d’existence ;
- Débouter Monsieur [N] [D] de sa demande des intérêts au double taux ;
- Et subsidiairement, dire que les intérêts double taux portent sur la somme de 229.989,50 euros pour la période du 02 février 2022 à la date de notification des conclusions le 21.02.2023;
- Dire que la capitalisation des intérêts ne courra qu’à compter du jugement à intervenir;
- Limiter dans de plus justes proportions l’indemnité sollicitée au titre de l’article 700 du CPC;
- Statuer ce que de droit quant aux dépens ;
- Limiter le bénéfice de l’exécution provisoire au montant de l’offre de la GMF.
Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.
La CPAM de la Gironde n’a pas constitué avocat. Il sera statué par jugement réputé contradictoire.
MOTIFS DE LA DECISION
Il résulte des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur l’implication du véhicule assuré par La S.A. GMF Assurances et le droit à indemnisation de Monsieur [N] [D]
Aux termes de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985, “Les dispositions du présent chapitre s’appliquent, même lorsqu’elles sont transportées en vertu d’un contrat, aux victimes d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui lui sont propres”. Les articles 2 à 4 de la loi du 5 juillet 1985 disposent notamment que lorsque plusieurs véhicules terrestres à moteur sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l’indemnisation des dommages qu’il a subis, directement ou par ricochet, sauf le conducteur qui a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice, une telle faute ayant pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation de ses dommages.
En l’espèce, la S.A. GMF Assurances ne conteste pas le droit à indemnisation entier de Monsieur [N] [D] et être tenue à cette indemnisation. Il convient en conséquence de la condamner à indemniser son entier préjudice.
Sur la liquidation du préjudice de Monsieur [N] [D]
Le rapport du docteur [S] indique que Monsieur [N] [D] né le [Date naissance 2]/2021, exerçant la profession d’ éducateur sportif en CDI au moment des faits, a présenté suite aux faits :
- Un traumatisme crânien associant de multiples pétéchies évocatrices de lésions axonales diffuses, une hémorragie sous arachnoïdienne avec contingent hémorragique des citernes de la base,
- Un traumatisme facial associant des fractures des dents 24, 25 et 32,
- Une contusion pulmonaire gauche.
Après consolidation fixée au 07/02/2020, l’expert retient un déficit fonctionnel permanent de 23 % en raison de l’anosmie et les séquelles cognitives.
Au vu de ce rapport, le préjudice corporel de Monsieur [N] [D] sera évalué ainsi qu’il suit, étant observé qu’en application de l’article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge.
I - Préjudices patrimoniaux :
A - Préjudices patrimoniaux temporaires :
Dépenses de santé actuelles (DSA) :
Ces dépenses correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation pris en charge par les organismes sociaux ou restés à la charge effective de la victime.
Il s’évince du relevé de débours de la CPAM que cette dernière a exposé entre le 14/10/2017 et le 05/07/2019 pour le compte de son assuré social Monsieur [N] [D] un total de 50 342,69 € (frais hospitaliers, frais médicaux et pharmaceutiques) qu'il y a lieu de retenir.
Monsieur [N] [D] fait état des dépenses demeurées à sa charge qu'il convient de retenir à hauteur de :
- 123,50 € de franchise (mentionnées sur le décompte de la Cpam )
- 250 € au titre des consultations auprès de la psychologue clinicienne,
- 30 € au titre de la consultation ostéopathe
- 120 € au titre de la consultation de médecin chinoise (acupuncture)
- 913,71 € au titre des frais dentaires,
- 60,81 € au titre de frais de pharmacie.
Total : 1 498,02 €.
La GMF ne conteste pas les frais suivants restés à charge :
- 123,50 € de franchise (mentionnées sur le décompte de la Cpam)
- 30 € au titre de la consultation ostéopathe
- 60,81 € au titre de frais de pharmacie.
- 728,05 € au titre des frais dentaire.
Elle relève l'absence de prescription médicale s'agissant des séances de médecine traditionnelle chinoise et la prise en charge partielle des frais dentaires par la mutuelle.
Néanmois, la part restant à charge sur la facture de soins dentaires du 13/07/2018, s'élève à 913,71 € comme sollicité par Monsieur [D]. De plus, les soins d'acupuncture réalisés le 29/08 et le 13/09/2019 peuvent être assimilés à des frais para-médicaux. Il conviendra donc de retenir ces frais.
