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03/06/2024 | FRANCE | N°23/00544

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6ème chambre civile, 03 juin 2024, 23/00544


6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 03 Juin 2024
58E

RG n° N° RG 23/00544

Minute n°





AFFAIRE :

[H] [D]
C/
Compagnie d’assurance LA MACIF






Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL
la SELARL BLAZY & ASSOCIES



COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
statuant en juge unique.
Madame

Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 08 Avril 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
en premier ressort
Par mise à ...

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 03 Juin 2024
58E

RG n° N° RG 23/00544

Minute n°

AFFAIRE :

[H] [D]
C/
Compagnie d’assurance LA MACIF

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL
la SELARL BLAZY & ASSOCIES

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 08 Avril 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDEUR

Monsieur [H] [D]
né le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]

représenté par Maître Christian BLAZY de la SELARL BLAZY & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSE

Compagnie d’assurance LA MACIF prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]

représentée par Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX et de Me Bertrand NERAUDAU, avocat au barreau de PARIS
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

M. [H] [D] a souscrit un contrat d’assurance automobile auprès de la compagnie d’assurance MACIF au titre d’un véhicule VOLKSWAGEN Golf immatriculé [Immatriculation 9] à effet du 8 juin 2019.

Le 15 novembre 2019, M. [H] [D] a prêté ce véhicule à son fils M. [S] [D]. Alors que le véhicule était poursuivi par les forces de l’ordre sur l’A10, il s’est encastré dans des installations publiques autoroutières.

Lors de la déclaration de sinistre, M. [H] [D] a déclaré que le véhicule était conduit par Mme [J] [P], amie de M. [S] [D].

Après expertise, le véhicule a été déclaré économiquement irréparable et la MACIF a transmis à M. [H] [D] une offre d’indemnisation à hauteur de 45.694 € correspondant à la valeur d’acquisition du véhicule après déduction d’une franchise d’un montant de 400 €. L’offre d’indemnisation a été acceptée par l’assuré et la MACIF lui a transmis un chèque bancaire qui a été retourné à la MACIF à la suite d’une erreur dans le nom du bénéficiaire.

Entretemps, la MACIF a été destinataire du rapport d’intervention de la police et, considérant que le conducteur du véhicule au moment de l’accident n’était pas Mme [J] [P] mais M. [S] [D] qui se trouvait sous l’empire d’un état alcoolique, elle a opposé à l’assuré une déchéance de garantie en raison des fausses déclarations portant sur l’identité du conducteur du véhicule au moment de l’accident.

Par courrier du 6 septembre 2021, la MACIF a informé son assuré de ce qu’elle n’interviendrait pas pour le règlement des dommages au motif qu’il était établi que le conducteur du véhicule était sous l’empire d’un état alcoolique.

Par courriers des 29 juin 2021, 22 septembre 2021 et 17 février 2022, le conseil de M. [H] [D] a mis en demeure la MACIF de procéder au règlement de la somme de 45.964 euros. La MACIF a maintenu son refus.

Par acte du 28 avril 2022, M. [H] [D] a fait assigner la MACIF devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux pour obtenir le paiement d’une provision d’un montant de 49.694 €. Par ordonnance du 31 octobre 2022, le juge des référés a débouté M. [H] [D] de sa demande de provision et l’a condamné à payer à la MACIF une indemnité de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte d’huissier délivré le 19 décembre 2022, M. [H] [D] a fait assigner la MACIF devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour la voir condamner au paiement de la somme de 45.694 euros.

Selon ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 octobre 2023, M. [H] [D] demande au tribunal de :
Vu l’article 1217 du code civil,
Vu les conditions générales du contrat d’assurance souscrit par Monsieur [D],
- déclarer Monsieur [H] [D] recevable et bien fondé en ses demandes,
- débouter la MACIF de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- condamner la MACIF à verser à Monsieur [H] [D] la somme de 45.694 € au titre de l’indemnisation de son véhicule conformément aux exigences contractuelles,
- condamner la MACIF à verser à Monsieur [H] [D] la somme de 10.000 € au titre de l’indemnisation des dommages et intérêts,
- condamner la MACIF à verser à Monsieur [H] [D] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En défense, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 avril 2023, la MACIF demande au tribunal de :
Vu les conditions générales applicables,
A TITRE PRINCIPAL :
- constater que Monsieur [S] [D] – fils de Monsieur [H] [D] – conduisait sous l’empire d’un état alcoolique lors de la survenance du sinistre du 15 novembre 2019 ;
- constater que la MACIF est bien fondée à opposer à Monsieur [H] [D] l’exclusion de garantie stipulée aux termes des conditions générales ;
- dire et juger qu’aucune indemnité n’est due à Monsieur [H] [D] par la MACIF au titre de l’accident de la circulation survenu le 15 novembre 2019 ;
- débouter Monsieur [H] [D] de l’ensemble de ses demandes ;
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- prononcer la déchéance de l’intégralité de la garantie au titre du sinistre du 15 novembre 2019;
- débouter Monsieur [H] [D] de l’ensemble de ses demandes ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
- condamner Monsieur [H] [D] à payer à la MACIF la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner Monsieur [H] [D] aux entiers dépens.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 janvier 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 8 avril 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour.

