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19/06/2024 | FRANCE | N°22/09453

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 5/section 1, 19 juin 2024, 22/09453


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 19 JUIN 2024


Chambre 5/Section 1
AFFAIRE: N° RG 22/09453 - N° Portalis DB3S-W-B7G-WYOM
N° de MINUTE : 24/00933

DEMANDEUR

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2], représenté par le cabinet ATM & GAILLARD
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Tanguy LETU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 120

C/

DEFENDEUR

Madame [V] [X]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jean claude GUIBERE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vesti

aire : 001



COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Charlotte THINAT, Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispo...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 19 JUIN 2024

Chambre 5/Section 1
AFFAIRE: N° RG 22/09453 - N° Portalis DB3S-W-B7G-WYOM
N° de MINUTE : 24/00933

DEMANDEUR

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2], représenté par le cabinet ATM & GAILLARD
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Tanguy LETU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 120

C/

DEFENDEUR

Madame [V] [X]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jean claude GUIBERE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 001

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Charlotte THINAT, Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Madame Zahra AIT, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 24 Avril 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Madame Charlotte THINAT, Présidente, assistée de Madame Zahra AIT, greffier.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [V] [X] est notamment propriétaire du lot n°43, correspondant à un appartement, au sein de l'immeuble sis [Adresse 2] (93), soumis au statut de la copropriété.

A l'occasion de l'assemblée générale des copropriétaires du 12 avril 2018, Madame [X] a soumis au vote un projet d'installation d'une pergola sur la terrasse en continuité de son appartement et transmis le devis correspondant aux travaux envisagés. Cette résolution a cependant été rejetée.

Lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 18 avril 2019, Madame [X] a soumis au vote un nouveau projet d'installation de pergola, dont elle joignait le devis. La résolution a été rejetée.

Madame [X] a fait procéder à l'installation d'une pergola sur la terrasse attachée à son appartement.

Par exploit de commissaire de justice délivré le 16 septembre 2022, le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 2], représenté par son syndic, le cabinet ATM & GAILLARD, a fait assigner Madame [V] [X] devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de :

RECEVOIR le Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] en ses demandes et Y FAIRE DROIT ;

En conséquence,

A titre principal,
JUGER que la pergola de Madame [V] [X] constitue un ouvrage au sens de la loi ;
JUGER que la pergola de Madame [V] [X] affecte l'aspect extérieur de l'immeuble;
JUGER que l'installation de la pergola de Madame [V] [X] contrevient au règlement de copropriété de l'immeuble [Adresse 2] ainsi qu'aux prescriptions de la loi du 10 juillet 1965,

En conséquence,
CONDAMNER Madame [V] [X] à procéder à la dépose de la pergola, sous astreinte de la somme de 100 euros par jours de retard à compter de la décision ;

A titre subsidiaire,
DESIGNER un expert qu'il plaira, avec la mission suivante :
se rendre surplace ,se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;visiter les lieux;examiner les désordres allégués, en particulier ceux mentionnés dans l 'assignation ainsi que les dommages ;fournir tous éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer, s'il y a lieu, les préjudices subis,indiquer et évaluer les travaux éventuellement nécessaires à la réfection et chiffrer, le cas échéant, le coût des remises en état,

en cas d 'urgence reconnu par l 'Expert, autoriser le demandeur à faire exécuter, à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l'Expert, ces travaux étant dirigés par le Maître d 'œuvre du demandeur et par des entreprises qualifiées de son choix, sous le constat de bonne fin de l'Expert lequel, dans ce cas, déposera un pré-rapport précisant la nature et l'importance de ces travaux ;donner son avis sur les comptes présentés par les parties,DIRE que l'expertise sera mise en œuvre et que l'Expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du Code de procédure civile, et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat-greffe de ce tribunal, dans les six mois de sa saisine.DIRE qu'il sera référé au Juge en cas de difficulté.FIXER la provision à consigner au greffe, à titre d'avance sur les honoraires de l'Expert, dans le délai qui sera imparti par l'ordonnance à intervenir.
En tout état de cause,
CONDAMNER Madame [V] [X] à verser au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNER Madame [V] [X] aux entiers dépens.

