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18/06/2024 | FRANCE | N°23/11593

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 5/section 2, 18 juin 2024, 23/11593


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 18 JUIN 2024
SELON LA PROCEDURE ACCELEREE AU FOND


Chambre 5/Section 2
AFFAIRE: N° RG 23/11593 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YFED
N° de MINUTE : 24/00925

DEMANDEUR

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 5], représenté par son syndic en exercice, l’Association Relais Habitat-syndic de redressement, représenté par son président en exercice.
Sis [Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Nathalie HAMET de l’AARPI HAMET & LORGEOUX AVOCATS AARPI, avocats au barreau

de PARIS, vestiaire : C1706

C/

DEFENDEUR

Monsieur [O] [P] [W]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Rachid ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 18 JUIN 2024
SELON LA PROCEDURE ACCELEREE AU FOND

Chambre 5/Section 2
AFFAIRE: N° RG 23/11593 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YFED
N° de MINUTE : 24/00925

DEMANDEUR

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 5], représenté par son syndic en exercice, l’Association Relais Habitat-syndic de redressement, représenté par son président en exercice.
Sis [Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Nathalie HAMET de l’AARPI HAMET & LORGEOUX AVOCATS AARPI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C1706

C/

DEFENDEUR

Monsieur [O] [P] [W]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Rachid EL HAILOUCH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 288

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Mechtilde CARLIER,

Statuant sur délégation du président du tribunal judiciaire conformément aux dispositions de l’article 481-1 du code de procédure civile,

Assistée aux débats de Madame Khedidja SEGHIR, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 07 Mai 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Madame Mechtilde CARLIER, assistée de Madame Khedidja SEGHIR, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

M. [W] est propriétaire des lots 22, 32, 35 et 109 au sein de l’immeuble sis [Adresse 5]) soumis au statut des immeubles en copropriété.

Par exploit du 6 décembre 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à Saint Denis (93) (le syndicat des copropriétaires) a fait assigner M. [W] devant le Président du tribunal judiciaire de Bobigny statuant en la forme des référés, au visa de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965, aux fins de le voir condamner au paiement des charges impayées.

L’affaire a fait l’objet de plusieurs renvois et a été évoquée à l’audience du 7 mai 2024.

Lors de cette audience, le syndicat des copropriétaires a déposé des conclusions qu’il a soutenues oralement en s’y référant expressément et aux termes desquelles il demande à la juridiction, au visa de la loi du 10 juillet 1965, du code civil et du code de procédure civile, de :

JUGER recevable et bien-fondé le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5]) et y faisant droit,
DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande d’inexigibilité des charges et travaux votés du 26 janvier 2022 au 25 janvier 2023,
DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande de nullité de l’Assemblée Générale du 15 mars 2023,
DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande d’annulation des résolutions prises par l’Assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023,
DEBOUTER Monsieur [W] de ses demandes d’irrecevabilité,
DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande de nullité de l’assignation délivrée le 6 décembre 2023,
CONDAMNER Monsieur [W] à régler au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5]) les sommes suivantes :
O 74 494,67 euros au titre des charges de copropriété et des frais de recouvrement arrêtés au 31 décembre 2022, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2022,
O 15 000 euros à titre de dommages-intérêts,
O 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
REJETER la demande de délais de paiement formulée par Monsieur [W] sur le fondement de l’article 1244-1 du Code civil,
DIRE n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
CONDAMNER Monsieur [W] aux dépens.

