La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2024 | FRANCE | N°22/04066

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6ème chambre civile, 16 mai 2024, 22/04066


6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 16 Mai 2024
64B

RG n° N° RG 22/04066

Minute n°





AFFAIRE :

[H] [D]
C/
[T] [F]
[E] [C]
Caisse CPAM de la Gironde
INTER VOLONT
[V] [C]





Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
Me Cindy BOCQUET
Me Myriam SEBBAN



COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Fanny CALES, jug

e,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 14 Mars 2024

JUGEMENT :

Contradictoire...

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 16 Mai 2024
64B

RG n° N° RG 22/04066

Minute n°

AFFAIRE :

[H] [D]
C/
[T] [F]
[E] [C]
Caisse CPAM de la Gironde
INTER VOLONT
[V] [C]

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
Me Cindy BOCQUET
Me Myriam SEBBAN

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Fanny CALES, juge,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 14 Mars 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDERESSE

Madame [H] [D]
née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 10]

représentée par Me Myriam SEBBAN, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEURS

Madame [T] [F]
née le [Date naissance 3] 1976 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 10]

représentée par Me Cindy BOCQUET, avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur [E] [C]
né le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 10]
représenté par Me Cindy BOCQUET, avocat au barreau de BORDEAUX

CPAM de la Gironde prise en la pesonne de son directeur en exercice
[Adresse 12]
[Localité 6]

représentée par Maître Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocats au barreau de BORDEAUX

PARTIE INTERVENANTE

Madame [V] [C]
née le [Date naissance 5] 2024 à [Localité 11]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Me Cindy BOCQUET, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 30 novembre 2018, Mme [D] été blessée à la main lors d’une altercation de voisinage, impliquant Mme [T] [F], M. [C], et Mme [C].

Le certificat médical dressé le 30 novembre 2018 notait la présence d’une plaie profonde de la main droite au niveau du 5ème doigt en regard de la 3ème phalange avec une hypoesthésie distale ayant nécessité une intervention chirurgicale en urgence pour exploration parage et suture. Seule une contusion nerveuse a été retrouvée.
Une ITT de 21 jours était fixée.

Mme [D] portait plainte à l’encontre de Mme [F] le 10 décembre 2018 pour les faits de violence volontaire avec ITT supérieur à 8 jours du 30 novembre 2018.

Par ordonnance en date du 08/06/2020, le Tribunal judiciaire de Bordeaux statuant en référé a ordonné une mesure d'expertise médicale de Mme [D] confiée au Dr [X] afin d’évaluer ses préjudices et trois mesures d’expertises médicales de Mme [C], Mme [F] et M. [C] confiées au Dr [Y].

Le 15 mars 2021, le Dr [X]a déposé son rapport d'expertise définitif s’agissant de Mme [D], fixant un DFP de 6%.

Faute de proposition d’indemnisation, Mme [D] a, par actes d'huissier délivrés les 25 mai 2022, fait assigner devant le présent tribunal Mme [F], et M. [C] pour voir indemniser son préjudice ainsi que, en qualité de tiers payeurs, la CPAM de la Gironde.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30/01/2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 14/03/2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour, les parties en ayant été informées selon les modalités de l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par voie électronique le 06/11/ 2023, Mme [D] demande au tribunal de :
- Déclarer Mme [F] et M. [C] entièrement responsables de son préjudice,
- Condamner in solidum Mme [F] et M. [C] à payer à Mme [D] la somme correspondant à la réparation de son préjudice se décomposant de la façon suivante :
o Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT) : 2.409 €
o Souffrances Endurées : 4.000 €
o Préjudice esthétique temporaire : 2.000 €
o Déficit Fonctionnel Permanent (DFP) : 10.800 €
o Préjudices esthétique permanent : 1.000 €
SOIT un total de 20.209 €
- ordonner l’exécution provisoire,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [C] à payer à Mme [D] la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner solidairement Mme [F] et M. [C] , aux entiers dépens de l’instance,
- rejeter les demandes de Mme [F], Mme [C] et M. [C].

