N° RG 22/05088 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WZSW
7ÈME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7ÈME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 14 Mai 2024
50A
N° RG 22/05088
N° Portalis DBX6-W-B7G- WZSW
Minute n°2024/
AFFAIRE :
[O] [H]
[I] [E] [G] [C] épouse [H]
C/
SCEA LA GONTRIE
Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Cécile BOULE
la SCP MAATEIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :
Madame BOULNOIS, Vice-Présidente,
Madame VERGNE, Vice-Présidente,
Madame PINAULT, Juge,
Lors des débats et du prononcé :
Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier
DÉBATS :
à l’audience publique du 05 Mars 2024
JUGEMENT :
Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe
DEMANDEURS
Monsieur [O] [H]
né le 13 Juin 1972 à [Localité 7] (YVELINES)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Cécile BOULÉ, avocat au barreau de BORDEAUX
Madame [I] [E] [G] [C] épouse [H]
née le 27 Décembre 1971 à [Localité 8] (SEINE MARITIME)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Cécile BOULÉ, avocat au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE
SCEA LA GONTRIE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Stéphan DARRACQ de la SCP MAATEIS, avocat au barreau de BORDEAUX
Suivant acte notarié du 25 mai 2018, Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] ont acheté à la SCEA LA GONTRIE une parcelle de terrain à [Localité 9] pour un prix de 136.360 euros. Cette vente était conditionnée à l’obtention d’un permis de construire pour l’édification d’une maison individuelle d’une surface de 103m², permis octroyé le 05 mars 2018.
Un contrat de construction de maison individuelle avait été signé le 12 janvier 2018 par Monsieur et Madame [H] avec la SAS INCA AQUITAINE, exerçant sous l’enseigne «MAISONS CLAIRLANDE». Le chantier a débuté le 14 novembre 2018 et dès ce premier jour, le constructeur a fait part à Monsieur et Madame [H] de la présence de déchets sous le terrain et un arrêt de chantier a été formalisé le lendemain.
Monsieur et Madame [H] ont alors déclaré un sinistre à leur assureur protection juridique qui a mandaté le Cabinet d’expertise GREXX qui a rendu un rapport le 07 janvier 2019.
Suivant acte d'huissier signifié le 12 septembre 2019, ils ont fait assigner la SCEA LA GONTRIE devant le Tribunal judiciaire aux fins de solliciter l'organisation d'une expertise. Par ordonnance du 18 mai 2020, le juge des référés a fait droit à leur demande et a désigné un expert judiciaire, remplacé ensuite par Monsieur [B] [L]. L'expert a rendu son rapport le 19 mai 2021.
Suivant acte d'huissier signifié le 08 juillet 2022, Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] ont fait assigner au fond la SCEA LA GONTRIE.
Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 décembre 2023, Monsieur et Madame [H] demandent au Tribunal de :
Vu les articles 1641 et suivants du Code Civil, Vu les articles 1112-1 et 1131 du Code Civil,
• DECLARER recevables et bien fondées les demandes de Monsieur et Madame [H] – [C] ;
• DEBOUTER la SCEA LA GONTRIE de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions
Y faisant droit,
A TITRE PRINCIPAL
• CONSTATER l’existence d’un vice caché, en l’espèce la pollution du sol de la propriété, objet de la vente située au [Adresse 1] ;
• CONSTATER que la SCEA LA GONTRIE, anciennement représentée par Monsieur [J] [M] et récemment par Madame [M], avait parfaitement connaissance de la pollution du sol de la propriété objet de la vente située au [Adresse 1] ;
• JUGER que la pollution, affectant le bien objet de la vente, était connue de la SCEA LA GONTRIE, antérieurement à la vente
En conséquence,
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE, de verser à Monsieur et Madame [A] la somme de 136.360 euros, correspondant au prix de vente du terrain situé au [Adresse 1] ;
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE au remboursement de l’ensemble des frais exposés par les consorts [A] lors de la vente, soit la somme de 136.360 euros outre les frais annexes relatifs à cette acquisition (les frais de notaire, d’aménagement du terrain etc, pour un montant total de 91.030 euros.
