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14/03/2024 | FRANCE | N°22/05035

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6ème chambre civile, 14 mars 2024, 22/05035


6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 14 Mars 2024
60A

RG n° N° RG 22/05035

Minute n°





AFFAIRE :

[J] [B]
[Z] [B]
C/
Compagnie d’assurance AXA - DIRECTION REGIONALE SUD OUEST
CPAM DE LA GIRONDE






Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES
la SELARL RACINE BORDEAUX



COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Fanny CALES, ju

ge,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 11 Janvier 2024

JUGEMENT :

réputé...

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 14 Mars 2024
60A

RG n° N° RG 22/05035

Minute n°

AFFAIRE :

[J] [B]
[Z] [B]
C/
Compagnie d’assurance AXA - DIRECTION REGIONALE SUD OUEST
CPAM DE LA GIRONDE

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES
la SELARL RACINE BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Fanny CALES, juge,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,

DEBATS :

à l’audience publique du 11 Janvier 2024

JUGEMENT :

réputé contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDEURS

Monsieur [J] [B]
né le [Date naissance 5] 1993 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 4]

représenté par Maître Antoine CHAMBOLLE de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

Madame [Z] [B]
née le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 4]

représentée par Maître Antoine CHAMBOLLE de la SARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSES

SA AXA - DIRECTION REGIONALE SUD OUEST prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 10]

représentée par Maître Annie BERLAND de la SELARL RACINE BORDEAUX, avocats au barreau de BORDEAUX

CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualité audit siège
[Adresse 11]
[Localité 3]

défaillante

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 14 juin 2014 à [Localité 12], M. [J] [B] a été victime d’un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par M. [H] [I] assuré auprès de la compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD.

Il a été pris en charge par le SAMU et a été immédiatement transporté au CHU de [Localité 3] [9] où il a été constaté un traumatisme thoracique avec dissection aortique, associé à hémothorax bilatéral et un hémomédiastin, outre un traumatisme du membre inférieur gauche avec fracture du tiers inférieur du fémur et du plateau tibial.

Il a par la suite été hospitalisé au centre de rééducation de [8] jusqu’au 19 septembre 2014.

Il a été réhospitalisé du 23 au 25 août 2015 pour une ablation partielle des fils d’acier du sternum, puis du 19 au 21 juillet 2016 pour l’ablation du matériel d’ostéosynthèse et du 22 au 23 janvier 2018 pour l’ablation des fils d’acier restants.

Par jugement correctionnel en date du 19 mai 2015, le Tribunal de grande instance de Libourne a notamment :
- reconnu M. [B] coupable des faits de conduite d’un véhicule en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants et sous l’empire d’un état alcoolique, faits commis le 14 juin 2014 à [Localité 12] ;
- reconnu M. [I] coupable notamment des faits de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence à l’encontre de [B] [J], faits commis à [Localité 12] le 14 juin 2014 ;
- statué sur les peines ;

- déclaré M. [I] entièrement responsable des conséquences dommageables de l’infraction ;
- déclaré recevable la constitution de partie civile de M. [B] et constaté l’absence de demande.

Par un arrêt en date du 10 novembre 2017, la sixième chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Bordeaux, a, notamment :
- réformé le jugement en ce qu’il a déclaré M. [I] entièrement responsable des conséquences dommageables de l’infraction ;
- dit que le droit à indemnisation de M. [B] est limité à 50 % de son préjudice.

Par un arrêt en date du 8 janvier 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation (pourvoi n° 17-87.492) a, motifs pris que la cour d’appel a fait état de motifs pour partie hypothétiques et insuffisants à établir l’existence d’une faute de conduite commise par M. [B] en lien de causalité avec le dommage subi, cassé et annulé l’arrêt attaqué et renvoyé devant la même cour d’appel autrement composée.
Par un arrêt correctionnel en date du 17 décembre 2020, la Cour d’appel de Bordeaux a entre autres dispositions, confirmé en ses dispositions civiles le jugement du 19 mai 2015 concernant M. [B].

Parallèlement, et par ordonnance en date du 15 septembre 2016, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Libourne a fait droit à la demande d’expertise médicale de M. [B].

Dans un rapport déposé le 9 novembre 2018, le docteur [M] [K] a conclu à une date de consolidation de l’état de santé de M. [B] au 30 septembre 2015 et à un taux de déficit fonctionnel permanent de 20 %.

Estimant que les propositions d’indemnisation formulées étaient insuffisantes, M. [J] [B] a, par actes délivrés les 29 juin 2022, fait assigner devant le présent tribunal la compagnie AXA FRANCE IARD pour voir indemniser son préjudice ainsi que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (la C.P.A.M.) de la Gironde en qualité de tiers payeur.

