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06/03/2024 | FRANCE | N°22/01426

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 7ème chambre civile, 06 mars 2024, 22/01426


N° RG 22/01426 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WKXK

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
58E

N° RG 22/01426
N° Portalis DBX6-W-B7G-WKXK

Minute n° 2024/





AFFAIRE :

S.C.E.A. [Adresse 3]
C/
S.A. GENERALI IARD










Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
la SELARL AUSONE AVOCATS
la SCP MAATEIS




COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier 2024

JUGEMENT :
...

N° RG 22/01426 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WKXK

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Mars 2024
58E

N° RG 22/01426
N° Portalis DBX6-W-B7G-WKXK

Minute n° 2024/

AFFAIRE :

S.C.E.A. [Adresse 3]
C/
S.A. GENERALI IARD

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
la SELARL AUSONE AVOCATS
la SCP MAATEIS

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé : Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 10 Janvier 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe

DEMANDERESSE

S.C.E.A. [Adresse 3]
Lieudit [Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Stéphan DARRACQ de la SCP MAATEIS, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDERESSE

S.A. GENERALI IARD
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Me Jean PATRIMONIO, de la SELAS CEJ AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
La SCEA [Adresse 3], gérée par Madame [G] [S] épouse [T], est propriétaire d’un ensemble agricole composée de 3 bâtiments situé lieudit [Adresse 3] .

Par arrêté en date du 18 septembre 2018, la commune de [Localité 4] a été reconnue en état de catastrophe naturelle au titre des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sècheresse pour la période du 1er janvier au 30 juin 2017. L’arrêté a été publié au journal officiel le 20 octobre 2018

Se plaignant de désordres et notamment de fissures, la SCEA [Adresse 3] a sollicité auprès de la S.A.GENERALI IARD, son assureur, qu'ils soient reconnus comme relevant de cet état de catastrophe naturelle.

La compagnie d'assurance a mandaté le Cabinet POLYEXPERT qui a rendu un rapport le 11 avril 2019. La SCEA [Adresse 3] a également fait réaliser une étude de sol par le Cabinet CERATO GEOTECHNIQUE qui a rendu un rapport le 20 décembre 2019. Un second rapport a été rendu par le Cabinet POLYEXPERT le 22 décembre 2020.

Suivant acte d'huissier signifié le 23 février 2022, la SCEA [Adresse 3] a fait assigner au fond la S.A.GENERALI IARD devant le Tribunal judiciaire aux fins de solliciter l'indemnisation d'un préjudice.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2023, la SCEA [Adresse 3] demande au Tribunal de :

Vu les articles L125-1 et suivant du Code des assurances,
▪ Recevoir la SCEA [Adresse 3] dans ses prétentions,
▪ Condamner la SA GENERALI IARD à payer à la SCEA [Adresse 3] la somme de 72.274,80 € avec indexation de l’indice BT01 à compter du (sans précision)
▪ Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir de toutes les condamnations prononcées par le jugement, en principal et intérêt, dommages et intérêts, indemnités de l'article 700 du CPC ainsi que pour les dépens,
▪ A défaut assortir l’exécution des condamnations à la constitution d'une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations,
▪ Condamner la SA GENERALI IARD à payer à la SCEA [Adresse 3] la somme de 9.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure comprenant notamment les frais d’exécution, dont le droit proportionnel prévu au numéro 129 du tableau 3-1 annexé à l’article R.444-3 du Code de commerce, dont distraction sera faite au profit de Maître Stéphan DARRACQ représentant la SCP MAATEIS.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 janvier 2023, la SA GENERALI demande au Tribunal de :

Vu l’article L.125-1 du Code des assurances,
− Débouter la société [Adresse 3] de l’ensemble de ses demandes,
− Recevoir GENERALI IARD en sa demande de frais irrépétibles,
− Condamner la société [Adresse 3] à payer à GENERALI la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
− Condamner la société [Adresse 3] aux entiers dépens que la SCP LE BARAZER & D’AMIENS pourra recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 janvier 2023.

