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06/03/2024 | FRANCE | N°22/01934

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7ème chambre civile, 06 mars 2024, 22/01934


N° RG 22/01934 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WMCT

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
62B

N° RG 22/01934
N° Portalis DBX6-W-B7G-WMCT

Minute n° 2024/





AFFAIRE :

[Z] [R],
[S] [J] épouse [R]
C/
[K] [T],
[Y] [D] épouse [T]










Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Sylvain BOUCHON
Me Christelle PRINCE



COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du

délibéré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier ...

N° RG 22/01934 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WMCT

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
62B

N° RG 22/01934
N° Portalis DBX6-W-B7G-WMCT

Minute n° 2024/

AFFAIRE :

[Z] [R],
[S] [J] épouse [R]
C/
[K] [T],
[Y] [D] épouse [T]

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me Sylvain BOUCHON
Me Christelle PRINCE

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe

DEMANDEURS

Monsieur [Z] [R]
né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 8] (GIRONDE)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]

représenté par Me Sylvain BOUCHON, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

Madame [S] [J] épouse [R]
née le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 8] (GIRONDE)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Me Sylvain BOUCHON, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDEURS

Monsieur [K] [T]
né le [Date naissance 5] 1970 à [Localité 9] (NORD)
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 7]

représenté par Me Christelle PRINCE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

Madame [Y] [D] épouse [T]
née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 9] (NORD)
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 7]

représentée par Me Christelle PRINCE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
********************************

Monsieur [Z] [R] et Madame [S] [J] épouse [R] sont propriétaires d'une maison avec jardin au [Adresse 4] à [Localité 7]. Ils sont voisins de Madame [Y] [D] épouse [T] et Monsieur [K] [T].

Se plaignant d'un déversement des eaux en provenance du terrain de leurs voisins, Monsieur et Madame [R] ont saisi un conciliateur de justice. Malgré l'intervention du conciliateur, ils ont continué à se plaindre de ruissellements d'eau en provenance du fonds voisin.

Les deux propriétés sont en outre séparées par une clôture grillagée.

Suivant acte signifié le 7 mars 2022, Monsieur et Madame [R] ont fait assigner devant le Tribunal judiciaire Madame et Monsieur [T] aux fins de solliciter leur condamnation à faire effectuer des travaux, les indemniser d'un préjudice et prendre en charge une partie de la reconstruction de la clôture.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2022, Monsieur [Z] [R] et Madame [S] [J] épouse [R], demandent au Tribunal de :

Vu les dispositions des articles 640 et suivants et 666 et suivants du Code Civil
A titre principal,
- JUGER que les époux [T] ont aggravé l’écoulement des eaux depuis leur fonds vers le fonds des époux [T].
Par conséquent,
- CONDAMNER les époux [T] à mettre fin au trouble
• en détruisant la dalle en béton le long de la clôture, d’une part,
• en cessant de déverser les eaux du récupérateur d’eau sur le terrain des époux [R]
- CONDAMNER les époux [T] à verser aux époux [R] une indemnité d’un montant de 37 500 euros
A Titre subsidiaire,
- CONDAMNER les époux [T] à verser aux époux [R] une indemnité d’un montant de 1 000 euros en réparation de la faute consistant à laisser s’écouler le tuyau d’arrosage lié au récupérateur d’eau de pluie sur le terrain des époux [R]
En outre,
- CONDAMNER les époux [T] à la moitié des frais de reconstruction de la clôture, que celle-ci soit l’œuvre d’un artisan ou des époux [R] eux-mêmes,
- CONDAMNER les époux [T] à verser aux époux [R] la somme de 297,20 euros au titre du constat d’huissier de Me [C] du 29/12/2021 fondant la présente instance
- CONDAMNER les époux [T] à la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile
- CONDAMNER les époux [T] aux entiers dépens de l’instance en ce compris les frais de signification et d’exécution du Jugement à intervenir
- Prononcer l’exécution provisoire du Jugement à intervenir

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2022, Madame [Y] [D] épouse [T] et Monsieur [K] [T] demandent au Tribunal de :