La C.P.A.M. de la Gironde n’a pas constitué avocat. Il sera statué par jugement réputé contradictoire.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 11 janvier 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour, les parties en ayant été informées selon les modalités de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions n°1 notifiées par voie électronique le 26 mai 2023, M. [J] [B] et Mme [Z] [R] épouse [B] demandent au tribunal, au visa des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, de l’article 246 du code de procédure civile et des articles L. 211-9 et suivants du code des assurances, de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leurs fins, moyens et prétentions ;
- condamner la compagnie AXA à indemniser intégralement M. [B] de ses préjudices imputables à l’accident du 14 juin 2014 se décomposant comme suit :

demandes victime
PRÉJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

- DSA dépenses de santé actuelles
3 149,50 €
- FD frais divers
MÉMOIRE
- ATP assistance tierce personne
5 845,71 €
- PGPA perte de gains actuels
MÉMOIRE
permanents

- DSF dépenses de santé futures
299,00 €
- Frais divers
789,00 €
- ATP assistance tiers personne
74 127,16 €
- IP incidence professionnelle
70 000,00 €
PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

- DFTP déficit fonctionnel temporaire partiel
4 480,00 €
- SE souffrances endurées
35 00,00 €
- PET préjudice esthétique temporaire
2 000,00 €
permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
38 500,00 €
- PE Préjudice esthétique permanent
2 000,00 €
- PA préjudice d'agrément
15 000,00 €
- TOTAL
241 013,35 €
Provision
35 000 €
TOTAL après provision
206.013,35 €

- condamner la compagnie AXA à indemniser le préjudice d’affection de Mme [Z] [B] victime par ricochet à hauteur de 10.000 euros ;
- dire que l’offre émise par AXA pour M. [B] a été formulée hors délai et est manifestement insuffisante et incomplète et équivaut à un défaut d’offre ;
- constater l’absence d’offre pour les préjudices d’accompagnement des victimes par ricochet ;
- dire que l’ensemble montant des indemnités allouées produira intérêt de plein droit au double du taux d’intérêt légal à compter du 9 avril 2019 avec anatocisme ;
- condamner la compagnie AXA à verser à M. [B] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la compagnie AXA à verser à Mme [B] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la compagnie aux entiers dépens en ce compris la note d’honoraires de Me LYON CAEN, avocat près la Cour de cassation.

En défense, et par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 16 août 2023, la compagnie AXA FRANCE IARD demande au tribunal, au visa des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances et de l’article 700 du code de procédure civile, de :
- la recevoir en ses écritures et la déclarer bien fondée ;
- limiter les sommes allouées à M. [B] au titre de l’indemnisation de ses préjudices comme suit

offres
PRÉJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

- DSA dépenses de santé actuelles
23,50 €
- FD frais divers
0,00 €
- ATP assistance tierce personne
0,00 €
- PGPA perte de gains actuels
0,00 €
permanents

- DSF dépenses de santé futures
0,00 €
- Frais divers
789,00 €
- ATP assistance tiers personne
0,00 €
- IP incidence professionnelle
0,00 €
PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

- DFTP déficit fonctionnel temporaire partiel
3 346,50 €
- SE souffrances endurées
12 800,00 €
- PET préjudice esthétique temporaire
800,00 €
permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
18 500,00 €
- PE Préjudice esthétique permanent
1 200,00 €
- PA préjudice d'agrément
0,00 €
- TOTAL
37 459,00 €
Provision
35000
TOTAL après provision
2 459,00 €

- déduire de l’indemnisation allouée la provision de 35.000 euros d’ores et déjà versée ;
- constater qu’une offre définitive d’indemnisation suffisante a été adressée par la société AXA le 2 février 2022 à M. [B] ;
- débouter M. [B] de sa demande de condamnation au paiement d’intérêt au double du taux légal à compter du 9 avril 2019 avec anatocisme ;
- limiter le cours des intérêts au double du taux légal sur les sommes qui seront allouées par le tribunal de céans à M. [B] du 9 avril 2019 au 2 février 2022 sans anatocisme ;
- limiter l’indemnisation allouée à Mme [Z] [B] au titre de son préjudice d’affection à la somme de 1.000 euros ;
- débouter Mme [Z] [B] de sa demande de condamnation au paiement d’intérêt au double du taux légal à compter du 9 avril 2019 avec anatocisme sur les sommes qui lui seront allouées ;
- réduire à de plus justes proportions la somme allouée à M. [B] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
- débouter Mme [B] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
- débouter M. [B] de sa demande tendant à voir inclus dans les dépens la note d’honoraires de Me LYON CAEN, avocat près la Cour de cassation ;
- écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir, à tout le moins limiter l’exécution provisoire à hauteur de 50 %.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que la Cour d’appel de Bordeaux a jugé le 17 décembre 2020 que le droit à indemnisation de M. [B], en application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, est entier.

Il y a lieu de procéder à la liquidation de son préjudice.

