N° RG 23/01618 - N° Portalis DBX6-W-B7H-XQX6
7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 24 Avril 2024
54G
N° RG 23/01618
N° Portalis DBX6-W-B7H-XQX6
Minute n° 2024/
AFFAIRE :
[D] [P],
[V] [H] [X] [T]
C/
S.A. ALLIANZ FRANCE
Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
la SELAS ELIGE [Localité 5]
la SELARL SAINT-JEVIN
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats :
Monsieur Gilles TOCANNE, Magistrat Honoraire Juridictionnel, magistrat rapporteur
Lors du délibéré :
Madame Anne MURE, Vice-Présidente,
Madame Alice VERGNE, Vice-Présidente,
Monsieur Gilles TOCANNE, Magistrat Honoraire Juridictionnel,
Lors des débats : Madame Elodie GUILLIEU, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier
Lors du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier
DEBATS :
à l’audience publique du 24 Avril 2024,
Monsieur Gilles TOCANNE, magistrat chargé du rapport, a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.
JUGEMENT :
Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe
DEMANDEURS
Monsieur [D] [P]
né le 14 Juin 1989 à [Localité 9] (PYRENEES-ATLANTIQUES)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 8]
représenté par Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
Madame [V] [H] [X] [T]
née le 26 Janvier 1990 à [Localité 6] (CALVADOS)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
DEFENDERESSE
S.A. ALLIANZ FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par Maître Claire SAINT-JEVIN de la SELARL SAINT-JEVIN, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
****************************
EXPOSE DU LITIGE.
Le 23 septembre 2019, M. [D] [P] et Mme [V] [T] ont acquis des époux [Z] une maison d’habitation sise [Adresse 3] [Localité 8], la SARL AQUITAINE DIAGNOSTIC BATIMENT, désormais en liquidation judiciaire et assurée auprès de la SA ALLIANZ IARD, ayant préalablement réalisé un diagnostic technique concluant que “l’installation de l’immeuble est raccordée au tout à l’égout et possède des réseaux séparatifs pour les eaux usées et les eaux pluviales”.
Déclarant avoir postérieurement découvert qu’en réalité les eaux usées de la buanderie se déversaient dans un bac extérieur avant d’être pompées et renvoyées vers le réseau EP et faisant état d’un certificat de non conformité de cette installation établi le 29 octobre 2020 par L’EAU BORDEAUX METROPOLE qui exigeait la réalisation sous douze mois de travaux permettant d’y remédier, par acte du 13 février 2023, M. [P] et Mme [T] ont saisi le tribunal judiciaire de Bordeaux d'une action indemnitaire directe dirigée contre la SA ALLIANZ IARD sur le fondement principal de l’article 1231-1 du code civil.
Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 7 décembre 2023 par M. [P] et Mme [T],
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Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 23 octobre 2023 par la SA ALLIANZ IARD,
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 février 2024 et l'affaire fixée pour plaidoiries à l'audience du 6 mars 2024, date à laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION.
Les demandeurs sollicitent, désormais sur le fondement de l’article 1240 du code civil, à titre principal la condamnation de la SA ALLIANZ IARD à leur payer les sommes de 14.115,20 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2022 en réparation de leur préjudice matériel outre 10.000 euros également avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2022 en réparation de leur préjudice moral et à titre subsidiaire l’organisation d’une mesure d’expertise permettant d’apprécier la conformité réglementaire de l’installation et son caractère décelable par simple examen visuel.
En cas de vente d’un immeuble bâti, l’article L 271-4 du code de la construction et de l’habitation dispose qu’un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente.
Si le diagnostiqueur est contractuellement seulement tenu à l'égard du vendeur, en l’absence de lien contractuel avec l’acquéreur celui-ci peut agir sur le fondement de l’article 1240 du code civil et des principes de la responsabilité délictuelle, à charge pour lui de rapporter la preuve du dommage que lui cause la mauvaise exécution, par ce technicien, du contrat qu'il a conclu avec le vendeur à savoir lorsque le diagnostic n'a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l'art tout en se révélant erroné.
Cette faute s’apprécie par rapport à la mission légale ou réglementaire du diagnostiqueur.
Il résulte du 8° de l’article L 271-4 précité et de l’article 1331-11-1 du code de la santé publique qu’en ce qui concerne l’assainissement, seule est obligatoire l’annexion d’un document établi après contrôle des installations d’assainissement non collectif et datant de moins de trois ans.
Ce n’est qu’en l’absence de raccordement que le diagnostiqueur décrit et vérifie alors la conformité à la réglementation du système d'assainissement non collectif.
