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06/03/2024 | FRANCE | N°22/09595

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7ème chambre civile, 06 mars 2024, 22/09595


N° RG 22/09595 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
50G

N° RG 22/09595
N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

Minute n° 2024/





AFFAIRE :

[E] [N] épouse [B], [Y] [B]
C/
[K] [R] veuve [L]










Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Mathieu BONNET-LAMBERT
Me Anne-Charlotte DEVIENNE



COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du déli

béré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier...

N° RG 22/09595 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
50G

N° RG 22/09595
N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

Minute n° 2024/

AFFAIRE :

[E] [N] épouse [B], [Y] [B]
C/
[K] [R] veuve [L]

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Mathieu BONNET-LAMBERT
Me Anne-Charlotte DEVIENNE

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe

DEMANDEURS

Madame [E] [N] épouse [B]
née le 01 Octobre 1977 à [Localité 8] (HAUTE GARONNE)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Anne-Charlotte DEVIENNE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

Monsieur [Y] [B]
né le 23 Février 1978 à [Localité 7] (LANDES)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Me Anne-Charlotte DEVIENNE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDERESSE

Madame [K] [R] veuve [L]
née le 13 Juillet 1930 à [Localité 6] (TARN-ET-GARONNE)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Mathieu BONNET-LAMBERT, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
**************************

Madame [K] [R] veuve [L] était propriétaire d'une maison [Adresse 4] à [Localité 5]. Elle a mis cette maison en vente par l'intermédiaire de l'agence REALY SMART au prix de 1 149 500 euros, commission incluse.

Le 1er septembre 2022, Monsieur [Y] [B] et Madame [E] [N] épouse [B] lui ont adressé via l'agence REALY SMART une proposition d'achat pour un montant de 995 0000 euros sous condition suspensive d'obtention d'un prêt de 500 000 euros au taux maximal de 1,70%.

Madame [L] a vendu la maison à un autre acquéreur, Monsieur et madame [U], par l'intermédiaire d'une seconde agence immobilière, [Localité 5] BELLE MAISON.

Faisant valoir qu'elle avait de manière fautive rompu les pourparlers, Monsieur et Madame [B] ont par acte signifié le 15 décembre 2022, fait assigner Madame [K] [R] veuve [L] devant le Tribunal judiciaire aux fins de se voir indemnisés d'un préjudice.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 décembre 2023, Monsieur/la société demande au Tribunal de :

Vu les articles 1112 et 1240 et suivants du Code civil,
- JUGER que les pourparlers en cours entre les parties étaient à un stade très avancés et sur le point d’aboutir
- JUGER que les circonstances de leur rupture, par Madame [R] veuve [L], constituent une faute délictuelle
En conséquence, A titre principal,
- CONDAMNER Madame [R] veuve [L] à indemniser Madame et Monsieur [B] du préjudice subi en raison de cette rupture fautive des pourparlers, à hauteur de 99.500€
A titre subsidiaire,
- CONDAMNER Madame [R] veuve [L] à indemniser Madame et Monsieur [B] du préjudice subi en raison de cette rupture fautive des pourparlers, à hauteur de 5.000 €
A titre infiniment subsidiaire,
N° RG 22/09595 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

- CONDAMNER Madame [R] veuve [L] à indemniser Madame et Monsieur [B] du préjudice subi en raison de cette rupture fautive des pourparlers, à hauteur d’un montant que le Tribunal arbitrera
En tout état de cause,
- CONDAMNER Madame [R] veuve [L] à payer à Madame et Monsieur [B] la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
- CONDAMNER Madame [R] veuve [L] aux entiers dépens
- CONSTATER qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la décision à intervenir
- DEBOUTER Madame [R] veuve [L] de toute éventuelle demande contraire ou plus amples

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 13 décembre 2023, Madame [R] demande au Tribunal de :

Vu les dispositions des articles 1112 et suivants du code civil ;
DEBOUTER Madame [E] [N] épouse [B] et Monsieur [Y] [B] de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions
CONDAMNER Madame [E] [N] épouse [B] et Monsieur [Y] [B] à payer à Madame [L] une indemnité de 5 760 € TTC sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 décembre 2023

MOTIFS :

En application de l’article 1240 du Code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. ».

En application de l'article 1112 du code civil, l'initiative, le déroulement et la rupture des négociations pré contractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi. En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages.
Il appartient donc à Monsieur et Madame [B] de démontrer un comportement fautif ou de mauvaise foi de Madame [L] leur ayant causé un préjudice.
La proposition d'achat du 1er septembre 2022 émanant de Monsieur et Madame [B] n'a pas été contresignée du vendeur.
Dans un mail du 6 septembre 2022, Madame [V], la fille de Madame [L], a écrit à Maître [H], son Notaire : « avec l'accord de Madame [K] [L], ma mère, je vous transmets sa volonté, « je demande à Me [H] de préparer un compromis de vente reprenant les éléments fournis dans l'offre de REALY SMART ». En pièce jointe : copie de la proposition d'achat. ». Suite à ce mail,  Maître [H] a fait parvenir le 9 septembre 2022 au Notaire de Monsieur et Madame [B] un projet de compromis de vente, un rendez-vous de signature étant fixé le 15 septembre 2022.
N° RG 22/09595 - N° Portalis DBX6-W-B7G-XJMN