Sur la liquidation du préjudice de M. [J] [B]

Le rapport du docteur [K] indique que M. [J] [B], né le [Date naissance 5] 1993, a présenté suite aux faits un traumatisme thoracique avec dissection aortique, associé à hémothorax bilatéral et un hémomédiastin, outre un traumatisme du membre inférieur gauche avec fracture du tiers inférieur du fémur et du plateau tibial.

Les suites sont marquées par plusieurs interventions chirurgicales (enclouage centro-médullaire du fémur gauche et vissage du plateau tibial le 17 juin 2014, remplacement de la crosse aortique par prothèse avec réimplantation des trous supra-aortiques le 26 juin 2014), une immobilisation du membre inférieur et un suivi cardiologique.

Il a été hospitalisé au centre de rééducation de [8] jusqu’au 19 septembre 2014 puis une ré hospitalisation du 23 au 25 août 2015 pour une ablation partielle des fils d’acier du sternum.

L’expert a fixé la consolidation au 30 septembre 2015 soit un an après la sortie du centre de rééducation.

Par la suite, M. [B] a été réhospitalisé du 19 au 21 juillet 2016 pour l’ablation du matériel d’ostéosynthèse et du 22 au 23 janvier 2018 pour l’ablation des fils d’acier restants.

L’expert retient un déficit fonctionnel permanent de 10 % en raison d’une limitation fonctionnelle sur le plan cardiologique pour des efforts substantiels sans signe de dysfonction ou d’ischémie myocardique avec une contrainte thérapeutique et une surveillance cardiologique régulière, outre sur le plan rhumatologique une limitation minime de la flexion du genou gauche.

Au vu de ce rapport, le préjudice corporel de M. [J] [B] sera évalué ainsi qu’il suit, étant observé qu’en application de l’article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, étant précisé, comme le rappelle le demandeur, qu’aux termes des dispositions de l’article 246 du code de procédure civile le juge n’est pas lié par les constations ou les conclusions de l’expert.

1° - Préjudices patrimoniaux

a - Préjudices patrimoniaux temporaires

- Dépenses de santé actuelles (DSA)

Ces dépenses correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation pris en charge par les organismes sociaux ou restés à la charge effective de la victime.

Il s’évince du relevé des débours de la CPAM que cette dernière a exposé entre le 15 juin 2014 et le 27 février 2015 pour le compte de son assuré social M. [J] [B] un total de 78.446,77 euros au titre des frais hospitaliers, médicaux et pharmaceutiques, somme qu'il y a lieu de retenir.

M. [J] [B] fait état des dépenses suivantes demeurées à sa charge :
- 23,50 euros de franchise mentionnée sur le décompte de la CPAM ;
- 3.126 euros au titre de frais d'hospitalisation restés à sa charge.

Au titre de cette dernière somme, M. [B] soutient que ces frais relèvent des conséquences directes de l'accident puis de l'hospitalisation et qu'il était dans l'incapacité de faire face à ces frais, qu'il se trouvait en situation de précarité sociale et financière du fait de ses blessures alors même qu'AXA n'a formulé son offre provisionnelle que le 5 juin 2018.

AXA FRANCE IARD soutient que ces sommes sont des pénalités de retard dès lors qu'un avis à tiers détenteur a été émis, que ces pénalités sont les conséquences directes de l'absence de paiement imputable à M. [B] et que l'assureur ne saurait supporter la situation financière de la victime ou les conséquences de sa décision de ne pas avoir souscrit une complémentaire santé.

M. [B] produit la notification d'une opposition à tiers détenteur pour différentes hospitalisations à la suite de l'accident du 14 juin 2014 et pour des titres émis par l'administration les 1er et 8 août 2014 ainsi que le 17 octobre 2014.

En outre, il n'est pas établi, comme l'affirme AXA FRANCE IARD, que des pénalités de retard ont été saisies parmis ces sommes puisque l'avis à tiers détenteur n'est qu'une prérogative de l'administration permettant le recouvrement de ses dettes sans qu'elle n'implique nécessairement des pénalités de retard.

Aussi il convient de retenir cette somme à hauteur de 3.126 euros restée à charge de M. [B].

Dès lors, ce poste de préjudice sera fixé à la somme totale de 81.572,77 euros.

- Frais divers (F.D.)

M. [B] sollicite que ce poste soit mis en réserve ; AXA FRANCE IARD conclut au rejet en indiquant que le demandeur devrait être en mesure de chiffrer ces postes compte tenu de la date de l’accident.

Pour être réparable, le préjudice doit présenter un caractère certain. Aussi, un poste de préjudice peut être mis en mémoire dès lors que l’existence de ce préjudice est établie mais qu’il ne peut être quantifié au jour du jugement.

Or, M. [B] n’apporte aucune explication quant à cette demande tendant à réserver ces frais divers avant consolidation alors même que son état est stabilisé, selon l’expert, depuis le 30 septembre 2015.