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 29/06/2023, la CPAM de la Gironde demande au tribunal, de :
- déclarer Mme [F] et M. [C] responsables de l’accident dont a été victime Mme [D] le 30 novembre 2018 et des préjudices qui en ont résulté pour la CPAM DE LA GIRONDE ;
- déclarer que le préjudice de la CPAM DE LA GIRONDE est constitué par les sommes exposées dans l'intérêt de son assurée sociale, Mme [D], à hauteur de la somme de 1.104,28€;
- Condamner in solidum Mme [F] et M. [C] à verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1.104,28€ € en remboursement des prestations versées pour le compte de son assurée sociale ; et la somme de 368,09 € au titre de l'indemnité forfaitaire en application des dispositions des articles 9 et 10 de l'Ordonnance n°96-51 du 24 janvier 1996 ; - déclarer que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal ;
- faire application des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du Code Civil ;
- condamner in solidum Mme [F] et M. [C] verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens ;
- dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit.

Au terme des conclusions responsives notifiées par voie électronique le 17/05/2023, Mme [F], M. [C] et Mme [C] demandent au tribunal de :
- à titre principal : débouter Mme [D] et la CPAM DE LA GIRONDE de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
- à titre subsidiaire : fixer le préjudice de Mme [D] à la somme totale de 6 552,37 euros, selon le détail suivant :
o Dépenses de santé : 1 472,37 €
o Déficit fonctionnel temporaire : 1 825 €
o Souffrances endurées : 1 000 €
o Déficit fonctionnel permanent : 1 800 €
o Préjudice esthétique permanent : 500 €
- débouter Mme [D] de sa demande au titre du préjudice esthétique temporaire,
- limiter le droit à indemnisation de Mme [D] à la charge de Mme [F] à hauteur de 20 %,
- débouter Mme [D] et la CPAM DE LA GIRONDE de leurs demandes de condamnation solidaire et in solidum à l’égard de M.[C],
- débouter Mme [D] et la CPAM DE LA GIRONDE de leurs plus amples demandes,
A TITRE RECONVENTIONNEL :
- condamner Mme [D] à payer à M. [C] la somme de 2 000 € en indemnisation de son préjudice moral,
- condamner Mme [D] à payer à Mme [F] la somme de 2 500 € en indemnisation de son préjudice moral,
- condamner Mme [D] à payer à Mme [C] la somme de 3 000 € en indemnisation de son préjudice moral,
- condamner Mme [D] à payer à M. [C], Mme [F] et Mme [C] la somme de 1000 € chacun sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Mme [D] aux entiers dépens, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire du Docteur [X].

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

I- Sur la demande d’indemnisation de Mme [D]

A- Sur la responsabilité de Mme [F] et M. [C]

Au terme des dispositions de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. L'article 1243 du code civil énonce que le propriétaire d'un animal ou celui qui s'en sert, pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage que l'animal a causé, soit que l'animal fût sous sa garde, soit qu'il fut égaré ou échappé.

En l’espèce, Mme [D] affirme que la blessure subie le 30 novembre 2018 a été occasionnée par la morsure du chien “Pépé” appartenant à Mme [F] et M. [C]. Les défendeurs contestent cette allégation, faisant état d’une altercation de voisinage à l’instigation de Mme [D] et de son compagnon au cours de laquelle Mme [F] aurait mordue Mme [D] pour se défendre.

Chacune des parties versent des attestations de témoins et copie de leurs dépôts de plainte. Les plaintes réciproques déposées par les parties retracent leurs déclarations personnelles s’agissant du déroulé des faits le jour de l’incident de sorte qu’il convient de les appréhender avec précaution.

Néanmoins, il ressort des autres pièces versées que si les attestations versées par les défendeurs font état de l’absence d’incident constaté, d’autres voisins, ont pu à l’inverse constater d’une part le comportement violent de Mme [F] et de M. [C] et d’autre part que le chien “Pépé” pouvait avoir des comportements aggressifs envers d’autres personnes ou d’autres animaux.
Si les défendeurs contestent cette situation, il convient cependant de relever qu’ils ont révélé que cette accusation de morsure de la part de leur chien n’était pas un évènement isolé, puisqu’ils ont eux-mêmes fait mention de deux autres incidents d’accusations de morsure de la part de l’animal lors de l’entretien avec l’éducatrice canine. De plus, les constatations par l’éducatrice canine d’un comportement normal et calme du chien, après les faits et sur un temps limité et serein, ne permettent pas d’attester de l’impossibilité de tout comportement agressif de l’animal dans une situation de tension.