Il est expressément renvoyé à ces conclusions pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 03 novembre 2023, le syndicat des copropriétaires a demandé au tribunal judiciaire de Bobigny de :

RECEVOIR le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble [Adresse 2] en ses demandes et Y FAIRE DROIT ;
CONSTATER que les notifications de procès-verbaux des Assemblées Générales des 25 avril
2018 et le 17 mai 2019 ont été réalisées ;

En conséquence,

A titre principal,
JUGER que la pergola de Madame [V] [X] constitue un ouvrage au sens de la loi ;
JUGER que la pergola de Madame [V] [X] affecte l’aspect extérieur de l’immeuble ;
JUGER que l’installation de la pergola de Madame [V] [X] contrevient au règlement de copropriété de l’immeuble [Adresse 2] ainsi qu’aux prescriptions de la loi du 10 juillet 1965,

En conséquence,
CONDAMNER Madame [V] [X] à procéder à la destruction et l’enlèvement de la pergola, sous astreinte de la somme de 100 euros par jours de retard à compter de la décision ;
En tout état de cause,
CONDAMNER Madame [V] [X] à verser au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTER Madame [V] [X] de sa demande de condamnation du Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2] à la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER Madame [V] [X] aux entiers dépens.

Le syndicat des copropriétaires soutient que l'installation par Madame [X] d'une pergola sur la terrasse jouxtant son appartement est contraire au règlement de copropriété, ce dernier indiquant en page 45 que les terrasses sont des parties communes même si elles sont affectées à l'usage exclusif d'un copropriétaire et en page 52 que tout aménagement de ces parties doivent faire l'objet d'une approbation en assemblée générale. Il fait valoir que la terrasse de Madame [X] étant une partie commune et non une partie privative, elle ne peut faire procéder à l'installation d'un ouvrage sans l'accord de l'assemblée. Il considère que la pergola querellée constitue un ouvrage au sens de l'article 6-3 de la loi du 10 juillet 1965 puisqu'elle n'est pas mobile et a nécessité pour sa pose quatre jours d'intervention et le recours à une nacelle. Il estime que l'absence de fixation au mur ou au sol de la pergola ne fait pas disparaître l'obligation de bénéficier d'une autorisation de l'assemblée générale et que l'avis transmis par le syndic de la copropriété le 21 juin 2019 par courriel est dénué de valeur. Le poids total de l'ouvrage, de 1046 kg, présente de surcroît selon lui un risque de dégradation du revêtement. Le syndicat des copropriétaires soutient en outre que la pergola construite par la défenderesse modifie l'aspect extérieur de l'immeuble, ce qui justifie là encore un vote préalable de l'assemblée générale selon l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965. Sur la notification des procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires des 12 avril 2018 et 18 avril 2019, le syndicat verse en procédure deux accusés-réception pour justifier l'envoi de ceux-ci. Il convient de relever que le syndicat des copropriétaires développe dans ses conclusions une demande subsidiaire tendant à la désignation d'un expert mais ne reprend pas cette prétention dans le dispositif de ses conclusions.

Il est expressément renvoyé à ces conclusions pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

*

Madame [X] a constitué avocat.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 07 septembre 2023, elle a demandé au tribunal judiciaire de Bobigny de :

CONSTATER qu’aucune notification de procès-verbal d’Assemblée Générale n’est communiquée,

En conséquence,
DEBOUTER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2], représenté par le Cabinet ATM GAILLARD de l’ensemble de ses demandes et moyens, les décisions ne pouvant être ni opposables, ni définitives,

À titre subsidiaire,
DEBOUTER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2], représenté par le Cabinet ATM GAILLARD de l’ensemble de ses demandes et moyens,

À titre reconventionnel,
CONDAMNER le Syndicat des Copropriétaires le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2], représenté par le Cabinet ATM GAILLARD à régler la somme de 3 500 € au titre de l’article 700, tout en 12exonérant Madame [V] [X] de sa quote-part au titre des frais d’administration outre aux entiers dépens, dont distraction au profi t de Maître Jean-Claude GUIBERE, avocat au Barreau de la Seine-Saint-Denis,
DEBOUTER le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2], représenté par le Cabinet ATM GAILLARD de toutes demandes et moyens contraires.