Le demandeur ne justifie donc pas de l’existence de ce poste, de sorte que ce poste n’est pas réservé mais rejeté.

- Assistance temporaire d’une tierce personne pour les besoins de la vie courante

M. [B] sollicite une somme de 5.845,71 euros de ce chef en soutenant qu’il a eu besoin de l’assistance d’une tierce personne à hauteur de 2 heures par jour du 19 septembre 2014 au 19 décembre 2014 et à hauteur de 2 heures par semaine du 19 décembre 2014 au 30 septembre 2015. Il sollicite une indemnisation au taux horaire de 22 euros.

AXA FRANCE IARD conclut au rejet de cette demande en indiquant que ce besoin n’est nullement avéré, qu’il n’est pas documenté et que l’expert a constaté que l’état de santé de M. [B], en sortant de rééducation, ne justifiait nullement un besoin en tierce personne.

Ce poste de préjudice est lié à la nécessité, pour la victime, du fait de son handicap, d’être assistée par une tierce personne, spécialisée ou non s’agissant notamment du ménage, des actes de la vie courante, d’une incitation ou simple surveillance nocturne.

Il est constant que ces frais sont fixés en fonction des besoins de la victime et du rapport d’expertise et que l’indemnisation de ce poste de préjudice n’est pas subordonnée à la production de justificatifs et n’est pas réduite en cas d’assistance bénévole par un membre de la famille. Il convient en outre de rappeler que la tierce personne s’entend de l’aide pour tous les actes essentiels de la vie courante.

En l’espèce, l’expert judiciaire écrit qu’aucune aide humaine n’a été documentée et/ou évoquée.

Toutefois, l’expert ne conteste pas les doléances de M. [B] qui indique qu’à la sortie de la rééducation, au 19 septembre 2014, il est retourné vivre chez sa mère et a marché avec une béquille pendant un mois ce qui implique nécessairement une assistance, même minime, pour les actes de la vie quotidienne sur cette période.

Aussi, l’absence de reprise de la conduite automobile alléguée pendant une durée de trois mois apparait cohérente avec les circonstances de l’accident. M. [B] est donc bien fondé à solliciter une assistance tierce personne pour ses déplacements sur cette période. Cependant, il n’existe aucun élément tendant à établir que M. [B] ne pouvait plus conduire jusqu’à la consolidation.

Il y a donc lieu de retenir le besoin en tierce personne suivant :
- une heure par jour pendant 30 jours pour la convalescence ;
- une heure trente par semaine pendant 90 jours pour la conduite ;

Il sera retenu un taux horaire de 18 euros s’agissant d’une aide nécessaire qui ne requiert aucune qualification spécialisée

Ce poste de préjudice sera réparé à hauteur de la somme de 887,14 euros (1h x 18 € x
30 j + 1.5h x 18 € x 90 j / 7j).

- Perte de gains professionnels actuels (P.G.P.A.)

M. [B] sollicite que ce poste soit mis en réserve ; la compagnie AXA conclut au débouté.

La perte de gains professionnels actuels concerne le préjudice économique de la victime imputable au fait dommageable, pendant la durée de son incapacité temporaire.

L’expert ne prend pas position sur les arrêts de travail imputables à l’accident. Toutefois il écrit que la victime a été incarcérée et mise sous bracelet électronique mais qu’il ignore pendant quelle période. Ainsi, il n’a pu déterminer les périodes de pertes de gains professionnels imputables à l’accident. L’expert ajoute que l’état de santé était très rassurant à la sortie du centre de rééducation.

Il convient de constater que la CPAM de la Gironde fait valoir une créance à hauteur de 10.200,52 euros au titre des indemnités journalières versées entre le 26 juin 2014 et le 30 septembre 2015, somme qu’il convient de retenir.

M. [B] ne prétend pas avoir subi une perte de salaire et n’apporte aucune explication à l’appui de sa demande tendant à voir ce poste mis en réserve pour un poste temporaire alors même que la consolidation remonte à l’année 2015.

Aussi, il n’y a pas lieu de réserver ce poste de préjudice mais de le fixer à hauteur de la créance de la CPAM.

b - Préjudices patrimoniaux permanents

- Dépenses de santé futures (DSF)

Il s’agit les frais médicaux et pharmaceutiques, non seulement les frais restés à la charge effective de la victime, mais aussi les frais payés par des tiers (sécurité sociale, mutuelle...), les frais d’hospitalisation, et tous les frais paramédicaux (infirmiers, kinésithérapie etc.), même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après la consolidation.

M. [B] sollicite une somme de 299 euros au titre d’une chambre à la clinique [13] pour l’hospitalisation du 22 au 24 janvier 2018.

AXA s’y oppose en indiquant qu’il s’agit d’une chambre particulière premium, ce qui relève d’un choix personnel de M. [B] et qui ne saurait être pris en charge par l’assureur.