Madame [L] produit une offre d'achat en date du 1er septembre 2022 émanant de Monsieur et Madame [U] pour un montant de 1 040 000 euros, proposition d'achat sur laquelle Madame [L] a écrit le 12 septembre 2022 qu'elle l'acceptait à hauteur de 1 000 000 net vendeur et sans condition suspensive de changement d'usage.
Dans un mail également du 6 septembre 2022, Maître [H] avait écrit « je fais suite à ma conversation téléphonique avec Mme [V], la fille de Madame [L]... nous sommes dans une situation inconfortable puisqu'il semble que Mme [L] sans n'avoir jamais rien signé, ait donné un accord verbal à deux agences pour vendre son bien à deux clients différents, de sorte qu'on me demande de préparer un compromis pour chaque acquéreur. Un acquéreur offre plus que l'autre mais demande une condition suspensive de plus et il semble que Madame [L], un peu perdue, ait plusieurs fois changé d'avis sur l'offre qui avait sa préférence. Afin de mettre un terme au plus vite à cette situation et afin de nous prémunir contre toute nouvelle volte face, j'ai demandé à Madame [V] d'obtenir de sa mère (qui n'a pas de mail) un écrit indiquant : « je demande à Me [H] de préparer un compromis de vente reprenant les éléments fournis dans l'offre de... ».
Madame [L] produit également les échanges de mail entre Maître [H] et l'agence [Localité 5] BELLES MAISONS. Dans un mail du 9 septembre, la représentante de l'agence indique lui avoir transmise l'offre de Monsieur et madame [U] et « qu'il faut respecter sa façon d'avancer », le même jour, Maître [H] répondait « je viens de raccrocher une nouvelle fois avec elle (Madame [L]), suite à la renonciation à leur condition suspensive de changement d'usage, l'offre de vos clients était devenue la plus intéressante et Madame [L] souhaitait l'accepter. Cependant le service juridique de l'autre agence considère que l'email envoyé par sa fille me demandant de préparer un compromis de vente conforme à l'offre d'achat de ses clients valait acceptation et ils ont commencé à lui parler de recours et de Tribunal. Je l'ai informé qu'une demande de préparation de compromis ne valait pas à mon avis acceptation d'une offre d'achat mais Madame [L] se juge trop âgée pour se lancer dans des procédures et m'indique donc décider de vendre aux autres pour « ne pas être embêtée » ». Enfin, l'agence immobilière [Localité 5] BELLES MAISONS répondait que Madame [L] l'avait appelée à plusieurs reprises, « sa fille lui ayant confirmé qu'elle s'est contentée de demander à l'agence de préparer un compromis de vente, ce qui ne constitue pas une acceptation d'offre d'achat, d'autant plus qu'elle n'est ni propriétaire ni mandatée par sa mère pour la représenter. Madame [L] pense donc que l'agence a tenté de l'intimider et elle souhaite accepter l'offre de M.et Mme [U]. Je dois passer … lui présenter l'offre d 'achat et la lui faire accepter. Je suis assez confiante puisque j'ai volontairement cessé d'appeler Madame [L] dès qu'elle m'a dit avoir accepté l'autre offre, tellement elle était perturbée et inquiète, je ne voulais pas en rajouter ».
Dans un courrier du 14 septembre 2022 adressé à Madame [L], l'agence REALY SMART lui transmettait une nouvelle offre d'achat émanant de Monsieur et Madame [B] en date du 13 septembre 2022, d'un montant de 1 050 000 euros frais d'agence inclus, supérieure de 55 000 euros à la première.
Quand bien même la fille de Madame [L] aurait reçu mandat de sa mère de demander au notaire la préparation d'un compromis de vente avec Monsieur et Madame [B], alors que si la théorie du mandat apparent ne peut recevoir application en vertu de l'article 1988 du code civil en matière d'aliénation, il ne s'agit ici que de demander la préparation d'un compromis, ce simple mail demandant au notaire de préparer un compromis suivi de la seule préparation du compromis, ne démontre pas un stade abouti de l'avancement des pourparlers, d'autant plus que le 14 septembre, Monsieur et Madame [B] ont adressé à Madame [L] une offre d'un montant différent, le tout dans un laps de temps très court, et il en ressort que les pourparlers étaient alors toujours en cours et non aboutis.

En outre, il résulte des éléments exposés ci-dessus que les offres de Monsieur et Madame [B] et de Monsieur et Madame [U], émanant de deux agences différentes, se sont télescopées, que Madame [L], qui est apparue « un peu perdue » au Notaire et « perturbée et inquiète » à la seconde agence immobilière, a certes fait preuve d'hésitations dans l'acceptation des offres mais pas d'un comportement déloyal ou de mauvaise foi dans son choix de ne pas accepter au final l'offre de Monsieur et Madame [B].
En conséquence, aucun rupture abusive des pourparlers n'est établie et Monsieur et Madame [B] seront déboutés de l'ensemble de leurs demandes.
Monsieur et Madame [B], partie perdante, seront condamnés aux dépens.
Au titre de l'équité, ils seront condamnés à payer à Madame [L] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, en premier ressort, par décision contradictoire, par mise à disposition au Greffe:

DEBOUTE Monsieur [Y] [B] et Madame [E] [N] épouse [B] de l'ensemble de leurs demandes.

CONDAMNE in solidum Monsieur [Y] [B] et Madame [E] [N] épouse [B] à payer à Madame [K] [R] veuve [L] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE in solidum Monsieur [Y] [B] et Madame [E] [N] épouse [B] aux dépens.

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

La présente décision est signée par Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, la Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 7ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/09595
Date de la décision : 06/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-06;22.09595 ?
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