Enfin, la mutuelle SWISS LIFE justifie de sa créance à hauteur de 17 083,11 €. Il apparait que la ligne relative aux frais dentaires est en date du 25/01/2022 soit après consolidation. Par conséquent, il convient de retenir la créance au titre des dépenses de santé actuelles à hauteur de 16 555,21 € (en ce compris la créance de 10 € au titre des frais de transport).
Dès lors, ce poste de préjudice sera fixé à la somme totale de 68 395,92 €.
2 - Frais divers (F.D.) :
Honoraires du médecin conseil.
Les honoraires du médecin conseil de la victime sont une conséquence de l’accident. La victime a droit au cours de l’expertise à l’assistance d’un médecin dont les honoraires doivent être intégralement remboursés sur production de la note d’honoraires, sauf abus.
Au vu des factures produites, et celles-ci incluant les frais de consultation préparatoire à l’expertise, ce poste de préjudice sera réparé à hauteur de la somme de 2859 € .
Autres frais,
En l’état, il convient de constater l’accord des parties s’agissant de l’octroi des sommes suivantes :
- Frais de restauration durant l’hospitalisation : 50,94 €
- Frais de reproduction du dossier médical : 53,20 €
- Frais d’évaluation à la conduite : 65,00 €
- Frais de déplacement : 233,60 €
Frais vestimentaires
Monsieur [D] sollicite l’octroi d’une somme forfaitaire à ce titre de 150 € au motif que ses effets (vêtements, casque) ont été endommagés lors de l’accident.
Il ne verse cependant aucune facture permettant d’apprécier la valeur des effets dégradés.
Par conséquent, la demande sera rejetée.
Assistance temporaire d’une tierce personne pour les besoins de la vie courante.
Il s’agit du préjudice lié à la nécessité, pour la victime, du fait de son handicap, d’être assistée par une tierce personne, spécialisée (infirmière, kinésithérapeute...) ou non s’agissant notamment du ménage, des actes de la vie courante, d’une incitation ou simple surveillance nocturne...
Il est constant que ces frais sont fixés en fonction des besoins de la victime et du rapport d’expertise et que l’indemnisation de ce poste de préjudice n’est pas subordonnée à la production de justificatifs et n’est pas réduite en cas d’assistance bénévole par un membre de la famille. Il convient en outre de rappeler que la tierce personne s’entend de l’aide pour tous les actes essentiels de la vie courante.
En l’espèce, le médecin expert a retenu un besoin en tierce personne spécialisée pour la période du 05/12/2017 au 25/01/2018 à raison de 2h par jour pour aide à la stimulation cognitive et adaptation à la reprise d’une vie ordinaire.
Ce besoin n’est pas contesté par la GMF.
Monsieur [D] sollicite par ailleurs de voir fixer une besoin de 5 heures par semaine au titre de l’aide administrative pour la période du 26/01/2018 au 28/02/2018 (un mois à compter de son retour au domicile , période de DFTP à 50 %). Ce besoin n’a pas été identifié par le médecin expert et Monsieur [D] ne justifie pas en quoi il était “dépendant de son entourage” ou de la réalité de cette “aide admnistrative” qui aurait été apportée.
Par ailleurs, le médecin expert ayant retenu une aide spécialisée, il sera retenu un taux horaire de 20 €, soit pour la période considérée, la somme totale de 2 080 €.
Ce poste de préjudice sera réparé à hauteur de la somme de 2 080 €.
Perte de gains professionnels actuels (P.G.P.A.) :
Elles concernent le préjudice économique de la victime imputable au fait dommageable, pendant la durée de son incapacité temporaire.
L’expert retient un arrêt de travail imputable à l’accident entre le 14 octobre 2017 et le 31 jabnvier 2018.
Il ressort de la notification des débours définitifs versée aux débats que la CPAM a engagé une somme de 11 000, 32 € au titre indemnités journalières qu’elle a versées à son assuré social.
Monsieur [D] indique que sa perte de salaire le temps de son arrêt de travail a été intégralement compensée par les indemnitées journalières et ne réclame pas d’indemnités pour ce poste.
Ce poste de préjudice sera en conséquence réparé à la somme globale de 11 000,32 €, poste intégralement absorbé par la créance de la CPAM.
B - Les préjudices patrimoniaux permanents :
Dépenses de santé futures (DSF) :
L’expert retient la réalisation de soins dentaires postérieurement à la consolidation.
La créance de la CPAM à ce titre s’élève 2 382,66 €. Celle-ci n’étant pas contestée par les parties, il convient de retenir cette créance.