Or la victime a droit à la prise en charge de l’ensemble des frais liés à l’hospitalisation notamment pour accorder à la victime le confort dont elle aurait bénéficié si l’accident ne s’était pas produit.

Aussi, il convient de retenir cette somme de 299 euros.

- Frais divers post-consolidation

Les honoraires du médecin conseil de la victime sont une conséquence de l’accident. La victime a droit au cours de l’expertise à l’assistance d’un médecin dont les honoraires doivent être intégralement remboursés sur production de la note d’honoraires sauf abus.

Au vu de la facture produite, ce poste de préjudice sera réparé à hauteur de la somme de 789 euros.

- Assistance par tierce-personne (ATP)

M. [B] sollicite une somme de 74.127,16 euros, soit une heure par semaine à 22 euros le tout capitalisé à titre viager.

AXA conclut au rejet, l’expert n’ayant retenu aucun besoin en aide humaine à titre viager.

Ces dépenses sont liées à l’assistance permanente d’une tierce personne pour aider la victime handicapée à effectuer les démarches et plus généralement les actes de la vie quotidienne.

Il est vrai que le docteur [K] n’a retenu aucun besoin en tierce personne à titre viager.
Le certificat médical du docteur [C], médecin traitant, établi le 3 février 2021 décrit une douleur résiduelle constante au sternum avec dissection aortique en soin ; douleurs qui handicapent beaucoup M. [B] et l’empêchent d’exercer son métier de maçon et nécessitant un reclassement sans port de charges lourdes. Or, ce certificat n’est pas corroboré par l’avis du médecin du travail.
En outre, il ne saurait être déduit de l’inaptitude à un poste de maçon ou à un reclassement sans port de charges lourdes un besoin général en tierce personne pour la réalisation d’actes ponctuels de la vie quotidienne, notamment lors des courses du quotidien.

Le besoin n’étant pas établi, il y a lieu de rejeter cette demande.

- Incidence professionnelle (I.P)

L’incidence professionnelle correspond aux séquelles qui limitent les possibilités professionnelles ou rendent l’activité professionnelle antérieure plus fatigante ou pénible traduisant une dévalorisation sur le marché du travail.

M. [B] sollicite une somme de 70.000 euros en soutenant qu’il était peintre avant l’accident, qu’il ne peut exercer son métier sans douleur à la position assise et qu’il souffre d’un essoufflement important. Il indique qu’il n’a pas pu reprendre son travail d’enduiseur façadier nécessitant le port de charges lourdes et qu’il convient de retenir une fatigabilité et une gêne douloureuse outre l’incapacité à exercer son ancienne profession.

La compagnie AXA conclut au rejet de cette demande en indiquant que M. [B] ne justifie pas qu’il exerçait réellement la profession de peintre en bâtiment avant l’accident, que l’expert n’a retenu aucune incidence professionnelle, que ce poste ne saurait être déduit des seules séquelles justifiant le taux de déficit fonctionnel permanent et que la note technique du docteur [V], établie non contradictoirement, et le certificat médical du médecin traitant n’apportent aucun élément nouveau. Par ailleurs, la compagnie relève que la victime a elle-même déclarée avoir repris son activité de plaquiste dans l’entreprise dans laquelle il travaillait. Il a indiqué au sapiteur psychiatre avoir un travail régulier chez un employeur qui lui a proposé de faire une formation pour stabiliser son emploi. Aussi, AXA conclut à l’ignorance de sa profession avant l’accident, de sa situation actuelle sur le plan professionnel, de son éventuelle réorientation professionnelle ou d’un éventuel licenciement.

C’est à raison que la compagnie AXA s’interroge sur l’activité exercée antérieurement par M. [B]. En effet, ce dernier déclare dans ses écritures exercer la profession de peintre en bâtiment puis d’enduiseur façadier. Il a en effet indiqué à l’expert judiciaire avoir tenté de reprendre en CDD son travail d’enduiseur façadier mais a dû arrêter en raison des difficultés rencontrées à la position debout et au port de charges lourdes. Par ailleurs, l’expert reprend qu’au moment des faits M. [B] était en CDI dans le bâtiment mais en qualité de coffreur bancheur. La victime déclare au sapiteur psychiatre en mars 2018 avoir repris progressivement sa profession cette fois ci de plaquiste dans l’entreprise dans laquelle il travaille toujours au jour de l’entretien. Enfin, son médecin traitant a conclu à l’impossibilité d’exercer le métier de maçon. Force est de constater que M. [B] ne verse par ailleurs aucun bulletin de salaire et aucun contrat de travail de nature à justifier de la ou les professions exercées au moment de l’accident.

Toutefois, il ne peut être occulté que M. [B] occupait un emploi étant donné le versement d’indemnités journalières par la CPAM ; activité professionnelle manifestement dans le secteur du bâtiment.