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE à verser aux consorts [H] - [C] la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.
A TITRE SUBSIDIAIRE
• CONSTATER que la SCEA LA GONTRIE s’est volontairement abstenue de communiquer aux consorts [H] - [C] une information qu’elle savait essentielle pour la détermination du consentement des acquéreurs, en l’espèce, la présence de déchets enfouis et de pollution dans les sols de la propriété, objet de la vente
• JUGER que ce silence est une manœuvre dolosive, imputable à la SCEA LA GONTRIE
• PRONONCER la nullité de la vente intervenue le 25 mai 2018
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE au remboursement de l’ensemble des frais exposés par les consorts [H] - [C] lors de la vente, soit la somme de 136.360 euros, outre les frais annexes relatifs à cette acquisition (les frais de notaire, les frais d’agence, d’aménagement du terrain etc) pour un montant total de 91.030 euros.
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE à verser aux époux [H] la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.
EN TOUT ETAT DE CAUSE
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE à verser aux époux [H] la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
• CONDAMNER la SCEA LA GONTRIE aux entiers dépens de procédure en ce compris les frais d’expertise judiciaire.
Ils se fondent à titre principal sur la garantie des vices cachés pour solliciter la résolution de la vente, la restitution du prix du terrain et l'indemnisation d 'un préjudice et, à titre subsidiaire, sur le dol pour solliciter la nullité de la vente. Ils font valoir que la SCEA LA GONTRIE connaissait la présence d'une pollution qui rendait le terrain incompatible avec leur projet d’y faire construire une maison.
Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 janvier 2024, la Société Civile d'Exploitation Agricole «LA GONTRIE» demande au Tribunal de :
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,
▪ Faire droit aux prétentions de la SCEA LA GONTRIE,
▪ Débouter les époux [H] de l’intégralité de leurs prétentions,
▪ Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir de toutes les condamnations prononcées par le jugement, en principal et intérêt, dommages et intérêts, indemnités de l'article 700 du CPC ainsi que pour les dépens,
▪ A défaut assortir l’exécution des condamnations à la constitution d'une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations,
▪ Condamner les époux [H] à payer à la SCEA LA GONTRIE la somme de 8.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure comprenant notamment les frais d’exécution, dont le droit proportionnel prévu au numéro 129 du tableau 3-1 annexé à l’article R.444-3 du Code de commerce, dont distraction sera faite au profit de Maître Stéphan DARRACQ représentant la SCP MAATEIS.
Elle fait valoir qu'elle ignorait l'état de pollution du sol dont elle n'est pas responsable, que lors de la vente conditionnelle, Monsieur et Madame [H] s'étaient engagés à faire réaliser une étude de sol qu'ils n'ont pas fait faire et qu'elle n'a dissimulé sciemment aucune pollution.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 09 février 2024.
MOTIFS :
L’article 1103 du Code civil dispose : «Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits».
Aux termes de l’article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Conformément à l'article 1643, il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
L'article 1644 du Code civil dispose que dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
Enfin, aux termes de l'article 1645 du même Code, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.
L'acte de vente du 25 mai 2018 du terrain objet du litige est assorti d'une clause exclusive de garantie des vices mêmes cachés affectant le bien, conforme à l'article 1643 du Code civil, de telle sorte qu’en présence de cette clause dont la validité n’est pas contestée, il appartient au demandeur de démontrer que le vendeur connaissait l'existence des vices qu'il invoque, si celui-ci n'est pas considéré comme un professionnel.
L'acte de vente prévoit en outre qu'en cas de présence de déchets, le propriétaire du bien devra supporter le coût de leur élimination qu'ils soient les siens ou ceux de producteurs ou de détenteurs maintenant inconnus ou disparus. Le propriétaire simple détenteur de déchets ne peut s'exonérer de cette obligation que s'il prouve qu'il est étrange à l'abandon des déchets et qu'il n'a pas permis ou facilité cet abandon par un tiers par complaisance ou négligence.