De plus, les pièces médicales constate une blessure suite à morsure de chien, y compris l’attestation d’intervention du SDIS le jour des faits qui mentionne une intervention pour deux personnes dont Mme [D], mordues par un chien.

En tout état de cause, les défendeurs ne contestent pas être impliqués dans l’altercation de voisinage et à l’origine de la blessure au doigt de Mme [D], qui aurait été mordue selon leurs déclarations, par Mme [F] elle-même, celle-ci invoquant un geste de légitime défense. Ils se fondent à ce titre sur des plaintes et déclarations qu’ils ont eux-même réalisés et sur le classement sans suite opéré par le procureur suite au dépôt de plainte pour infraction insuffisament caractérisée.

Or, d’une part, l’absence de caractérisation d’une infraction n’empêche pas la constitution d’une faute au sens du droit civil. De plus, hors leurs seules déclarations unilatérales, aucun élément ne permet de démontrer que Mme [D] serait effectivement l’instigatrice de l’altercation et des violences physiques. L’échange d’insultes, reconnu par Mme [D] après les violences verbales de ses voisins, ne sauraient par ailleurs constituer en l’état une faute de nature à voir rejeter son droit à réparation.

Par conséquent, vu l’ensemble de ces éléments, il convient de déclarer Mme [F] et M. [C] entièrement responsables de l’accident dont a été victime Mme [D] le 30 novembre 2018 et de rejeter toute demande tendant à voir réduire son droit à indemnisation.

B- Sur la liquidation du préjudice de Mme [D]

Le rapport du docteur [X] indique que Mme [D] née le [Date naissance 1]1975, sans profession au moment faits, a présenté suite aux faits : la présence d’une plaie profonde de la main droite au niveau du 5ème doigt en regard de la 3ème phalange avec une hypoesthésie distale et une contusion nerveuse.

Après consolidation fixée au 06/10/2020, l’expert retient un déficit fonctionnel permanent de 6 % en raison des éléments du stress post-traumatique et du petit déficit de flexoin du 5ème doigt.

Au vu de ce rapport, le préjudice corporel de Mme [D] sera évalué ainsi qu’il suit, étant observé qu’en application de l’article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge.

Préjudices patrimoniaux temporaires :

Dépenses de santé actuelles (DSA) :

Ces dépenses correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation pris en charge par les organismes sociaux ou restés à la charge effective de la victime.
Ils’évince du relevé de débours de la CPAM que cette dernière a exposé entre le 30/11/2018 et le 22/05/2019 pour le compte de son assuré social Mme [D] un total de 1104,28 € (frais hospitaliers, frais médicaux et pharmaceutiques) qu'il y a lieu de retenir au vu de l'attestation d'imputabilité également versée par la CPAM.

Mme [D] ne fait pas état de dépenses demeurées à sa charge.

Dès lors, ce poste de préjudice sera fixé à la somme totale de 1 104,28 €.

Préjudices extra-patrimoniaux :

- Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :

Ce poste de préjudice indemnise l'aspect non économique de l'incapacité temporaire, c'est-à-dire l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu'à sa consolidation. Ce préjudice correspond à la gêne dans tous les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant sa maladie traumatique et à la privation temporaire de sa qualité de vie.

Calculée sur la base de 27€ par jour pour une DFT à 100%, il doit être arrêté au regard des conclusions de l'expert à :
- 167,40 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 20 % pour la période du 30/11/2018 au 30/12/2018
- 190,35 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 15 % pour la période du 31/12/2018 au 15/02/2019
- 1 617,30 € pour le déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 10 % pour la période du 16/02/2019 au 06/10/2020

soit un total de 1 975,05 €.

Souffrances endurées (SE) :

Elles sont caractérisées par les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité, des traitements subis.

L'expert les a évalué à 1,5/7.

Vu le traumatisme initial, les soins prodigués, les souffrances physiques et psychologiques, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 4000 €.