Vu les dispositions des articles 640 et suivants du Code de procédure civile,
Vu les dispositions de l'article 666 du Code Civil ,
JUGER que Monsieur et Madame [R] ne rapportent pas la preuve d’un ruissellement des eaux du fonds voisin des époux [T], sur leur fonds.
DEBOUTER Monsieur et Madame [R] de l’intégralité de leurs demandes principales et subsidiaires à l’encontre de Monsieur et Madame [T]
Les condamner à rembourser aux époux la somme de 390 € correspondant aux frais d’huissier pour l’établissement du constat du 25 mars 2022.
Les condamner au paiement d’une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Les condamner aux entiers dépens .

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 janvier 2023

MOTIFS :

Sur le ruissellement des eaux :

L'article 640 du Code civil dispose que « les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digues qui empêchent cet écoulement. Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur ».

En application de l'article 641 du même code : « tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds. Si l'usage de ces eaux ou la direction qui leur est donnée aggrave la servitude naturelle établie par l'article 640, une indemnité est due au propriétaire du fonds inférieur ».

Monsieur et Madame [R] font valoir que leurs voisins aggravent la servitude d'écoulement des eaux en ce qu'ils ont construit une dalle de béton qui serait en pente déclinante vers leur propriété et en ce qu'ils évacuent leurs eaux par un tuyau d'arrosage qui se déverse sur leur propriété.

Monsieur et Madame [T] font valoir que la servitude d'écoulement des eaux n'est pas prouvée et qu'en outre dans le cas où elle serait admise, la présence d'eau sur le terrain de leurs voisins n'est pas de leur fait.

Monsieur et Madame [R] produisent un compte-rendu en date du 7 mai 2021 d'intervention sur site d'un conciliateur intervenu à leur demande qui a constaté certaines difficultés relatives à l'écoulement des eaux pluviales, liées à l'absence de liaison entre un égout de toit et une conduite de gouttière et une rangée de tuiles de rives, qui auraient été réglées depuis selon leurs écritures, et qui indique en outre « que l'inclinaison et la surface des autres dalles toujours en rehaut par rapport au sol naturel ne semblaient pas être un facteur d'accroissement du ruissellement d'autant plus que le relief entre les deux parcelles laisse apparaître à certains endroits une certaine déclivité vers la parcelle des demandeurs (Monsieur et Madame [R]). ». Il résulte des pièces produites par Monsieur et Madame [T] relativement à cette conciliation que Monsieur [T] a réalisé les travaux nécessaires, tant pour le captage des égouts de toit que pour le ruissellement d'eau de pluie du fait d'ouvrages maçonnés.  

Monsieur et Madame [R] produisent en outre un constat d'huissier en date du 29 décembre 2021 qui indique : « au moment de mon constat, il tombe une petite pluie fine. Je constate que le terrain des requérants est imprégné d'eau dans sa partie la plus proche de la clôture séparative avec la propriété [T]. Je constate qu'effectivement, comme le montrent les photographies ci-après annexées, la propriété du voisin est bétonnée ou recouverte de dalles de béton sur un mètre de large environ et sur plus d'une quinzaine de mètres linéaires, contre la clôture séparative».

S'il ressort du procès-verbal du conciliateur que le relief entre eux les deux parcelles laisse apparaître une certaine déclivité vers celle de Monsieur et Madame [R], le constat d' huissier ne relève pas l'existence d'une pente entre les deux fonds.

Pour le surplus à l'appui de la preuve de l'existence de cette pente, ceux-ci produisent deux courriers adressés à leurs voisins dans lesquels ils évoquent l'écoulement des eaux pluviales, mais ces deux courriers dont ils sont les rédacteurs ne sauraient constituer des preuves de l'existence de cette pente. De même l'attestation de Madame [G], ancienne propriétaire du terrain et de la maison de Monsieur et Madame [R], selon laquelle elle avait « fait intervenir la police municipale par rapport au ruissellement des eaux pluviales provenant du terrain [T] » n'est pas suffisante à trouver l'existence d'une servitude d'écoulement des eaux naturelles. Enfin les photographies produites par les demandeurs sur lesquels on voit une main tenir un niveau entre les deux propriétés, niveau qui n'est même pas posé au sol, ne sauraient établir l'existence d'une pente dans un sens ou l'autre.