MOTIFS :

L’article L.125-1 alinéa 3 du Code des assurances dispose que sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, ou également pour les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la ré hydratation des sols, la succession anormale des événements de sécheresse d'ampleur significative, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance où n’ont pu être prises ( ...) l'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi la nature des dommages résultant de celle-ci couvert par la garantie visée au premier alinéa du présent article».

En l'espèce, un arrêté interministériel a constaté l'état de catastrophe naturelle de la commune concernée pour la période du 1er janvier au 30 juin 2017.

La SA GENERALI IARD fait valoir que sa garantie n'est pas due car la SCEA [Adresse 3] n'aurait pas pris les mesures habituelles pour prévenir le dommage.

La SCEA [Adresse 3] fait valoir que suite au premier rapport, l'expert de l'assureur avait reconnu l'état de catastrophe naturelle et lui avait indiqué avoir reçu l'aval de l'assurance pour la prise en charge des désordres et que ceux-ci sont bien dus à une catastrophe naturelle.

En effet, dans un mail du 11 février 2020, l'expert ayant rédigé le premier rapport du cabinet POLYEXPERT a écrit à la SCEA [Adresse 3] « nous vous informons avoir terminé l'analyse du rapport CERATO et avoir préparé nos conclusions que nous allons adresser cette semaine à GENERALI (mise en évidence du caractère déterminant des effets de la sécheresse) ». Dans un nouveau mail du 7 mars 2020, il écrivait avoir reçu l'aval de l'assureur pour les travaux.

Cependant, peu importe en réalité la teneur des mails que le premier rédacteur du rapport de POLYEXPERT a adressés à l'assuré, le tribunal devant vérifier si les conditions de l'article L.125-1 alinéa 3 du Code des assurances sont réunies.

Il ressort du premier rapport du Cabinet POLYEXPERT du 11 avril 2019 que trois bâtiments agricoles sont affectés. Le rapport a décrit sur l'un des bâtiments de 65 m², en façade sud-ouest, des fissures verticales en queue de billard avec présence de végétation à proximité des désordres et absence de signe de tassement. Concernant un second bâtiment de 80 m², il a constaté en angle Sud une lézarde avec signe de tassements de part et d'autre. Sur un troisième bâtiment 260 m², il a relevé sur le pignon nord-est des fissures verticales et en escalier « avec dissociation avec mur retour perpendiculaire attestant d'un mouvement ». Il a conclu que seuls ces trois bâtiments était affectés de désordres, que les désordres affectant le premier bâtiment étaient d'ordre structurel aggravés par la présence de végétation dont les racines déstabilisaient le sol d'assise et n'étaient pas imputables à la sécheresse, que pour le bâtiment de 80 m² les désordres étaient symptomatiques d'un tassement du sol d'assise du bâtiment avec répercussions sur les murs perpendiculaires et les murs opposés par les contraintes imposées par la charpente et que les effets de la sécheresse pouvaient être à l'origine de ces désordres, pour le troisième bâtiment 260 m² que les désordres étaient de même symptomatiques d'un tassement du sol d'assise du pignon nord-est qui se matérialisait par des fissures verticales et en escalier avec rupture entre le pignon et le mur retour perpendiculaire et que les effets de la sécheresse pouvaient être à l'origine de ces désordres

L'expert a indiqué dans ce rapport que s'agissant de la nature du sol, il n'y avait eu aucune reconnaissance de sol à ce jour. Concernant la végétation, il a indiqué « absence de végétation incriminable ». S'agissant de la collecte des eaux, il a indiqué «  existence de collecte et d'évacuation des eaux pluviales de toiture et eaux usées raccordées à un système d'assainissement autonome ». Il a noté qu'aucun travaux urgents de mesures conservatoires n'avaient été réalisés par le propriétaire sur les dépendances agricoles et n'a préconisé aucune mesure conservatoire.

Il a ajouté cette phrase « afin de s'affranchir du caractère déterminant des effets de la sécheresse proposons à la compagnie de mener des investigations géotechniques ». Il a indiqué que cette étude aura pour but d'analyser les solutions de réparation possible, de définir si la construction est assise sur un sol gonflant rétractable sensible à la sécheresse et de mettre en évidence d'autres facteurs susceptibles d'être à l'origine des dommages ou de les avoir aggravés.