Préjudice esthétique temporaire ( P.E.T.)

L'expert ne mentionne pas de préjudice esthétique temporaire. Néanmoins, un tel préjudice peut être caractérisé au vu de la blessure initiale, des soins et pansements pendant une période d'un mois.

Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 1000 €.

- Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :

Le déficit fonctionnel permanent (D.F.P.) :

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Plus précisément, il s'agit du préjudice non économique lié à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours.

L'expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 6% pour les raisons ci avant rappelées.

Le fait que Mme [D] bénéficie du statut de la MDPH ne suffit pas à caractériser un “état antérieur” en ce que les séquelles relevées (stress post traumatique et déficit de flexion du doigt) sont imputables à l’agression et non à une pathologie ou situation antérieure aux faits reprochés, comme celà est établi par l’expertise.

Il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 10 800 € soit 1 800 € du point d'incapacité correspondant au niveau moyen retenu pour ce taux de déficit vu l'age de la victime à la date de consolidation.

Préjudice esthétique permanent ( P.E.P.) :

L'expert a retenu une préjudice esthétique permanent de 0,5/7 en raison de la cicactrice du doigt.

Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 1 000 €.

- Sur la créance des tiers payeurs et la répartition des créances:

Dès lors que le droit à indemnisation de demandeur est partiel, il convient d’appliquer les principes suivants posés par les articles L 376-1 du Code de la Sécurité Sociale et 31 de la loi n° 85-677 du 5 Juillet 1985 modifiée par l’article 25 III et IV de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007.

- les recours subrogatoires des caisses contre les tiers et les recours subrogatoires des tiers payeurs s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel.

- conformément à l’article 1252 ancien du Code Civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l’indemnisation.

- lorsqu’elle n’a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales, en ce cas, l’assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée.

- lorsqu’elle n’a été indemnisée qu’en partie, en ce cas, elle peut exercer ses droits contre le responsable , pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n’a reçu qu’une indemnisation partielle.

- cependant, si le tiers payeur établit qu’il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s’exercer sur ce poste de préjudice.

- cependant en cas d’accident du travail ou trajet -travail , il résulte de l’article L434-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d’un accident du travail indemnise, d’une part, les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité, d’autre part ,le déficit fonctionnel permanent. Il s’en déduit que dans la mesure où le montant de la rente excède celui des pertes de revenus et l’incidence professionnelle, elle répare nécessairement, en tout ou en partie, le déficit fonctionnel permanent . En l’absence de préjudice patrimonial, les arrérages échus et le capital représentatif de la rente versée à la victime en application de l’article L434-1 du code de la sécurité sociale s’imputent sur l’indemnité allouée au titre du déficit fonctionnel permanent.

La créance des tiers payeurs au titre des prestations évoquées ci avant pour chaque poste de préjudice s’imputera conformément au tableau ci-aprés :

Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

-DSA dépenses de santé actuelles
1 104,28 €

1 104,28 €
permanents

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- DFTP déficit fonctionnel temporaire
1 975,05 €
1 975,05 €

- SE souffrances endurées
4 000,00 €
4 000,00 €

- PET préjudice esthétique temporaire
1 000,00 €
1 000,00 €

permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
10 800,00 €
10 800,00 €

- PE Préjudice esthétique permanent
1 000,00 €
1 000,00 €

- TOTAL
19 879,33 €
18 775,05 €
1 104,28 €

Après déduction de la créance des tiers-payeurs (1104,28€), le solde dû à Mme [D] et à la charge in solidum de Mme [F] et M. [C] , s’élève à la somme de 18 775,05 euros.

Conformément aux dispositions de l’article 1231-7 du Code Civil, les indemnités allouées à la victime porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.

II- Sur les demandes de la CPAM de la Gironde

C'est à bon droit que la CPAM de la Gironde demande en application de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale, la condamnation in solidum de Mme [F] et M. [C], à lui rembourser la somme de 1104,28 € au titre des frais exposés pour son assurée social et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Elle est en outre bien fondée dans sa demande au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion telle que prévue aux articles 9 et 10 de l'ordonnance numéro 96-51 du 24 janvier 1996 avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

En outre, il convient de faire application des dispositions de l'article 1343-2 du Code civil conformément à la demande.