L'acte de vente du 25 mai 2018 a été précédé d'un acte de vente conditionnelle en date du 26 décembre 2017 qui prévoyait que la vente était consentie sous la condition suspensive au profit de l'acquéreur que «l'étude de sol qui sera réalisée à la demande de l'acquéreur et à ses frais ne révèle pas de sujétions particulières nécessitant des fondations spéciales (pieux, radiers, etc…), ni des ouvrages de protection contre l'eau».
Le 15 novembre 2018, la SAS INCA AQUITAINE, exerçant sous l’enseigne «MAISONS CLAIRLANDE» écrivait à Monsieur et Madame [H] «Nous vous informons par la présente, que la découverte de déchets divers lors du creusement des fondations rend impossible la continuation des travaux de construction de votre maison. Ces déchets sont présents entre - 0,8 m et - 3,5 m de votre terrain naturel. Nous n'allons pas creuser plus profond lors de nos investigations d'hier».
Le rapport d'expertise amiable du Cabinet GREXX a indiqué que «le terrain a été nivelé en surface à son niveau de référence, on ne constate pas de déchets ni gravats sur la couche de 50 premiers centimètres. C'est en creusant la fondation à - 80 cm du niveau de référence que les premiers déchets ont été trouvés ainsi que les morceaux de béton. En creusant au-delà, les déchets et gravats étaient toujours présents, le terrassier n’est pas descendu au-delà des 3 mètres». Le rapport indique que divers déchets ont pu être identifiés : «Grillage métallique, cagettes et sacs plastiques, morceaux de fer rouillé, éléments de zinc de couverture, crochets aluminium, gravats, béton, roue en caoutchouc». L'expert amiable a ajouté que de gros blocs de béton avaient été retirés, qu'ils étaient en nombre important, enchevêtrés les uns dans les autres forment des cavités. Le rapport indiquait que si le terrain était conservé en l'état, le CMI devait envisager de reposer sa fondation sur le bon sol, au-delà de la zone remblayée, et allait devoir pour ce faire réaliser des micros pieux avec longrines pour s'affranchir de tout risque de mouvements de sol. Le rapport relevait que la présence de polluants n'était pas exclue et qu'une étude géotechnique était nécessaire pour déterminer les limites des zones remblayées et la nature précise des déchets enfouis.
L’expert judiciaire a fait procéder à des sondages du sol. Il a relevé que dès le premier sondage, une odeur de gasoil ou de fioul altéré était perceptible et que le faciès géologique était noir. Il a par ailleurs, selon les sondages et les profondeurs, identifié des matériaux de remblais, des blocs bétons d’environ 0,70 à 1 m², des déchets et gaines électriques, des revêtements de sol de type Gerflor de couleur marbré verdâtre, des dalles béton coulées sur un remblai dit technique, des bidons de brûlage, de la laine de verre, un mur de briques d'une surface d'environ 2 m², des ferrailles de toutes dimensions outre la présence d'un extincteur rouillé. Il ajoutait que tous les sondages avaient été arrêtés à - 3,50 mètres.
S'agissant de la présence d’hydrocarbures, suite à l'analyse des échantillons prélevés, l'expert judiciaire a indiqué que tous les échantillons présentaient soit des traces, soit des concentrations très élevées correspondant le plus souvent à du gasoil/fioul/mazout. Il a ajouté concernant les métaux lourds et métalloïdes, que les concentrations étaient très variables et ne dépassaient pas les valeurs couramment observées, que la présence de l’élément cuivre n'était pas surprenante compte tenu de la proximité de vignes, que les concentrations en plomb et cadmium étaient en corrélation avec les hydrocarbures trouvés précédemment, entrant dans la composition des carburants, que l’arsenic et le chrome correspondant à des produits phytosanitaires et/ou de nettoyage. Concernant des composés volatils, il a souligné que seul du tétrachloréthane avait été identifié, produit largement utilisé comme solvant dans les années 1970/1990, avant son interdiction suite à sa toxicité démontrée.
Il a en outre relevé que dans les excavations réalisées, lors des venues d'eau, une irisation s'observait en deux endroits, signe d'une pollution aux hydrocarbures.