L’expert conclut à l’absence d’incidence professionnelle du seul fait de la prothèse de la crosse aortique vu l’absence de souffrance au sternum et les douleurs minimes au membre inférieur gauche. Il relève toutefois, au titre du DFP, une limitation fonctionnelle sur le plan cardiologique pour les efforts substantiels type sport ce qui entraine, nécessairement, une augmentation de la pénibilité d’un emploi dans le secteur d’activité du demandeur.

Ensuite, si M. [B] se prévaut de l’impossibilité de porter des charges lourdes, il ne verse à l’appui de cette allégation que le certificat médical de son médecin traitant et la note technique du docteur [V] réalisée non contradictoirement et sans examen de la victime. Il n’est justifié d’aucun aménagement de poste ou avis de la médecine du travail. L’impossibilité au port de charges lourdes n’est pas établie.

Aussi, alors que M. [B] était âgé de 21 ans au jour de la consolidation, il convient de lui allouer la somme de 20.000 euros de ce chef en réparation de l’augmentation de la pénibilité à l’emploi dans son secteur d’activité.

2° - Préjudices extra-patrimoniaux

a - Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire (DFT)

Ce poste de préjudice indemnise l'aspect non économique de l'incapacité temporaire, c'est-à-dire l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu'à sa consolidation. Ce préjudice correspond à la gêne dans tous les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant sa maladie traumatique et à la privation temporaire de sa qualité de vie.

Au regard des conclusions de l’expert, il convient de retenir les périodes suivantes au titre du DFT total :

- du 15/06/2014 au 19/09/2014, comme le relève AXA l’accident est survenu dans la nuit du 14 au 15, soit 97 jours ;
- du 19/07/2016 au 21/07/2016, soit 3 jours ;
- du 23/08/2017 au 25 août 2017, soit 3 jours ;
- du 22/01/2018 au 23/01/2018, soit 2 jours ;

Calculée sur la base de 27 euros par jour pour un DFT à 100%, il doit être arrêté au regard de ces conclusions à la somme de 2.835 euros (27 € x 105 j).

Ensuite, l’expert se contredit dans le contenu de la discussion et dans ses conclusions en retenant un chiffrage d’abord de 15 %, ensuite de 20 % pour la période du 20/09/2014 au 30/09/2015, hors hospitalisation du 15/06/2014 au 19/09/2014, soit 270 jours.

Au regard du compte rendu d’hospitalisation de [8] du 19 septembre 2014 où l’état de santé est qualifié de très rassurant et l’évolution satisfaisante, l’absence d’antalgiques systématiques si ce n’est du doliprane à la demande et l’absence de besoin en rééducation complémentaire, il convient de retenir pour l’ensemble de la période un DFT de 15  % en moyenne.

Il est donc retenu une somme de 1.093,50 euros (27 € x 15 % x 270 j) pour cette période.

Le poste DFT est donc fixé à la somme totale de 3.928,50 euros.

- Souffrances endurées (SE)

Elles sont caractérisées par les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité, des traitements subis.

L'expert les a évalué à 4/7 en raison du grave traumatisme thoracique ayant nécessité une hospitalisation de plus de trois mois consécutifs, des douleurs post chirurgie cardiaque et post fracture du membre inférieur gauche.

Cette évaluation apparait adaptée au regard du barème médico-légal dès lors que comme le rappelle AXA, M. [B] a été hospitalisé pendant un mois jusqu’au 14 juillet 2014 au CHU de [Localité 3] avant rééducation pendant deux mois à [8]. En outre, il n’y a pas lieu de reporter la date de consolidation médico-légale fixée au 30 septembre 2015, les souffrances post-consolidation étant en tout état de cause prises en compte au titre du poste DFP.

Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 20.000 euros.

- Préjudice esthétique temporaire (P.E.T.)

Ce préjudice correspond à l’atteinte à l’apparence physique avant la date de consolidation.

L'expert a retenu un préjudice esthétique temporaire de 2/7 en raison des cicatrices, la marche en fauteuil roulant ou avec une canne anglaise jusqu'à fin octobre 2015.

Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 2.000 euros.

b - Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent (D.F.P.)

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Plus précisément, il s'agit du préjudice non économique lié à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours.

L'expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 10 % principalement en raison d’une limitation fonctionnelle sur le plan cardiologique pour des efforts substantiels sans signe de dysfonction ou d’ischémie myocardique avec une contrainte thérapeutique et une surveillance cardiologique régulière, outre sur le plan rhumatologique une limitation minime de la flexion du genou gauche.

Or il ne ressort pas de ses conclusions que l’expert a pris en compte les douleurs au sternum et au thorax alléguées par M. [B] et objectivée par son médecin-traitant. Toutefois, les conséquences sur la qualité de vie ont bien été prises en compte en retenant la surveillance cardiologique régulière. En outre, le demandeur ne justifie pas de l’existence d’autre trouble particulier dans ses propres conditions d’existence.