Madame [X] soutient que même si elle a eu connaissance du rejet des résolutions portant sur l'installation d'une pergola sur sa terrasse lors des assemblées générales des 12 avril 2018 et 18 avril 2019, elle ne retrouve pas trace de la notification des procès-verbaux afférents. Or, à défaut de pouvoir valablement se fonder sur ces procès-verbaux, le syndicat des copropriétaires est selon elle mal fondé à exiger le démontage de sa pergola. Elle fait également valoir que celle-ci ne constitue pas un ouvrage puisqu'elle est démontable, n'étant pas fixée au sol ou au mur. De surcroît, elle ne modifie pas l'aspect extérieur de l'immeuble, d'autant qu'un autre lot dispose également d'une pergola sur sa terrasse. Madame [X] conteste le poids de 1046 kg avancé par le syndicat des copropriétaires, le poids total de la pergola étant selon elle de 300 kg, soit 19 kg/m2 ce qui est très inférieur au poids autorisé. Elle précise que l'installation a duré quatre jours compte tenu de la nécessité de faire intervenir une nacelle et ce, afin de ne pas endommager les parties communes ni troubler la tranquillité des occupants de la copropriété. Le montage à proprement parlé n'aurait duré qu'une demi-journée. Madame [X] fait également état du règlement de copropriété qui indique en page 28 que les parties privatives comprennent les espaces tels que jardins, balcons et terrasses et que lesdites parties sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire. Elle renvoie en outre à la jurisprudence de la cour de cassation selon laquelle, les travaux effectués sur les parties communes à jouissance exclusive ne nécessitant qu'un ancrage au sol léger et superficiel ne nécessitent pas d'autorisation (Civ 3e, 19 novembre 1997 n°95-20.079).

Il est expressément renvoyé à ces conclusions pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

*

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2024, et l'affaire appelée à l'audience de plaidoiries (juge unique) du 24 avril 2024. Elle a été mise en délibéré au 19 juin 2024, date à laquelle la décision a été rendue par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile et ne donneront pas lieu à mention au dispositif.

1 – Sur la demande principale en destruction et enlèvement de la pergola sous astreinte

Aux termes de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, « Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant : (…) b) L'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ; ».

Selon l'article 6-3 de la dite loi, « Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes affectées à l'usage ou à l'utilité exclusifs d'un lot. Elles appartiennent indivisément à tous les copropriétaires.
Le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché. Il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d'un lot.
Le règlement de copropriété précise, le cas échéant, les charges que le titulaire de ce droit de jouissance privative supporte ».

*

Aux termes de l'acte de vente du 12 juillet 2013, Madame [X] est propriétaire du lot n°43 de l'immeuble sis [Adresse 2] (93), qui consiste en « un appartement de quatre (4) pièces n°404, comprenant : Entrée, double séjour avec cuisine, deux chambres dont une avec dressing, salle de bains avec WC, salle d'eau avec WC, dressing/buanderie, dégagement et terrasse. Les quatre cent quinze/dix millièmes des parties communes générales 415/10.000ème ».

L'état descriptif de division et règlement de cette copropriété reprend à l'identique le descriptif du lot n°43.