L'expert a conclu que des désordres étaient existants et a validé un devis estimatif de dépollution d'un coût de 289.400,40 euros, en précisant qu'une provision d'environ 46.000 euros était à prévoir pour les diagnostics pollution, pose de piézomètres, analyses et rapports.
La présence d'une quantité importante de déchets, de gravats, de blocs de béton provoquant des cavités, enfouis dans le sol, outre la présence d'une pollution aux hydrocarbures dont la dépollution coûterait plus cher que le coût initial du terrain, constituent un vice d'une gravité importante.
Ce vice présent dans le sol et découvert à l'occasion d'excavations était antérieur à la vente. Le fait que préalablement à l'acte de vente, était prévu dans un acte conditionnel à titre de condition suspensive à leur profit, que Monsieur et Madame [H] fassent réaliser une étude de sol ne remet pas en cause le caractère caché du vice lors de la vente. En effet, ceux-ci avaient toute possibilité de renoncer à la condition suspensive prévue dans leur seul intérêt et effectivement cette étude de sol n'a pas été réalisée. Seule une étude dite de «terrain» a été réalisée le 06 janvier 2018 qui a conclu à la présence de terre végétale sur une épaisseur de 20 cm et d'un limon argilo-graveleux sur une profondeur de 60 cm. Ainsi, le vice, révélé par les excavations, était caché au moment de la vente.
La SCEA LA GONTRIE fait valoir qu'elle ignorait ce vice et qu'en conséquence, la clause d'exonération doit jouer en sa faveur.
Elle a acquis le terrain en 1962. L'expert judiciaire a relevé que la SCEA LA GONTRIE a été constituée en 1992 et qu'elle avait d'abord été gérée par Monsieur [J] [M] puis par sa fille [K] [M] à compter de 2014.
S'agissant des matériaux retrouvés dans le sol, l'expert judiciaire a indiqué que les matériaux de construction correspondaient à ceux qui étaient utilisés dans les années 1960/1970 (laine de verre, briques, dalles coulées, déchets électriques, dalles de revêtement marbré verdâtres...) et pourraient correspondre à des matériaux utilisés pour des hangars.
L'expert judiciaire a en outre consulté des photographies aériennes antérieures du site et a noté que le terrain avait été nivelé entre les années 1950 et 1961 outre la construction de trois hangars (dont il n'est pas contesté qu'ils étaient à usage de poulailler) identiques entre 1961 et 1965, outre la construction de quelques bâtiments. Il a décelé sur les clichés la présence de tâches blanches à partir de 1970, qui seraient des cuves aériennes. Il a noté qu'entre le 24 juillet et le 05 juin 1996, un des trois hangars avait été démoli pour la partie toiture puis que les fondations du hangar avaient été enlevées entre 1996 et 2000.
Il a également relevé qu'il n'existait pas de sites polluants à proximité immédiate du site ni de pollution antérieure déclarée.
L'expert conclut que, si la pollution identifiée en elle-même n'est pas datable précisément selon l'échelle de temps, les causes des désordres présents dans le sous-sol sont vraisemblablement la dé construction des hangars sur le site aux environs des années 1995/1996. Il a précisé que la déconstruction avait été commencée en 1995 pour un premier bâtiment, puis dans les années suivantes, la déconstruction du bâtiment central et qu'à ce jour seul, un bâtiment subsistait.
Il n'est en outre pas contesté que les cuves mentionnées par l'expert sont des cuves de fioul, fioul destiné à chauffer les poulaillers. L'expert judiciaire a indiqué que les cuves étaient placées topographiquement plus haut que le terrain de Monsieur et Madame [H].
Il en résulte que la destruction des hangars a eu lieu alors même que la SCEA LA GONTRIE était propriétaire du lieu et l’exploitait, de même que la réalisation et la présence de cuves de fioul.