Il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 25.500 euros soit 2.550 euros du point d'incapacité correspondant à un point majoré afin de tenir compte des souffrances endurées post-consolidation et au regard de l'âge de la victime à la date de consolidation (22 ans).

- Préjudice d’agrément (P.A.)

Il vise à réparer le préjudice lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs. Ce poste inclut la limitation de la pratique antérieure.

L'expert retient l'impossibilité de pratiquer les activités sportives violentes type boxe et sport de contact.
Bien qu’il a indiqué à l’expert pratiquer ce sport, M. [J] [B] ne verse aucune pièce tendant à établir qu’il pratiquait effectivement la boxe avant l’accident.

Dès lors, il convient de rejeter la demande à ce titre.

- Préjudice esthétique permanent (P.E.P.)

Ce poste de préjudice vise à réparer l’atteinte à l’apparence physique après la date de consolidation.

L'expert a retenu un préjudice esthétique permanent de 1/7 en raison des cicatrices post opératoires et post accidentelles qui sont cachées par les vêtements en dehors de l'alopécie occipitale.

Dès lors, il convient de fixer l'indemnité à ce titre à 2.000 euros.

Au total, les divers postes de préjudices seront récapitulés comme suit :

Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

- DSA dépenses de santé actuelles
81 572,77 €
3 126,00 €
78 446,77 €
- FD frais divers
0,00 €
0,00 €

- ATP assistance tierce personne
887,14 €
887,14 €

- PGPA perte de gains actuels
10 200,52 €
0,00 €
10 200,52 €
permanents

- DSF dépenses de santé futures
299,00 €
299,00 €

- Frais divers
789,00 €
789,00 €

- ATP assistance tiers personne
0,00 €
0,00 €

- IP incidence professionnelle
20 000,00 €
20 000,00 €

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

- DFTP déficit fonctionnel temporaire partiel
3 928,50 €
3 928,50 €

- SE souffrances endurées
2 000,00 €
2 000,00 €

- PET préjudice esthétique temporaire
0,00 €

permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
25 500,00 €
25 500,00 €

- PE Préjudice esthétique permanent
2 000,00 €
2 000,00 €

- PA préjudice d'agrément
0 €
0 €

- TOTAL
147 176,93 €
58 529,64 €
88 647,29 €
Provision

35 000,00 €

TOTAL aprés provision

23 529,64 €

Sur l'imputation de la créance des tiers payeurs et la réparation des créances

Il convient de rappeler qu’en vertu des principes posés par les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale et 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 modifiée par l’article 25 III et IV de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 :
- les recours subrogatoires des caisses et tiers payeurs contre les tiers responsables s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel,
- conformément à l’article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l’indemnisation, lorsqu’elle n’a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; qu’en ce cas, l’assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence à la caisse subrogée,
- cependant, si le tiers payeur établit qu’il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s’exercer sur ce poste de préjudice

En l’espèce, la créance des tiers payeurs s’imputera ainsi :

- la créance de 78.446,77 euros exposés par la CPAM pour des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques s’imputera sur les dépenses de santé actuelles ;
- la créance de 10.200,52 euros d’indemnités journalières versées par la CPAM s’imputera sur les pertes de gains professionnels actuels ;

Après imputation de la créance des tiers-payeurs (88.647,29 euros) et déduction des provisions versées pour un total de 35.000 euros, le solde dû à M. [J] [B] et à la charge de AXA FRANCE IARD, s’élève à la somme de 23.529,64 euros.

L’organisme social n'a formulé aucune demande, ce qui laisse présumer qu'il a été ou sera désintéressé dans le cadre des dispositions du Protocole de 1983 ou de celui prévu à l’article L. 376-1 alinéa 6 du code de la sécurité sociale modifié par la loi du 21 Décembre 2006.

Sur la demande au titre du préjudice d’affection de Mme [Z] [B]

Le préjudice d’affection constitue le préjudice moral subi par certains proches, parents ou non, justifiant d’un lien affectif réel, au contact de la souffrance de la victime directe. Il n’est pas nécessaire que ces souffrances aient un caractère exceptionnel pour être indemnisées.

Au vu des liens familiaux, de l’âge de la victime au moment de l’accident, de l’importance des blessures et de la durée de la convalescence, il convient d’allouer à Mme [Z] [B], mère de M. [J] [B], la somme de 2.000 euros de ce chef.

Sur les intérêts au double du taux légal

Aux termes de l’article L. 211-9 du Code des assurances, une offre d’indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l’accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l’assureur n’a pas, dans les trois mois de l’accident, été informé de la consolidation de l’état de la victime. L’offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d’offre dans les délais impartis par l’article L. 211-9 du Code des assurances, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l’article L. 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.

La pénalité s'applique soit, à l'offre complète (conforme aux prescriptions légales) proposée par l'assureur retardataire, soit, en l'absence d'offre complète, à l'indemnisation fixée par le juge.