Il précise dans sa section « définition des parties communes » : « Les « parties communes générales » sont celles qui sont affectées à l'usage ou à l'utilité de tous les copropriétaires. Elles comprennent notamment (…)
5°- les couvertures, toiture-terrasse, balcons, oriels et terrasses du bâtiment, même si ils sont affectés à l'usage exclusif d'un copropriétaire dans la mesure de ce qui est dit ci-après :
les balcons, oriels ou terrasse, même s'ils sont en tout ou partie réservés à l'usage exclusif d'un copropriétaire, n'en sont pas moins des parties communes,seuls les revêtements superficiels des sols des balcons, oriels ou terrasses, et s'il y a lieu les revêtements intérieurs de leurs garde-corps, constitueront des parties privatives pour les espaces réservés à l'usage exclusif d'un copropriétaire, leurs autres éléments (y compris ceux assumant éventuellement leur étanchéité) constituant des parties communes, ».
Les parties privatives y sont quant à elles décrites comme les parties « constituées par les locaux et espaces qui, aux termes de l'état descriptif de division ci-dessus, sont compris dans la composition d'un lot et comme tels sont affectés à l'usage exclusif du propriétaire du lot considéré ou à son utilité exclusive. Il en est ainsi de tous les éléments d'équipement à usage privatif inclus à l'intérieur desdits locaux tels que notamment à titre énonciatif et non limitatif et pour autant qu'ils existent : (…) 3° - les revêtements superficiels des balcons et terrasses s'il existe des revêtements superficiels, et s'il y a lieu, les revêtements intérieurs de leurs garde-corps affectés à l'usage exclusif d'un copropriétaire, à l'exclusion du gros œuvre, de l'étanchéité lorsqu'elle existe (ou même du revêtement superficiel s'il fait office d'étanchéité) et des « balustrades de protection » ou « garde-corps » qui sont parties communes ;
Les aménagements et plantations réalisés sur les terrasses affectées à l'usage exclusif d'un copropriétaire constitueront des parties privatives pour le copropriétaire qui en a l'usage. ».

Il est ajouté « Les parties privatives comprennent en outre les espaces dont la jouissance exclusive telle qu'indiquées à l'état descriptif de division ci-après, est réservée à un copropriétaire déterminé, tels que les jardins, balcons et terrasses. Les parties privatives sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire. »

Aux termes de cet état descriptif de division et règlement de copropriété ainsi que de la description du lot n°43 de Madame [X], la terrasse rattachée à ce lot doit être considérée comme étant une partie commune. Seuls les revêtements superficiels des balcons et terrasses s'il existe des revêtements superficiels, et s'il y a lieu, les revêtements intérieurs de leurs garde-corps affectés à l'usage exclusif d'un copropriétaire constituent des parties privatives.

Madame [X] est donc tenue de solliciter l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires au titre de la nature de sa terrasse. De surcroît, elle est soumise à l'obligation de respecter les dispositions du règlement de copropriété et, par conséquent, les règles relatives à l'utilisation des terrasses, à l'harmonie de l'immeuble ainsi qu'à sa sécurité.

Le règlement de copropriété impose ainsi, dans son article 4°/ Utilisation des fenêtres, balcons, oriels ou terrasses que « tout ouvrage, tel que jardinière en béton, sera interdit ou soumis à l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires. Tout objet ou ouvrage devra, en tout état de cause, être compatible avec la surcharge admissible des fenêtres, balcons, terrasses et dalles. ». L'article 5°/ Harmonie de l'immeuble de ne pas modifier les balcons et terrasses sans l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires et ce, même s'ils constituent des parties privatives. Il est également précisé, à l'article 13°/ Sécurité – Salubrité, qu' « il ne pourra être placé, ni entreposé, aucun objet dont le poids excéderait la limite de charge des planchers ou celle des murs déterminés par l'architecte de la copropriété dans le cahier des charges. ». L'article 14°/ Surcharge des planchers dispose quant à lui que « Il ne pourra être placé ni entreposé dans les logements, ou sur les balcons, terrasses ou dalles, aucun objet dont le poids excéderait la limite de charge autorisée fixée par le descriptif technique de chaque constructeur des logements. ».