Monsieur [D] produit par ailleurs un devis de soins bucco-dentaires du 25/01/2022 fixant un montant restant à charge de 521 € après déduction de la part de remboursement de l’assurance maladie. La GMF conteste la part restée à charge de Monsieur [D], faisant valoir la créance de la société SWISSLIFE.
La créance de la société SWISSLIFE établie le 20/12/2022 porte mention de la somme de 527,90 € au titre des frais dentaires du 25/01/2022.
Par conséquent, il convient de retenir la créance de la société SWISSLIFE à ce titre à hauteur de 527,90 €.
Monsieur [D] ne démontrant cependant pas avoir conservé des frais à sa charge à ce titre, il sera débouté de sa demande.
Ainsi, ce poste de préjudice sera fixé à la somme totale de 2 382,66 €.
Incidence professionnelle (I.P)
Elle correspond aux séquelles qui limitent les possibilités professionnelles ou rendent l’activité professionnelle antérieure plus fatiguante ou pénible traduisant une dévalorisation sur le marché du travail.
En l’espèce, Monsieur [D] exerçait avant l’accident, la profession d’éducateur sportif dans une salle de sport en CDI. Il a repris cette activité à temps complet.
L'expert a retenu que les séquelles imputables à savoir l'anosmie, sont susceptibles de gêner Monsieur [D] dans la pratique en salle de sport compte tenu de la non-reconnaissance des odeurs corporelles ; que les troubles de la coordinations sont susceptibles de le gêner dans la réalisation des chorégraphie et leur enseignement ; et que la fatigabilité cognitive est susceptible de le gêner sur un temps de travail ordinaire.
Monsieur [D] fait valoir à ce titre que ses horaires de travail ont été aménagées pour tenir compte de sa fatigabilité.
En l'état, il n'est pas contesté ni contestable que les séquellles subies par Monsieur [D] aggrave la pénibilté dans l'exercice de son travail, et limitent ses espoirs d'évolution de carrière, ce dernier n'ayant que 29 ans au moment de la consolidation.
Il convient en conséquence d'allouer à Monsieur [N] [D] la somme de 150 000 € au titre de l'incidence professionnelle.
Par ailleurs, il ressort de la créance de la CPAM qu’il a perçu une rente AT de 127 642,48 euros. Cette somme sera imputée sur le poste Incidence professionnelle.
II - Préjudices extra-patrimoniaux :
A - Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :
Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :
Ce poste de préjudice indemnise l'aspect non économique de l'incapacité temporaire, c'est-à-dire l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu'à sa consolidation. Ce préjudice correspond à la gêne dans tous les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant sa maladie traumatique et à la privation temporaire de sa qualité de vie.
Calculée sur la base de 27€ par jour pour une DFT à 100%, il doit être arrêté au regard des conclusions de l'expert à :
- 1 404 € correspondant au déficit fonctionnel temporaire total (100%) d’une durée totale de 52 jours selon le calcul commun des parties
- 1 053 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 75 % d’une durée totale de 52 jours selon le calcul commun des parties
- 459 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 50 % d’une durée totale de 34 jours selon le calcul commun des parties
- 4 785,75 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 25 % d’une durée totale de 709 jours selon le calcul commun des parties
soit un total de 7 701,75 €.
Souffrances endurées (SE) :
Elles sont caractérisées par les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité, des traitements subis.
L'expert les a évalué à 4/7 en raison notamment de :
- La longue période d’hospitalisation complète
- La pose d’une pression intra-crânienne
- L’hospitalisation de jour
- L’impact psychothérapique ayant justifié un suivi psychothérapique
- La gêne occasionnée dans la vie courante par l’importante fatigabilité, l’anosmie et l’agueusie
Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 20 000 €.
Préjudice esthétique temporaire ( P.E.T.)
L'expert a retenu une préjudice esthétique temporaire de 1.5/7 du 14/10/2017 au 01/02/2018 en raison de la cicatrice palpébrale droite empêchant l'occlusion palpébrale droite.
Vu l'accord de la GMF à ce titre, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 1 800 €.
B - Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :
Le déficit fonctionnel permanent (D.F.P.) :
Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Plus précisément, il s'agit du préjudice non économique lié à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours.
L'expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 23% pour les raisons ci avant rappelées.
Vu l’absence de contestation de la GMF, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 72 335 euros .