MOTIFS DE LA DECISION

Il est constant que M. [H] [D] a souscrit un contrat d’assurance automobile auprès de la MACIF avec effet au 8 juin 2019. Ce véhicule a été sinistré le 15 novembre 2019 et déclaré économiquement irréparable. Après avoir dans un premier temps proposé d’indemniser le sinistre à hauteur de 45.694 € et avoir adressé un chèque de ce montant à M. [H] [D], chèque qui lui a été retourné, la MACIF a contesté le droit à indemnisation de son assuré.

M. [H] [D] fonde sa demande en exécution du contrat d’assurance sur les dispositions de l’article 1217 du code civil selon lequel “la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’(a été imparfaitement, peut : (...) Poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation”. Il soutient que contrairement à ce que prétend la MACIF, son fils M. [S] [D] n’était pas le conducteur du véhicule au moment de l’accident puisqu’il avait cédé le volant à son amie Mme [J] [P], expliquant que s’il conduisait le véhicule au moment où les policiers avaient fait sommation de s’arrêter, il s’était arrêté au parking du restaurant Mac Donalds pour échanger sa place avec celle de Mme [J] [P] pour éviter d’être interpellé car il conduisait sous l’emprise d’un état alcoolique. Quelques centaines de mètres plus loin, Mme [J] [P] perdait le contrôle du véhicule qui percutait des installations publiques autoroutières. Il considère que dans son jugement, le tribunal correctionnel, qui a relaxé son fils de l’infraction de conduite à une vitesse excessive, a reconnu qu’il n’était pas le conducteur du véhicule au moment de l’accident. Enfin, il fait valoir que les policiers qui suivaient le véhicule l’ont perdu de vue au moment de l’accident de telle sorte qu’ils ne peuvent affirmer l’identité du conducteur du véhicule à ce moment là.

La MACIF soutient que M. [S] [D] était le conducteur du véhicule au moment de l’accident et qu’il se trouvait sous l’empire d’un état alcoolique. Elle considère dès lors que la clause d’exclusion de garantie mentionnée à l’article 2 des conditions générales du contrat doit trouver à s’appliquer. A titre subsidiaire, elle oppose à son assuré une déchéance de garantie au titre d’une fausse déclaration sur l’identité du conducteur de véhicule.

Selon l’article 2 des conditions générales du contrat d’assurance, la garantie “dommages au véhicule” n’est pas acquise pour les véhicules à quatre roues lorsqu’au moment du sinistre “le conducteur du véhicule se trouve sous l’empire d’un état alcoolique dont le seuil est fixé par l’article R.234-1 du code de la route (...)”.

Il est constant que s’agissant d’une clause d’exclusion de garantie, la charge de la preuve repose sur l’assureur qui doit rapporter la preuve que les conditions d’application de cette clause sont réunies. En l’espèce, il appartient à la MACIF de rapporter la preuve que le fils de l’assuré, M. [S] [D], était le conducteur du véhicule et qu’il conduisait sous l’empire d’un état alcoolique.

La MACIF produit pour justifier de ses prétentions les procès verbaux de l’enquête de police qui permettent d’établir dans quelles circonstances le véhicule assuré par la MACIF a été sinistré.

Il ressort du procès verbal d’infraction qu’une patrouille de police composée de M. [Y], M. [N] et M. [Z] de patrouille anti-criminalité remarque le 15 novembre 2019 à 3h45 un véhicule Golf monté par deux individus, à savoir un homme brun de forte corpulence en position de chauffeur et une jeune femme en position de passager avant. Le véhicule est aperçu par la patrouille au moment où il sort du Mac Donald des [Adresse 4] à [Localité 10] à très vive allure. Le véhicule franchit un feu rouge fixe et freine brusquement en plein carrefour faisant un tour complet. Les policiers décident alors de procéder au contrôle de ce véhicule en actionnant leurs avertisseurs sonores et lumineux. Le conducteur refuse le contrôle et prend la fuite. Selon ce procès verbal, la patrouille de police suit le véhicule de près, le véhicule prend la direction de l’A10 après une série de dépassements par la droite. Il est perdu de vue une quinzaine de seconde et retrouvé arrêté derrière le rail de sécurité à la sortie [Localité 7]. Les deux occupants du véhicule prennent la fuite et sont interpellés, M. [S] [D] étant décrit comme le chauffeur du véhicule et Mme [J] [P] comme le passager.