A défaut de transmission par le syndicat des copropriétaires du cahier des charges établi par l'architecte de la copropriété, il ne peut être déterminée la limite de charge des planchers des terrasses ni si le poids total que la pergola et ses bacs de lestage représentent, soit 1046 kg selon Madame [J] en charge du suivi de l'installation de la pergola sur la terrasse de Madame [X] pour la société BIOSSUN, est supérieur à cette limite.

Le poids total de la pergola, bacs de lestages compris, et la nécessité de procéder à son installation par le biais d'une nacelle et de cordage, du fait de la volumétrie de certaines pièces, établissent qu'il s'agit d'un ouvrage et ce, même si elle n'est pas fixée au mur ou au sol. De fait, la pergola ne peut être démontée ni remontée sans assistance et constitue de façon manifeste un aménagement destiné à rester de façon permanente sur la terrasse. Dès lors, au regard des dispositions des articles 4 et 5 du règlement de copropriété, Madame [X] devait impérativement solliciter et obtenir l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires avant toute installation, celle-ci ne bénéficiant pas d'un ancrage au sol léger et superficiel au sens de l'arrêt de la troisième chambre civile de la cour de cassation du 19 novembre 1997 n°95-20.079.

Au demeurant, Madame [X] a parfaitement connaissance de cette obligation, ayant elle-même soumis une résolution tendant à obtenir une telle approbation des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] (93) lors des assemblées générales des 12 avril 2018 et 18 avril 2019.

Madame [X] ne peut se justifier en arguant de l'existence d'un ouvrage similaire sur la terrasse de l'un de ses voisins, le syndicat des copropriétaires démontrant qu'il s'agissait d'une pergola en kit aux dimensions plus réduites et ne nécessitant pas de lest. En outre, cet élément a été démonté à la demande du syndic, ainsi qu'en atteste le procès-verbal d'huissier de justice du 03 février 2022 et le propriétaire du lot concerné dans une attestation datée du 14 juin 2022.

De même, l'avis transmis à Madame [X] le 21 juin 2019 par le syndic, selon lequel l'aménagement envisagé, selon les documents fournis, ne devrait pas pouvoir être contesté du fait de son absence d'emprise au sol, ne suffit pas à justifier du bien fondé de la défenderesse. En effet, outre l'impossibilité d'apprécier sur quel fondement cet avis a été donné, faute de transmission des documents adressés par Madame [X] au syndic pour accompagner sa demande, il ne vaut pas accord pour l'installation de la pergola. De fait, il n'écarte pas la possibilité d'une contestation de la part des copropriétaires.

Madame [X] sera en conséquence condamnée au retrait de la pergola de sa terrasse dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'issue dudit délai, ceci pendant au maximum 60 jours.

2 - Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Madame [V] [X], succombant à l’instance, sera condamnée au paiement des entiers dépens.

- Sur les frais irrépétibles

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, il convient de condamner Madame [V] [X] au paiement de la somme de 2.000,00 euros au titre des frais irrépétibles exposés par le syndicat des copropriétaires.

- Sur l’exécution provisoire

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Aux termes de l'article 514-1 du code de procédure civile, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou en partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.

En l'espèce, il n'y pas lieu d’écarter l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

ORDONNE à Madame [V] [X] de procéder à l'enlèvement de la pergola et de ses bacs de lestage dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'issue de ce délai, ceci pendant au maximum 60 jours ;

CONDAMNE Madame [V] [X] à payer au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 2], représenté par son syndic, le cabinet ATM & GAILLARD, la somme de 2.000,00 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE Madame [V] [X] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [V] [X] au paiement des entiers dépens de l'instance ;

REJETTE les demandes plus amples ou contraires ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la décision est de droit.

Fait au Palais de Justice, le 19 juin 2024

La minute de la présente décision a été signée par Madame Charlotte THINAT, Présidente, assistée de Madame Zahra AIT, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

Madame [O] Madame [S]


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 5/section 1
Numéro d'arrêt : 22/09453
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;22.09453 ?
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