La SCEA LA GONTRIE conteste avoir enterré de quelconques gravats. Elle fait valoir que lors de leur enlèvement, les cuves ont été vendues à la société DECONS et que les fondations d'un poulailler détruit ont été utilisées par l'acquéreur de la parcelle concernée, outre qu'elle a utilisé des parties des déconstructions pour consolider des chemins ou encore que les éléments enterrés ne correspondent pas à ceux qui étaient présents dans les poulaillers et qu'elle a pour pratique de récupérer l'ensemble de ces matériaux. Aucun élément ne démontre la vente à la société DECONS. Pour le surplus, quand bien même elle récupérerait des matériaux, il n'empêche que de nombreux matériaux se retrouvent enterrés dans le terrain qu'elle possédait, alors que ces matériaux ont été datés des années 1960/1970 dont l'enfouissement ne peut alors qu'être postérieur à la période à laquelle elle a acquis le terrain. Si Monsieur [D], ayant acquis une parcelle voisine en 2012, atteste avoir enterré les matériaux de fondation du poulailler qui se trouvait sur son terrain, et si un ancien employé de la SCEA affirme avoir arraché les fondations d'une ancienne volière et les avoirs stockés sur la propriété, cela n'explique pas la présence des nombreux gravats et matériaux enterrés sur le terrain de Monsieur et Madame [H]. En outre, la pollution aux hydrocarbures correspond à la présence de cuves de fioul, alors qu'avant l'acquisition du terrain par la SCEA, aucune construction n'était présente sur le terrain. Quand bien même la SCEA aurait surveillé le niveau de ses cuves, la pollution aux hydrocarbures ne peut provenir que de celles-ci.
Il en résulte que c'est bien la SCEA LA GONTRIE qui a enterré les matériaux dans le terrain et qu'elle était en outre informée de la présence d'hydrocarbures dans celui-ci. Elle ne peut donc se prévaloir de l'exonération de garantie des vices cachés et sera tenue de garantir ceux-ci vis-à-vis de Monsieur et Madame [H], le fait que la société en charge du CCMI n'ait pas fait procéder à une étude de sol ou que la pose de fondations appropriées aurait pu être exigée pour le même prix, n'étant pas exonératoire de sa propre responsabilité de vendeur.
L'importance de la présence de gravats et de matériaux et la présence d'une pollution aux hydrocarbures dont le coût de dépollution excède le coût d'achat de la parcelle font qu'il convient, en application de l'article 1644 du Code civil, de faire droit à la demande de résolution de la vente formulée par Monsieur et Madame [H] et de restitution du prix de celle-ci. En conséquence, la SCEA LA GONTRIE sera condamnée à leur payer la somme de 136.360 euros. Elle sera en outre condamnée à leur payer la somme de 7.917 euros correspondant au coût des frais de notaire exposés lors de la vente outre la somme de 5.990 euros correspondant au coût des frais d'agence immobilière exposés pour l'achat du terrain.
Monsieur et Madame [H] sollicitent en outre le paiement d'une somme de 44.214 euros au titre de dépenses locatives entre avril 2019 et mars 2023. Ils justifient du paiement de loyers entre avril 2019 et novembre 2021 puis entre février 2022 et mars 2023.
Le contrat de construction de maison individuelle a été signé le 12 janvier 2018. Il prévoyait un délai d'exécution des travaux à la charge du constructeur de 12 mois à compter de l'ouverture du chantier. Le chantier a démarré le 14 novembre 2018 et aurait donc dû s'achever le 14 novembre 2019. Cependant, si le constructeur de maison individuelle fait valoir qu'il a arrêté le chantier car l'adaptation des fondations nécessit(ait) un surcoût, cela est contraire au CCMI qui prévoit un coût forfaitaire pour la construction de la maison. En outre, quand bien même le terrain n'aurait pas été pollué et n'aurait pas été encombré de déchets, il n'est pas établi que la construction de la maison aurait été achevée pour novembre 2019 et en tout état de cause, Monsieur et Madame [H] devaient se loger alors qu'ils ont acheté un terrain nu. En conséquence, il n'est pas établi de préjudice lié au coût des loyers en relation directe avec le vice caché affectant le terrain et Monsieur et Madame [H] seront déboutés de leur demande à ce titre.