Dans leurs auditions, les trois policiers ont déclaré avoir vu le véhicule sortir du parking du Mac Donald et être conduit par un individu masculin de forte corpulence.

M. [S] [D] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour des faits de refus d’obtempérer, conduite sous l’empire d’un état alcoolique et conduite d’un véhicule à une vitesse excessive. Par jugement en date du 30 juin 2020, le tribunal l’a déclaré coupable des deux premiers chefs de prévention et l’a relaxé pour les faits de conduite d’un véhicule à une vitesse excessive. M. [H] [D] considère que par cette relaxe, le tribunal correctionnel a reconnu que son fils n’était pas le conducteur du véhicule. Il explique qu’il était bien le conducteur du véhicule au moment où les policiers lui ont fait sommation de s’arrêter, mais soutient qu’après avoir été sommé de s’arrêter, il a changé de place avec son amie dans le parking du Mac Donald et que c’est elle qui conduisait le véhicule au moment de l’accident.

Outre que M. [H] [D] ne fait aucune mention dans sa relation des faits de la course poursuite engagée avec la patrouille de police du parking du Mac Donald jusqu’à la sortie [Localité 7] de l’A10, course poursuite pendant laquelle le véhicule prétendument conduit par Mme [J] [P] aurait franchit un feu rouge, fait un tête-à-queue, effectué des dépassements par la droite frôlant la collision avec les autres usagers de la route, il convient de constater qu’en réalité, la patrouille de police n’a aperçu le véhicule qu’à la sortie du parking du Mac Donald. Il ressort clairement du procès verbal de police que les infractions au code de la route n’ont été commise par le conducteur du véhicule qu’après être sorti de ce parking et non avant comme le soutient M. [H] [D] et que les policiers n’ont donc fait sommation de s’arrêter qu’une fois ces infractions commises. Or, les trois policiers ont déclaré avoir clairement pu identifier l’individu de sexe masculin comme le conducteur du véhicule et la personne de sexe féminin comme le passager du véhicule. Si les policiers ont pu au cours de cette course poursuite perdre de vue le véhicule, ils l’ont néanmoins suivi de très près tout au long de cette poursuite et il n’existe aucun moment ni endroit entre la sortie du parking et l’accident du véhicule au cours duquel les occupants du véhicule auraient pu échanger leur place. Contrairement à ce que soutient le demandeur, la relaxe intervenue du chef de conduite du véhicule à une vitesse excessive ne signifie en rien que le tribunal a par là reconnu que M. [S] [D] n’était pas le conducteur du véhicule, alors que les éléments de l’enquête permettent au contraire d’identifier M. [S] [D] comme le conducteur du véhicule tout au long de la course poursuite. Enfin, il ne peut qu’être constaté que M. [S] [D] a été déclaré coupable de refus d’obtempérer, refus d’obtempérer qui au regard de l’enquête a commencé à la sortie du parking du Mac Donald jusqu’à l’accident survenu sur l’autoroute.

La MACIF rapporte en conséquence la preuve que M. [S] [D] était le conducteur du véhicule au moment de l’accident. Il a été condamné définitivement par le tribunal correctionnel de Bordeaux pour des faits de conduite d’un véhicule automobile sous l’empire d’un état alcoolique. Les conditions d’application de la clause d’exclusion visée à l’article 2 des conditions générales du contrat sont donc réunies. M. [H] [D] sera en conséquence débouté de l’ensemble de ses demandes.

Succombant à la procédure, M. [H] [D] sera condamné aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la MACIF les frais non compris dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Constate que la MACIF est bien fondée à opposer à son assuré M. [H] [D] une clause d’exclusion de garantie ;

Déboute M. [H] [D] de l’intégralité de ses demandes ;

Condamne M. [H] [D] aux dépens ;

Condamne M. [H] [D] à payer à la MACIF une indemnité de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ainsi fait et jugé les an, mois et jour susdits.

Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 6ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/00544
Date de la décision : 03/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-03;23.00544 ?
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