Le syndicat des copropriétaires rappelle que le jugement du 13 octobre 2021 du tribunal judiciaire de Bobigny a admis une fin de non-recevoir et qu’il ne s’est pas prononcé sur le fond du litige de sorte qu’il ne saurait avoir l’autorité de la chose jugée sur les demandes désormais soumises dans le cadre de la présente instance. Le syndicat des copropriétaires soutient également que M. [W] opère une confusion entre d’une part l’association « Relais – syndic de redressement » qui a pour RCS 753 215 227, et d’autre part l’association « Association Relais Habitat » qui a pour RCS 443 098 421, dissoute en 2019 alors que le débat est sans lien avec la procédure. Le syndicat des copropriétaires se réfère aux motifs d’un arrêt de la cour d’appel de Paris du 17 novembre 2022. Le syndicat des copropriétaires retient que l’assemblée générale du 20 mars 2023 a été convoquée par Mme [X], présidente du conseil syndical, et que lors de cette assemblée générale le syndic Relais Habitat – syndic de redressement a été mandaté valablement. Le syndicat des copropriétaires était donc valablement représenté lors de la délivrance de l’assignation du 6 décembre 2023. Le syndicat des copropriétaires ajoute qu’il est désormais représenté par le cabinet Bruno. Le syndicat des copropriétaires retient qu’il tient son mandat de l’assemblée générale et non d’un contrat dont la nullité ne saurait affecter son pouvoir de représentation. En l’état le syndic tient son mandat de l’assemblée générale du 22 février 2022 de sorte que les appels de fonds sont valides et exigibles. Le syndicat des copropriétaires ajoute qu’un appel est en cours contre le jugement du 3 octobre 2023.

Sur l’assemblée générale du 15 mars 2023, le syndicat des copropriétaires soutient que M. [W] n’a engagé aucune procédure en nullité dans les conditions de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965. La demande est donc irrecevable. Le syndicat des copropriétaires ajoute que les demandes pécuniaires sont bien fondées nonobstant l’augmentation du devis entre l’assemblée générale du 15 mars 2023 et celle d’avril 2022. En outre, la demande porte sur le compte arrêté au 31 décembre 2022 de sorte qu’elle ne présente pas de difficulté. Ainsi, en vertu des articles 10 et 14-1 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires est bien fondé pour recouvrer les charges de copropriété et les appels de fonds travaux. Le syndicat des copropriétaires ajoute que l’immeuble fait l’objet d’un arrêté de péril et d’insalubrité avancée, que les autorités administratives sont saisies des difficultés de l’immeuble, que des subventions sont attendues notamment de l’ANAH mais que le versement des subventions est conditionné par un préfinancement à la charge de la copropriété.

Le syndicat des copropriétaires souligne qu’il a bien pris en compte tous les versements de M. [W]. Il précise que les versements plus récents ont été imputés à la dette la plus ancienne faute de précision de sa part. Le syndicat des copropriétaires ajoute que le débiteur était tout à fait informé de la dette réclamée tant par la mise en demeure qui lui a été adressée que par chaque appel de fonds qui reprend un décompte des sommes dues.

Pour s’opposer aux délais de paiement, le syndicat des copropriétaires explique que les difficultés alléguées par M. [W] ne sont pas caractérisées alors que la collectivité des copropriétaires souffre de manière certaine des difficultés de trésorerie dues à l’impayé.

Le syndicat des copropriétaires ajoute que la recevabilité de la demande de dommages-intérêts n’est pas contestable dans la mesure où elle est un accessoire de la demande en recouvrement qui ne nécessite pas d’autorisation. Le syndicat des copropriétaires se fonde sur les dispositions de l’article 1231-1 du code civil et retient que la résistance de M. [W] est abusive et cause un réel préjudice à la communauté.

Le conseil de M. [W] a déposé des conclusions à l’audience dont il a maintenu les termes et selon lesquelles, M. [W] demande à la juridiction de :

A titre principal,
- Constater la nullité du contrat de syndic signé le 19 avril 2022 entre Mme [X], en sa qualité de présidente de séance de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], et Monsieur [K] [N] [D], en qualité de président de l’association RELAIS HABITAT/SYNDIC DE REDRESSEMENT
- Constater l’annulation des résolutions prises par l’assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023 en leur ensemble.
- Déclarer irrecevables les prétentions du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier sis [Adresse 5] basées sur l’Assemblée Générale du 15 mars 2023.
- Prononcer en conséquence la nullité de l’assignation du 6 décembre 2023
- Dire que le syndic l’association Relais habitat/ Syndic de redressement, inscrite au RNA sous le numéro W931008996 ne justifie pas d’un pouvoir pour représenter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5]
- Débouter le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], de toutes ses demandes ;
A titre subsidiaire,
- FAIRE APPLICATION des dispositions de l’article 1244-1 du Code civil à l’égard de Monsieur [W] en ce qui concerne le règlement des sommes éventuellement dues ;

En tout état de cause,
- CONDAMNER le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], à verser à Monsieur [W] la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] aux entiers dépens.

M. [W] se fonde sur les dispositions de l’article 1355 du code civil et estime que par jugement du 13 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a estimé que le syndicat des copropriétaires était irrecevable dans son action initiée le 20 avril 2021 et dont l’objet était une demande de condamnation au paiement des charges de copropriété et appels de fonds travaux à échoir pour l’année 2021. M. [W] ajoute qu’en l’absence d’appel, la décision est définitive et l’assignation délivrée le 6 décembre 2023 est également irrecevable.

M. [W] conteste le bienfondé de la dette au titre des travaux votés lors de l’assemblée générale du 19 avril 2022. M. [W] soutient que lors de l’assemblée générale du 15 mars 2023 les copropriétaires ont annulé le vote du budget de travaux adopté en avril 2022 pour un montant de 1.395.856,83 euros de sorte que les appels de fonds ne doivent être payés. Il soutient que par jugement du 3 octobre 2023, le tribunal a estimé que le contrat de syndic signé le 19 avril 2022 était irrégulier en ce que son signataire n’avait pas la capacité pour le signer ni pour voter des travaux opposables aux copropriétaires de sorte que les appels de charges et les travaux ne sont pas justifiés ni exigibles.

Sur le vote des travaux à hauteur de 1.520.870,78 euros lors de l’assemblée générale du 15 mars 2023, M. [W] estime que le syndic n’étant plus valablement mandaté en raison de la nullité affectant le contrat de syndic du 19 avril 2022 et prononcée rétroactivement par jugement du 3 octobre 2023, il n’était pas habilité pour convoquer le 3 mars 2023 l’assemblée générale du 15 mars 2023. L’assemblée générale du 15 mars 2023 encourt la nullité également dans la mesure où la convocation du 3 mars 2023 pour une assemblée du 15 mars 2023 est intervenue trop tardivement. M. [W] ajoute qu’une assignation a été délivrée devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins d’annulation des assemblées générales du 15 mars et du 20 mars 2023. L’instance est pendante et par conséquent, compte tenu de l’annulation de l’assemblée générale du 15 mars 2023, les appels du fond travaux ne sont ni justifiés ni exigibles.

M. [W] conteste le quantum dont il estime que la preuve n’est pas rapportée en ce que plusieurs versements n’ont pas été pris en compte. La dette est donc incertaine.

Sur les délais de paiement, M. [W] soutient qu’il se trouve dans une situation précaire, sans revenus autres que les revenus locatifs tirés de l’appartement dont il est propriétaire [Adresse 5].

Sur la demande de dommages-intérêts, M. [W] estime que le syndicat des copropriétaires ne dispose pas de l’autorisation requise de l’assemblée générale des copropriétaires pour formuler une telle demande. En outre, M. [W] estime que le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité entre le préjudice allégué et les manquements qui lui sont reprochés.

L’affaire a été mise en délibéré au 18 juin 2024.

MOTIFS

1. Sur les fins de non-recevoir et nullité de l’assignation

1.1. Sur la nullité du contrat de syndic du 19 avril 2022

L’article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

L’article 480 du code de procédure civile prévoit que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

En l’espèce, le jugement du 3 octobre 2023 a prononcé la nullité du contrat de syndic du 19 avril 2022. Il n’est pas établi que cette décision aurait été infirmée. Par conséquent, le tribunal constatera la nullité du contrat du 19 avril 2022 déja prononcée.

1.2. Sur la demande tendant à voir « Constater l’annulation des résolutions prises par l’assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023 en leur ensemble »

En vertu des articles 10 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, les décisions d'assemblée générale s'imposent aux copropriétaires tant que la nullité n'en a pas été prononcée.

En l’espèce, il n’est pas établi par les pièces produites que l’assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023 aurait été annulée que ce soit intégralement ou pour une partie seulement des résolutions adoptées. En l’état, l’assemblée générale du 15 mars 2023 s’impose donc à tous les copropriétaires dans son intégralité.

M. [W] sera débouté de sa demande tendant à voir « constater l’annulation des résolutions prises par l’assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023 en leur ensemble »

1.3. Sur la représentation du syndicat des copropriétaires

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En vertu de l’article 126 du même code, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue. Il en est de même lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l'instance.

En l’espèce, dans l’assignation le syndicat des copropriétaires est représenté par le syndic “association Relais Habitat – Syndic de redressement”. Lors de l’audience du 7 mai 2024, le syndicat des copropriétaires était représenté par le cabinet Bruno.

Ainsi, le grief relatif au défaut de représentation valable du syndicat des copropriétaires au moment de l’assignation a disparu en cours d’instance étant observé que M. [W] ne conteste pas le pouvoir du cabinet Bruno.

Ainsi, la fin de non-recevoir n’est pas fondée. M. [W] sera débouté de ses demandes de :

- Dire que le syndic l’association Relais habitat/ Syndic de redressement, inscrite au RNA sous le numéro W931008996 ne justifie pas d’un pouvoir pour représenter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5]

- Déclarer irrecevables les prétentions du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier sis [Adresse 5] basées sur l’Assemblée Générale du 15 mars 2023.

1.4. Sur la demande de nullité de l’assignation

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’indépendamment des pouvoirs qui lui sont conférés par d'autres dispositions de la présente loi ou par une délibération spéciale de l'assemblée générale, le syndic est chargé, dans les conditions qui seront éventuellement définies par le décret prévu à l'article 47 ci-dessous de représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice dans les cas mentionnés aux articles 15 et 16 de la présente loi, ainsi que pour la publication de l'état descriptif de division et du règlement de copropriété ou des modifications apportées à ces actes, sans que soit nécessaire l'intervention de chaque copropriétaire à l'acte ou à la réquisition de publication.

En l’espèce, le jugement du 3 octobre 2023 a prononcé la nullité du contrat de syndic du 19 avril 2022. Toutefois, le syndic dispose d’un mandat légal. Il tient ses pouvoirs de la loi et des textes précités. Le contrat, dont la loi a dressé le contrat-type, signé entre un syndic et une copropriété fixe les modalités d’exécution notamment financières du mandat mais les imperfections affectant l’instrumentum, à savoir le “contrat” signé n’altèrent pas la validité du mandat légal accordé au syndic par l’assemblée générale des copropriétaires. Par conséquent, la nullité prononcée par le jugement du 3 octobre 2023 n’annihile pas le mandat du syndic qui lui a été confié par la copropriété pour la représenter.

Le syndicat des copropriétaires était valablement représenté lors de la délivrance de l’assignation le 6 décembre 2023. M. [W] sera débouté de sa demande.

1.5. Sur la demande d’irrecevabilité des prétentions du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier sis [Adresse 5] basées sur l’Assemblée Générale du 15 mars 2023

En vertu des articles 10 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, les décisions d'assemblée générale s'imposent aux copropriétaires tant que la nullité n'en a pas été prononcée.

En l’espèce, le coût des travaux votés en avril 2022 ayant subi une augmentation conséquente l’assemblée générale du 15 mars 2023 a procédé à l’annulation du devis initialement adopté en avril 2022 pour un montant de 1.395.847,25 euros TTC et à l’adoption d’un nouveau devis pour un montant mis à jour de 1.520.870,78 euros TTC.

Par conséquent, la copropriété a accepté le montant des travaux et la somme de 1.520.870,78 euros a été valablement engagée. L’assemblée générale du 15 mars 2023 n’ayant pas été annulée, elle s’impose aux copropriétaires. Ainsi, le syndicat des copropriétaires reste bien fondé à appeler la somme de 1.520.870,78 euros de sorte que les appels de fond portant sur la constitution de cette somme sont dus.

Par ailleurs, le syndic n’était pas dépourvu de capacité à agir et de capacité à engager la copropriété. Le mandat légal que le syndic tient de la loi reste valable quelle que soit les conditions de la signature du contrat de syndic.

Le syndicat des copropriétaires est recevable et bien fondé en sa demande.

M. [W] sera débouté de sa fin de non-recevoir.

1.6. Sur la demande d’irrecevabilité des demandes en paiement des charges de copropriété et appels travaux à échoir pour l’année 2021.

L’article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

L’article 480 du code de procédure civile prévoit que Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

En l’espèce, M. [W] excipe du jugement du 13 octobre 2021 un principe d’irrecevabilité de toute demande en paiement des charges pour l’année 2021. Toutefois, dans son jugement du 13 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a déclaré irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires contenues dans l’assignation du 20 avril 2021.

Ce jugement n’a donc pas la portée que prétend M. [W].
Le syndicat des copropriétaires dispose de toute latitude pour introduire une nouvelle instance ayant le même objet dans la mesure où le tribunal n’a pas tranché tout ou partie des demandes formulées par le syndicat des copropriétaires en 2021.

Les demandes du syndicat des copropriétaires sont donc recevables. M. [W] sera débouté de sa fin de non-recevoir afférentes aux demandes en paiement des charges de copropriété et appels travaux à échoir pour l’année 2021.

2. Sur la demande en paiement des charges et frais

2.1. Sur le quantum

L’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité que ces services et éléments présentent à l’égard de chaque lot. Ils sont également tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes et de verser au fonds de travaux la cotisation prévue par la loi, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent de l’article 5. Le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges.

Par ailleurs, il est de principe que les décisions de l’assemblée générale s’imposent tant que la nullité n’en a pas été prononcée.

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires produit :

- l’extrait de matrice cadastrale ;
- l’extrait du compte copropriétaires ;
- les appels de charges ;
- les procès-verbaux des assemblées générales de copropriétaires des 19 avril 2022, 22 décembre 2023 et 20 mars 2023 ;

Il a été vu que les appels de fonds afférents au budget travaux sont exigibles que les sommes découlent de l’assemblée générale du 19 avril 2022 ou du devis rectificatif voté lors de l’assemblée générale du 20 mars 2023.

En l’état, aucune des assemblées générales précitées n’a été annulée. Une instance est pendante devant le tribunal judiciaire de Bobigny mais les parties n’ont pas sollicité le sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal judiciaire de sorte que l’assemblée générale du 20 mars 2023 n’a pas été annulée et elle s’impose à tous les copropriétaires.

En outre, en vertu de l’article 19-2 de la loi de 1965, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge statuant en la forme des référés de prononcer la nullité des assemblées générales dont les modalités de contestation sont encadrées par l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Pour ce qui est des sommes que M. [W] indique avoir réglées et qui n’auraient pas été prises en compte par le syndic, M. [W] ne précise pas le nombre de versements qui ne figurent pas sur le décompte du syndic. Il ne produit pas d’éléments établissant que les chèques qu’il produit ont effectivement été débités de son compte ni la date des débits.

M. [W] soutient qu’il n’avait pas connaissance du montant de sa dette mais celle-ci figure sur les appels de fonds trimestriels. A titre d’exemple, le 4e appel de fonds édité le 4 octobre 2023 contient la somme due au titre de l’appel en tant que tel ainsi qu’un relevé de compte reprenant le solde de la dette d’un montant total de 77.268,27 euros. Le grief n’est donc pas fondé et la dette de M. [W] est établie.

Au regard de ces éléments, il convient de condamner M. [W] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 74.494,67 euros à titre d’arriéré de charges de copropriété selon décompte arrêté au 6 octobre 2022, appel provisionnel du 4e trimestre 2023 inclus.

2.2. Sur les intérêts

En vertu de l’article 1344-1 du code civil, la mise en demeure de payer une obligation de somme d'argent fait courir l'intérêt moratoire, au taux légal, sans que le créancier soit tenu de justifier d'un préjudice.

En l’espèce, la mise en demeure du 6 octobre 2022 complétée le 24 octobre 2022 précise que M. [W] s’expose à une condamnation au paiement de l’arriéré sans en préciser le montant. Le courrier renvoie à un décompte qui n’est pas produit aux débats. Le syndicat des copropriétaires ne précise pas le montant de la dette sur lequel les intérêts seraient susceptibles d’avoir couru. Il sera donc débouté de sa demande d’intérêts à compter du 6 octobre 2022.

3. Sur les délais de paiement

L’article 1343-5 du code civil prévoit que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

En l’espèce, M. [W] n’établit pas la preuve de sa situation patrimoniale et financière. Il produit un extrait non complet de sa déclaration de revenus de 2022 d’où il ressort qu’il ne toucherait aucun revenu alors qu’il admet, aux termes de ses écritures, qu’il tire des revenus locatifs de l’appartement situé au sein de la copropriété et qu’il produit un document démontrant qu’il règle son loyer. En revanche, le syndicat des copropriétaires établit qu’il est indispensable de réunir les fonds appeler pour bénéficier de l’allocation de l’ANAH.

Par conséquent, M. [W] sera débouté de sa demande de délais de paiement.

4. Sur la demande indemnitaire

En vertu de l’article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

Il est constant que le défaut de paiement de ses charges par un copropriétaire impose aux autres copropriétaires de pallier la carence du copropriétaire défaillant, ce qui entraîne pour le syndicat des copropriétaires un dommage distinct de celui résultant du retard apporté au règlement, plus précisément des difficultés de trésorerie et de financement du fait des délais que s'est octroyé d'office ce copropriétaire défaillant, ou bien encore des désagréments d'ordre administratif et judiciaire. Ce préjudice est d'autant plus important lorsque les impayés de charges sont conséquents et/ou anciens.

En l’espèce, il sera observé que M. [W] ne formule aucune fin de non-recevoir tirée du défaut d’autorisation expresse de l’assemblée générale mais se contente de demander son rejet c’est-à-dire son débouté. Les moyens de défense du syndicat des copropriétaires sur la question de la recevabilité paraissent dès lors superfétatoires.

Quant au bien fondé de la demande, celle-ci est motivée par les articles 1231-1 et suivants du code civil, elle est accessoire à l’action en recouvrement et ne nécessite pas d’autorisation expresse de l’assemblée générale.

Il ressort des pièces produites que M. [W] ne règle pas régulièrement ni spontanément sa dette à la copropriété. Il a laissé s’installer un passif conséquent par l’ampleur de la dette obligeant le syndicat des copropriétaires à des diligences supplémentaires.

Le demandeur justifie que cette situation est de nature à lui causer un préjudice distinct de celui compensé par les intérêts moratoires. L’inertie du copropriétaire défaillant oblige les autres copropriétaires à suppléer sa carence en avançant ses charges à sa place et prive la communauté de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l’entretien de l’immeuble de surcroit dans le contexte particulier d’un arrêté de péril et d’insalubrité auquel il convient de recourir rapidement.

L’attitude de M. [W] relève de la mauvaise foi et justifie sa condamnation à des dommages et intérêts complémentaires.

Par conséquent, M. [W] sera condamné à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 750 euros.

5. Sur les autres demandes

M. [W], qui succombe, sera condamné aux dépens.

Il sera condamné à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le président du tribunal judiciaire, statuant publiquement, selon la procédure accélérée au fond, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et en premier ressort,

Constate la nullité du contrat de syndic signé le 19 avril 2022 prononcée par jugement du 3 octobre 2023 ;

Déboute M. [W] de sa demande tendant à voir constater l’annulation des résolutions prises par l’assemblée générale des copropriétaires du 15 mars 2023 en leur ensemble

Déboute M. [W] de sa fin de non-recevoir des prétentions du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier sis [Adresse 5] basées sur l’Assemblée Générale du 15 mars 2023

Déboute M. [W] de sa demande de nullité de l’assignation du 6 décembre 2023

Déboute M. [W] de sa demande tendant à voir dire que le syndic l’association Relais habitat/ Syndic de redressement, inscrite au RNA sous le numéro W931008996 ne justifie pas d’un pouvoir pour représenter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5]

Déboute M. [W] de sa demande d’irrecevabilité des demandes en paiement des charges de copropriété et appels travaux à échoir pour l’année 2021

Condamne M. [W] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à [Localité 6] (93) la somme de 74.494,67 euros à titre d’arriéré de charges de copropriété selon décompte arrêté au 6 octobre 2022, appel provisionnel du 4e trimestre 2023 inclus ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation au paiement des intérêts ;

Déboute M. [W] de sa demande de délais de paiement ;

Condamne M. [W] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à [Localité 6] (93) la somme de 750 euros à titre de dommages-intérêts ;

Condamne M. [W] aux dépens ;

Condamne M. [W] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à [Localité 6] (93) la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

La minute de la présente décision a été signée par Madame CARLIER, Juge, assistée de Madame Khedidja SEGHIR, Greffier présente lors de son prononcé.

LE GREFFIERLE JUGE

MADAME SEGHIRMADAME CARLIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 5/section 2
Numéro d'arrêt : 23/11593
Date de la décision : 18/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-18;23.11593 ?
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