Préjudice esthétique permanent ( P.E.P.):
L'expert a retenu une préjudice esthétique permanent de 1/7 en raison des trois cicatrices que conserve Monsieur [D] de son accident, à savoir :
- Une cicatrice située à la face antérieure du genou gauche centimétrique et hyperchrome
- Une cicatrice au niveau du menton, cachée, par la barbe mais visible de 2 cm
- Une cicatrice palpébrale droite invisible au premier regard, filiforme de 2 cm
Dès lors, et vu l'absence d'opposition de la GMF à la demande, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 2 000 €.
Préjudice d’agrément ( P.A.) :
Il vise exclusivement à réparer le préjudice lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs.
L'expert retient que les séquelles imputables sont susceptibles de le gêner dans la pratique des activités sportives antérieures à savoir la pratique du football en salle compte-tenu du léchage pyramidal séquellaire et des troubles de la coordination. La boxe est définitivement contre-indiquée compte-tenu du traumatisme crânien.
Monsieur [D] verse d’ailleurs plusieurs attestations de proches justifiant de sa pratique sportive antérieure. Cette pratique sportive n’est pas contestée sur le principe par la GMF qui reconnait que Monsieur [D] était très sportif, celle-ci relevant néanmoins qu’hors les attestations de proches, il n’est pas justifié de la participation à des tournois ou compétition tel qu’avancé par le demandeur.
Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 20 000 €.
Préjudice d’établissement
Le préjudice d’établissement peut se définir comme un préjudice tellement important qu’il fait perdre l’espoir de réaliser tout projet personnel de vie, notamment fonder une famille, élever des enfants, en raison de la gravité du handicap.
En l’espèce, Monsieur [D] fait valoir que les séquelles neurologiques ont engendré des changements comportementaux et notamment une irritabilité, et une impulsivité, qui ont conduit à sa séparation conjugale quelques mois après l’accident.
Il sollicite à voir reconnaitre la perte de chance de poursuivre un projet de vie de couple normale en raison des séquelles subies, de nature à entraver une relation effective. Il sollicite également à voir reconnaitre que les suites de l’accident ont conduit à une majoration du risque de rupture de sa relation antérieure.
La GMF fait valoir le jeune âge de Monsieur [D] et que la nature des séquelles subies par celui-ci ne l’empêche ni de poursuivre une vie sociale et amoureuse ni de fonder une famille.
En l’état, il est constant que Monsieur [D] subit du fait de l’accident des séquelles cognitives. Il se plaignait essentiellement de troubles du comportement, d’une anosmie et d’une importante fatigabilité cognitive . L’examen clinique du médecin expert a confirmé une irritation pyramidale monoparétique sans conséquence fonctionnelle.
S’il apparait que sa relation amoureuse a pu être impactée par son accident, le suivi médical et les séquelles relatées, et que de la même façon, celles-ci peuvent être de nature à fragiliser ses éventuelles relations ultérieures, il n’est pas possible en l’état de caractériser la perte d’espoir de réaliser tout projet personnel de vie, notamment fonder une famille, élever des enfants, en raison de la gravité du handicap.
La demande à ce titre sera donc rejetée.
Sur la créance des tiers payeurs et la répartition des créances:
Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers et les recours subrogatoires des tiers payeurs s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel.
La créance des tiers payeurs au titre des prestations évoquées ci avant pour chaque poste de préjudice s’imputera conformément au tableau ci-après :
Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
Créance SWISSLIFE
PREJUDICES PATRIMONIAUX
temporaires
-DSA dépenses de santé actuelles
68 395,92 €
1 498,02 €
50 342,69 €
16 555,21 €
-FD frais divers
3 261,74 €
3 261,74 €
- ATP assistance tierce personne
2 080,00 €
2 080,00 €
-PGPA perte de gains actuels
11 000,32 €
0,00 €
11 000,32 €
permanents
- DSF dépenses de santé futures
2 382,66 €
0,00 €
2 382,66 €
527,90 €
- IP incidence professionnelle
150 000,00 €
22 357,52 €
127 642,48 €
PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX
temporaires
- DFTP déficit fonctionnel temporaire
7 701,75 €
7 701,75 €
- SE souffrances endurées
20 000,00 €
20 000,00 €
- PET préjudice esthétique temporaire
1 800,00 €
1 800,00 €
permanents
- DFP déficit fonctionnel permanent
72 335,00 €
72 335,00 €
- PE Préjudice esthétique permanent
2 000,00 €
2 000,00 €
- PA préjudice d'agrément
20 000,00 €
20 000,00 €
- préjudice d'établissement
0,00 €
0,00 €
- TOTAL
360 957,39 €
153 034, 03 €
191 368,15 €
17 083,11 €
Après déduction de la créance des tiers-payeurs et déduction des provisions fixée par l'ordonnance de référé (30 000 €), le solde dû à Monsieur [N] [D] et à la de la S.A. GMF Assurances, s’élève à la somme de 123 034,03 €.