AXA FRANCE IARD a émis une offre définitive en date du 2 février 2022. Or cette offre est tardive puisqu’elle a été émise plus de cinq mois après le dépôt du rapport ayant fixé la consolidation de la victime le 9 novembre 2018.

Cette offre, d’un montant total de 35.000 euros, n’apparait pas manifestement insuffisante par rapport aux montants alloués par le présent tribunal de telle sorte qu’elle équivaut à un défaut d’offre.

En outre, AXA FRANCE IARD justifie que M. [B] n’a pas retiré la lettre recommandée avec accusé de réception contenant l’offre de l’assureur.

Aussi, il y a lieu de condamner AXA à payer à M. [B] les intérêts au double du taux légal à compter du 9 avril 2019 date d’expiration du délai de 5 mois, jusqu’au 2 février 2022, date d’émission de l’offre, et sur l’assiette de l’indemnité offerte, soit 35.000 euros.

L’article L. 211-13 du code des assurances ne déroge pas aux dispositions d’ordre public de l’article 1154, devenu 1343-2 du code civil, qui s’appliquent de manière générale aux intérêts moratoires.

Il convient donc d’ordonner la capitalisation de ces intérêts.

Aussi, conformément aux dispositions de l’article L. 211-9 du code des assurances, l’assureur n’est tenu de présenter une offre aux victimes par ricochet qu’en cas de réclamations.

Or en l’espèce, Mme [B] ne justifie d’aucune réclamation en ce sens.

Il y a lieu de la débouter de sa demande de doublement de l’intérêt légal.

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

Succombant à la procédure, AXA FRANCE IARD sera condamnée aux dépens de la présente instance.

S’il est sollicité la prise en charge d’une note d’honoraires d’un avocat au conseil Me LYON CAEN, ces frais ne relèvent pas des dépens et ne concernent pas la présente instance civile mais la procédure pénale. Cette demande est rejetée.

D’autre part, il serait inéquitable de laisser à la charge de demandeurs les frais non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner AXA FRANCE IARD à une indemnité en la faveur de M. [B] de 2.000 euros et en la faveur de Mme [B] de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit prévue par l’article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal,

RAPPELLE que le droit à indemnisation de M. [J] [B] à la suite de l’accident du 14 juin 2014 est entier ;

FIXE le préjudice subi par M. [J] [B], suite à l’accident dont il a été victime le 14 juin 2014, à la somme totale de 147.176,93 euros selon le détail suivant :

Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

- DSA dépenses de santé actuelles
81 572,77 €
3 126,00 €
78 446,77 €
- FD frais divers
0,00 €
0,00 €

- ATP assistance tierce personne
887,14 €
887,14 €

- PGPA perte de gains actuels
10 200,52 €
0,00 €
10 200,52 €
permanents

- DSF dépenses de santé futures
299,00 €
299,00 €

- Frais divers
789,00 €
789,00 €

- ATP assistance tiers personne
0,00 €
0,00 €

- IP incidence professionnelle
20 000,00 €
20 000,00 €

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

- DFTP déficit fonctionnel temporaire partiel
3 928,50 €
3 928,50 €

- SE souffrances endurées
2 000,00 €
2 000,00 €

- PET préjudice esthétique temporaire
0,00 €

permanents

- DFP déficit fonctionnel permanent
25 500,00 €
25 500,00 €

- PE Préjudice esthétique permanent
2 000,00 €
2 000,00 €

- PA préjudice d'agrément
0 €
0€

- TOTAL
147 176,93 €
58 529,64 €
88 647,29 €
Provision

35 000,00 €

TOTAL après provision

23 529,64 €

CONDAMNE AXA FRANCE IARD à payer à M. [J] [B] la somme de 23.529,64 euros au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel, après imputation de la créance du tiers payeur et déduction des provisions versées à hauteur de 35.000 euros ;

CONDAMNE AXA FRANCE IARD à payer à Mme [Z] [B] la somme de 2.000 euros au titre de son préjudice d’affection ;

CONDAMNE AXA FRANCE IARD à payer à M. [J] [B] les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’offre effectuée le 2 février 2022, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 9 avril 2019 et jusqu’au 2 février 2022, avec anatocisme conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

REJETTE la demande de doublement de l’intérêt au taux légal sur les indemnités allouées à Mme [Z] [B] ;

CONDAMNE AXA FRANCE IARD aux dépens de la présente instance ;

REJETTE la demande de condamnation de AXA FRANCE IARD à payer le montant de la note d’honoraires de Me LYON CAEN au titre des dépens ;

CONDAMNE AXA FRANCE IARD à payer à M. [J] [B] une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE AXA FRANCE IARD à payer à Mme [Z] [B] une somme unique de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

Le jugement a été signé par Fanny CALES, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 6ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/05035
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;22.05035 ?
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