N° RG 22/01934 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WMCT

De surcroît, Monsieur et Madame [T] produisent un constat d'huissier en date du 25 mars 2022 dont il résulte que l'huissier a mesuré la pente, certes à partir de la dalle béton qui n'est pas naturelle, mais que cette pente est en direction de leur fonds. Ils produisent enfin un questionnaire relativement à la vente de la maison rempli par Madame [G], dans lequel celle-ci déclare n'avoir connaissance d'aucune servitude particulière sur sa propriété et que son terrain n'est pas en pente.

En conséquence il n'est pas établi qu'il existe une servitude d'écoulement naturel des eaux en provenance du fonds de Monsieur et Madame [T] vers celui de Monsieur et Madame [R] et les demandes de ceux-ci qui se fondent uniquement sur l'aggravation de cette servitude naturelle tendant à la destruction de la dalle en béton et à l'indemnisation d'un préjudice qui aurait résulté de cette aggravation seront rejetées.

S'agissant du fondement de la faute délictuelle quant au déversement des eaux du récupérateur d'eau par un tuyau qui dépasserait sur la propriété de Monsieur et Madame [R], il ressort du constat d' huissier que le jour du passage de celui-ci, le tuyau se trouvait positionné en direction de leur propriété, son contenu pouvant effectivement se déverser sur leur fonds. Cependant, le tuyau pouvait être replacé très simplement en direction du fonds de Monsieur et Madame [T] en le décalant de quelques centimètres et il n'est pas établi que le positionnement de ce tuyau résulte d'une faute de Monsieur et Madame [T]. En conséquence, tant sur le fondement de l'aggravation de la servitude, que de la faute, Monsieur et Madame [R] seront déboutés de leur demande tendant à voir ordonnée « la cessation du déversement des eaux du récupérateur d'eau ».

Sur la clôture :

En application des articles 666 et 667 du Code civil, toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture, ou s'il n'y a titre, prescription ou marque contraire, et la clôture mitoyenne doit être entretenue à frais communs.
Monsieur et Madame [R] font valoir que l'entretien de la clôture qui sépare les fonds est nécessaire car elle n'est pas rectiligne et est fortement endommagée et que la réfection de la clôture doit être ordonnée à frais partagés.
Monsieur et Madame [T] font valoir que la clôture n'est pas abîmée, qu'elle est simplement distendue et souffre d'un défaut d'alignement.
Il ressort du constat du huissier du 29 décembre 2021 produit par Monsieur et Madame [R] que la clôture n'est pas rectiligne et que le grillage est distendu à plusieurs endroits, ce qui ressort effectivement des photographies. Il résulte du constat d' huissier du 25 mars 2022 produit par Monsieur et Madame [T] que le grillage est effectivement distendu et qu'un fil métallique partant du portail de Monsieur et Madame [R] y est accroché. Pour le surplus aucun élément n'établit que la clôture est fortement dégradée et nécessiterait une réfection. En conséquence, Monsieur et Madame [R] seront déboutés de leur demande tendant à voir condamnés Monsieur et Madame [T] à prendre en charge la moitié des frais de reconstruction de la clôture.
Sur les demandes annexes :
Monsieur et Madame [R], partie perdante, seront condamnés aux dépens.
Au titre de l'équité, ils seront condamnés à payer à Monsieur et Madame [T] la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, incluant les frais du constat d' huissier du 25 mars 2022.
PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, en premier ressort, par décision contradictoire, par mise à disposition au Greffe :

DEBOUTE Monsieur [Z] [R], et Madame [S] [J] épouse [R] de leurs demandes.

CONDAMNE Monsieur [Z] [R], et Madame [S] [J] épouse [R] à payer à Monsieur et Madame [T] la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE Monsieur [Z] [R], et Madame [S] [J] épouse [R] aux dépens.

RAPPELLE que l'exécution provisoire de droit.

La présente décision est signée par Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, la Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 7ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01934
Date de la décision : 06/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-06;22.01934 ?
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