La CPAM n'a formulé aucune demande, ce qui laisse présumer qu'elle a été ou sera désintéressée dans le cadre des dispositions du Protocole de 1983 ou de celui prévu à l’article 376-1 alinéa 6 du Code de la Sécurité Sociale modifié par la loi du 21 Décembre 2006.
Sur le doublement des intérêts au taux légal
Aux termes de l’article L 211-9 du code des assurances, Quelle que soit la nature du dommage, dans le cas où la responsabilité n'est pas contestée et où le dommage a été entièrement quantifié, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.
Une offre d'indemnité doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident. En cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu, à son conjoint. L'offre comprend alors tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable.
Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.
En tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique.
En l'espèce, Monsieur [N] [D] soutient d'une part que la GMF ne démontre pas avoir émis une offre indemnitaire dans les délais.
D'autre part, il fait valoir que l’offre adressée par la S.A. GMF Assurances le 06/08/2021 était incomplète car ne portant pas sur tous les éléments indemnisables du préjudice, ce qui s’assimile à un défaut d’offre.
La S.A. GMF Assurances soutient avoir réalisé une offre le 06/08/2021 soit avant expiration du délai, après dépôt du rapport du 14/04/2021. Elle fait valoit que son offre d’indemnisation était justifiée, au regard d'une part des postes établis par l'expertise et d'autre part de sa demande de justificatifs adressée à la victime pour lui permettre de chiffrer ses propositions.
En l'état, si la GMF produit la copie d'un courrier daté du 06/08/2021 adressé à Monsieur [D], elle ne justifie nullement que ce courrier a été effectivement été envoyé, ni de la réception de ce courrier. Dès lors, il convient de considérer qu'acune offre n'a été faite dans les délais, les premières conclusions ayant été notifiées le 21/02/2023.
Par ailleurs, au terme de l'article L 211-13 du code des assurances, lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L. 211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.
Dès lors, il convient de dire que
-la somme offerte par l'assureur ( 229 989,50 €) portera intérêts au double du taux légal à compter du 02/02/2022 et jusqu’à la date de notification de conclusions portant offre régulière soit le 21/02/2023.
Sur les demandes de SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE
C'est à bon droit que la mutuelle demande en application de l'article 29 de la loi du 05 juillet 1985, la condamnation de la S.A. GMF Assurances, tiers responsable à lui rembourser la somme de 17 083,11 € au titre des frais exposés pour son assurée social (cette somme incluant les frais de transport de 10 € sollicités), et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, cette somme s’imputant sur le poste des dépenses de santé actuelles et dépenses de santé futures.
Il n’y a pas lieu néanmoins à réserver les droits de la société SWISSLIFE PREVOYANCE au titre des prestations versées non connues à ce jour et celles pouvant être versées ultérieurement, tel que sollicité.
Sur la capitalisation des intérêts
Il sera fait droit à cette demande, dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Sur les demandes d’indemnisation formées par les victimes indirectes
Sur le préjudice d’affection des proches,
Le préjudice d’affection est défini comme le préjudice moral subi par certains proches, parents ou non, mais justifiant d’un lien affectif réel, au contact de la souffrance de la victime directe. Il convient d’inclure à ce titre le retentissement pathologique objectivé que la perception du handicap de la victime a pu entraîner chez certains proches.
En l’espèce, il n’est pas contesté que les parents et le frère de Monsieur [D] ont été lourdement affectés par la violence et la gravité du traumatisme initial, l’importance des soins, de la convalescence et des séquelles subis par leur fils et frère.
En conséquence, il convient d’attribuer à chacun la somme de 8 000 € au titre de leur préjudice d’affection.
Sur le préjudice d’accompagnement des parents,
Le préjudice relatif au trouble dans les conditions d’existence consiste à indemniser les troubles dans les conditions d’existence dont sont victimes les proches justifiant d’une communauté de vie effective et affective avec la victime directe pendant sa survie handicapée.
En l’espèce, les parents de Monsieur [D] font valoir le soutien et les visites de leur fils lors de son hospitalisation, ainsi que l’installation de ce dernier à leur domicile entre sa sortie d’hospitalisation et sa consolidation le temps de sa convalescence.