En l’espèce, la SARL AQUITAINE DIAGNOSTIC BATIMENT concluait, dans son rapport de repérage au raccordement au réseau d’assainissement collectif du 15 mars 2019 annexé à l’acte de vente, que les résaux EP et EU étaient conformes et que “l’installation de l’immeuble est raccordée au tout à l’égout et possède des réseaux séparatifs pour les eaux usées et les eaux pluviales”.
Il n’est pas contesté que l’immeuble vendu était bien raccordé dans son intégralité au système collectif d’assainissement, ce que ne contredit pas le rapport de contrôle de L’EAU [Localité 5] METROPOLE daté du 29 octobre 2020.
Ce rapport fait état d’une non conformité des évacuations de la douche et de la machine à laver car raccordées au réseau EP du garage et vise à cet effet les articles L 1331-1 à L 1331-8 du code de la santé publique et le règlement d’assainissement de [Localité 5] METROPOLE.
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Les articles L 1331-1 à L 1331-8 du code de la santé publique étant muets quant à l’interdiction d’un réseau unitaire sur la commune de [Localité 8], celle-ci trouve nécessairement sa source dans le règlement local d’assainissement.
Or, ainsi que le soutient à juste titre la SA ALLIANZ IARD, la SARL AQUITAINE DIAGNOSTIC BATIMENT, après avoir valablement constaté que l’immeuble était raccordé au réseau public d’assainissement collectif, n’était pas légalement ou contractuellement tenue de contrôler cette installation et plus particulièrement sa conformité de détail au règlement d’assainissement de [Localité 5] METROPOLE.
Le diagnostiqueur a également mentionné dans son rapport l’existence de deux réseaux séparatifs pour les eaux usées d’une part et les eaux pluviales d’autre part mais cette précision n’est aucunement erronée ni quant à son principe ni quant à la réalité de leurs raccordements respectifs au réseau public d’assainissement, le rapport n’ayant d’autre objet que la vérification de l’existence et de l’implantation d’un réseau collectif.
C’est exclusivement en ce sens, conforme aux articles L 271-4 du code de la construction et L 1331-11-1 du code de la santé publique, que doit être comprise la référence à la conformité des réseaux EU et EP sans extension à la norme locale issue du règlement d’assainissement de [Localité 5] METROPOLE, y compris au titre d’un devoir général de conseil.
Or, le rapport de L’EAU [Localité 5] METROPOLE constate exclusivement un défaut de conformité à ce règlement, extérieur à la sphère d’intervention de la SARL AQUITAINE DIAGNOSTIC BATIMENT, les deux rapports n’ayant pas le même objet.
La SARL AQUITAINE DIAGNOSTIC BATIMENT n’a donc pas manqué à la bonne exécution de la mission qui lui avait été confiée par les vendeurs dans les limites définies par les articles susvisés du code de la construction et du code de la santé publique et, en l’absence de faute de sa part, les demandes indemnitaires dirigées contre son assureur seront intégralement rejetées.
Quant à la demande d’expertise, soutenue à titre subsidiaire, elle ne constitue pas une véritable prétention au sens des articles 4, 5 et 30 du code de procédure civile.
En effet, en application des articles 9 et 132 du code de procédure civile les parties doivent, plus particulièrement devant le juge du fond, apporter et produire spontanément les pièces nécessaires au soutien de leurs prétentions et l'article 146 du même code dispose qu'une mesure d'instruction ne doit pas avoir vocation à pallier leur carence en matière de preuve.
C'est la raison pour laquelle, aux termes de l'article 232 du même code, la mesure d'instruction, au fond, n'est ordonnée que si le juge a besoin d'être éclairé sur une question de fait nécessitant les lumières d'un technicien.
En l’espèce, en l’absence d’erreur du diagnostiqueur et de démonstration du recours à une méthode ne respectant ni les normes édictées ni les règles de l'art, la demande d’expertise sera rejetée car aucune mesure d’instruction n’est nécessaire.
Il sera rappelé que conformément à l'article 514 du code de procédure civile, en sa rédaction applicable au présent litige, le présent jugement est exécutoire à titre provisionnel.
Il n’est pas inéquitable de laisser aux parties la charge des frais exposés pour leur défense et non compris dans les dépens, mis à la charge de M. [P] et Mme [T], partie perdante.
EN CONSEQUENCE
Le Tribunal,
DÉBOUTE M. [D] [P] et Mme [V] [T] de l’ensemble de leurs demandes,
RAPPELLE que le présent jugement est de droit exécutoire par provision,
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [D] [P] et Mme [V] [T] aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La présente décision est signée par Madame Anne MURE, Vice-Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,