Concernant les solutions réparatoires, le rapport indique qu'une action sous le gros œuvre dépendra des analyses géotechniques, que les travaux de remise en état consistent à la remise en état des murs en pierre et que dans l'hypothèse où le caractère déterminant des effets de la sécheresse seraient mis en évidence par les investigations géotechniques, il proposait à la compagnie d'ouvrir ce sinistre à une somme de 45 000 €. Enfin il a noté que l'assuré s'était associé les services d'un expert judiciaire avec lequel il avait eu la même analyse des désordres.

Le diagnostic géotechnique établi par le cabinet CERATO GEOTECHNIQUE a indiqué s'agissant du risque de retrait gonflement des argiles que selon la carte d'exposition à ce risque, la zone du site était classée « aléas forts ». Il a indiqué lui aussi que les désordres concernaient trois bâtiments à usage agricole et étaient caractérisés par des fissures et des déformations. Il a relevé que les bâtiments reposaient sur des fondations superficielles empierrées. Il a conclu que l'hétérogénété des sols d'assise, de nature argilo sableuse ou sablo-gréseuse voire sableuse puis les résistances mécaniques tantôt lâches tantôt élevées conduisaient à des comportements différentiels, que la dominante argilo-sableuse imposait son comportement mécanique qui était sensible à l'eau, des variations volumiques du sol lié aux variations hydriques entraînant successivement des tassements puis des gonflements, que le phénomène de retrait-gonflement (plus intense en période de sécheresse) et l'hétérogénéité des sols d'assise étaient les causes des désordres. Il a ajouté que la présence d'arbres d'arbustes à proximité et le caractère vétuste des bâtiments était également des éléments accentuant les défauts des sols d'assise.

Le diagnostic géotechnique a préconisé une consolidation du sol d'assise par injection de résine expansive ou une reprise en sous-œuvre en y associant un renforcement structurel. Il a également recommandé la création d'un écran anti racines entre les bâtiments et les arbres arbustes proches outre un élagage et a ajouté que l'étanchéité et le non colmatage des réseaux d'eau pluviales et usées était à vérifier.

S'agissant de l'hydrogéologie, le diagnostic géotechnique a indiqué que lors de la réalisation des investigations le 28 novembre 2019, aucune arrivée d'eau franche n'avait été observée au droit des sondages sur la profondeur reconnue.
N° RG 22/01426 - N° Portalis DBX6-W-B7G-WKXK

Le rapport en date du 22 décembre 2020 du Cabinet POLYEXPERT fait suite à la communication à l'assureur du diagnostic géotechnique et à une nouvelle réunion d'expertise proposée à la SCEA. À partir des données du diagnostic géotechnique, l'expert de la compagnie d'assurances a indiqué que la portance du sol dans les sables et argiles sableuses était à la limite de l'admissibilité par rapport aux charges apportées par la construction et que le toit des sables grésifiés n'était pas homogène et variait de manière importante et que des bancs de sable grésifiés avaient été reconnus à l'angle Nord du bâtiment trois. L'expert de l'assurance a indiqué être en présence de sol de type limon à sable dont la fraction fine était faible et classée comme moyennement active et présentait une susceptibilité faible vis-à-vis des variations hydriques en termes de retrait et gonflement et que les sols étaient par contre sensibles en termes de portance en cas d'apport hydrique, la portance du sol d'assise allant diminuait de manière importante pour une faible augmentation de la teneur en eau. S'agissant des fondations, il a indiqué que pour les trois bâtiments elles étaient conformes aux règles de l'art et qu'elles étaient ancrées dans des argiles sableuses pour le bâtiment 1 et 2 et de manière hétérogène dans des sables et des sables grésifiés pour le bâtiment 3. Le rapport, de même que le premier, a écarté le rôle de la sécheresse dans les désordres pour le bâtiment 1.

Pour le bâtiment 2, il a conclu que les fondations étaient ancrées dans une argile sableuse présentant une sensibilité faible vis-à-vis des variations hydriques en termes de retrait et nulle vis-à-vis du gonflement, qu'en outre les argiles sableuses avaient une épaisseur très faible sous la fondation insuffisante pour expliquer l'ampleur des désordres affectant le bâtiment dans le cadre d'un retrait de la fraction fine argileuse liée à une dessiccation mais que, par contre, des apports d'eau importants lors de précipitations dans la mesure où les eaux des toitures n'étaient pas récoltées allait diminuer fortement l'importance du sol d'assise qui était déjà à la limite de l'admissibilité par rapport à la descente de charge apportée par l'ouvrage. Il en a déduit que les désordres affectant le bâtiment 2 avaient pour origine des défauts de portance associés à une épaisseur hétérogène des argiles sableuses au-dessus des sables grésifiés suite aux apports hybrides non maîtrisés et qu'une dessiccation du sol d'assise liée à la sécheresse de 2017 n'était pas à l'origine des désordres.

S'agissant du bâtiment 3, ce second rapport de POLYEXPERT a conclu que les fondations étaient ancrées dans des sables grésifiés ou des sables, que l'assise n'était pas constituée par des argiles sensibles aux variations hydriques en termes de retrait et que dès lors le mouvement observé était lié à l'ancrage hétérogène dans les sables et les sables grésifiés dont la portance était respectivement très faible à élevée et que les désordres avaient été également aggravés par les apports hydriques non maîtrisés apportés par la toiture dont les eaux n'étaient pas récoltés. Il en résultait selon le rapport qu'une dessiccation du sol d'assise liée à la sécheresse de 2017 n'était pas à l'origine des désordres.

Dans ce second rapport, l'expert a relevé la présence de végétaux incriminables selon un schéma fait en page cinq, une absence de collecte des eaux pluviales et des eaux usées raccordées à un système d'assainissement autonome.

Il convient de souligner qu'il existe un certain nombre de contradictions entre ce rapport et le premier rapport du Cabinet POLYEXPERT ainsi qu'avec le diagnostic géotechnique.

Cette seconde expertise de POLYEXPERT conclut ainsi en contradiction avec le diagnostic géotechnique que les sols sont de type limon à sables dont la fraction fine est faible alors que le diagnostic géotechnique avait conclu à un sol d'assise de fondation hétérogène avec une dominante argilo- sableuse.

En outre le premier rapport de POLYEXPERT avait relevé une existence de collecte et l'évacuation des eaux pluviales des toitures et le diagnostic géotechnique, au jour des investigations, une absence d'arrivée d'eau franche au droit des sondages effectués, en contradiction avec le second rapport expert notant une absence de collecte des eaux pluviales sans explication. Aucune photographie sauf une vue aérienne n'est jointe à ce second rapport. Quelques photographies de mauvaise qualité jointes au premier rapport ne permettent pas de voir une collecte d'eau pluviale sur les bâtiments deux et trois mais en revanche des gouttières et une descente d'eau pluviale sur le bâtiment 1.

S'agissant de la végétation, le premier rapport de POLYEXPERT avait relevé la présence de végétation incriminante seulement pour le premier bâtiment et non pour les trois. En outre le diagnostic géotechnique a conclu à une accentuation du phénomène de retrait gonflement par la présence d'arbres ou d'arbustes à proximité mais que le phénomène de retrait gonflement et l'hétérogénéité des sols d'assise étaient les causes des désordres.

Pour le bâtiment 1 de 65m2, le premier rapport de POLYEXPERT excluait déjà la sécheresse comme cause des désordres en raison de désordres structurels aggravés par la présence de végétation, ce qui rejoint les conclusions du second rapport de POLYEXPERT. Il en résulte que la sécheresse n'est pas la cause déterminante des désordres affectant ce bâtiment et que la SA GENERALI IARD ne doit pas sa garantie au titre de l'état de catastrophe naturelle s'agissant de ce bâtiment.

