TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXECUTION
JUGEMENT CONTENTIEUX DU
04 Septembre 2024
MINUTE : 24/877
RG : N° 24/04607 - N° Portalis DB3S-W-B7I-ZIIN
Chambre 8/Section 1
Rendu par Monsieur UBERTI-SORIN Stephane, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assisté de Madame MOUSSA Anissa, Greffière,
DEMANDEURS
Monsieur [Z] [D]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Madame [V] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentés par Me Hatem HSAINI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS - PB 212
ET
DEFENDEUR
S.C.I. FONCIERE RU 01/2009
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Louna GRAPPE, avocat au barreau de PARIS - G709
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS
Monsieur UBERTI-SORIN, juge de l’exécution,
Assisté de Madame MOUSSA, Greffière.
L'affaire a été plaidée le 05 Août 2024, et mise en délibéré au 04 Septembre 2024.
JUGEMENT :
Prononcé le 04 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe, par décision Contradictoire et en premier ressort.
EXPOSE DU LITIGE
Par requête du 16 avril 2024, Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] ont sollicité une mesure de sursis à expulsion de 12 mois poursuivie en exécution d'un jugement rendu le 11 janvier 2024 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Montreuil, signifié le 15 février 2024, suivi d'un commandement de quitter les lieux délivré le même jour.
L'affaire a été retenue à l'audience du 5 août 2024 et la décision mise en délibéré au 4 septembre 2024, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées.
A l'audience, Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D], assistés de leur conseil, ont soutenu leur demande. Ils exposent notamment :
-occuper le logement avec leur deux enfants mineurs ;
-rechercher activement à être relogés.
Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience, le conseil de la SCI FONCIERE RU 01/2009 s'est opposé à la demande de sursis aux motifs notamment que :
-le loyer courant n'est pas payé ;
-la dette locative s'élève à plus de 20.000 euros.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, à la requête précitée et, le cas échéant, aux dernières écritures des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de délais pour quitter les lieux
Aux termes des dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution ne peut délivrer de titre exécutoire hors les cas prévus par la loi et est dépourvu des pouvoirs juridictionnels pour accorder des délais de grâce lorsqu'aucune procédure d'exécution forcée n'est en cours.
Aux termes du premier alinéa de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Conformément à l'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction en vigueur à compter du 29 juillet 2023, la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
C'est ainsi que la loi prescrit au juge d'examiner trois éléments pour statuer sur une demande de délai pour quitter les lieux :
- la bonne ou mauvaise volonté de l'occupant dans l'exécution de ses obligations ;
- les situations respectives du propriétaire et de l'occupant ;
- les diligences que l'occupant justifie avoir effectuées en vue de son relogement.
Enfin, le juge de l'exécution ne peut, en vertu des textes précités, accorder qu'un délai maximal de 12 mois.
Il ressort de l'avis d'imposition établi en 2024 au titre des revenus de 2023 que Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] ont perçu des revenus salariaux de 66.186 euros et s'acquitte d'une pension alimentaire pour 4.800 euros, soit un revenu net mensuel avant impôt d'environ 5.115,50 euros. Ils ont un enfant à charge née en 2022 et un enfant à qui il verse une pension alimentaire.
Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] justifient en revanche d'une demande de logement social effectuée le 2 avril 2024.
La SCI FONCIERE RU 01/2009 s'oppose à la demande de sursis aux motifs que le loyer courant n'est pas payée et que la dette locative est importante.
Il est rappelé qu'il convient pour le tribunal de trouver un équilibre entre les intérêts des parties en présence et il lui appartient donc de respecter un juste équilibre entre deux revendications contraires en veillant à ce que l'atteinte au droit du propriétaire soit proportionnée et justifiée par la sauvegarde des droits de l'occupant, dès lors que ces derniers apparaissent légitimes.
En l'espèce, il ressort du relevé de compte locataire produit par la société bailleresse que l'arriéré locatif s'établit à 41.938,99 euros à la date du 16 mai 2024, cet arriéré étant de 36.929,23 euros à la date du 21 novembre 2023 tel qu'il ressort du jugement du 11 janvier 2024, pour un loyer d'un montant actuel de 1.694,76 euros. Il ressort également du décompte arrêté au 7 août 2024 produit en cours de délibéré comme cela avait été demandé par la présente juridiction à l'audience, que la dette de loyer ressort à cette date à 51.675,34 euros.
Il est ainsi établi que le loyer courant n'est pas payé alors que le revenu mensuel du couple de 5.115,50 euros est de nature à leur permettre de faire face au loyer courant. Le fait que les requérants aient formuler une demande de logement social le 2 avril dernier ne constitue pas une action suffisante aux regards de leurs obligations à l'égard de la société bailleresse. Par ailleurs, l'absence de règlement du loyer courant reste inexpliqué compte tenu du niveau de revenus du couple, par exemple par des dettes contractées auprès de tiers.
Pour l'ensemble de ces raisons, il apparaît que les conditions d'octroi d'un sursis telles que rappelées précédemment ne sont pas réunies. En conséquence, Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] seront déboutés de leur demande de sursis à expulsion.
Sur les demandes accessoires
a) Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] supporteront la charge des éventuels dépens et ce, malgré le succès de sa prétention, l'instance ayant été introduite dans le seul objectif d'obtenir des délais pour quitter les lieux.
b) Sur les frais irrépétibles
En application de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
Aucune demande n'est formulée par les parties à ce titre. Par suite, il sera dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 précité.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Par suite, sera débouté de sa demande à ce titre.
Condamnés aux dépens, Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] seront également condamnés à indemniser la SCI FONCIERE RU 01/2009 au titre de ses frais irrépétibles. Cette dernière sollicite la somme de 2.000 euros à ce titre mais ne produit aucun élément de nature à justifier sa demande telle que la convention d'honoraires conclue avec son conseil.
Dans ces conditions, seule la somme forfaitaire de 500 euros lui sera allouée.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l'exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort et prononcé par mise à disposition au Greffe,
DEBOUTE Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] de leur demande de sursis à expulsion ;
CONDAMNE Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] à verser à la SCI FONCIERE RU 01/2009 la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame [V] [I] et Monsieur [Z] [D] aux entiers dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire ;
Ainsi jugé et prononcé au Palais de Justice de Bobigny le 4 septembre 2024.
Le Greffier, Le juge de l'exécution,
Anissa MOUSSA Stéphane UBERTI-SORIN