III- Sur les demandes d’indemnisation reconventionnelles formées à l’encontre de Mme [D],

Au terme des dispositions de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’espèce, les défendeurs invoquent le comportement violent de Mme [D] et de ses proches. Ils font état chacun d’un préjudice moral du fait de ces agissements.

Or, il convient de relever d’une part qu’ils se fondent sur leurs seules déclarations unilatérales telles que reprises dans leurs dépôts de plainte. Le fait de verser des attestations faisant état que certains voisins n’avaient pas de conflit avec eux ou avec leur chien ne permet pas de considérer qu’ils étaient victimes du comportement de Mme [D] notamment le jour des faits du 30/11/2018.

A titre surabondant, s’ils sollicitent l’indemnisation au titre du préjudice moral, il apparait que malgré le prononcé d’une mesure d’expertise à leur bénéfice par l’ordonnance de référé, aucune mesure n’a été conduite. Ainsi, les certificats médicaux versés aux débats dressés plusieurs jours après les faits dénoncés ne permettent pas d’établir la réalité de leur préjudice.

Par conséquent, il convient de rejeter les demandes aux fins de voir condamner Mme [D] à leur verser les sommes de 2 000 €, 2 500 € et 3 000 € au titre du préjudice moral.

Sur les autres dispositions du jugement

Succombant à la procédure, Mme [F], et M. [C] seront condamnés in solidum aux dépens, dans lesquels seront inclus les frais antérieurs à l'engagement de l'instance relatifs à l’instance de référé expertise ayant préparé la présente instance.

D’autre part, il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [D] et de la CPAM de la Gironde les frais non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner in solidum Mme [F] et M. [C] à une indemnité de 2 000 € en faveur de Mme [D] et 1000 € en faveur de la CPA, au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande formée à ce titre par les défendeurs sera rejetée.

Par ailleurs, rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit prévue par l’article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

DECLARE Mme [F] et M. [C] responsables du préjudice subi par Mme [D] ;

DIT que le droit à indemnisation de Mme [D] est entier ;

FIXE le préjudice subi par Mme [D], suite à l’accident dont elle a été victime le 30/11/2018 à la somme totale de 19 879,33 € suivant le détail suivant :

Evaluation du préjudice
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

-DSA dépenses de santé actuelles
1 104,28 €
permanents

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- DFTP déficit fonctionnel temporaire
1 975,05 €
- SE souffrances endurées
4 000,00 €
- PET préjudice esthétique temporaire
1 000,00 €
permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
10 800,00 €
- PE Préjudice esthétique permanent
1 000,00 €
- TOTAL
19 879,33 €

CONDAMNE in solidum Mme [F] et M. [C] à payer à Mme [D] la somme de 18 775,05 € au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel, après déduction de la créance des tiers payeurs ;

CONDAMNE in solidum Mme [F] et M. [C] à payer à la CPAM de la Gironde la somme de 1 104,28 € au titre des prestations versées pour le compte de son assuré social, Mme [D] ;

CONDAMNE in solidum Mme [F] et M. [C] à payer à la CPAM de la Gironde la somme de 380,80 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles 9 et 10 de l'ordonnance numéro 96-51 du 24 janvier 1996 ;

CONDAMNE in solidum Mme [F] et M. [C] à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile:
- 2 000 € à Mme [D]
- 1 000 € à la CPAM de la Gironde ;

DIT que les sommes allouées ci dessus porteront intérêts au taux légal à compter du présent jugement avec application des dispositions de l’article 1343-2 du Code civil au profit de la CPAM de la Gironde ;

REJETTE la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral formée par Mme [F], M. [C] et Mme [C]

CONDAMNE in solidum Mme [F] et M. [C] aux dépens, qui comprendront ceux de l’instance ayant donné lieu à l’ordonnance de référé et ses frais d’exécution ainsi que le coût de l’expertise judiciaire lesquels seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision ;

REJETTE toute autre demande des parties.

Le jugement a été signé par Fanny CALES, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 6ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/04066
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;22.04066 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award