Monsieur et Madame [H] réclament également le paiement d 'une somme de 32.909 euros au titre des dépenses liées au terrain et à la construction. Ils produisent à l'appui un devis à leur nom pour des travaux de VRD/CL/PL du 23 mai 2018 d'un montant de 4.980 euros, un appel de fonds à l'ouverture du chantier de la société INCA pour un montant de 20.038,73 euros le 08 octobre 2018, deux devis à leur nom de la société SIEA pour des branchements de montants de 2.364 et 2.202 euros ayant ensuite fait l'objet de titres exécutoires, deux factures de la société SIEA de 52,75 euros et 282,05 euros, un titre de perception d'un montant de 213 euros pour la redevance d'archéologie préventive, un titre de perception de 1.681 euros pour la taxe d'aménagement (sans la majoration pour non-paiement dans la date limite), une facture EDF de 582,34 euros à leur nom pour le chantier de [Localité 11], adressée à une adresse à [Localité 6] et un avis avant poursuite pour le paiement d 'une redevance pour pollution de 324,53 euros adressé à une adresse à [Localité 10].
Il ne leur sera pas accordé le remboursement par la SCEA de l'appel de fonds de la société INCA, dont le paiement n'est par ailleurs pas justifié, dans la mesure où cela intéresse les relations contractuelles entre eux et le constructeur de maison individuelle. Il n'est pas justifié que les travaux de VRD et branchements ayant fait l'objet du simple devis de 4.980 euros ont été réglés par Monsieur et Madame [H] alors que les pièces du CCMI produites ne permettent pas de connaître précisément le montant des prestations demeurées à leur charge et cette somme ne leur sera pas accordée. Pour le surplus, il leur sera accordé le remboursement de la facture EDF, des frais de branchements exposés auprès de la société SIEA, et des sommes payées au Trésor public (sans majoration), dans la mesure où elles ont été exposées en pure perte du fait de la résolution de la vente, soit un total de 7.701,66 euros que la SCEA LA GONTRIE sera condamnée à leur payer.
Enfin, Monsieur et Madame [H] ne justifient par aucune pièce avoir subi une atteinte psychologique, une atteinte à leur sentiment d’affection, d'honneur ou de considération en lien avec l'achat du terrain et ils seront déboutés de leur demande au titre du préjudice moral.
La SCEA LA GONTRIE, partie perdante, sera condamnée aux dépens, en ce compris ceux de l'expertise judiciaire.
Au titre de l'équité, elle sera condamnée à payer la somme de 3.000 euros à Monsieur et Madame [H] sur le fondement sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
En application de l'article 514-1 du Code de procédure civile, il y a lieu d'écarter l'exécution provisoire de la décision, celle-ci n'étant pas compatible avec la nature de l'affaire.
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal,
PRONONCE la résolution de la vente de la parcelle de terrain cadastrée [Adresse 5] intervenue suivant acte notarié du 25 mai 2018 entre Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] et la SCEA LA GONTRIE, aux torts de celle-ci.
CONDAMNE la SCEA LA GONTRIE à en restituer le prix de 136.360 euros à Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H].
CONDAMNE la SCEA LA GONTRIE à payer à Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] la somme de 7.917 euros correspondant au coût des frais de notaire exposés lors de la vente outre la somme de 5.990 euros correspondant au coût des frais d'agence immobilière exposés pour l'achat du terrain, à titre de dommages et intérêts.
CONDAMNE la SCEA LA GONTRIE à payer à Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] la somme de 7.701,66 euros correspondant aux frais exposés suite à l'achat du terrain, à titre de dommages et intérêts.
CONDAMNE la SCEA LA GONTRIE à payer à Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
DÉBOUTE Monsieur [O] [H] et Madame [I] [C] épouse [H] du surplus de leurs demandes.
CONDAMNE la SCEA LA GONTRIE aux dépens, en ce compris ceux de l'expertise judiciaire.
ÉCARTE l'exécution provisoire.
La présente décision est signée par Madame BOULNOIS, Vice-Présidente, et par Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT