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01/07/2024 | FRANCE | N°22/05322

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 6/section 4, 01 juillet 2024, 22/05322


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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 01 JUILLET 2024



AFFAIRE N° RG 22/05322 - N° Portalis DB3S-W-B7G-WKAW
N° de MINUTE : 24/00455
Chambre 6/Section 4


Monsieur [N] [M] [H]
[Adresse 2]
Bâtiment C
[Localité 19]
représenté par Me Yves PETIT, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 110

Madame [B] [T] [C]
[Adresse 2]
Bâtiment C
[Localité 19]
représentée par Me Yves PETIT, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 110

DEMANDEURS

C/

Compagnie d

’assurance ALBINGIA
[Adresse 3]
[Localité 17]
représentée par Me Pierre TORREGANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0405

SCCV LES MAISONS DU [...

/
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 01 JUILLET 2024

AFFAIRE N° RG 22/05322 - N° Portalis DB3S-W-B7G-WKAW
N° de MINUTE : 24/00455
Chambre 6/Section 4

Monsieur [N] [M] [H]
[Adresse 2]
Bâtiment C
[Localité 19]
représenté par Me Yves PETIT, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 110

Madame [B] [T] [C]
[Adresse 2]
Bâtiment C
[Localité 19]
représentée par Me Yves PETIT, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 110

DEMANDEURS

C/

Compagnie d’assurance ALBINGIA
[Adresse 3]
[Localité 17]
représentée par Me Pierre TORREGANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0405

SCCV LES MAISONS DU [Adresse 20]
[Adresse 7]
[Localité 19]
représentée par Me Mélisande FELTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D297

SCCV LES JARDINS DU [Adresse 20]
[Adresse 7]
[Localité 19]
représentée par Me Mélisande FELTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D297

Société RV PLOMBERIE
[Adresse 9]
[Localité 13]
représentée par Maître Véronique BOLLANI de la SCP FORESTIER & HINFRAY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0255

S.A.R.L. TEIXEIRA ISA
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 10]
représentée par Maître Isabelle COUDERC de l’ASSOCIATION FLEURY COUDERC, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0558

Compagnie d’assurance SMABTP, en sa qualité d’assureur de responsabilité de la société TEIXEIRA ISA
[Adresse 14]
[Localité 12]
représentée par Maître Isabelle COUDERC de l’ASSOCIATION FLEURY COUDERC, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0558

S.A. ABEILLE IARD & SANTE, en sa qualité d’assureur de R.V. PLOMBERIE
[Adresse 4]
[Localité 16]
représentée par Me Naïma AHMED-AMMAR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1918

S.A.S. BERNARDO CONSULTING
[Adresse 5]
[Localité 18]
défaillant

S.A. AXA FRANCE IARD, en sa qualité d’assureur de responsabilité de BERNARDO CONSULTING
[Adresse 8]
[Localité 15]
défaillant

S.A. AXA FRANCE IARD, en sa qualité d’assureur de responsabilité de PGD BATIMENT
[Adresse 8]
[Localité 15]
défaillant

S.A.S. PGD BATIMENT
[Adresse 1]
[Localité 11]
défaillant

DEFENDEURS

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré

Président :Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, rapporteur
Assesseurs :Monsieur David BRACQ-ARBUS, Juge
Monsieur François DEROUAULT, Juge

Assisté aux débats de : Madame Maud THOBOR, Greffier

DEBATS

Audience publique du 6 Mai 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 1er Juillet 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié reçu le 21 décembre 2018, la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] a vendu en l’état futur d’achèvement à monsieur [N] [H] et madame [B] [C] un appartement avec terrasse et jardin au sein d’un ensemble immobilier sis [Adresse 2] à [Localité 19], préalablement réservé le 26 juillet 2018.

Pour la réalisation des travaux, la SCCV Les Jardins du [Adresse 20], assurée en dommages-ouvrage et CNR auprès de la société Albingia, a confié :
à la SAS Bernardo Consulting, assurée auprès de la SA Axa France IARD, la maîtrise d’œuvre d’exécution ; à la SAS PGD Bâtiment, assurée auprès de la SA Axa France IARD, le lot gros-œuvre ; à la SARL RV Plomberie, assurée auprès de la SA Abeille IARD & Santé, le lot plomberie, VMC, chauffage, gaz, ESC ; à la SARL Teixeira Isa, assurée auprès de la SMABTP, le lot VRD.
La réception des travaux est intervenue le 18 février 2020, et la livraison aux consorts [H]-[C], le 24 février 2020.

Ces derniers se sont plaints de la présence d’un édicule avec grille dans le jardin non prévue par la notice descriptive annexée au contrat de réservation et que la SCCV s’était engagée à supprimer lorsqu’ils lui avaient signalé la difficulté à réception des plans définitifs, ainsi que de l’état de la pelouse.

Par courrier électronique du 11 juin 2020, la SCCV a proposé aux consorts [H]-[C] un aménagement paysager destiné à cacher la grille précitée et un dédommagement de 2.000 euros ; la proposition n’a pas été acceptée.

C’est dans ce contexte que, par actes d’huissier enrôlés le 13 mai 2022, monsieur [N] [H] et madame [B] [C] a fait assigner la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] et la SA Albingia (assureur DO et assureur décennale SCCV) devant le tribunal judiciaire de Bobigny.

De son côté, par actes d’huissier enrôlés le 19 avril 2023, la SA Albingia a fait assigner en intervention forcée la SAS Bernardo Consulting, la SA Axa France IARD (assureur Bernardo Consulting et PGD Bâtiment), la SAS PGD Bâtiment, la SARL RV Plomberie, la SA Abeille IARD & Santé venant aux droits d’Aviva Assurances (assureur RV Plomberie), la SARL Teixeira Isa, la SMABTP (assureur Teixeira Isa).

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 27 février 2024, monsieur [N] [H] et madame [B] [C] sollicitent, outre le rejet des prétentions de la SCCV et d’Albingia, la condamnation de ces dernières :
à leur payer solidairement les sommes suivantes : 8.000 euros au titre du préjudice esthétique et économique ; 1.072,80 euros au titre de l’habillage de la bouche d’évacuation des fumées ; 12.000 euros au titre de la perte de terrain ; 1.974 euros au titre de la remise en état de la pelouse ; 7.000 euros au titre du préjudice moral ;aux dépens, en ce inclus les frais de constat de Me [Z] et la facture Immo Duo, ainsi qu’à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de leurs prétentions, ils soutiennent que la SCCV expose sa responsabilité contractuelle à défaut d’avoir livré un bien conforme aux plans communiqués (bouche de désenfumage et non d’aération), non-conformité qui est du reste reconnue en défense ; que leur préjudice correspond à l’atteinte esthétique et économique, aux travaux d’habillage de la bouche d’extraction, et à la perte de terrain (impossibilité de jouir de la portion de terrain et nécessité d’entretenir les abords de la bouche) ; que la SCCV a encore installé les bandes de pelouse dans le jardin sans préalablement retirer les déchets de chantier (déchets retrouvés, pelouse rappée) ; que le comportement de la SCCV, qui a menti et n’a pas tenu ses engagements, leur a enfin causé un préjudice moral ; que la société Albingia doit garantir les indemnités réclamées en sa qualité d’assureur dommages-ouvrage et de responsabilité décennale de la SCCV, s’agissant de désordres rendant le bien impropre à sa destination, du fait des émanations de fumées et du risque de chute ; que le délai annal de l’article 1648 du code civil ne s’applique pas lorsque le vendeur reconnaît sa responsabilité, comme ici.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2024, la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] et la SCCV Les Maisons du [Adresse 20], intervenante volontaire, demandent au tribunal de :
constater le désistement de la SCCV Les Maisons du [Adresse 20] ; débouter les consorts [H]-[C] de leurs prétentions dirigées contre la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] ; subsidiairement : condamner la société Albingia à garantir la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] de toutes condamnations, en principal, intérêts et frais ; condamner in solidum les sociétés Bernardo Consulting, PDG Bâtiment, Axa France IARD, RV Plomberie, Abeille IARD & Santé, Teixeira Isa et SMABTP, à garantir la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] de toutes condamnations, en principal, intérêts et frais ; accessoirement, condamner tous succombants aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du même code.
A l'appui de ses prétentions, la SCCV Les Jardins du [Adresse 20] soutient que les deux désordres allégués en demande relèvent à l’évidence de la garantie des vices et non-conformités apparents de l’article 1642-1 du code civil, laquelle est néanmoins forclose à défaut d’action dans le délai prévu par l’article 1648 du même code ; que la garantie de l’article 1642-1 du code civil est exclusive de la responsabilité contractuelle de droit commun ; qu’aucune faute ne peut au demeurant lui être reprochée dans la mesure où l’implantation de la grille d’amenée d’air surmontée d’un petit édicule dans le jardin a été imposée par le contrôleur technique en cas d’incendie uniquement, sans aucune nuisance en temps normal, et où une telle modification, d’ordre technique, qui ne modifie pas la nature du projet de construction, était admise par le contrat de réservation ; que les désordre affectant la pelouse manquent de clarté et ne sont pas justifiés dans leur matérialité ; que les préjudices invoqués sont insuffisamment démontrés, dans leur principe et/ou leur quantum, outre que la perte de terrain se situe dans la marge de tolérance de 5% s’agissant de la contenance du bien contractuellement prévue ; que les demandeurs sont responsables du préjudice moral qu’ils allèguent, à défaut d’avoir accepté la solution proposée à titre transactionnel ; qu’en cas de condamnation, elle devra être garantie par son assureur CNR Albingia, ainsi que par les constructeurs assignés en intervention forcée sur le fondement décennal, à défaut contractuel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 février 2024, la SA Albingia demande au tribunal de :
sur les demandes présentées à son encontre en qualité d’assureur dommages-ouvrage : à titre principal, rejeter les demandes ; à titre subsidiaire, condamner in solidum les sociétés Bernardo Consulting, PDG Bâtiment, Axa France IARD, RV Plomberie, Abeille IARD & Santé, Teixeira Isa et SMABTP à la garatnir de toutes condamnations, et la juger fondée à opposer les limites de sa police ; sur les demandes présentées à son encontre en qualité d’assureur CNR et l’appel en garantie de la SCCV : à titre principal, rejeter les demandes ; à titre subsidiaire, condamner in solidum les sociétés Bernardo Consulting, PDG Bâtiment, Axa France IARD, RV Plomberie, Abeille IARD & Santé, Teixeira Isa et SMABTP à la garatnir de toutes condamnations, et la juger fondée à opposer les limites de sa police ; en toute hypothèse : rejeter l’exécution provisoire ; condamner in solidum tout succombant aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, elle soutient que les désordres allégués en demande ne relèvent pas du champ de sa police dommages-ouvrage ; qu’elle n’est pas tenue de désigner un expert lorsque la réclamation est manifestement injustifiée ; qu’elle n’a pas été assignée en qualité d’assureur CNR, outre que la police CNR n’a pas davantage vocation à s’appliquer aux désordres litigieux ; qu’elle est en toute hypothèse fondée à appeler en garantie les constructeurs chargés des travaux en cause sur le fondement décennal, à défaut contractuel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 novembre 2023, la SA Abeille IARD & Santé (assureur RV Plomberie) demande au tribunal de rejeter les prétentions dirigées à son encontre, et de condamner toutes parties succombantes aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du même code.

A l'appui de ses prétentions, elle soutient qu’il n’est pas démontré que les conditions de mobilisation de l’une de ses garanties sont réunies ; qu’elle n’a pas vocation à couvrir des désordres réservés et/ou apparents à réception comme ici ; qu’il n’est davantage établi que la responsabilité décennale ou contractuelle de son assurée serait exposée.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 20 novembre 2023, la société Teixeira Isa et la SMABTP (assureur Teixeira Isa) demandent au tribunal d’ordonner leur mise hors de cause ; subsidiairement, de condamner in solidum les sociétés Bernardo Consulting, PGD Bâtiment et Axa France IARD, à les garantir de toutes condamnations, et de juger la SMABTP fondée à opposer les limites de sa police ; accessoirement, de condamner tous succombants aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du même code.

A l'appui de leurs prétentions, elles soutiennent que les désordres litigieux sont sans rapport avec le lot VRD confié à la société Teixeira Isa ; qu’en cas de condamnation, elles devront être garanties par les autres constructeurs.
Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il sera renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La SAS Bernardo Consulting (citée à étude), la SA Axa France IARD (assureur Bernardo Consulting et PGD Bâtiment ; citée à personne), la SAS PGD Bâtiment (citée à personne), n’ont pas constitué avocat ; le présent jugement, susceptible d’appel, sera réputé contradictoire, conformément à l’article 474 du code de procédure civile.

La clôture de la mise en état a été fixée au 6 mars 2024 par ordonnance du même jour.

Par conclusions du 26 avril 2024, la société RV Plomberie demande la révocation de l’ordonnance de clôture et le renvoi à la mise en état.

A l'audience du 6 mai 2024, l'affaire a été mise en délibéré au 1er juillet 2024, date du présent jugement.

MOTIFS

A titre liminaire, conformément aux articles 394 et suivants du code de procédure civile, il convient de constater le désistement d’instance partiel de la SCCV Les Maisons du [Adresse 20], qui est intervenue volontairement par erreur dans cette affaire.

Sur la demande de révocation de la clôture

Il résulte de l’application combinée des dispositions des articles 802 et 803 du code de procédure civile qu’aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, après l’ordonnance de clôture, laquelle peut néanmoins être révoquée, d’office ou à la demande des parties – par conclusions dûment signifiées ou notifiées –, s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue.

En l’espèce, la société RV Plomberie n’invoque aucune cause grave, survenue depuis l’ordonnance de clôture, au soutien de sa demande de révocation, laquelle ne peut ainsi qu’être rejetée, étant précisé que le principe du contradictoire n’implique nullement que chaque partie se soit effectivement défendue, mais qu’elle ait disposé du temps nécessaire pour le faire, ce qui est manifestement le cas pour la société RV Plomberie, qui a été assignée à personne le 21 avril 2023.

Sur les demandes principales

1° Sur l’édicule et la grille dans le jardin

Il appartient à celui qui se prévaut de désordres survenus à l'occasion de travaux d'en établir la matérialité, conformément à l'article 9 du code de procédure civile.

Les responsabilités encourues par les intervenants à l'acte de construire au titre de ces désordres pouvant, selon leur nature, relever de garanties d'ordre public, exclusives du droit commun de la responsabilité civile, il importe également de les qualifier.

Ainsi, les désordres cachés au jour de la réception – qui incluent les désordres ayant fait l'objet d'une réserve à réception, mais qui ne se sont révélés que par la suite dans leur ampleur et leurs conséquences – peuvent relever :
de la garantie décennale prévue par les articles 1792 et 1792-2 du code civil, laquelle couvre, d'une part, les dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination, et, d'autre part, les dommages affectant la solidité des éléments d'équipement de l'ouvrage faisant indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert ;de la garantie biennale prévue par l'article 1792-3 du code civil, laquelle renvoie au mauvais fonctionnement, dans les deux années suivant la réception, des autres éléments d'équipement de l'ouvrage ;de la responsabilité civile de droit commun sinon.
Les garanties décennale et biennale prévues par les articles 1792 à 1792-3 supposent toutefois que les travaux confiés consistent en la construction d’un ouvrage, ce qui implique, s’il s’agit d’une construction nouvelle, un ancrage au sol ou une fixité, et, s’il s’agit de travaux sur existant, une importance certaine, caractérisée par la transformation de l’existant et/ou l’apport de matériaux nouveaux.

A l'inverse, les désordres apparents au jour de la réception peuvent :
relever de la responsabilité civile de droit commun s'ils ont fait l'objet d'une réserve non levée par l'entrepreneur dans le cadre de la garantie de parfait achèvement ;ne relever, en eux-mêmes, d'aucune garantie ni responsabilité s'ils n'ont fait l'objet d'aucune réserve, sauf application de la garantie prévue par l'article 1642-1 du code civil, selon lequel le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents.
Conformément à l’article 12 du code de procédure civile, le juge n’est pas tenu relever un fondement juridique autre que celui invoqué par le demandeur.

En l’espèce, il n’est pas discuté que la présence de l’édicule et de la grille litigieux dans le jardin des consorts [H]-[C] était apparente à la réception – dans les rapports entre la SCCV et les constructeurs – (comme d’ailleurs à la livraison – dans les rapports entre la SCCV et les acquéreurs), de sorte qu’à défaut d’avoir fait l’objet d’une réserve au moment de la réception, elle ne peut relever ni de la garantie décennale (ce qui exclut la garantie de l’assureur dommages-ouvrage), ni de la responsabilité civile de droit commun des constructeurs et réputés constructeurs (la SCCV étant réputée constructeur en sa qualité de vendeur d’immeuble à construire) invoquées en demande, la réception sans réserve valant purge des désordres alors apparents.

Le tribunal n’entend par ailleurs pas relever d’office l’application de la garantie prévue par l’article 1642-1 du code civil, laquelle n’est pas invoquée par les demandeurs, qui se contentent à ce titre de réagir aux moyens de défense opposés par la SCCV sur ce fondement, sans pour autant en requérir l’application.

En l’absence de fondement utile, les demandes indemnitaires relatives à la présence de l’édicule et de la grille litigieux seront rejetées.

2° Sur l’état de la pelouse

Le vendeur d’immeuble à construire répond, à l’égard de l’acquéreur :
des défauts de conformité et vices de construction cachés, de gravité décennale, de plein droit, autrement dit sans faute, en application des articles 1646-1, 1792 et 1792-1 du code civil ; des défauts de conformité et vices de construction cachés, de gravité non décennale, pour faute prouvée, sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun.
En l’espèce, il ressort des explications des consorts [H]-[C] que leur pelouse présenterait divers défauts, liés à la présence de déchets de chantier qui n’ont pas été enlevés avant que soient posées les bandes de pelouse.

A les supposer établis, ces défauts, qui sont apparus progressivement et étaient initialement dissimulés par les bandes de pelouse, n’étaient pas apparent au jour de la réception et de la livraison.

Contrairement à ce qui est soutenu en demande, il ne s’agit pas d’un désordre de gravité décennale, l’état dégradé de la pelouse et la présence de déchets de chantier ne rendant pas le bien impropre à sa destination, ni n’en compromettant la solidité ; il n’y a donc pas lieu de retenir la responsabilité décennale de la SCCV ni la garantie de l’assureur dommages-ouvrage de ce chef.

S’agissant, non pas d’un défaut de conformité au contrat de vente, comme soutenu en demande, mais d’une malfaçon, il faudrait, pour retenir la responsabilité civile de droit commun de la SCCV de ce chef, établir l’existence d’une faute personnelle de cette dernière, ce qui n’est manifestement pas le cas, dans la mesure où la SCCV, qui n’est pas constructeur (elle ne l’est réputée que par l’effet de la loi pour l’application de garanties expressément déterminées), n’a pas réalisé les travaux et n’en a pas plus assuré la maîtrise d’œuvre, et où il n’est pas démontré qu’elle se serait fautivement immiscée dans la réalisation de ces travaux.

En conséquence, les demandes indemnitaires relatives à l’état de la pelouse seront également rejetées.

3° Sur le préjudice moral

Le bien-fondé de la demande présentée par les consorts [H]-[C] au titre du préjudice moral dépend de celui des demandes présentées au titre des préjudices matériels, de sorte qu’en l’absence d’accueil de ces dernières prétentions, celle formée au titre du préjudice moral ne peut qu’être rejetée.

Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En application de l'article 700 du même code, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En conséquence, les consorts [H]-[C], parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens, avec bénéfice du droit prévu par l'article 699 du même code.

En revanche, les demandes présentées au titre des frais irrépétibles seront, en équité, rejetées.

Enfin, il y a lieu de constater l'exécution provisoire, qui est de droit, conformément à l'article 514 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige.
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et rendu en premier ressort,

Constate le désistement d’instance partiel de la SCCV Les Maisons du [Adresse 20] ;

Déboute la société RV Plomberie de sa demande de révocation de l’ordonnance de clôture ;

Déboute monsieur [N] [H] et madame [B] [C] de l’ensemble de leurs demandes indemnitaires ;

Condamne in solidum monsieur [N] [H] et madame [B] [C] aux dépens, avec bénéfice du droit prévu par les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leur demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de droit ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La minute est signée par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 6/section 4
Numéro d'arrêt : 22/05322
Date de la décision : 01/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-01;22.05322 ?
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