Si la GMF conclut au débouté de cette demande, il n’est demeure pas moins qu’il peut retenu une communauté de vie effective et affective entre les parents et la victime directe, bien que sur une période de temps limitée.
Par conséquent, il convient d’attribuer à chacun des parents la somme de 1500 € au titre du trouble dans les conditions d’existence.
Sur le préjudice matériel / frais de transport
Vu l’absence de contestation de cette demande, il convient d’y faire droit et d’accorder à Monsieur [W] [D] la somme de 838,98 € au titre des frais de transport domicile/lieu d’hospitalisation de son fils.
Sur les autres dispositions du jugement
Succombant à la procédure, la S.A. GMF Assurances sera condamnée aux dépens, dans lesquels seront inclus les frais antérieurs à l'engagement de l'instance relatifs à l’instance de référé expertise ayant préparé la présente instance.
D’autre part, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [N] [D] et de la société SWISSLIFE, les frais non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner la S.A. GMF Assurances à une indemnité en leur faveur au titre de l’article 700 du code de procédure civile de :
- 900 € pour la société SWISSLIFE
- 3 000 € pour Monsieur [D], 800 € pour Madame [G] [D], 800 € pour Monsieur [W] [D], 800 € pour Monsieur [C] [D].
Par ailleurs, l’ancienneté des faits justifie que l’exécution provisoire soit ordonnée.
Par ailleurs, rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit prévue par l’article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
DIT que le droit à indemnisation de Monsieur [N] [D] est entier ;
Fixe le préjudice subi par Monsieur [N] [D], suite à l’accident dont il a été victime le 14 octobre 2017 à la somme totale de 360 957, 39 € suivant le détail suivant :
Evaluation du préjudice
PREJUDICES PATRIMONIAUX
temporaires
-DSA dépenses de santé actuelles
68 395,92 €
-FD frais divers
3 261,74 €
- ATP assistance tierce personne
2 080,00 €
-PGPA perte de gains actuels
11 000,32 €
permanents
- DSF dépenses de santé futures
2 382,66 €
- IP incidence professionnelle
150 000,00 €
PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX
temporaires
- DFTP déficit fonctionnel temporaire
7 701,75 €
- SE souffrances endurées
20 000,00 €
- PET préjudice esthétique temporaire
1800,00 €
permanents
- DFP déficit fonctionnel permanent
72 335,00 €
- PE Préjudice esthétique permanent
2 000,00 €
- PA préjudice d'agrément
20 000,00 €
- préjudice d'établissement
0,00 €
- TOTAL
377 157,39 €
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à Monsieur [N] [D] la somme de 153 034, 03 € au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel, après déduction de la créance des tiers payeurs, et qui sera portée à la somme de 123 034,03 € sous réserve du versement effectif de l’indemnité provisionnelle de 30 000 € octroyée par l’ordonnance de référé ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à Monsieur [N] [D] une somme représentant les intérêts au double du taux légal sur la somme offerte par l’assureur dans son offre définitive, soit 229 989,50 €, pour la période entre le 02/02/2022 et le 21/02/2023 , en application des dispositions de l’article L211-13 du code des assurances ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à la société SWISSLIFE la somme de 17083,11 € au titre des prestations versées pour le compte de son assuré social, Monsieur [N] [D], et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
DIT qu’il sera fait application des dispositions de l’article 1343-2 du Code civil au profit de Monsieur [N] [D] et de la société SWISSLIFE ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à Madame [G] [V] [D] la somme de 8 000 € au titre de son préjudice d’affection et 1500 € au titre des troubles dans les conditions d’existence ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 8 000 € au titre de son préjudice d’affection, 1 500 € au titre des troubles dans les conditions d’existence et 838,98 € au titre des frais de déplacement ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer à Monsieur [C] [D] la somme de 8000 € au titre de son préjudice d’affection ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile :
- 3 000 € à Monsieur [N] [D],
- 900 € à la société SWISSLIFE
- 800 € pour Madame [G] [V] [D],
- 800 € pour Monsieur [W] [D],
- 800 € pour Monsieur [C] [D] ;
CONDAMNE la S.A. GMF Assurances aux dépens, qui comprendront ceux de l’instance ayant donné lieu à l’ordonnance de référé et ses frais d’exécution ainsi que le coût de l’expertise judiciaire ;
DIT n’y avoir lieu à écarter ou limiter l’exécution provisoire de droit de la présente décision
REJETTE les autres demandes des parties.
Le jugement a été signé par Fanny CALES, juge, pour Louise LAGOUTTE empêchée, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT