TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXECUTION
JUGEMENT CONTENTIEUX DU
04 Septembre 2024
MINUTE : 24/880
RG : N° 24/05461 - N° Portalis DB3S-W-B7I-ZLQH
Chambre 8/Section 1
Rendu par Monsieur UBERTI-SORIN Stephane, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assisté de Madame MOUSSA Anissa, Greffière,
DEMANDEUR
Monsieur [O] [P]
[Adresse 2]
[Localité 4]
comparant
ET
DEFENDEUR
S.C.I. SATURNE
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Sarah MOUHOU, avocat au barreau de PARIS - C245
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS
Monsieur UBERTI-SORIN, juge de l’exécution,
Assisté de Madame MOUSSA, Greffière.
L'affaire a été plaidée le 05 Août 2024, et mise en délibéré au 04 Septembre 2024.
JUGEMENT
Prononcé le 04 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe, par décision Contradictoire et en premier ressort.
EXPOSE DU LITIGE
Par requête du 15 avril 2024, Monsieur [O] [P] a sollicité une mesure de sursis à expulsion de 36 mois poursuivie en exécution d'un jugement rendu le 14 novembre 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aubervilliers, signifié le 9 janvier 2024, suivi d'un commandement de quitter les lieux du 11 avril 2024.
L'affaire a été retenue à l'audience du 5 août 2024 et la décision mise en délibéré au 4 septembre 2024, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées.
A l'audience, Monsieur [O] [P] a soutenu sa demande sollicitant à présent un délai de 12 mois. Il explique notamment que :
-il perçoit pour seul revenu mensuel une allocation de 283 euros ;
-il a fait des démarches en vue d'obtenir un logement social ;
-il a deux enfants âgés de 2 et 18 ans.
A l'audience, le conseil de la SCI SATURNE s'est opposé à la demande de sursis aux motifs que l'indemnité d'occupation n'est pas payée et qu'ainsi la dette locative est passée de 11.000 euros à 20.000 euros.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, à la requête précitée et, le cas échéant, aux dernières écritures des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de délais pour quitter les lieux
Aux termes des dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution ne peut délivrer de titre exécutoire hors les cas prévus par la loi et est dépourvu des pouvoirs juridictionnels pour accorder des délais de grâce lorsqu'aucune procédure d'exécution forcée n'est en cours.
Aux termes du premier alinéa de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Conformément à l'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction en vigueur à compter du 29 juillet 2023, la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
C'est ainsi que la loi prescrit au juge d'examiner trois éléments pour statuer sur une demande de délai pour quitter les lieux :
- la bonne ou mauvaise volonté de l'occupant dans l'exécution de ses obligations ;
- les situations respectives du propriétaire et de l'occupant ;
- les diligences que l'occupant justifie avoir effectuées en vue de son relogement.
Enfin, le juge de l'exécution ne peut, en vertu des textes précités, accorder qu'un délai maximal de 12 mois.
Il ressort de l'avis d'imposition établi en 2023 au titre des revenus de 2022 que Monsieur [O] [P] et son épouse ont perçu 7.049 euros, soit un revenu mensuel d'environ 587 euros. Cependant, le requérant ne produit aucune attestation établie par la caisse d'allocations familiales alors qu'il indique avoir à sa charge deux enfants mineurs et percevoir des allocations. Par ailleurs, si dans sa requête Monsieur [O] [P] indique chercher activement un emploi, aucun élément n'est produit concernant ses démarches à cet égard.
Il apparaît également que si une demande de logement social a effectivement été réalisée celle-ci l'a été que très récemment puisque la date de dépôt initial est, selon l'attestation produite, du 26 mars 2024.
En outre, il apparaît que dans le jugement ordonnant l'expulsion la dette locative s'élevait à 9.967,24 euros, somme arrêtée à la date du 11 septembre 2023. Or, selon le décompte locatif produit par la bailleresse, la dette locative s'élève au 2 août 2024 à 19.542,15 euros. Il ressort de ce même décompte qu'un paiement de 1.950 euros a été effectué le 9 décembre 2022, puis aucun paiement jusqu'au 6 juin 2024 de 525 euros correspondant à un virement réalisé par la caisse d'allocations familiales.
Sans méconnaître la situation de précarité de Monsieur [O] [P] et de sa famille, il apparaît que les conditions d'octroi d'un sursis telles que rappelées précédemment ne sont pas réunies dès lors que le requérant ne justifie pas de sa situation financière dans sa globalité par la production d'une attestation établie par la caisse d'allocations familiales, qu'il n'est pas expliqué qu'il reste sans emploi et que ses démarches en vue d'être relogé sont tardives, et surtout qu'il ne s'acquitte d'aucun loyer régulier à l'égard du bailleur, même partiellement.
Pour ces raisons, Monsieur [O] [P] sera débouté de sa demande de délai.
Sur les demandes accessoires
a) Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Monsieur [O] [P] qui succombe supportera la charge des éventuels dépens.
b) Sur les frais irrépétibles
En application de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort et prononcé par mise à disposition au Greffe,
DEBOUTE Monsieur [O] [P] de sa demande de sursis à expulsion ;
DIT n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [O] [P] aux entiers dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire ;
Ainsi jugé et prononcé au Palais de Justice de Bobigny le 4 septembre 2024.
Le Greffier, Le juge de l'exécution,
Anissa MOUSSA Stéphane UBERTI-SORIN