Concernant les bâtiments 2 de 80m2 et 3 de 160 m2, les conclusions du premier expert selon lesquelles les désordres les affectant sont symptomatiques d'un tassement du sol d'assise dont les effets de la sécheresse peuvent être à l'origine sont corroborées par les conclusions du diagnostic géotechnique selon lesquelles le phénomène de retrait gonflement plus intense en période de sécheresse et l'hétérogénéité des sols d'assise sont les causes des désordres, alors que la dominante argilo-sableuse impose son comportement mécanique, des variations volumiques du sol, liées aux variations hydriques entrainant successivement des tassements puis des gonflements. Les affirmations du second expert de POLYEXPERT quant à l'absence de collecte des eaux pluviales sont en contradiction avec celles du premier rapport et du diagnostic géotechnique. En outre, rien n'établit que l'expert ait réellement accédé à la propriété pour y faire des constatations alors que la SCEA [Adresse 3] affirme avoir refusé la visite de l'expert. Il en résulte que cette absence de collecte des eaux pluviales n'est pas établie et ne peut être considérée comme la cause déterminante du désordre. Quand à la présence de végétation, elle n'a pas été relevée par le premier expert qui s'est approché des bâtiments et les a photographiés alors que le second se contente d'une vue aérienne et si le diagnostic géotechnique indique de manière générale que la présence d'arbres ou d'arbustes à proximité est un élément accentuant les défauts des sables d'assise, il n'en fait pas la cause principale. Il en résulte que pour ces deux bâtiments la sécheresse est la cause déterminante des désordres alors qu'une absence de mesures habituelles pour prévenir ces dommages n'est pas établie.

En conséquence, la SA GENERALI IARD en est tenue à garantie et réparation. Le devis produit par la SCEA [Adresse 3] ne concerne que les bâtiments 2 et 3 et le lieu précis des désordres relevés (angle Sud pour le bâtiment 2 et angle Nord Est pour le bâtiment 3) tel que cela la résulte de la localisation qui figure. Si la SA GENERALI IARD conteste le montant des travaux préconisés, elle ne produit aucun élément de nature à remettre en cause le devis. Le devis concerne des travaux de consolidation après sinistre avec travaux de forage, pose de micro pieux et travaux de reprise en sous-œuvre des liaisons des micros pieux sous la fondation puis reprise des fissures, avec en outre pour le bâtiment trois une dépose des dallages et des travaux de rejointement intérieur. Ces travaux correspondent précisément à la reprise des désordres affectant les deux bâtiments dus à l'état de catastrophe naturelle. Le devis prévoit en outre des travaux de recollement et de vérification des réseaux pluviales y compris de curage qui paraissent aussi nécessaires pour terminer les travaux de réparation prévenir le renouvellement des dommages. Il sera en conséquence accordée l'intégralité du coût des réparations prévues au devis, soit la somme de 72 274, 80 euros, qui ne sera cependant pas indexée en l'absence de date figurant sur le devis.

La SA GENERALI IARD, partie perdante, sera condamnée aux dépens, qui seront recouvrés directement par Maître Stéphan DARRACQ représentant la SCP MAATEIS en application de l’article 699 du Code de procédure civile et qui ne comprendront pas le droit de recouvrement des articles L 444-3 et R 444-3 du code de commerce, qui constitue au profit du commissaire de justice investi d’une mission de recouvrement forcé un honoraire de résultat à la charge du seul créancier.

Au titre de l'équité, elle sera condamnée à payer à la SCEA [Adresse 3] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire, de droit aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, celle-ci n'étant pas incompatible avec la nature de l'affaire.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal , statuant publiquement, en premier ressort, par décision contradictoire, ;par mise à disposition au Greffe :

CONDAMNE la SA GENERALI IARD à payer à la SCEA [Adresse 3] la somme de 72 274, 80 euros en réparation des désordres.

CONDAMNE la SA GENERALI IARD à payer à la SCEA [Adresse 3] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la SA GENERALI IARD aux dépens, en ce non compris le droit des articles L 444-3 et R 444-3 du code de commerce, qui seront recouvrés directement par Maître Stéphan DARRACQ représentant la SCP MAATEIS en application de l’article 699 du Code de procédure civile.

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit et DIT n'y avoir lieu à l'écarter.

La présente décision est signée par Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, la Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 7ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01426
Date de la décision : 06/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-06;22.01426 ?
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